Critique d’Otys

[Otys]

Lorsque Libellud, l’éditeur connu pour ses jeux léchés aux graphismes travaillés rencontre Pearl Games, l’éditeur aux jeux mécaniquement profond, ça nous donne Otys. Un jeu où vous dirigerez une équipe de plongeurs partis explorer les profondeurs ? Afin d’en récolter des ressources uniques de l’Ancien Monde. Un thème original, mais est-ce que le jeu suivra la même tendance ? C’est ce que nous allons voir dans cette critique. Mettez votre scaphandre, fermez les écoutilles, car la descente en eaux profondes commence maintenant !

L’escouade des profondeurs

Je vais essayer d’être clair, tout en essayant de ne pas être long ou d’entrer trop dans les détails. Vous dirigez une équipe de 8 plongeurs, qui dispose chacun d’un pouvoir qui peut être amélioré (sans changer de nature) sous certaines conditions. Votre plateau d’exploration personnelle est composé de 5 « zones » dans lesquelles vous allez engager l’un de vos plongeurs pour récolter des ressources dans le but de réaliser des commandes à votre tour de jeu. Pour cela vous allez utiliser une « clé », une tuile chiffrée qui se trouve en face du plongeur désiré. Cela aurait pour effet de déclencher le pouvoir correspondant sur le Display de la colonie (le plateau commun), ainsi que le pouvoir de votre plongeur, une fois celui-ci engagé dans sa travée. Vous pouvez si vous le souhaitez renoncer à ces pouvoirs. Il vous suffit ensuite de défausser votre clé, en dessous du plateau, et de faire remonter votre plongeur tout en haut de la colonne. Si durant votre tour vous avez récolté assez de ressources, vous pouvez remplir un contrat qui vous apportera en échange des points de prestige et parfois un bonus. Au début de votre tour, en échange d’une batterie vous pourrez monter ou descendre l’un de vos plongeurs d’autant d’emplacements que vous permet votre mécanicien. En fin de tour, toujours contre une batterie vous pourrez décider de ne pas faire remonter votre plongeur. Bien entendu vous ne pourrez utiliser que des plongeurs qui disposent de clés. Vous les récupèrerez donc lorsque celles-ci atteindront votre hacker, en sachant que celui-ci pourra avancer sur la piste à l’aide du pouvoir de l’ingénieur. Tout le reste se fera à l’aide des pouvoirs de la colonie et des plongeurs. Le premier joueur à parvenir à 18 points met fin à la partie, on finit le tour de table et le joueur possédant le plus de points de prestige remporte la victoire. Ouf j’espère m’en être bien sorti et n’avoir rien oublié de trop important à la compréhension.

L’exigence d’une qualité toujours au rendez-vous

Vous savez ce qui est gênant avec le fait de nous habituer à de bonnes choses ? C’est que l’on y prend goût, et que le moindre écart se voit tout de suite. Ah le chemin de l’excellence est pavé de bonnes intentions, mais tout autant d’exigences. Je vous fais tout ce laïus pour introduire que Libellud nous a habitué à du matériel de très bonne qualité, et ici les plateaux ont tendances à se gondoler et à ne pas bien se poser sur la table, faisant parfois glisser les jetons Hacker et Mécanicien en dessous. De même, pour les plongeurs n’arrivent pas bien en face de leurs clés. Ce ne sont que des détails, clairement, mais sans gâcher l’expérience de jeu, ça fait un peu tache au vu du palmarès des deux éditeurs. Mais l’erreur est humaine. Pourtant, le jeu bénéficie d’une édition de qualité, les illustrations sont superbes et arrivent bien à nous représenter cet univers original, le rangement dans la boite est vraiment très bien pensé, et le reste des pièces bénéficient d’un travail tout aussi approfondi. Au niveau matériel, sans le comparer aux autres jeux des éditeurs, Otys conviendra à la plupart des personnes et profite d’une édition de qualité. Je suis juste tatillon, car ça m’ennuie qu’ils aient fait ces petites erreurs étant donné la qualité dont jouissent leurs autres jeux. L’exigence dans toute sa splendeur comme je vous le disais un peu plus haut.

Au fond de l’abysse

Les actions à entreprendre à chaque manche ne sont pas complexes ni vraiment nombreuses, on comprend vite ce que l’on doit faire. Mais aussitôt avons-nous compris cela que le jeu bascule dans les profondeurs, ceux de la mécanique et de la courbe de progression. Car Otys est un jeu profond, ce qui colle parfaitement avec le thème du jeu, mais qui implique un nombre de choix conséquent et surtout la mise en place obligatoire sur le long terme d’une stratégie calibré à la batterie près pour scorer comme il se doit. Car à chaque tour l’action que vous entreprenez va avoir des répercussions sur vos prochains tours, tout sera lié. Ajoutez à cela des contrats qui vont tourner et changer, surtout à 4 joueurs, et vous obtenez un jeu complexe où vous devrez faire preuve d’opportunisme et de qualités de planificateur. Un jeu qui devient dès lors assez froid, car les seules interactions entre les joueurs se situent au niveau du marché, des contrats et des copies de pouvoirs. Rien n’est fait pour que les joueurs se côtoient plus, surtout que chaque joueur joue à son tour, sans que les autres puissent en faire de même. Cela n’en fait pas un mauvais jeu, c’est juste qu’il est bon de le savoir avant de s’aventurer plus loin. Ce qui n’en fera pas un jeu accessible à tous malgré ses règles assez simples, car ça sera au niveau de l’application de celles-ci et la mise en place d’une stratégie assez lourde que tournera tout le jeu. Un jeu à réserver aux amateurs de gros jeux, costauds au niveau réflexion, avant toute chose.

Les 14 ans annoncés dessus sont justes, même si un enfant plus jeune et habitué s’en sentira très bien. Il aura cependant je pense, plus de mal à en tirer du plaisir, comme ce fut le cas pour mon fils de 11 ans. Enfin en terme de durée, les 60 minutes annoncées sont justes à 2, voire à 3, mais gonflent un peu à 4, car rien n’empêchera un joueur de faire de l’analysis paralysis (même pas remboursé par la sécu). Par contre, le thème est raccord avec les mécaniques de jeux, et huile bien le tout, même si on aurait pu remplacer les plongeurs par des mineurs par exemple, mais cette originalité lui sied à ravir. Un jeu qui plaira beaucoup aux amateurs de calculs et de kubenbois, car la victoire sera toujours à l'arraché, il faudra rester vigilant tout au long de la partie et maximiser son tour à chaque fois.

Otys n’est pas un jeu d’ascenseur … quoique …

Je dois vous avouer que j’ai un peu de mal à bien cerner le jeu et surtout à vous donner un avis bien tranché. Otys est rempli de qualités ludiques, le système fonctionne au poil, le thème est bien intégré et le tout reste extrêmement tendu. Franchement je n’ai rien à redire sur ce point. Mais d’un autre côté, l’attente entre les tours, la programmation assez lourde et l’absence d’interaction m’a un peu refroidi. Je n’y ai pas joué en prenant du plaisir en tant que joueur, mais plus en tant que tacticien et qu’ »analyste » de mécanique de jeux (aucune prétention de ma part en disant cela). Du coup je dirais qu’Otys est un très bon jeu, mais pour une tranche bien spécifique de joueurs. Ce n’est pas un mauvais titre dans la ludothèque des deux éditeurs, mais plutôt un jeu très original qui sort des sentiers battus, surtout pour Libellud. Du coup je le conseille sans mal si vous êtes le public visé par ce type de jeu, car Otys est exigeant, mais il demande en échange une implication importante pour dévoiler son potentiel. Et il saura séduire les joueurs exigeants qui attendant d’un jeu de gagner grâce à sa réflexion et non le fruit du hasard et grâce à des sales coups.

7 « J'aime »

Jeu testé vendredi dernier: il tourne bien dans le genre.
Par contre, les plateaux qui gondolent sont assez pénibles…

Je n’y ai pas encore joué mais l’impression qu’il m’a donné d’après ce que j’ai lu ou vu est parfaitement résumé dans ta phrase : “mais il demande en échange une implication importante pour dévoiler son potentiel.”
Il y a des jeux où clairement on se dit : “Ce jeu semble cool. A la place de machin je ferais ça et à la place de bidule, je ferais plutôt ça !” J’ai l’impression qu’Otys s’apprécie plus par l’expérience. On ne peut pas se contenter de voir jouer, il faut se confronter aux choix qu’il propose. Je pense que c’est typiquement le genre de jeu où on pense avoir compris toutes les subtilités avant de jouer mais qu’à tous les tours on se dit : “Ah non ! Bordel de chiotte !”, “Ah zut j’avais pas pensé à ça”, “Ahhhhrgh ! Je peux revenir en arrière ?” Bref, ça me semble très malin et je pense que ça peut lui donner une belle durée de vie car il faudra beaucoup de parties pour bien maîtriser ce que l’on fait.
J’espère à ce jeu la réussite que Libellud et Pearl Games méritent !

2 « J'aime »

Oui c’est pour ça que j’ai parlé de courbe de croissance justement. Mais oui ça se passe un peu comme ça.