Je viens de rentrer d’un voyage d’un an en nouvelle-Zélande au cours duquel j’ai eu l’occasion et le plaisir de pouvoir discuter avec Shem Phillips, auteur et dirigeant de Garphill Games. Voici le résultat de cet entretien mené en août dernier.
Par quel moyen avez-vous découvert le jeu de société moderne, et comment avez-vous commencé à créer ?
J'ai commencé le game design il y a une dizaine d'années. A l'époque un terme comme ameritrash ne signifiait rien pour moi : je ne connaissais que les jeux traditionnels comme le Cluedo ou le Scrabble, j'aimais bien jouer et je voulais simplement m'essayer à la création. Je me suis donc retroussé les manches et ai créé un premier jeu très simple avec une mécanique de roll-and-move (déplacement dicté par un lancer de dé), puis un autre et encore un autre, en apprenant les règles du game design de manière empirique. Peu après la publication de mon premier jeu, quelqu'un m'a contacté en me disant que je devrais l'emmener à Wellycon (le plus gros salon de jeu de Nouvelle-Zélande, qui se tient à Wellington depuis 2008), et c'est ainsi que j'ai découvert qu'il existait en fait des milliers de jeux!
Quand j'ai commencé à m'auto-publier, je faisais tout à la main en commandant les composants par lots, pour profiter des tarifs de gros, et je fabriquais une vingtaine d'exemplaires d'un coup. Imprimer et découper les cartes, plier les règles du jeu, monter la boîte et son insert en carton... ça me prenait une vingtaine de minutes par exemplaire, me coûtait vingt-deux dollars et je le vendais pour vingt, ce qui en faisait un vrai hobby et pas du tout une activité commerciale. Le produit final rendait suffisamment bien pour pouvoir être vendu à des amis et à quelques autres personnes qui savaient ce que je faisais, de quoi produire une centaine d'exemplaire par jeu.
Il m'arrive encore de recevoir des messages de personnes qui ont joué à l'un d'entre eux chez un ami et veulent se le procurer, mais ils sont tous épuisés depuis plusieurs années (j'ai vendu ceux qui me restaient en tant qu'add-on pendant les campagnes de Shipwrights et Raiders), et je ne compte pas les réimprimer : comme ce sont mes premiers jeux, ils sont loin d'être les plus peaufinés, et une fois qu'on est habitué à la qualité de production d'un fabricant professionnel on ne peut pas revenir à l'artisanal.
Vos études et vos précédents emplois vous ont-ils aidé lors de vos débuts en tant qu'auteur et éditeur ?
Pour mes études, ce n'est clairement pas le cas : j'ai fait une années de TIC (Technologies de l'Information et de la Communication) avant de prendre conscience que je n'avais aucune envie de travailler dans ce milieu, et j'ai alors enchaîné les petits boulots jusqu'à devenir responsable pour une boîte d'impression à la demande, ce qui explique le t-shirt proposé en add-on pendant la campagne de Shipwrights. Je suis resté à ce poste durant les six dernières années, ce qui m'a permis d'apprendre un certain nombre de choses sur le design graphique et la production. Ca s'est révélé très utile quand j'ai commencé à éditer mes jeux.
J'ai quitté mon emploi en janvier dernier pour passer à plein temps sur Garphill Games, ce qui a été possible grâce aux contrats de distribution internationaux que j'ai signé et au succès des campagnes pour les extensions de Raiders et Explorers. Il aura fallu dix ans mais je gagne désormais de l'argent avec mon activité d'éditeur.
La campagne de financement de Shipwrights a été lancée en mars 2014. Qu'est-ce qui vous a fait passer de votre salon à Kickstarter ?
J'avais déjà utilisé un site de crowdfunding kiwi appelé Pledge Me pour un autre de mes jeux, Plethora. La campagne m'avait permis d'imprimer 500 copies du jeu et de réaliser qu'il y a avait là quelque chose à creuser. Quand Kickstarter s'est ouvert aux projets australiens et néo-zélandais en 2013, je me suis mis à planifier une campagne pour Shipwrights.
C'est en fait un jeu que j'ai créé en 2010, alors que je faisais encore des petits jeux de cartes (d'où la mécanique centrale de draft). J'ai rapidement réalisé qu'il allait demander un certain nombre de composants, un gros travail d'illustration et une boîte bien plus grosse que celles dont j'avais l'habitude. Je ne savais pas où le faire produire et l'ai donc mis de côté jusqu'à ce que Kickstarter relance le projet. A ce moment-là je pensais bientôt arrêter le game design, et je me suis dit “pourquoi ne pas tenter le coup sur Kickstarter et voir si ça peut intéresser du monde ?”
J'ai trouvé un illustrateur canadien dont j'aimais beaucoup le style, mais au final nous n'avons pas pu travailler ensemble et j'ai du chercher quelqu'un d'autre, ce qui m'a amené sur le profil Deviantart de Mihajlo Dimitrievsky. Je lui ai parlé du projet en lui envoyant quelques descriptions de personnage et il m'a renvoyé deux croquis pour le barbare et l'assassin en moins d'une heure !
C'est vrai que son style colle très bien au thème viking, et je pense que ça a attiré pas mal de monde à l'époque.
Oui, ça a été un facteur-clé de la réussite du projet. J'aime beaucoup travailler avec Mihajlo parce qu'il est très créatif. Je lui avais donné beaucoup de détails sur les personnages de Shipwrights, mais plus on travaillait ensemble et moins j'avais besoin de lui fournir d'indications. Au bout d'un moment j'avais juste besoin de lui demander “un barbare mâle” et il me renvoyait un personnage qui collait parfaitement à ce que j'imaginais. Il y a environ 110 personnages dans toute la trilogie North Sea et je ne lui ai demandé que deux modifications! Mon personnage préféré est celui qui ressemble à Odin, sur la couverture de Hall of heroes.
Evidemment, son style a eu un gros impact sur les campagnes. Pour Shipwrights je demandais assez d'argent pour pouvoir imprimer 500 exemplaires et couvrir mes différents frais, raison pour laquelle le jeu était si peu cher. Quand j'ai atteint les mille exemplaires, j'ai réalisé que je pouvais changer de fabricant pour passer de celui que j'utilisais d'habitude à Panda, une entreprise chinoise avec une excellent réputation. Ca m'a permis d'augmenter encore la qualité des coposants et j'ai également pu stocker mes jeux à Hong-Kong, ce qui a rendu les différents envois bien plus faciles.
Je me souviens que j'ai été assez surpris en recevant le jeu : une belle boîte avec des composants de très bonne qualité et de superbes illustrations de la part d'un premier projet Kickstarter, qui avait été bien mené avec des nouvelles régulières... ce n'était pas vraiment la norme à cette époque, même si le jeu était en retard !
Pourtant ce n'était pas parfait : j'avais effectivement six mois de retard, en partie à cause du changement de fabricant, et j'ai au final perdu un peu d'argent sur le projet (pertes qui ont été compensées plus tard par l'excédent de la campagne de Raiders). C'était tout de même une bonne expérience et ça m'a relancé dans le game design à cause du grand nombre de personnes qui demandaient dans les commentaires de la campagne si le jeu allait leur permettre de piller au lieu de simplement construire des bateaux.
J'ai en effet vu beaucoup de joueurs un peu déstabilisés à l'écoute des règles. Après avoir vu la couverture de la boîte, ils imaginent toujours qu'ils vont pouvoir attaquer quelque chose.
C'est pour cette raison que j'avais déjà le thème du pillage en tête quand j'ai commencé à travailler sur Raiders, même si la mécanique n'était pas encore arrêtée. Je suis passé par huit ou neuf itérations avant d'arriver à la version finale, en partie parce que le thème me donnait toujours plus d'idées : on a besoin de recruter un équipage, donc certains des membres peuvent mourir au combat, etc. Je me suis finalement décidé pour une mécanique de pose d'ouvriers, une première pour moi. Le mécanisme de pose/prend, qui permet d'effectuer les actions qu'on veut mais pas forcément dans l'ordre qui nous arrange, était ma façon d'y ajouter un peu d'originalité.
Je n'aime pas reprendre une mécanique à l'identique : on peut utiliser des morceaux pris à droite et à gauche (on me dit souvent que le système d'offrande ressemble beaucoup à celui des huttes de L'âge de pierre), mais il faut y ajouter quelque chose d'original. J'aime beaucoup la collection, par exemple, et j'essaye toujours d'en mettre dans mes jeux sous une forme ou une autre. Une bonne partie des mécaniques d'Explorers est fondée dessus, et elle apparaît également dans Fields of fame avec le système de quêtes.
La campagne de Raiders a été un joli succès, récoltant un peu plus du double de celle de Shipwrights. Vous y proposiez Townsfolk, une petite extension pour Shipwrights, mais la grosse surprise provenait de l'ajout de pièces en métal en tant que stretch goal, quelque chose qu'on voit très rarement sur Kickstarter. Pourquoi ce choix ?
Je dois avouer que ça augmente pas mal le coût de fabrication du jeu, mais je pense que ça vaut vraiment le coup. Quand vous ouvrez la boîte, l'aspect et le son des pièces donnent immédiatement envie de jouer pour les avoir en main, comme pour les jetons de Splendor. Le coût reste finalement raisonnable, y compris pour la version boutique, grâce au nombre d'exemplaires du jeu qui sont imprimés simultanément (même si ça signifie une marge moindre pour mes partenaires internationaux). Les ennuis commencent plutôt avec le jeu sur lequel je travaille actuellement et qui aura besoin de 40 ou 50 pièces, là où Raiders n'en a que 32. Les gens attendent évidemment une qualité de production similaire à celle des jeux précédents, et j'espère avoir plus de soutien et donc pouvoir produire plus pour revoir les coûts à la baisse, mais je n'ai aucune garantie de pouvoir le faire sans connaître le nombre d'exemplaires à fabriquer.
J'ai créé Townsfolk pendant la campagne de Raiders, en réponse aux critiques des joueurs. Ils avaient soutenu ou acheté Shipwrights, ils n'étaient pas content et ils avaient raison. C'est un jeu que j'ai créé il y a un moment, et à l'époque je n'ai pas spécialement fait attention aux déséquilibres engendrés par les parties avec beaucoup de joueurs ou au fait qu'un jeu ait besoin d'avoir un arc et une fin de partie fixe (en théorie, Shipwrights peut ne jamais s'arrêter). C'est plus un patch qu'une extension, c'est la raison pour laquelle on peut la télécharger gratuitement.
C'est une des raisons pour lesquelles j'apprécie Kickstarter : on reçoit un grand nombre de retours de la part des soutiens, qui n'hésitent pas à donner leur avis. Pendant la campagne de Rocks of ruin, qui était assez différente des précédentes (très peu de stretch goals), les gens ne demandaient pas vraiment plus et ne se plaignaient pas. J'ai bien reçu quelques critiques mais je ne pouvais pas faire mieux : ajouter des pages au carnet de score me semblait assez pitoyable, et il m'était impossible de mettre des améliorations qualitatives pour le matériel puisqu'il devait être au niveau de celui du jeu de base dès le départ.
Raiders était un plus gros jeu que Shipwrights, avec davantage de matériel et un grand plateau, pourtant vous avez conservé la même taille de boîte. Etait-ce un souhait de votre part ?
C'est vrai que ça donne une bel aspect collection aux jeux de la série North Sea, mais c'est le fabricant de Plethora qui m'a proposé cette boîte il y a plusieurs années, et je l'ai simplement conservé pour les jeux suivants car elle pouvait toujours contenir l'ensemble du matériel. Il est par contre impossible d'y range un très grand plateau comme celui des Aventuriers du rail, la taille maximum doit être celle du plateau de Raiders. Cela dit ça permet d'avoir de la place sur la table pour des plateaux de joueurs et des aides de jeu, donc l'un dans l'autre c'est plutôt pas mal.
Durant la campagne d'Explorers, le dernier jeu de la trilogie, vous proposiez un add-on intitulé Runesaga permettant de jouer les trois jeux à la suite. Comment l'idée vous en est-elle venue ?
J'ai commencé à y penser une fois que Raiders avait été livré, parce que les joueurs commençaient à demander s'il était possible d'enchaîner les deux premiers jeux. J'ai laissé l'idée mijoter pendant un moment, et je l'ai finalement concrétisée pendant la création d'Explorers. J'ai vite réalisé que jouer les trois jeux à la suite resterait une exception et qu'il ne servait à rien de créer un système trop complexe, ce qui m'a permis de finir la mécanique et l'équilibrage assez rapidement. C'est un peu comme pour la boîte collector destinée à ranger Raiders et ses deux extensions : vous savez que les gens vont vous le demander donc vous le mettez à disposition.
Les extensions de Raiders et Explorers sont-elles également venues des demandes des joueurs ?
Créer une extension pour Raiders semblait logique vu la popularité du jeu, mais c'était la première fois que je m'attaquais à un tel projet (sans compter Townsfolk). J'ai jeté un oeil aux remarques des joueurs : le fer était dur à récupérer et, quand il n'y en avait plus, augmenter efficacement l'armement devenait très difficile. J'ai commencé à réfléchir à un thème de mercenaires, où figurait déjà l'idée d'utiliser des cartes de sa main comme monnaie, puis est venue l'idée des différentes quêtes et la taverne a suivi rapidement. Après tout, comment accomplir des quêtes sans recruter des héros pour les accomplir ? J'ai fini le design six mois avant la date prévue pour la campagne, du coup je me suis mis au défi de créer une deuxième extension dans l'intervalle.
Fields of fame est venu des retours des joueurs sur l'absence de prise de risque (vous savez systématiquement de combien de force vous avez besoin pour un raid donné), ce qui ne semblait pas très viking. Je me suis rendu compte en faisant des playtests à l'aveugle que les américains adorent cette extension alors que les européens préfèrent Hall of heroes, ce qui est assez représentatif des deux philosophies de jeu. Au final les joueurs ont majoritairement pris les deux pendant la campagne, et j'ai eu quelques critiques sur le fait que j'aurais pu tout mettre dans une seule boîte. Seulement voilà, on se serait retrouvé avec une boîte d'extension plus chère que le jeu de base, ce qui n'était pas très pratique pour la vie des extensions en boutique (et puis ça permet d'avoir deux superbes couvertures !).
Je voulais faire une extension dès le départ pour Explorers, et elle se devait d'ajouter un joueur supplémentaire car les joueurs voulaient pouvoir jouer Runesaga à cinq. Je savais que si j'ajoutais 12 tuiles au jeu de base, on en obtenait 60, divisible par 2,3,4 et 5. Ca semblait parfait sur le papier mais ça ne fonctionnait pas vraiment, du coup j'ai rajouté 12 tuiles supplémentaires et ça m'a permis de développer davantage la thématique des épaves. Personnellement je ne joue plus sans Rocks of ruin car elle n'augmente pas beaucoup la durée de la partie mais offre beaucoup plus d'options aux joueurs. Les bâtiments, par exemple, ne constituent pas une stratégie en eux-mêmes : si vous récupérez des poutres en fouillant les épaves, vous pouvez en construire un qui vous aide dans votre stratégie principale (animaux, contrôle des îles...) mais vous n'en avez pas absolument besoin.
Du game design à l'expédition en passant par la gestion des campagnes, comment faites-vous pour tout gérer simultanément, surtout de Nouvelle-Zélande ?
Je suppose que ça n'est pas très différent du reste du monde : je fais généralement beaucoup de tests solo quand je commence à créer un jeu, et quand je sens que je tiens quelque chose qui dépasse le simple empilement de mécaniques je le retravaille encore un peu avant de faire un prototype avec des composants épars. Quelque chose de très simple, en noir et blanc, avec aussi peu de design graphique que possible (il suffit que ce soit bien lisible). J'utilise des protèges-cartes pour pouvoir imprimer ce dont j'ai besoin à la maison et changer certaines valeurs à la volée, et je finis par le plateau. Il y a une réunion d'auteurs toutes les six semaines à Wellington, ce qui nous permet d'amener nos prototypes pour avoir des retours et des conseils de la part des autres participants.
Pour ce qui est de la production, j'ai toujours eu affaire à des chefs de projet canadiens ou américains et je ne traite que très rarement avec des chinois ou des européens, excepté pour des réglages pré-impression ou des tirages spécifiques. Nous produisons les éléments sans texte (comme les pièces) avec les différents distributeurs afin de faire baisser un peu le prix, et toutes les langues sont généralement imprimées pendant le même tirage. Ca m'oblige à attendre d'avoir tous les différents fichiers avant de lancer la production, ce dont je n'avais pas l'habitude quand je faisais uniquement l'anglais, mais c'est le seul changement de mon côté.
Une fois tous les essais réalisés, la production prend environ deux mois, auxquels s'ajoute un mois d'expédition. Shipwrights était en retard parce que je n'avais absolument pas envisagé d'imprimer autant d'exemplaires quand j'ai créé la page Kickstarter, du coup la date de livraison estimée était complètement fausse dès la fin de la campagne. Panda s'est montré bien plus méticuleux que mon précédent fabricant (ils font beaucoup de contrôle qualité), ce qui a augmenté les délais, mais ça en valait clairement la peine vu le résultat final.
Raiders a été nominé au Kennerspiel, la catégorie "connaisseurs" du plus prestigieux prix ludique. C'était une surprise pour vous ?
Absolument ! Je savais que Schwerkraft-Verlag (le distributeur allemand) l'avait proposé pour la sélection avec quelques autres jeux, mais je n'y pensais pas vraiment. Je me souviens que j'étais simplement en train de me reposer à la maison quand mon téléphone et le compte twitter de Garphill Games ont soudainement explosé !
Le voyage en Allemagne s'est très bien passé, j'ai pu rencontrer les personnes de chez FryxGames (l'éditeur de Terraforming Mars) et nous avons pas mal plaisanté pendant le dîner. On a même fini par jouer à une version allemande de Raiders avec un autre kiwi et deux suédois dans le hall, c'était très sympa.
Y a-t-il eu une augmentation des ventes de Raiders depuis sa nomination au Kennerspiel?
J'ai signé un contrat de distribution avec Renegade pour les Etats-unis et il y a désormais cinq langues de plus prévues d'ici la fin de l'année : portugais, espagnol, grec, ukrainien et tchèque. J'ai même du retravailler la police d'écriture du jeu pour l'alphabet ukrainien, qui contient une vingtaine de lettres qui n'existent pas dans l'alphabet latin.
Maintenant que la série North Sea est terminée et que Garphill Games a acquis une certaine popularité auprès des joueurs, allez-vous continuer d'utiliser Kickstarter ?
Je dois préciser que, sans Kickstarter, je n'aurais jamais pu publier mes jeux sans rencontrer des distributeurs dans des salons, ce que je n'ai jamais pu faire hors Nouvelle-Zélande jusqu'à l'année dernière. J'ai pu me rendre à Essen grâce à l'argent qui me restait après la campagne pour Explorers et Runesaga. Même si Garphill Games bénéficie d'une petite notoriété, je ne peux pas publier mes jeux sans Kickstarter.
Ce serait possible aux Etats-Unis car le distributeur peut se contenter de prendre mes jeux et les vendre sans se soucier de la barrière de la langue, mais je ne peux pas atteindre la Suède ou l'Espagne sans avoir quelqu'un sur le terrain qui démarche les boutiques. Les distributeurs locaux comme PixieGames et Schwerkraft-Verlag se joignent à ma production directement, ce qui permet d'augmenter les tirages et donc de réduire les coûts pour tout le monde : je vais faire imprimer 5000 extensions cette année dont 1000 en français et 2000 en allemand, ce qui est uniquement possible parce que ces versions localisées étaient proposées directement pendant les campagnes.
Quels sont vos prochains projets ? Pensez-vous que votre mode de fonctionnement va évoluer maintenant que vous êtes plus attendu ?
Je peux vous dire une chose, c'est que je ne retournerai pas à l'artisanal ! J'ai bien pensé à prendre quelqu'un pour m'aider, surtout pour le playtest, mais ça demande pas mal d'argent et je ne pense pas pouvoir me le permettre pour le moment. Peut-être d'ici un an ou deux, si les choses continuent ainsi... Si je ne cherche pas à produire plus de deux ou trois jeux par an je devrais pouvoir me charger de tout, même si les choses se compliquent vite quand vous atteignez la dizaine de partenaires.
Le prochain projet de Garphill Games sera le premier jeu d'une nouvelle trilogie située dans l'Europe de Charlemagne, Architects of the West kingdom. C'est une co-création réalisée avec Sam Macdonald, un autre auteur kiwi. Nous avons l'habitude de travailler ensemble car nous étions dans le même groupe de musique. Je pense d'ailleurs que la co-création ressemble beaucoup à l'écriture d'une chanson : vous avez une idée et vous la faites évoluer jusqu'à ce qu'elle donne naissance à une autre, ce qui vous permet d'en éliminer certaines parties avant de continuer. Thème et mécanique sont un peu comme paroles et mélodie. Nous allons conserver la même taille de boîte et les illustrations seront de nouveau réalisées par Mihajlo Dimitrievsky, mais la campagne Kickstarter n'est pas prévue avant février/mars 2018, donc vous avez tout le temps de profiter des extensions de Raiders !
[[Architectes du Royaume de l'Ouest](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/architectes-du-royaume-de-louest)][[L'Âge de Pierre](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/l-age-de-pierre)][[Pillards de la mer du Nord](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/pillards-de-la-mer-du-nord)][[Shipwrights of the North Sea](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/shipwrights-of-the-north-sea)][[Shipwrights of the North Sea: The Townsfolk - Extension](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/shipwrights-of-the-north-sea-the-townsfolk-extension)][[Splendor](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/splendor)]