Fuis : en vert et contre tous

[Forteresse][Frayeur][Fuis]

Il était grilheure. Les slictueux toves gyraient sur l’alloinde et vriblaient. Tout flivoreux allaient les borogoves, les verchons fourgus bourniflaient.

Alice au Pays du Fast Forward

Tric TracSi vous vous demandez ce que je raconte, c'est que vous ne connaissez pas le poème du Jabberwocky (ici son incipit), ce monstre issu de l'univers d'Alice de Lewis Carroll. Je vous invite, en passant, à vous plonger dans le deuxième roman, moins connu (De L'Autre Côté du Miroir) ainsi que dans la série de poèmes, précurseurs du surréalisme, se déroulant canoniquement dans l'univers de la brune rêveuse (non, les blondinettes, c'est seulement chez Disney). Et si vous n'avez jamais lu l'œuvre originale, bon sang, posez-y vos yeux !

Bref, de l'univers des textes de Carroll, nous ne retrouvons dans Fuis (car, introduction faite, venons-en tout de même au sujet, qui jusqu'ici traîne à toutes jambes et semble ne vouloir jamais démarrer (et ce n'est pas cette parenthèse entre parenthèse qui saurait me contredire)) que la saveur des personnages baroques de l'œuvre d'origine sous la plume d'Harald Lieske. Et peut-être, quelque part, les délires mécaniques aléatoires oniriques, dont chaque réveil chamboulle l'ordre et réoriente la partie suivante (mais nous entrons là dans l'analyse d'œuvre poussée, et je crains bien que l'on ne me goale, à la fin, à ne pas atteindre le but de cet article).

Fuis, c'est un jeu de la gamme Fabulosa - Fast Forward. Fabulosa, pour ceux qui ne savent pas, c'est une gamme de jeu créée par le génie ludique Friedemann Friese sur le principe du Legacy, mais sans destruction de matos, et que l'on peut remettre à 0 à volonté. Fast Forward, pour ceux qui ne savent pas, c'est une gamme de jeu créée par le génie ludique Friedemann Friese sans livret de règles, car celles-ci se découvrent, un peu comme un tuto vidéoludique, au fur et à mesure du déroulé de jeu.

Escape Fabulosa

Là où Forteresse (nous en parlions ici) se propose de monter à l'assaut du cœur des amateurs de conquête et bluff, et où Frayeur (nous en parlions là) tire plutôt sur la corde de l'optimisation de main et de la prise de risque, Fuis, un peu à part de ses deux comparses, s'avère être un jeu de pur casse-tête.

Jouable de 1 à 4, Fuis vous propose de jouer en coopératif. Chaque joueur place devant lui, sur son aire de jeu, une (ou plus en cours de partie) cartes, dont la carte du Monstre. Les joueurs jouent chacun leur tour une carte de leur zone de jeu, permettant de piocher, défausser, intervertir des cartes, et autres moult surprises qu'il est plaisant de découvrir par soi-même (cela fait partie intégrante de l'expérience Fabulosa-Fast Forward). Le but étant d'atteindre la fin de la pioche sans jamais (JAMAIS) que le joueur possédant la carte Le Monstre ne puisse jouer. Auquel cas, Le Monstre rattrape le Héros aussitôt, et le dévore, et déchire sa carte (oups, heu, non, en fait, pardon, on n'est pas dans un Legacy de ce genre, cela met juste fin à la partie).

Tout l'art de Fuis, c'est donc de savoir à qui et quand refiler ce foutu Monstre pour qu'il ne soit jamais joué. Ce sur quoi s'ajoute la dimension Fabulosa. L'ordre dans lequel vous allez jouer les cartes va déterminer l'ordre dans lequel elles apparaîtront à la prochaine partie. Il faudra donc parfois plutôt jouer pour préparer de bonnes combos que gagner véritablement.

Owner Of A Lonely Mind ?

Alors oui, Fuis est un coop à base de blabla dans lequel on cherche la meilleure option/combinaison possible, et le jeu ne passe pas à côté de l'écueil de l'effet leader. L'embrouillamini autour de la table dans la quête de la meilleure suite n'est pas toujours des plus plaisant, aussi je vous conseille, si vous ne souhaitez ni déblatérer sans fin sur une option, ni payer le prix du leader, de jouer en solitaire.

C'est sans doute, en solo, la meilleure manière d'aborder Fuis : en confrontant votre cerveau au jeu. Pas de modification de règles, puisque la partie se joue toujours avec les 4 personnages-Héros, qui sont gérés par l'ensemble des joueurs (ou du joueur, du coup, à 1). Une partie de Fuis se jouant en 15 à 20 minutes, la petite boîte devient rapidement un charmant et néanmoins addictif compagnon de voyage, et il n'est pas rare d'enchaîner, de rage ou d'excitation, 3 ou 4 partie d'affilé.Atteindre le fond du paquet aux 90 cartes ne sera pas mince affaire, tant le jeu se complique au long des parties. Actuellement, bien que pratiquant le jeu depuis 2 mois, je creuse difficilement à chaque partie 1 ou 2 nouvelles cartes, atteignant les 70. Piégé par l'addiction de ce concept de casse-tête, me voici prisonnier des illustrations de Lieske. 'Ne trouverais le repos qu'une fois qu'enfin j'aurai fuis, dû-je dévorer ce Monstre moi-même ! Gnihihihihi glarglaglarg snieekkk snk sprotch...

Fuis réjouira les amateurs de casse-tête carrollien, de solitaire à plusieurs, d'OLNI vert, et d'héritage de tutoriel.

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