[Les Demeures de l’Épouvante][Le Seigneur des Anneaux : Voyages en Terre du Milieu]
Voici déjà quelques semaines déjà qu'est sorti chez Fantasy Flight Games, FFG pour les intimes, un jeu qui reprend en partie l'application des Demeures de l'Epouvante - 2ème édition, en lui adjoignant une autre peau, un nouveau "skin" : Le Seigneur des Anneaux-mais-pas-les-films ! Plutôt bien accueilli, et même déjà en rupture de stock jusqu’à la rentrée 2019, le jeu de voyages en Terre du Milieu, comme sa baseline l'indique, vous propose de vivre des aventures faites de plusieurs scénarios formant une campagne. Chacun de ces scénarios est même éventuellement jouables en plusieurs sessions, puisqu'il est possible, avec quelques précautions, d'enregistrer la partie.
Allons, n'ayez donc aucune crainte, chères marionnettes, et lancez l'application. Laissez-vous guider et voyez où vous mènent vos pas une fois que vous avez franchi la première colline !
Hop… Rien ne va plus, le jeu est fait !
Le jeu, mécaniquement parlant, est simple d’accès et vite acquis, encore plus grâce à l’accompagnement de l’application qui vous rappelle les points principaux, les changements de phase et toutes ces sortes de choses. Vous lancez le scénario puis choisissez un personnage parmi les 6 disponibles, ensuite un rôle, tel rôdeur, cambrioleur ou éclaireur par exemple, parmi les 6, et hop, vous créez en conséquence votre deck de compétences avec les premières cartes Base/héros/rôle mélangées.
Beravor, éclaireuse en puissance... rapide et "aware" !
L’application vous guide ensuite dans l’installation du terrain (en tout cas, de ce que vous apercevez, le reste étant encore dans le brouillard) grâce aux multiples tuiles numérotées, quelques pions Exploration, Rencontre, Recherche, Menace et hop, le tour est joué… Et d’ailleurs, ce tour est simple aussi et se limite à trois phases : Action (héros) / Ombre (méchants et menace) / Ralliement (remise en route pour le prochain tour)
Là, par exemple, Aragorn se déplace. Il récupère ainsi un jeton Inspiration...
Et oui, dans la forêt, on respire toujours mieux !
Dans la première phase, celle d’Action, les héros, dans l’ordre de leur choix, auront deux actions pour se déplacer, attaquer ou interagir avec les éléments mis en place. Là encore, obéissez à l’application et tout se passera bien ! En dehors de bouger les figurines sur le plateau et tapoter l’écran pour avancer dans l’histoire, vos choix principaux viendront de l’aspect « gestion » de vos cartes : Lorsque vous devez réussir une action en passant un test, vous révèlerez autant de cartes que la caractéristique indiquée ou la carte équipement utilisée. Sur certaines cartes, il n’y a rien, et ce n’est pas bon pour vous ; Sur d’autres, il y a un (ou plusieurs) symbole Inspiration. En dépensant un jeton du même nom, vous transformez un réflexe ou une idée en réussite ; Enfin, sur le dernier type de carte, il y a un succès direct ! Non, aucun dé… juste de la manipulation de cartes !
L’intérêt, et la frustration sous-jacente et générant des décisions, viennent de la présence, sur ces mêmes cartes des effets que vous pourrez jouer sous certaines conditions dont l’une, et non des moindres, est d’avoir préparé la carte. C’est à dire qu’il faut l’avoir sélectionnée et placée sous votre héros lorsque vous aurez fait une Reconnaissance (en trois étapes) : Piocher des cartes ; En placer donc une (potentiellement et au maximum) sous votre héros ; Replacer le reste au dessus ou en dessous de votre deck, ayant ainsi une petite connaissance de ce que l’avenir vous réserve pour votre prochain test.
J'espère qu'un seul succès suffisait, mon bon Sacgins... ou Baquet... Bref !
Evidemment, faire les bons combos de cartes préparées pour une action d’éclat, être prêt à faire face à différentes situations et optimiser son deck font parties du plaisir du jeu. D’autant que les effets les plus puissants sont bien sûr sur les cartes indiquant des succès. Les préparer, c’est prendre le risque d’amoindrir vos chances d’action prochaine… à moins que l’effet ne retourne la situation en votre faveur… Bref, réflexions et trépidants aléas qui forment les moments intenses d’une aventure !
Les combats fonctionnent de la même façon, à coup de test, de mots-clés et d’application gérant les points de vies des méchants, leurs armures, sorcellerie et autres caractéristiques spéciales… Par contre, il ne faut pas charrier non plus, l’app’ n’enlève pas les figurines mortes. Pas trop de modernité d’un coup, tout de même ! Ça, c’est encore à vous de le faire… À la main… Comme dans « l’ancien temps » !
Viendra ensuite la phase d’Ombre où les méchants jouent et tentent de vous tatanner à grands coups de dégâts ou de peurs… et puisqu’il s’agit d’un coopératif, si un seul d’entre vous tombe, physiquement ou en vous recroquevillant de terreur, tous perdent… pas comme la communauté de l’appli de l’anneau ! Les ténèèèèèèbres envahissent ensuite peu à peu, et éventuellement, le plateau. Cette phase se conclue par le temps qui passe, comme dans la vraie vie. À trop tarder à cueillir des champignons ou de l’athelas, des évènements se déclencheront… Et ce n’est pas souvent en votre faveur. Pour tout ça, laissez faire l’app, elle gère !
Enfin, la phase Ralliement permet de réinitialiser le paquet des héros, de faire une « Reconnaissance 2 » et de vérifier si l’objectif du scénario est réussi, avant d’enchaîner sur un nouveau tour si ce n’est pas le cas.
Une fois le scénario effectué, en plus des objets que vous aurez trouvés et que vous pourrez conserver d'une aventure à l'autre, s'il reste des utilisations ; en plus des titres comme Seigneur des Ours que vous aurez acquis au gré de vos aventures et qui pourront être activé à raison d'une fois par aventure ; vous aurez acquis de l'expérience et la possibilité d'investir dans de nouvelles cartes pour votre deck, de nouveaux équipements et ainsi être paré, tel le héros Ambroise, pour faire face à une adversité grandissante. Une grande part du plaisir est là également : Sentir son personnage devenir un héros et entrer dans la légende dont on fait des chansons... elfiques, bien sûr !Mais non, c'est d'un peu de bon sens dont ils ont besoin...
Pour tout le reste, il y a Master… l’application !
Le Seigneur des Anneaux : Voyage en Terre du Milieu amuse… il amuse même très bien. Vivre chaque scénario comme une aventure avec ses rebondissements, ses explorations qui nous font découvrir les contrées de Tolkien, faire ces rencontres, aléatoires ou non, qui donnent l’impression d’un monde « vivant » et non pas plat, s’arrêter sur un cliffhanger, même s’il est plus ou moins couru d’avance, faire évoluer ses personnages en apprenant de nouvelles compétences, voir même en changeant librement de rôle… Bref, et c’est indéniable, il y a du plaisir ludique dans cette boite, s'approchant d'une activité frôlant l'initiation au jeu de rôle !
Avec les Os d’Arnor, la première campagne, il y a déjà de quoi faire, surtout si vous prenez le temps de jouer les 6 héros en tentant d’imaginatifs et étonnants mélanges : Et si on jouait Gimli en éclaireur silencieux, furtif et maître archer ? Et si Aragorn se faisait cambrioleur ou Bilbon, hobbit chanteur (et Frodon douceur) ?
D’autant que depuis, une nouvelle campagne, À la poursuite de la Couronne de Braise, est en approche (à acheter en format DLC) et devrait arriver conjointement avec la première extension « Fléaux de l’Eriador ». De quoi multiplier les possibilités de jeu !
- Mais…
- Mais ?
- Oui, car il y a aussi des bémols à cette première partie plutôt laudative !
Tout d’abord, en terme de contenu, et quand bien même il faut manier les comparaisons avec prudences, vous ne trouverez, dans cette boite à 90 euros, que 31 figurines, avec 6 héros et 7 modèles différents de méchant… ah, qu’il est loin le temps de la première version de Descent avec ses 20 héros et ses 60 montres de 12 modèles différents ! Oui, le plastique, la sculpture, les tailles, toussa toussa… Mais tout de même !
Après tout, le modèle de Games Workshop fonctionne : Une figurine seul entre 18 et 30 euros ne pose problème à personne tant qu’il y a des amateurs qui achètent. L’extension dont nous parlions ci-dessus est annoncée à une quinzaine d’euros pour trois figurines de grands méchants, sans nouveaux adversaires, que nous pouvions déjà rencontrer dans les campagnes disponibles, dont celle de base où ils étaient incarnés par des figurines classiques. Si le procédé l’est tout autant, classique, depuis la deuxième version de Descent, chacun questionnera donc son intérêt avant de payer le prix de trois pions « deluxe » et 9 malheureuses cartes qui se battent en duel !
Et c’est bien là qu’est le deuxième, et peut-être le plus important, bémol : Suivant vos desideratas ludiques, par le truchement de l’application, les joueurs passent le plus clair de leur temps sur cette dernière. Et il vaut mieux un écran large pour ne pas s’y abimer les yeux ! Finalement, les figurines auraient complètement pu être intégrés dans l’application. Nous les aurions déplacés avec le doigt en glissé/lâché et hop, le tour était joué. Les seuls éléments, si l’on souhaite garder un peu de « matérialité », restent les cartes ! Ce sont bien elles le seul élément mécanistique ludique où le joueur, en tant qu’être pensant, est actif ! Et encore… Rien n’eût empêché de les virtualiser : Chaque joueur les gérait sur son portable, c’était même plus confortable visuellement, là où c’est écrit en tout petit… et le tour était joué !
À la rigueur, si j’veux jouer à un jeu vidéo… ben je joue à un jeu vidéo !
Winzenschtark
Peut-être est-ce là l’inévitable questionnement, que chacun résoudra individuellement ou avec sa tablée de joueurs, sur ce chemin d’alliance forgé entre jeu de société et jeu vidéo, où les limites de l’un affrontent parfois les contraintes de l’autre…
Quoi qu’il en soit, et pour conclure, il y a ceux qui ne souhaiteront pas être la slave puppet de l’app master d’un côté et de l’autre, ceux qui s’écrieront gollumment : « mon préccccciiiieuxx, n’y touchez pas, sales hobbits joufflus ! »... voir même, il restera de la place entre les deux pour ceux qui y jouet... juste !