Allez les braves, en avant !
Runes Editions, avec Remi Gruber, le viking RöcTrankil, en leader, continue un chemin éditorial qui mérite d'être connu : King& Assassins en passant par Harald (mes préférés, personnellement), sans oublier Meowtopia et Blackwood, autant de jeux plaisants (voir très plaisants) à découvrir, jouer... et re-jouer (toujours un très bon signe, ça, lorsque l'on rejoue aux jeux appréciés) ! Et le dernier, ou devrais-je dire, les deux derniers, présentés aux SpielTage d'Essen en cette troisième semaine d'octobre 2018, ne dépareilleront pas dans votre ludothèque. Chafouinages tendus et Couinements colorés au menu !
Lindisfarne porte le nom d'une des premières abbaye pillé par les célèbres guerriers nordiques et le 8 juin (encore un) 793 marque le début d'une période sombre de raids en occident. Un jeu qui, par sa thématique, ne pouvait être que chez Runes Editions. Dans la petite boite bien remplie du jeu d'Alain Pradet et Damien Fleury (trictraciens dont nous préserverons l'anonymat en ne divulguant pas (tout de suite) les pseudos), nous allons incarner des jarls, des chefs de clans, prêts à partir en raids dans les pays d'Europe.
Accrochez-vous au drakkar, j'envoie la houle !
Une carte géographique en trois parties, décalées et boisées du plus bel effet, permettra de venir placer les 6 jetons de son clan pour y emporter des cartes Destination au cours de 6 expéditions avant que de dresser un décompte où, astucieusement, le revers des plateaux sont utiles pour déterminer le grand vainqueur.
Le trésor est à portée de main, préparez-vous à l'attaque !
L'avantage est qu'il n'y a, à son tour, qu'une action à choisir parmi deux. Et pourtant les conséquences sont, avec un matériel restreint, à bien estimer. Jugez plutôt : Préparer une expédition revient à lancer autant de dés classiques que de jetons Vikings encore présents devant soi. Il faudra ensuite: - choisir un seul des trois plateaux ; - pour y poser au moins un de ses jetons ; - chacun sur une valeur obtenue à raison de un jeton par valeur maximum. Ainsi, par exemple, j'ai trois jetons, je lance trois dés, j'obtiens 1, 5, 6. Je choisis le plateau du bassin méditerranéen. Je dois poser au moins un de mes trois jetons sur la valeur 1, 5 ou 6... voir les trois sur chacun de ces valeurs si je le souhaite.
Heureusement, le hasard se voit également pondéré par la présence de jetons Rune. Un de ces dernier permet d'appliquer un +1/-1 à un dé (qui ne boucle pas : le "6" ne peut devenir "1" et vice versa).
L'autre action possible est de rentrer au village, cessant ainsi de placer ses jetons Clan. Le premier à le faire récupère ainsi le marqueur premier joueur. C'est à ce moment que vous récupérerez aussi autant de jetons Rune que de jeton(s) Clan non placé(s).
Tout ça pourquoi, me direz-vous ? Mais enfin, pour le sang, la gloire, les combats et les trésors pillées, les vaches et les femmes... euh, non rien ! Bref ! Auprès de chaque plateau se trouve deux cartes Destination. Et chaque plateau, de haut en bas, a sa propre règle de résolution. Ainsi, le premier plateau voit la somme des valeurs de chacun des jetons Clan. Le second plateau favorise la suite la plus longue de valeurs. Enfin, le troisième plateau se fera sur la pile de jeton la plus haute. Comme nous n'avons que 6 jetons Clan, les égalités peuvent facilement apparaître et l'ordre de placement (premier arrivé se plaçant en haut du plateau) les départagera.
Par Ann&Seb et par Heimdal (moi aussi, j'ai faim!) ... à l'assaut !
Dans l'ordre des gagnants, et pour chaque plateau, les joueurs choisiront entre une carte Destination parmi les présentes (et les restantes pour les suivants) ou une carte Objectif, présentant trois destinations à "piller". Ceci étant, pour prendre une carte Objectif, il faut pouvoir renoncer à une carte Destination. Dit autrement, si les deux premiers font haro sur les cartes Destination, les autres repartiront bredouilles au fjord. Petite précision : Les cartes Norvège ont chacune des effets particuliers là où les illustrations des autres pays forment une fresque.
Après 6 manches, le temps du décompte : à raison de 10 points par objectif rempli, 4 points pour la majorité des cartes dans chacun des six pays, les points de cartes Destination elles-même... et pour finir les points pour les parties de fresques reconstituées. Les fructueuses expéditions font les bons comptes qui font les bons... amis, peut-être pas, mais bon, nobles adversaires néanmoins.
Oh tiens ! Morlockbob et Zypher, les auteurs "cartisés" !
D'ailleurs vous retrouverez aussi Rémi et les illustrateurs... Rigolo à faire dédicacer, non ?
Dans Lindisfarne se cache un jeu mêlant à la fois une pincée de "push your luck" : "allez, je ne pose qu'un jeton ici pour relancer deux dés et essayer d'obtenir un "6" pour ce plateau-là" ; de gestion légère de ressources "si je pose trois de mes jetons d'un coup, je ne lancerai plus que trois dés au tour d'après... et surtout les autres n'iront plus trop sur ce plateau mais je n'aurai rien sur les deux autres du coup" et enfin de fourbes planifications : "il s'est installé là en premier, mais normalement, il ne veut que cette carte-là, donc je peux me contenter d'une égalité et comme ça, je lui passe devant sur l'autre plateau du coup... gniark gniark gniark".
Les tractations vont bon train, les tentatives d'alliances "si je me met là, tu me laisses cette carte, dis ? Et je t'embête pas en Europe du Nord ?" sapée parfois par un lancé de dés malheureux... et même le fait de passer pour prendre l'avantage au tour d'après peut être mis dans la balance. Mieux vaux parfois, même si les dés vous donnent ce que vous souhaitez, garder quelques guerriers pour infléchir une décision, provoquant une guerre d'usure entre les clans. Il y a 6 cartes Destination par manche et seulement 6 manches pour faire des points. Récupérer un peu de tout partout, c'est bien, mais récupérer ce qu'il vous fait pour maximiser vos points, c'est mieux ! Seulement, les majorités se font sur peu de chose parfois, méfiez-vous !
Bref, un "petit" jeu par sa boite, mais qui contient un concentré de bons moments, de réflexions intenses et de décisions chafouines... où chaque décision se pèse fortement !... et du coup, les 45 minutes de parties, effectivement là, ne se voit pas passer, et laisse l'impression de n'avoir guerroyer que le temps d'un raid en se tapant fort dans l'dos pour les bons coups de la partie !... Et rejouer, bien sûr !
rho, comment que j't'ai bien eu dans la dernière manche... on s'en r'fait une ?
Virage à 180° pour le deuxième jeu présenté à Essen par Runes Editions : Tag City dont l'auteur, Robin David, nous a gratifier tout dernièrement d'un carnet d'auteur pour nous présenter sa démarche créative que vous pouvez lire ici. Il s'agit là d'un jeu dans un genre qui verra de nombreuses déclinaisons lors du salon internationale d'Essen : Le "roll and write" ! Vous savez, ces jeux souvent simples et addictifs où, à chaque tour, des dés seront lancés permettant ensuite aux joueurs de faire chacun leur choix pour inscrire quelques choses sur leur feuille personnelle afin de remporter la partie par un décompte final ?
Et bien vous voici avec vos bombes de peinture prêt à égayer un mur voir un quartier complet de la ville. Chaque face de dé permet de choisir entre deux formes sur le plateau central, vous permettant de remplir, en respectant scrupuleusement la forme choisie, les quartiers de la ville en laissant ainsi briller votre talent... mais attention, vous ne pouvez pas aller n'importe où en ville. Vous allez y progresser pas-à-pas. De fait, surveillez bien la progression de vos adversaires ! Car c'est aussi une course à celui qui terminera le premier telle ou telle rue (colonnes et lignes) ainsi que les quartiers (zones de couleur), et il n'est pas possible de laisser les autres joueurs vous prendre tous les gros points. Il sera donc parfois judicieux d'utiliser des drones pour aller peindre des endroits difficiles ou utiliser les "rézosocios" pour s'assurer d'une victoire en cas d'égalité... Bref, utiliser à bon escient quelques malus pour prendre l'ascendant vers l'arc-en-ciel !Le jeu, simple d'accès comme le sont les représentants du genre, mais pas simpliste, se renouvelle très bien avec des plans de villes différents et plus ou moins tortueux, mais aussi par des formes de quadrominos ou pentominos différentes à chaque partie, permettant également de se renouveler... sans compter les formes bonus. Et les chatoyantes illustrations de Grelin accrochent bien au thème. Tag City, en fort belle icône du genre, est très interactif et son aspect "course" est bien rendu, mâtiné d'un petit vrillage de cerveau en deux dimensions pour savoir s'il vaut mieux ce petit "4 cases" qui rentre là pour s'approcher d'une couleur terminée ou plutôt ce grand "5 cases" qui ne me fait rien finir mais qui m'en "colorie" davantage !
Bref derechef, une fois encore, une petite boite qui a tout d'une grande !
Allez, Psssshhhhiiiiitt ! Laissez faire les artistes !
D'ailleurs, le premier tirage de Tag City se verra gratifier d'un cinquième artiste et son plateau... rdv à Essen pour vous le faire dédicacer par l'auteur