Oui, ok, je sais… la temporalité des calendriers ludiques et la temporalité des parties de jeux s’explosent dans un chaos agrégeant les particules des rescapés en cartons qui passent le filtre de cette inextricable filet qui, parfois, gardent dans ses rets quelques petites boites aux délicieux goûts de pépites… Et lorsque ces pépites, du fait même de ce calendrier, passent un poil sous une sorte de radar parce qu’un autre a attiré à lui la lumière, et bien, tant pis, le temps a beau avoir passé, il n’en demeure pas moins qu’un fort bon jeu est un fort bon jeu… et les forts bons jeux, ça se partage !
Dragon Castle, puisque c'est de lui dont il s'agit, est sorti à Essen 2017 et étaient dans notre scope pendant le débrief TTTV. Le temps de le voir arriver (étonnant comme le temps joue un rôle dans cette histoire) en français par l'intervention d'Edge et le jeu d'Horrible Games débarque à l'officine. Librement inspiré du Mahjong, avec ses magnifiques pièces qui rappellent cette matière de nos anciens dominos, la bakélite (comme Hive en son temps), il est proposé par Lorenzo Silva (Potion Explosion, Dungeon Fighter, Horse Fever) ; Hjalmar Hach (déjà présent dans le très malin et très beau Photosynthesis) et Luca Ricci (The Vampire, The Elf & The Cthulhu).
Quand Dragon fâché senõr, lui toujours agir ainsi...
2 à 4 joueurs installeront donc leur petit plateau personnel quadrillé et, en tant que seigneurs locaux, se préparent à se construire une belle forteresse en déconstruisant l'antique et maintenant délabrée Forteresse du Dragon. Suivant un plan immémorial (ou alors un des nombreux déjà proposé dans le livret de règle), les 116 tuiles sont installées, reprenant des formes que les habitués du vieux jeu sur ordinateur reconnaîtront : Les piliers de la création ; la cité interdite ou les milles tours comme autant d'invitations à un peu de poésie et autant de parties.
Marchands, Soldats, Fermiers se mêleront artistiquement avec les Saisons, Vents et Dragons et un premier joueur entamera le premier tour après avoir, si vous le souhaitez, ajouté en jeu une carte Dragon et une carte Esprit.
Avec le Dragon de l'Harmonie, si vous construisez votre forteresse symétriquement suivant les deux axes foncés de votre plateau, ça peut faire jusqu'à 8 PVs... et même 12 si vos sanctuaires le sont également... L'harmonie, c'est bien ! |
Ici, les cartes Esprit permettent d'aller chercher une tuile non disponible (l'Élégance) ; ré-organiser deux tuiles de votre forteresse (la Force) ... et la Duperie, mais là, c'est plus difficile à voir... Et la duperie, c'est mal ! |
Ces tours s'enchaîneront suivant un rituel aussi immuable que celui du thé mais tout aussi agréable : Une action à choisir parmi trois et qui commencent toutes par la prise d'une tuile disponible (avec un de ses longs côtés sans tuile adjacente) sur le plus haut niveau du château. Après cette première prise, vous complèterez donc en :
- prenant une deuxième tuile appariée et disponible, quelque soit sa provenance ;
- ajoutant un sanctuaire (petits toits) à votre réserve qui en contient un seul au départ ;
- défaussant cette tuile pour récupérer 1 PV (point de victoire) ;
Vous l'aurez compris, il vous faudra plein de PV pour l'emporter et justement, nous y arrivons. Après avoir récupéré une ou deux tuiles, vous les placerez sur votre plateau personnel, face visible, sur un emplacement vide ou une tuile retournée. Et ce retournement de tuiles, appelé Consolidation, arrive automatiquement dés lors qu'une combinaison de 4 tuiles de la même famille sont adjacentes, orthogonalement parlant. Bien sûr, il peut y en avoir plus de 4, et c'est même conseillé puisque ça rapporte davantage de points : (2 PV pour 4 tuiles et 8 PV pour 8 tuiles). À vous donc de jauger les risques et l'attente dans vos récupérations pour faire de fructueux placements.
D'un autre côté, consolider rapidement retourne les tuiles et vous permettra de construire en hauteur... et ça, c'est pratique aussi puisqu'au moment des consolidations, en fonction de la famille retournée, vous pourrez "chapeauter" (Non, Shrek, on ne parle ni de toi, ni de pupuce" d'un ou plusieurs sanctuaires une "tour" de tuiles faces cachées pour des points en fin de partie. Le maximum est de 3 PVs et en correspondance avec la hauteur de la tour. Là encore, construire des sanctuaires sur les tuiles les plus nombreuses (Marchands, Fermiers, Soldats : 24 par familles) ne vous permet de n'en poser qu'un seul. Les Vents et les Saisons (16 tuiles pour chaque) vous en autorise deux. Et les Dragons, ancestraux et plus rares encore avec 12 tuiles seulement, ajoute 1 PVs à ces deux éventuels petits toits.À tout moment de votre tour, la défausse d'une tuile visible de votre forteresse ou d'un sanctuaire de votre réserve vous permet d'activer le pouvoir de la carte Esprit.
Viendra immanquablement le moment où la forteresse du Dragon n'est plus qu'un seul niveau de tuiles, et à partir de là, il est possible, en lieu et place de son action, de récupérer un jeton Appel du Dragon. En plus de vous octroyer 2 PVs, il rapproche du dernier tour déclenché par la révélation du "!" sous un de ces jetons en place, fonction du nombre de joueurs.
Sommes des PVs, des sanctuaires et de l'objectif fixé par la carte Dragon déclare un vainqueur avec le plus beau "Dragon Castle"... même s'il n'a pas la superbe d'antan !
On m'a toujours dit que ce qui est petit est mignon... et là, c'est mignon !
Et tel le phénix, le château verra ses pierres renaître !
Il n'est pas nécessaire d'attendre davantage, ce Dragon Castleest excellent, et ce, quelque soit sa configuration. Et il n'est pas sans parallèle avec Azul qui l'a un peu éclipsé : avec un matériel très joli, esthétique à utiliser et même à simplement regarder, vous allez construire, horizontalement dans l'un et plutôt verticalement dans l'autre en suivant des contraintes de prises et de poses. Azul est peut-être plus direct, avec un courbe d'intérêt en jeu qui augmente en cours de jeu (au fur et à mesure que votre carrelage se construit) et en dents de scie (chaque manche monte en tension avant de redescendre en début de manche lorsqu'on vide son plateau de droite). Dragon Castle est un poil plus linéaire, peut-être moins innovant par son approche à la "Mahjong", mais ça ne l'empêche nullement d'être donc excellent.
Vous voulez vous faire un jeton 1er Joueur en standee ?
Oh, ce n'est pas l'excellence d'une ambiance à la "déconnade" mais le plaisir de trouver des paires, de cacher celles que vous espérez ou gâcher les "espérées adverses", de construire habilement son propre château en maximisant les points via la prise de risque et le positionnement. Le jeu est fluide, agréable dans sa manipulation autant que dans sa réalisation, et ce, pour toute la famille. Renouvelable, autant par les positions de départs (y compris celles que vous inventerez) que par les différentes cartes Esprit et Dragon, il garde, à chaque partie, ce plaisir ludique à défaire d'un côté et construire de l'autre avec les belles et chaudes illustrations de Cinyee Chiu. À ne pas manquer, certainement... ou au moins à jouer et découvrir, assurément !
C'est classe tout-de-même, plein de bons jeux à jouer...
... mais pas assez de temps pour tout faire... argh ! :D