[Badass Force][Mascarade - édition 2021][Not Alone]
Figurez-vous que dans le futur, ils ont analysé l’ADN des plus grands héros des temps modernes. Ces demi-dieux à qui l’ont adressait des libations sur pellicule, et que des fidèles venus des quatre coins de la rue vénéraient dans le noir, leur sacrifiant quelques maïs sucrés. Oui, ceux-là même ! Et rendez-vous compte qu’avec cet ADN, dans le futur, ils reconstituent des doubles transfomorphes avec lesquels ils se foutent joyeusement sur la tronche.
Une vraie bro-force
Badass Force est un jeu de Ghislain Masson, un nom qui devrait peut-être vous mettre des paillettes dans les vic-yeux si je vous dis que nous le connaissons comme l'auteur du délectable et vipérin Not Alone. Déjà, si vous êtes amateur du fourbe jeu inspiré des fabuleuses Chasses du Conte Zaroff de nos amis belges de Geek Attitude Games, vous devriez trouver votre bonheur avec les Badass. Badass Force, ne vous y trompez pas, ce n'est pas un jeu bourrin. Certes, on s'amuse à se tirer dans les pattes et se planter des couteaux crantés dans le dos, mais tout le sel du jeu va venir de votre capacité à bluffer sur vos capacités d'agressivité, plutôt que de vos réelles facultés.
Badass Force, c'est aussi le premier jeu du jeune duo de frères éditeurs Funky Sheep. Et pour se lancer dans l'aventure ludique, ils proposent, comme bien des petits nouveaux, leur jeu en financement participatif sur Kickstarter. C'est d'ailleurs ici que ça se passe, et si vous voulez en savoir plus sur le pourquoi du comment de qu'est-ce qu'il se quoi de l'histoire du jeu, il se trouve que nous avons tourné un petit papotache à l'officine, en bonne septième compagnie :
Bouge pas ou j'te bute peut-être
Votre but, en temps que Badass incarné, va être de marquer 16 points de victoire au Badassomètre. Vos armes, pour se faire, seront d'utiliser à votre tour une action parmi une panoplie de 5 disponibles. Vous pourrez charger votre arme, tenter de tirer, ou plus vicieusement et insidieusement, jouer avec les capacités des personnages en jeu.Oui, parce qu'en début de partie, on sélectionne un pool de Badass dont chaque joueur possédera un représentant dans sa main. On n'incarne qu'un seul Badass à la fois, et si celui-ci ne vous plait plus, ou qu'il se fait mitrailler façon gruyère, vous pourrez ou devrez alors le changer pour un Badass encore disponible de votre main. Chaque Badass possède un effet particulier, permettant d'améliorer vos armes, dézinguer du bonshomme, ou jouer des actions plus performantes que vos petites capacités basiques.Le truc, c'est que le Badass que vous chaussez de vos petons délicats est face caché. Vous êtes donc le seul à savoir qui vous êtes vraiment, et temps que vous ne faîtes pas un bonzaï tonitruant dans la mêlée, vous pouvez vous faire passer pour n'importe qui. En tout cas, temps qu'on ne vous accuse pas de dire des menteries, de trouver que la voix de Bruce est drôlement fluette, ou les manières de Sigourney un peu trop texanes et moustachues.
Alors si on ne vous dit rien, et qu'on vous laisse bonimenter comme un enfant de 5 ans parce que vous êtes bien mignon, ou comme un cador masqué des services des Missions Impossibles, on vous laissera bien gentiment rouler des mécaniques de Dolph dans les sandales de Uma. Mais si quelqu'un ou quelques-uns autour de la table vous trouve(nt) un poil suspect, il va alors falloir révéler des cartes, bas les masques, et se lancer dans des révélations qui pourraient bien changer le cours du tour ou de la partie !
Philippe, je sais où tu te cache !
J'en vois quelques-uns autour de leur écran qui s'agitent en pensant au Mascarade de Bruno Faidutti. Si les deux excellents jeux sont en effet cousins sur le papier, ils diffèrent tout à fait en terme de sensations. Déjà parce que là où un Mascarade sera plus chaotique à moult, et plus tactique en comité réduit, Badass Force montre clairement une profondeur stratégique et réflexive omniprésente, quelque soit le nombre de joueur. Certes, Badass Force peut aussi se jouer à la simple force d'un hasardeux destin, par les dés et les armes uniquement, mais l'on passe là à côté du sel et de l'esprit du jeu.Badass Force est aussi clairement agressif. Nul besoin de tirer dans tous les sens ! Le simple bluff, contre-bluff, ou l'accusation maligne, permettront d'aller directement prendre des points de victoire en affaiblissant les autres joueurs (qui perdront des Badass dans l'affaire, et donc diminueront leur capacité à masquer la vérité). Il est néanmoins toujours possible de se relever, en usant intelligemment des capacités des personnages en jeu, ou en pointant du doigt le leader en tête dans l'arène. La tchatche et la fourberie sont au cœur de ce petit délire malin et très interactif, et des renversements de vapeur de dernière minute auront souvent cours, transformant une situation désespérée en rebondissement impromptu.
C'est d'ailleurs là que l'on retrouve l'ambiance et l'hommage caricatural et fort plaisant de Badass Force. Si le jeu joue sur les clichés et clins d'yeu des gros films d'action bourrins des 80's et 90's, les parties seront, encore une fois, bien plus intellectuelles que physiques. Il n'empêche, l'on s'en met plein la tête, l'on diminue et modifie physiquement ses capacités, et l'on gagne des points en mordant clairement le jarret des autres. L'esprit de Badass Force, c'est de faire la bagarre avec la fourberie d'une mine plutôt que la faculté de nettoyage d'un missile sol-air. Une ambiance habilement rendue par le graphisme tout particulier et délicieusement atypique d'Anthony Geoffroy, mis en avant jusque dans un teaser hommage à cet univers :
Attention toute fois, nous sommes ici dans le délicieux pastiche.
Le jeu, est, en main, bien plus fin étalon que bourru canasson.
Badass Force réjouira les amateurs de bluff suspicieux, d'accusation à tort et à travers la fenêtre, d'univers des sorties-ciné de notre enfance, de sueur d'aisselle et de cerveau, et d'interactions dans tes dents.