[Cant Stop!][Diamant][Sea of Clouds]
C’est en 2005 que nous pouvions découvrir Diamant, une création à quatre mains de Alan Moon et Bruno Faidutti. À l’origine se trouve l’admiration des deux auteurs pour Can’t Stop de Sid Sackson un des jeux emblématique du quitte ou double ou du stop ou encore.
La première idée donna un prototype d’exploration d’un réseau de grotte et se nommait La Grotte du Dragon. L’idée de base que l’on retrouvera dans le jeu final est de proposer aux joueurs une exploration ou les gains augmenteront dans le même temps que la possibilité de tout perdre. Et cela fonctionne parfaitement.
Après ce qui semble avoir été un succès chez Schmidt, le jeu n’a pourtant pas été réédité dans cette version. Le voilà qui fait à nouveau son apparition mais cette fois chez l’éditeur français Iello. C’est prévu pour juillet prochain dans les 25€ dans le format Sea of Clouds/Croâ
C’est une très bonne nouvelle car Diamant est, dans son format, un jeu rapide et chaotique juste ce qu’il faut pour être amusant et il allie à la fois simplicité, limpidité et sensations assurées. De l’accessible malin.
Une partie va se composer de plusieurs explorations de grottes qui vont nous permettre de ressortir les bras chargés de pierres précieuses en chantant comme une bande de nains joviaux.
Sauf que… Ces grottes, constituées de cartes tirées au fur et à mesure de l’exploration, recèlent aussi des dangers. Les dangers sont appareillés deux à deux. Quand on tire une carte Danger comme un vilain serpent, ce n’est rien. Même pas peur ! Du moins pour le moment. Q’une seconde carte Serpent soit tirée et tout le monde doit se carapater dehors en criant et surtout en laissant derrière eux leur précieux butin. Fallait pas aller si loin…
On pioche les diamants par morceaux. Des sacs de rubis par quintaux
Pour nous sans valeur sont des trésors. On pioche tric trac, tric trac.
Heigh-ho, heigh-ho, heigh-ho, heigh-ho Heigh-ho Heigh-ho, heigh-ho : on rentre du boulot!
Durin Montaigne
Une des astuces du jeu est qu’après chaque carte résolue, chaque joueur va devoir décider en secret s’il continue ou s’il fait demi-tour. Continuer c’est assez facile de comprendre pourquoi. Rentrer à la maison c’est surtout l’assurance de mettre à l’abri tout ce qu’on a déjà gagné.
C’est là qu’intervient l’autre astuce du jeu et qui va nous donner matière à réflexion. Les cartes de pierres précieuses nous indiquent le nombre de pierres que nous avons découvert et que les explorateurs vont se répartir équitablement. En fonction du nombre de joueurs, cela ne tombe pas forcément rond. Celles qui ne peuvent être distribuées restent donc en place et… seront récupérées par le ou les premiers à sortir. Nous allons donc nous retrouver avec des trésors probables qui nous incitent à continuer mais aussi des restes qui sont appétissants à récupérer en faisant demi-tour.
Et si nous faisons demi-tour à plusieurs ? Alors comme dans le partage d’exploration, nous ferons un partage de sortie. C’est un peu rageant quand on pensait faire son malin et qu’on se retrouve à faire son malin en troupeau.
Tout ça doit surement être en relation avec le sens profond de la vie mais je vous laisse le soin de le trouver où.
Cette édition reprend les Reliques qui avaient fait leur apparition dans Incan Gold : la version anglo-saxonne du jeu. Les reliques ne se partagent pas lors de l’exploration. Elle ne seront prise que si un (et un seul) joueur sort en premier et plus il y a de reliques et plus il touchera. Cela renforce encore plus la frustration de se retrouver à sortir à plusieurs.
Un fois tout le monde sorti de la cinquième grotte, chacun va faire le compte de ce qu’il a récolté et nous retrouverons dans cette nouvelle édition des petits coffres personnels en carton assemblé pour planquer son magot.
La ou le plus riche remportera la partie et… attention c’est important, en cas d’égalité il y a égalité donc plusieurs vainqueurs ! Merci Iello ! Enfin merci Bruno Faidutti qui milite contre les règles MMLN (à la mords-moi-le-nœud) qui départagent les ex-aequo de manière un peu artificielle sous prétexte qu’il existerait un mouvement chez les joueurs qui ferait que les égalités seraient vu comme des erreurs ludiques.
Monsieur Faidutti en a fait un article sur son blog. En tout cas sur la version des règles que j’ai là juste sous les yeux (et que je ne vous montrerais pas car elle n’est pas définitive) l’égalité est permise. Monsieur Bruno nous parle d’ailleurs de Montaigne : « Il ne faut pas trouver étrange si gens désespérés de la prise n’ont pas laissé d’avoir plaisir à la chasse » (II, 12 ; II, 169) Une idée reprise plus tard par Pascal (grand lecteur de Montaigne) et qui s’applique bien au jeu puisque la chasse peut en être un. Si la volonté de la prise est une condition nécessaire, le plaisir de la chasse prédomine toujours et ceux qui n’y croit pas ne sont que des viandards. Il est d’ailleurs fort probable que l’ami Montaigne laisse l’analogie en suspens avec un autre jeu plus érotique celui-là.
Nul doute que Montaigne et Pascal auraient appréciés une bonne égalité à Diamant.
En tout cas, bonne nouvelle que cette réédition. Elle est illustrée par Paul Mafayon dans un style que je trouve ici un peu trop sage et appliqué. Sans doute un prochain approved (les approved n’existaient pas lors de l’édition précédente) mais nous attendons de voir le matériel.
