les défis et la difficulté

Un jeu qui ne proposerait pas de défi ne serait pas très intéressant, si vous saviez dès le départ que vous allez gagner, à quoi bon jouer ? Un bon jeu est donc un jeu qui propose une certaine échelle de progression, des défis à relever, et qui se renouvelle.

Bien entendu lorsque l’on parle de difficulté on pense immédiatement aux jeux coopératifs comme pandémie, or dans des jeux comme Agricola, les joueurs qui pourtant jouent chacun pour soi, doivent relever des défis proposés par le jeu, dans le but d’augmenter ses points et donc de remporter la partie. Dans la plupart des jeux, les défis sont représentés par les autres joueurs, pourtant il n’est pas impossible de cumuler les deux.

Il est donc essentiel de proposer des défis à relever à ses joueurs, et cela quelle que soit la nature du jeu. Pour cela il faut commencer par lister les défis, pour ensuite mieux voir le niveau de difficulté de chacun, il est également important de voir si ces derniers sont équilibrés et proposés au bon moment dans la partie. Il faut que ces derniers soient ni trop simple où le jeu semblera insipide, ni trop complexe où les joueurs seront très vite découragés. Les défis à relever doivent souvent impliquer l’utilisation de ressources afin de les résoudre, même si certains styles de jeux peuvent s’en passer (les jeux de mots ou d’énigmes par exemple). Ces ressources doivent s’acquérir au fur et à mesure, et non être offerte dès le début, si ces ressources découlent d’un choix c’est encore mieux. Il n’est pas bon de donner trop de choix aux joueurs, ni d’offrir la possibilité aux joueurs de tout pouvoir acquérir, les joueurs doivent faire des sacrifices, des choix. Rien ne doit être acquis.

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Descendance : un bon exemple de défis graduels et de nombreux défis.

Une fois ces défis relevés, les joueurs doivent être récompensés à la hauteur de leur effort, un défi complexe doit rapporter une récompense plus importante qu’un défi plus simple. Le nombre de points acquis ou une ressource rare peut être un très bon exemple de récompense. Comme l’or par exemple dans Catane Junior qui n’est pas accessible dès le début, mais seulement une fois une route construite. Ces récompenses peuvent également prendre l’aspect de personnages bonus, à la manière d’Oddville. Elles peuvent/doivent être unique ou tout du moins en nombre limité, si la récompense est rare ou unique, elle provoquera de la convoitise (qui ici est souhaitée et recommandée), et ainsi fera naitre un sentiment de rareté au sein des joueurs, et donc une course pour son acquisition.

Les défis (et els récompenses qui en découlent) doivent être équilibrés, sinon les joueurs choisiront les mêmes, et le jeu sera bancal. Si le choix n’est pas possible, les autres joueurs se sentiront lésés et délaisseront le jeu, surtout si la récompense est unique et puissante (à quoi bon continuer de jouer puisque ce joueur gagnera forcément ?). Mais attention au fur et à mesure que les joueurs progresseront il faudra proposer des défis de plus en plus complexes ou compliqués à atteindre, comme dans 7 Wonders par exemple, ou les dernières constructions (les cartes bleues) de l’âge III, et qui rapportent le plus de points, demandent énormément de ressources très diversifiées. Mais la récompense est là : un maximum de point !

Un piège à éviter : le fait de proposer des défis trop ciblés, c’est-à-dire qui demandent des ressources ou compétences bien spécifiques qui ne peuvent être acquis en cours de partie, mais qui sont par exemple distribués dès le départ. Il faut donc des défis variés, équilibrés ou proposant des alternatives. De même qu’il faut proposer un large choix de défis et donc de récompenses, trop peu de choix et le jeu semblera banal, trop simpliste, mais trop de choix perdra également le joueur, c’est donc un équilibre judicieux qu’il faut mettre en place. Afin d’aider à la visibilité, n’hésitez pas à codifier vos récompenses, ressources et défis, en leur donnant un code couleur logique et cohérent. Les récompenses simples pourraient avoir un fond vert, tandis que celles du rang supérieur pourraient en avoir un orange et les plus complexes un rouge. Ce code vert-orange-rouge est connu de tous et s’identifie très simplement, rendant ainsi le jeu plus simple.

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Augustus et ses récompenses au choix cornélien

Pour pouvoir effectuer ces choix, les joueurs devront savoir où ils doivent aller ou ce qu’ils doivent faire. Si le but à atteindre est spatial, celui-ci devra bien être indiqué, et surtout n’hésitez pas à ajouter des étapes avant d’atteindre ce but, comme dans Descendance où sur la route du voyage chaque ville visitée rapporte un bonus tandis que le fait de tous les visiter rapporte un maximum de points. Un bonus global sous catégorisé par des étapes rapportant des bonus.

Encore dans Descendance, le fait de poser un ouvrier pour le spécialiser permet de certes investir et donc perdre du temps, mais cela permet également de se perfectionner dans un domaine pour ainsi faire des économies sur la longueur.

Bien entendu tout ceci ira de pair avec d’autres interrogations pour le joueur comme : dois-je me dépêcher de récolter les premiers points et ainsi en accumuler le maximum, ou bien attendre et récolter au passage le bonus, au risque de me le faire souffler sous le nez ? Ce genre de choix on le ressent beaucoup dans le jeu Jaipur, un jeu à 2 où chaque joueur doit revendre des ressources. Mais lorsqu’un joueur parvient à en vendre plus de 3 en même temps celui-ci reçoit un bonus, qui est exponentiel. Cette question est donc fondamentale pour l’équilibre et doit être prise en compte. Cela pourrait être traité sous une forme plus militarisée avec : dois-je attaquer ou plutôt me défendre ? Le thème importe peu, l’équilibre est partout et ne doit pas être négligé. Si le jeu implique la récupération de pouvoirs au fur et à mesure de la partie, prenez garde à ce que ces derniers soit équitables et n’avantagent pas trop un joueur face à un autre, sauf si la prise de risque pour l’obtenir était plus grande.

Dans ce premier exemple, le nombre de ressources nécessaires pour avoir une récompense est identique au nombre de points récoltés, il n’y a donc aucun intérêt à attendre et accumuler, le jeu est plat sans suspens. La couleur est donc de mise.

Exemple 1 : pas de croissance des points

Ici par contre plus on dépense de ressources en une seule fois et plus el nombre de points récoltés est important, il y a donc un intérêt à amasser pour récolter plus. Mais attention il en faut pas du coup proposer que des gros défis, en pensant que les petits n’intéresseront plus, car ça bloquerait une grande partie du jeu, à cause du nombre de ressources nécessaires surtout en fin et début de partie, mais surtout cela retirerait du choix.

Exemple 2 : Il y a une croissance des points

La multiplication des ressources pourra entrainer la diversification des récompenses, et au lieu de rester sur une seule ligne, nous aurons alors un arbre des récompenses. A la manière de 7 Wonders avec les constructions gratuites.

Exemple 3 : plus concret avec 7 Wonders

Bien entendu le but final de tout joueur est de remporter la partie, pourtant il n’est pas exclu d’ajouter des objectifs importants en cours de partie ou juste avant de terminer la partie, afin de créer du suspens. Panthéon par exemple propose d’effectuer un calcul des points déjà acquis en cours de partie, ainsi les joueurs doivent être attentifs dès le début de la partie.

Un jeu équilibré et intéressant proposant proposera donc de manière transparente ou apparente de nombreux défis à ses joueurs, ces défis seront graduels, chacun apportant alors plus de points que son prédécesseur. Pour remporter ces défis, les joueurs devront la plupart du temps utiliser des ressources, qui seront plus ou moins faciles à obtenir. Les récompenses qui découleront de la réussite de ces défis devront être diversifiées afin de proposer plus de choix aux joueurs, sans pour autant les perdre. Un bon jeu devra intégrer tout ceci, ou du moins s’en inspirer.

Les défis et les récompenses qui en découlent sont donc les pistons d’un moteur bien huilé, sans eux le jeu ne peut avancer et le joueur pilote n’au aucune envie d’emprunter la route mystérieuse du jeu. Pensez-y !

2 « J'aime »

C'est intéressant effectivement. Gros joueur de Race for the Galaxy j'ai pu voir apparaître justement des défis (le plus de, le premier) dans les extensions. Et ça donne effectivement un plus à ce jeu.

D'ailleurs il est intéressant de voir des défis acquis (le premier) et d'autres qui peuvent être contestés tout au long de la partie (le plus de). Puisque tu en parles il me semble qu'Augustus emprunte exactement ce système il me semble avec quelques variantes intéressantes (le choix cornélien du moment où l'on réclame sa récompense en fonction du nombre d'objectifs remplis).

C'est aussi une manière de créer des interactions dans certains jeux qui manquent de confrontation directe entre joueurs.

Les extensions de Seasons et surtout la seconde à sortir va aussi dans ce sens.

Je n'aime pas du tout Descendance.

Je n'aime pas du tout RFTG.

Je n'aime pas du tout Augustus.

Merci d'avoir -peut-être- su pointer un critère me permettant de savoir à l'avance si un jeu me plairait ou pas.

bel article, merci.

Ca fait plaisir de voir fleurir des articles de ce style sur le site !

Merci pour le boulot !

Merci beaucoup pour vos retours encourageants. ^_^