[Suspects]
<img src=“https://cdn.trictrac.net/documents/formats/news_xlarge/documents/originals/7d/bd/c3aa75dcb7410908a31b40654d6b2abd1c5f90448531e2187a9b6f43fc3a.jpeg” alt=“Des suspects pas vraiment “usual””/>
Sortez vos loupes et réactivez vos petites cellules grises, c’est cette semaine qu’arrive sur les étals des boutiques ludiques la première boite de Suspects, le nouveau jeu d’enquêtes de Studio H.
Suspects est un jeu d'enquêtes coopératif dans lequel 1 à 6 joueurs vont incarner la jeune criminologue Claire Harper dans ses investigations pour résoudre quelques mystères dignes d'un bon roman policier.
Puisqu'il va bien falloir y passer, attaquons d'emblée l'exercice incontournable : Suspect n'est en rien comparable avec d'autres jeux d'enquêtes du type Sherlock Holmes Détective Conseil ou Détective. Nul besoin d'ordinateur ou de trier une foultitude de documents, le matériel de chaque enquête se limite à une cinquantaine de cartes, d'une présentation et deux annexes au format A4. De même, la résolution d'une énigme ne devrait demander que quatre-vingt-dix minutes, ce qui range le titre dans les jeux pouvant tout autant satisfaire les enquêteurs chevronnés que les joueurs occasionnels.
Le crime était presque parfait...
La mécanique est simplissime à assimiler : un incident - généralement un crime - a eu lieu dans un lieu relativement exotique pour notre XXIe siècle.
Incarnant l'héroïne de cette première série appelée à la rescousse, les joueurs ont pour objectif de répondre correctement à une série de questions présentés dès l'introduction des faits. À partir des premiers éléments connus et de quelques documents fournis (un plan, un arbre généalogique...) les joueurs déterminent un lieu à visiter ou un témoin à interroger. Il suffit alors de prendre la carte numérotée correspondant au choix et, tel un livre dont vous êtes le héros, lire les descriptifs des interrogatoires ou des indices trouvés.
Comme à l'accoutumé, un premier témoignage peut amener à d'autres questions (proposées sur la carte avec le numéro correspondant) et de nouveaux indices abondent dans les lieux visités, obligeant l'équipe à faire des choix cornéliens sur les pistes à suivre.
Car le nombre de cartes lues pour répondre correctement à chacune des réponses va influer sur le score final.
Déjà, un élément important à savoir : les joueurs vont devoir lire l'intégralité des cartes durant la partie.
Finies les fins d'enquêtes qui se terminent par "mais comment on pouvait deviner ça ?!?" à la lecture des réponses. En consultant l'ensemble des indices et témoignages, les équipiers profitent ainsi à fond de l'ensemble de la construction de l'énigme, des différents chemins ouvrant sur la résolution, comme les fausses pistes qui n'auraient pas été suivies.
Le scoring ne repose donc pas sur le nombre de cartes consultées mais à quel moment l'équipe a correctement résolu les mystères. Au fur et à mesure qu'ils donnent leurs solutions aux questions posées dans l'introduction ou qu'ils corrigent leurs réponses, les joueurs indiquent le nombre de cartes consultées à ce stade de la partie selon trois seuils de scoring : de 1 à 30 cartes piochées, entre 31 et 45 et plus de 46.
Plongée dans l'Angleterre de George V
Mener une enquête en suivant des numéros représentant des indices et témoignages, vous allez me dire que ça n'a rien de nouveau... alors pourquoi cet article ? Tout simplement parce que l'aficionados de livres policiers que je suis est tombé sous le charme de l'écriture des scénarios. Ça n'est pas par hasard qu'on nous présente Claire Harper comme une jeune lectrice d'Agatha Christie tant le ton des intrigues est proche du style de la "Reine du crime".
Rien que les lieux choisis pour mener les enquêtes sont dignes de la romancière britannique : un manoir écossais, un théâtre à Édimbourg, et un temple en Égypte. On se croirait dans "Mort sur le Nil" et on s'étonnerait à peine de voir surgir Hercule Poirot parmi les cartes personnages.
Les protagonistes ne sont pas en reste, évoluant dans la bonne société britannique des années 30, tout cela fleure la bourgeoisie aux secrets inavoués, les artistes aux mœurs décadentes et autres professions huppées pittoresques. Mais n'oublions pas pour autant le petit personnel qui observe tout et n'ignore rien des petits travers de leurs employeurs.
Cette immersion dans une époque révolue n'aurait été possible sans le superbe travail d'illustration d'Émile Denis qui, à travers ses décors et portraits, tout à la fois réalistes et froids, complète l'ambiance lourde des secrets cachés.
Bon sang mais c'est bien sûr !
La construction des enquêtes mêle habilement fausses pistes et véritables indices. Tout en étant élaborées, les énigmes restent résolubles si l'on fait bien attention aux récits des témoignages ou à la présentation de certains faits.
Rien d'étonnant à cela d'ailleurs compte tenu des personnalités derrière les enquêtes : l'auteur du jeu et scénariste de la première enquête, Guillaume Montiage, est connu - avant de créer le jeu Kemet - pour ses soirées enquêtes publiées il y a quelques décennies, dont une co-écrite avec Sébastien Duverger-Nédellec, scénariste du second chapitre. Quand au troisième scénario, il est tiré de la plume de Paul Halter, auteur de romans policiers, spécialiste des meurtres en "chambre close" et ne renâclant pas sur un brin de fantastique. Avec de telles origines, le résultat est parfait pour les amateurs d'histoires policières.
D'ailleurs si vous désirez en faire l'expérience vous-même, il vous suffit de tester l'enquête de découverte d'une heure offerte dans le numéro de Plato de janvier/février, aussi disponible dans une mini-boite gratuite distribuée dans les boutiques ludiques. On parle d'un meurtre dans un train... serez-vous l'âme d'Hercule Poirot au service de Claire Harper ?