Si vous êtes familiers des jeux de plis (ou levées) traditionnels, il y a de bonnes chances qu’en découvrant Skull King vous vous exclamiez « Ah mais c’est comme le [entrez le nom que vous donnez à ce jeu par chez vous] ! » Face à ce genre de cas, on se demande toujours si ce n’est pas un peu gonflé de sortir en boutique un traditionnel ne nécessitant jusqu’ici qu’un jeu de 54 cartes et si, globalement, ce jeu présente encore un véritable intérêt ludique.
La revanche du Skull
Ce Skull King est une réédition. Il nous revient après quelques années d’absence, édité cette fois par les propres soins de l'auteur de cette version d'un jeu que peut-être vous connaissez, sous le nom d’ascenseur ou un autre. Sa règle est proche de celle des tarots dits africain (ou tiar) et mexicain. Personnellement je l'appelais abusivement le whist, mais le véritable whist est en fait bien plus proche de la belote ou du tarot.
Respect du code
Hors des cartes les plus particulières, le jeu se compose de 4 couleurs comptant chacune 14 cartes de valeur 1 à 14 (comme au tarot). Nous avons du perroquet en vert, de la carte au trésor en violet, du coffre (également au trésor) en jaune et du drapeau pirate, en noir évidemment. Il ne sera pas utile de déterminer une couleur d’atout, c'est le pavillon noir qui l’emporte toujours sur les autres couleurs.
La levée se déroule de manière assez classique : le premier joueur de la table pose une carte de sa main et le suivant doit en fournir une de la même couleur si possible. Si possible ce n’est pas, il met ce qu’il veut. Quand tout le monde a joué une carte, celui qui remporte ce pli est le joueur ayant joué le pavillon noir de la plus grande valeur ou à défaut, la plus haute carte de la couleur qui avait été demandée par le premier joueur. Le pli remporté est entassé devant ce joueur, qui relance un nouveau tour avec en posant une nouvelle carte de sa main.
Les corsaires rouges
Ça me rappelle de vous mettre une petite ambiance sonore pour évoquer les pirates : voilà. Reprenons.
Les cartes plus particulières quant à elles, n’obéissent pas à la règle exigeant de suivre la couleur demandée. Nous avons des personnages : 6 pirates, 2 sirènes et 1 Skull King. Ces cartes n’affichent pas de valeur, cependant en jouer une lors d’une levée permet de remporter celle-ci. Enfin, c’est à ceci près qu’une sirène sera capturée par un pirate, que les pirates sont eux-mêmes battus par le roi des pirates (surnommé Skull King) et que ce dernier succombe toujours au chant envoûtant d’une sirène. Si les trois types de carte sont présents lors d’un même pli, la sirène l’emporte. Tout cela promet quelques rebondissements.
Enfin il y a les cartes fuite, qui vous assurent de ne pas remporter le pli. Des cartes honnies, pensez-vous ? C’est que je ne vous ai pas encore expliqué le principe global du jeu.
Principe global du jeu
Une partie se déroule en dix manches (ce quel que soit le jour de la semaine). À la première, une seule carte est distribuée à chaque joueur. À la seconde c’est deux, à la troisième, trois, etc. jusqu’à dix à la dixième. Contrairement au jeu de l’ascenseur, la partie s’arrête à la dixième manche, sans redescendre ensuite graduellement à une carte, vous prendrez les escaliers. Il faut dire que les toutes premières manches, avec peu de cartes, ne sont vraiment pas les plus passionnantes. Elles ont au moins l’avantage d’être vite réglées et de permettre aux novices d’appréhender progressivement le jeu.
C’est utile car le but est davantage d’anticiper le déroulement de la manche que de remporter un maximum de plis. En effet, à chaque début de manche, les joueurs doivent prendre le pari du nombre de plis qu’ils vont réaliser. Ils tapent du poing sur la table en criant « Yo-ho-ho ! » (sauf si les petits sont allés se coucher) et révèlent leurs paris tous en même temps. Deux cartes leur permettent d’afficher le nombre de leur choix, de 0 à 10. En général on constate immédiatement un écart entre le total des prédictions et le nombre de levées de la manche et le cas échéant, on peut prédire avec davantage d’exactitude que certains vont se faire avoir.
Yo-ho-ho, j'ai encore fait zéro !
Il y a deux manières de compter les points à la fin d’une manche : la méthode Skull King et la méthode Rascal.
Selon le Skull King, il faut compter, lorsque le pari est gagnant, 20 points par pli remporté. Si le nombre visé était 0, c’est 10 points par pli dans la manche. En revanche, lorsque le pari est perdant, le score tombe à 0, puis en en retire encore 10 points par pli d’écart entre la prédiction et la réalité !
À cela viennent s’ajouter des points bonus pour les cartes 14 prises et les personnages capturés par d’autres personnages. La feuille de marque, très détaillée, vous permet de tenir le compte de tout cela si vous avez envie de tout noter, le comptage étant le point un peu complexe du jeu.
Selon le décompte de Rascal, chaque manche vaut autant de point que le nombre de cartes qui y sont jouées par tous les joueurs. Ces points, sont remportés par tous les joueurs dont le pari s’avère gagnant. On y ajoute les éventuels points bonus. Un écart de 1 par rapport au pari divise par deux le total et un écart de 2 le réduit à 0. L’idée derrière ce décompte est de favoriser la justesse des prédictions par rapport aux mains chanceuses.
Advanced Skull King
Des règles supplémentaires sont proposées, pour complexifier le jeu progressivement et le personnaliser.
Il est possible d’ajouter un kraken, monstre marin destructeur de plis, une baleine blanche qui fait fuir les personnages et ignorer les couleurs, ainsi que des cartes butin, qu’on laisse prendre par un joueur pour marquer un bonus avec lui, à condition que son pari se réalise.
De plus les pirates ont tous un pouvoir particulier. Par exemple, Will le bandit permet de piocher deux cartes et d’en défausser autant. Comme ces capacités s’appliquent uniquement lorsqu’un pirate fait gagner un pli, il n’est pas nécessaire de trop s’encombrer l’esprit de leurs effets à l’avance et on peut très vite les inclure dans le jeu si on le souhaite.
Tu ne me feras pas prendre un ascenseur !
Disons-le tout net, Skull King n’est pas pour tous les amateurs de cartes. Il aura du mal à convaincre ceux qui ne jurent que par le bridge, Magic ou Ark Nova par exemple. Les joueurs de belote pourront regretter que l'on mélange le jeu entre chaque manche, éliminant tout aspect de mémorisation. En revanche si vous cherchez un jeu de pli simple et sympathique, créant une ambiance autour de la table pour jusqu’à 8 joueurs, Skull King pourrait vous plaire. On évalue sa main, on tente de remporter des plis, on essaie de ne plus en faire, on rage quand tout tombe à l'eau... c'est un jeu de cartes qui demande tout de même un peu plus de réflexion que par exemple LAMA, le 6 qui prend ou le Uno. Parlant du Uno, en le comparant au 8 américain originel, il convient de reconnaître à l’auteur de Skull King davantage d’idées personnelles donnant de l'intérêt à sa version (n’hésitez pas à y aller vous même de votre propre exemple de jeu traditionnel repompé, en commentaire.) Ces particularités, ainsi que les jolies cartes de bonne facture, le soucis constant d'accessibilité et le prix relativement modique, sont autant d’arguments en faveur de ce petit jeu à sortir pour se détendre, et répondre à la demande de ces joueurs qui vous annoncent toujours qu’ils veulent bien participer si ce n’est pas trop long, ni trop compliqué.
Un jeu de Brent beck, Tauni Beck et Jeff beck,
illustré par Apryl Tott.
Pour 1 à 8 joueurs d'au moins 8 ans et des parties d'environ 30 minutes.
Photos : Claire C.
[[6 qui prend !](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/6-qui-prend-2)][[Ascenseur](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/ascenseur)][[Huit Américain](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/huit-americain)][[LAMA](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/lama)][[Skull King](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/skull-king)][[Uno](https://www.trictrac.net/jeu-de-societe/uno)]