Lord Pietroch s’avançait à pas feutrés, les sens en alerte. Il sait que le dragon n’est pas loin, qu’il rôde de salle en salle, prêt à dévorer tous les intrus qui tentent de lui dérober des trésors, acquis “honnêtement” (pour un dragon, certes) durant les centaines d’années de sa très longue vie. Il n’est pas seul et son “conseil restreint” le renseigne sur qui entre et où… qu’attendent donc ces femmes et ces hommes, en retour de leur service ?..
Sentant la rage monter en lui contre ces traîtres, un léger "pssst... Roger !" derrière lui le surprend en premier lieu. La seconde surprise vient de cette voix, de cette personne qu'il reconnaît dans la pénombre de la porte dérobée :
"- Robert... mais... qu'est-ce-que tu fous là ?... c'est toi qui..."
"- Oui, mais là, en souvenir de notre vieille amitié, j'te sauve les fesses, alors files par ici !"
Le coup de feu est lancé et hop, voici le deuxième jeu français 2016 qui démarre, comme annoncé précédemment sur Kickstarter. "Dragon Keeper, The Dungeon" est un jeu d'Etienne Daniault illustré avec bonheur par Ismaël et Boris Moncel. Ilopeli, en la personne d'Arnaud Urbon, s'occupe de l'édition et vous allez le voir, il y a du beau sur la table. Passez donc par ce passage secret qui mène aux souterrains du Donjon pour découvrir ce jeu pour 2 à 4 joueurs.
Le dragon qui rougeoit et les aventuriers qui cramoient !
Dans Dragon Keeper, vous incarnez un conseiller du dragon ayant abandonné sa guilde d'origine. Guerrier, Sorcier, Voleur, Ranger... vous recevrez en début de partie une identité secrète, ainsi que 4 trésors, vos économies pour votre retraite.
Mais c'est ensuite, et surtout, vers le plateau, impressionnant, en trois dimension et sur trois niveaux, que vos yeux iront se promener. Ce donjon a vu ses trois étages (couvercle, fond de boite et plateau intérieur) parsemés des 75 tuiles en 5 couleurs (dont 4 représentent vos guildes, les amazones rouges étant farouchement opposées à une quelconque défection dans leur rang). Sur chaque tuile, une valeur, et éventuellement, pour les tuiles violettes des sorciers, un effet spécial (piège, passage secret, échange de tuiles...). La figurine du Dragon, elle, trône actuellement au centre du premier niveau, prêt à dévorer les habituels aventuriers du jours qui pensent repartir avec moult artefacts précieux.
À chaque tour, vous déplacerez le dragon où vous voulez, suivant la direction "1" indiquée sur le plateau en cours, et récupèrerez la tuile de destination. Vos conseils auprès du dragon vous rapporteront donc des tuiles qui s'entasseront, les unes après les autres, suivant les couleurs récupérées. Ensuite, suivant la direction "2", orthogonalement donc, vous ferez un deuxième mouvement avec le dragon mais cette fois pour donner la tuile finale à votre "compère" à droite (le joueur précédent). Si le "cadeau" est de valeur 2 ou plus, cette générosité vous octroiera un trésor supplémentaire. Mais bon, d'un autre côté, pourquoi donner d'éventuels points de victoires (la valeur sur les tuiles) à vos adversaires ? Vous allez comprendre.
Comment coincer un dragon ?
Lorsque le dragon ne peut plus bouger (ligne vide pour le mouvement suivant), ce niveau s'arrête et on passe au suivant. Seulement, les choses se compliquent. Premièrement, en fonction des aventuriers (les tuiles restantes) qui s'enfuient avec les trésors du dragon, il faudra rembourser ce dernier, et ce, sur vos deniers et trésors personnels. Gare au joueur en panne de liquidités, le voilà éliminé. Vous comprendrez donc qu'il faut parfois être généreux avec ses camarades pour rembourser le dragon parce que ces enf nobles collègues vous ont tendu un piège et que la manche va s'arrêter avec 9 aventuriers (tuiles) en fuite et 3 trésors à payer, là où vous n'en avez plus que 2.
Deuxièmement, lors du dernier niveau, après cette "imposition dragonnesque", vient le moment du tribut final : Votre pile de tuiles récupérées la plus haute partira ainsi en fumée. Pire, si votre guilde est de la couleur de la pile la plus haute, vous défausserez cette dernière et la deuxième pile la plus haute aussi. Paf ! Attention, on ne parle pas en terme de poins de victoire encore, juste en nombre de tuiles par pile. À vous d'avoir gratter des tuiles de petites valeurs sur la pile la plus haute et les tuiles rémunératrices en PV en moindres exemplaires. Si vous avez les tuiles violettes spéciales, vous pourrez ensuite défausser quelques tuiles de votre guilde d'origines.
Là, je vois que vous vous demandez certainement pourquoi ? Simplement parce qu'au final, votre score sera calculé par la somme de vos tuiles minorés par les tuiles restantes de votre guilde d'origine... Et là, tout s'éclaire ! Si vous ne prenez jamais (ou presque) de tuiles d'une telle couleur, vos adversaires risquent de vous refaire et vous en refourguer un maximum.
Récupérer des tuiles juteuses en points dans une couleur sans trop en prendre pour ne pas avoir à les payer en tribut, c'est bien ! Là encore, les autres risquent de ne pas vous laisser faire... Bref, vous allez jouer de façon interactive pendant toute la partie à surveiller votre voisin de droite, prévenir les autres des machinations et suspicions des autres joueurs tout en tachant de faire oublier les vôtres. Après, vous devez faire au mieux avec ce que le dragon vous laisse à vos tours et les sortilèges des tuiles violettes pour optimiser tout ça.
Un jeu qui a donc tout d'un grand, réflexif et opportuniste, interactif voir même un brin méchant, Dragon Keeper : The Dungeon est avant tout un jeu de collecte à réaliser finement. La Trictrac TV vous montrera tout ça en temps réel et vous pourrez vous rendre compte de tout ce qu'il a dans le ventre... enfin, dans l'donjon, quoi !
Quant à l'édition du jeu, en plus d'un prix très attractif, la boite en trois dimensions est vraiment plaisante et pénétrer plus profondément dans le donjon fait son petit effet... Une très belle réussite !
► La Tric Trac TV de la partie