[Ilôs]
Passer des vikings aux initiateurs des grandes invasions qui marquèrent le repli de l’Empire Romain dans les années 380, ça ne se fait pas comme ça aussi facilement… Outre le déplacement historique et géographique, il faut encore passer d’un vainqueur qui scande Ynavi à un général qui succède au Grand Khan. En terme de jeux de mots, si Huns se pose là, l’autre s’efface. Vous voici donc, fier guerrier hunnique, respecté au sein d’une vaste tribu nomade d’origine turco-mongol autant qu’indo-européenne… mais pas du tout sans “h” puisque ce ne sont pas moins de 2 à 4 joueurs qui chercheront à ravir les plus beaux équipements et trésors issues des plus rapides razzias, aidés en cela d’utiles mercenaires en évitant les perfides fléaux !
Huns est la dernière nouveauté de La Boite de Jeu. Fneup, son auteur, avait donc un prototype initial appelé Ynavi qui avait été moult fois remarqués (Flip, CNJ, Ludinord, PeL), et qui déploie ses chevauchées sauvages sous les traits du plus en plus remarqué Anthony Wolff. Ce dernier marque d'une empreinte certaine le jeu en alliant à ses illustrations les défis du gameplay. C'est parti pour 45 minutes d'affrontements et filouteries !
Et un nain hun jouant à Huns, ça fait trois déjà, non ?
Commençons par configurer les cubes Richesse et les paquets de cartes suivant le nombre de joueur et la couleur. Arrêtons-nous sur les cartes qui, côte-à-côte, forment une frise. C'est peut-être Huns détail pour vous, et pourtant, cet élément reste toujours agréable à voir, et, un peu chamaniquement, elle déploie facilement une chronologie dans le sens où l'oeil, comme suivant un mouvement de caméra, reconstitue rapidement du sens, comme un début d'histoire, une ambiance, ce qui permet d'entrer dans le jeu par son thème.
Les cartes Chariot, futures prises à remplir de richesses, voient 4 d'entre elles révélées pour préparer nos butins futurs et enfin 2 sont piochées par chaque joueur et s'en vont rejoindre le plateau personnel.
Les tours s'enchaîneront ensuite, commençant immanquablement par la cérémonie du dé... (non, pas du thé... Rising Sun, c'est à côté !) : Le premier joueur lance les 5 dés reprenant les couleurs des cartes Richesses et les place sous la pile adéquat. Dans l'ordre du tour et jusqu'à épuisement des dés, chaque joueur va se munir d'un dé pour faire une des deux actions ainsi disponible. Le jeton Premier Joueur sera passé et tourne ainsi les chevaux jusqu'à l'épuisement d'un paquet ou des cubes Richesse d'une couleur.
Avec votre dé, vous pourrez piller autant de richesses, cubes de bois à la couleur du dé, qu'indiqué par ce dernier. Les valeurs possibles sont Huns, Deus ou Troyes. Ces richesses iront sur une seule carte, Mercenaire (pour le payer et l'activer) ou Fléau (en offrande pour s'en débarrasser) ou sur vos chariots pour les remplir. Sinon, à votre choix, vous piocherez autant de cartes du paquet idoine qu'indiqué par le dé pour en choisir une et la jouer.
Les Equipements (Bleu) viendront chez vous vous filer un coup de main, de la souplesse stratégique via leur effet ;
Les Razzias (Rouge) ont des effets plus puissant mais ne s'appliquant au moment possible choisi qu'une seule fois puis rapporteront un point de victoire (PV) à la fin de partie ;
Les Mercenaires (Vert), ce sont des effets permanents sans compter les PV... mais pour ça, il faut les payer, sinon ils entament votre réputation : chaque mercenaire non payé vous fait perdre 1 PV ! ;
Les Fléaux (Noir) se balance avec joie et délectation à la tête de vos adversaires et opéreront leur nuisance tant que l'obole divine (en cubes richesses) n'aura pas été payée. Notons qu'un joueur peut fuir le fléau qui lui tombe dessus, mais sa couardise lui vaudra une pénalité en fin de partie ;
Enfin, les Trésors (Jaune, bien sûr), classique source forte de richesse, posent une condition qui, respectée, rapporte autant de PV que le nombre de joueur.
En fin de partie, s'ajoute à ces razzias, mercenaires, fléaux fuis, trésors, X PV par chariot expédié (X étant le nombre de joueur) et quelques PVs supplémentaires pour les types de chariots remplis, différents ou en série. Et paf, un vainqueur !
L'huns, vaincu, canne ! L'autre, vainqueur, Khan !
Après Ilôs, La Boite de Jeu confirme avec Huns le "nez fin" tout autant que le travail de développement mis autour de leur sélection ludique pour des jeux édités en phase avec l'air du temps : Huns est fluide et dynamique et on rentre rapidement dans la partie avec une succession de choix simples mais tous procurant la petite dose de frustration qui voudrait tout faire : à la fois prendre des ressources mais aussi des cartes. Les tours s'enchaînent assez rapidement avec leur lot de couinages et autres techniques de pleureuses pour faire face aux interactions indirectes (choix du dé qui ne nous arrange pas forcément) ou directes (razzias et fléaux dans les dents) jusqu'au dénouement final, et ce n'est pas notre Tric Trac TV qui nous démentira.
Huns garde pour lui une certaine profondeur, qui vient avec le temps et l'expérience des parties : Savoir quelles cartes sont possibles et lesquelles fonctionnent bien entre elles ou contrecarrent l'effet d'une autre, éviter un comportement (et un choix de dés) finalement plus profitable à un adversaire suite à ces équipements ou ces mercenaires, déclencher la razzia à un moment peut-être moins profitable pour le joueur mais bien plus punitif pour les adversaires... Bref, largement de quoi donner envie de rejouer, avec un plaisir toujours présent, et de creuser le jeu, parties après parties, même si ce comportement n'est, lui, plus trop dans l'air du temps. Le jeu de Fneup ne prétend pas boxer dans la catégorie des poids lourds, mais le guerrier Huns, dans la catégorie mi-lourd, se pose bien là !
Saluons encore une fois la direction artistique et le travail d'illustration d'Anthony Wolff qui donne, à chaque carte, l'envie de la regarder, d'entrer dans l'illustration pour en connaître le bout d'histoire mis en scène, tout en ayant travaillé les couleurs pour lui garder sa teinte, permettant d'immédiatement la reconnaître comme provenant de tel ou tel paquet.
Un fort bon jeu, bien agréable, qui pourrait conquérir de nombreuses tables de jeu (sauf pour ceux qui, adepte du full contrôle froid couineront trop)... d'autant qu'on imagine très bien plein d'éléments pour varier et enrichir tout ça... là n'est pas encore le moment ! Revenons à l'hiver 453, à ce moment tragique où le grand Khan canne sans son Kho Huns dans un coin de la steppe... et jouons !
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Et bien oui, deux approved, en attendant, qui sait, le Tric Trac Approved si Monsieur Phal ou Docteur Mops nous rejoignent...