Vingt nat !

Vous ne savez pas ce que signifie l'acronyme JdR ? Vous allez avoir du mal à suivre si vous ne connaissez le Jeu de Rôle que par son homologue des jeux vidéos qui est un faux ami.
Narratif ? On monte encore d'un cran.
Pour résumer très brièvement, le Jeu de Rôles (avec ou sans S terminal, un vieux débat de rôlistes) est né dans les années 70 avec le célèbre "Dungeons & Dragons" de E. Gary Gygax et Dave Arneson. Une vraie révolution dans l'univers du jeu puisque pour la première fois l'objectif est de devenir le héros d'une aventure. Autant vous dire que ça nous a fait plein de petits frissons partout.
Le premier univers est tout logiquement celui du "Seigneur des Anneaux" de Tolkien qui a conquis le cœur de millions de lecteurs depuis la fin des années 50. Le problème délicat de la licence est contourné est D&D empruntera également à toutes les sources de la littérature de fantasy.
D&D se propose de mettre des règles pour jouer un personnage dans des scénarios. Le Jeu de Rôles est donc par essence narratif. C'est du moins ce que l'on pourrait supposer.
Dès les débuts, les joueurs sont encouragés a créer leurs propres scénarios et ces salopiauds vont vite comprendre qu'ils peuvent même créer leur propre jeu dans leurs univers préférés.
Bien que révolutionnaire, D&D est issu directement du wargame avec figurines. Les wargames n'ont pour prétention que de gérer un combat entre des belligérants. Historique à l'origine, les amateurs de fantastiques ont vite troqué les grognards contre des nains, des orcs, ... Et là, la filiation avec le roman opéra : Que faisait les héros des champs de bataille entre deux combats ?
On voit très vite combien la narration promise ou rêvée est restreinte dans les débuts du Jeu de Rôles. Nous sommes plus proche du jeu de plateau que de la veillée autour du feu. Le fameux Dungeon Crawl est alors le cœur du jeu : Un groupe d'aventuriers aux caractéristiques différentes et complémentaires, des sous-terrains remplis de monstres et de récompenses.
En français le style devient Porte-Monstre-Trésor.
Sur la table des Dungeon's Floor simulent les couloirs avec leurs cases, des figurines (eh! oui!) les personnages et les règles prennent toujours en compte le déplacement, la distance, etc. Le Jeu de Rôle n'est pas encore affranchi de son papa le wargame.
C'est sous la houlette de scénaristes que le Jeu de Rôles va sortir des sous-terrains assez rapidement. Puisqu'on peut créer son propre monde, ce serait bien frustrant de ne se contraindre qu'à ces trous mal famés (devenus Donjons en Français ^^).
On parle alors d'aventures en extérieur. Et là, il va falloir prendre des libertés avec les règles qui ne permettent pas de couvrir tout le champ des possibles.
C'est sans doute "L'Appel de Cthulhu" qui va ouvrir la voie à des JdR plus narratifs. En s'attachant à retranscrire fidèlement l'univers de l'écrivain H.P. Lovecraft, Sandy Petersen, dans les années 80 devra composer avec le fait que les héros de ces sombres histoires n'ont pas de super pouvoirs et qu'ils finissent rapidement et tragiquement.
Du coup, exit les coffres de pièces d'or, le joueur n'est quasiment plus récompensé par l'accroissement des capacités de son personnage mais par son background qui s'enrichit (avant de mourir ou de tomber barjot). A défaut de grives, on mange des merles.
D'autres viendront de plus en plus extirper le Jeu de Rôles des griffes de la simulation de combat en cherchant des voies privilégiant le storytelling.
Cela créa même quelques querelles de chapelles dans les années 90 entre vieux simulationistes et nouveaux narrativistes.
On voit alors apparaître des jeux quasi expérimentaux dont le plus précurseur est "Ambre" un jeu de rôle inspiré de l'univers de Zelazny. Et cette fois, la surprise est totale car le mythique et quasi sacré dé disparait pour la première fois.
Les joueurs disposent toujours de caractéristiques mais celle-ci ne servent qu'à comparer leurs qualités respectives. Erick Wujcik propose une nouvelle vision du jeu. Sa base de réflexion : Un joueur d'échecs qui est bon battra toujours un joueur débutant. Pas la peine de tirer un dé pour simuler ça.
La disparition du dé n'est pas le seul élément puisque là encore, l'auteur propose aux joueurs de fabriquer leurs propres univers, leurs objets,... La création de personnages comprend alors des éléments propres à la construction de l'histoire commune.
C'est dans cette voie que s'engagent les narrativistes. Hélas, le Jeu de Rôle n'est plus à son apogée et l'édition devient difficile. Plus que de s'attacher à simuler des actions, ces créateurs se posent la question de trouver des règles qui gèrent le récit lui-même. Adieu petites figurines. Au départ était le verbe et celui veut reprendre sa place.
Et pour ça le Net est là.
Cette longue et passionnante (^^) introduction pour vous dire que si vous avez tenu jusque là, vous devriez peut-être être intéressé par ce concours un peu vintage, un peu geek, un peu underground : "Vieux Pots, Nouvelles Soupes" vous propose de reprendre un vieux jeu des années Dorothée pour le transformer en un truc hype et narratif.
Parce que figurez-vous que c'est un exercice déjà pratiqué de quelques uns ! Au franges du monde connu du jeu plan-plan, des aventuriers aiment mettre les mains dans le cambouis, triturer les concepts et même pour de rares pervers géniaux allier connaissance du structuralisme et super héros.
Je vous laisse aller voir tout ça ou pas.
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