[Great Western][Isle of Skye][Maracaïbo][Mombasa][Terraforming Mars]
Si vous êtes amateur d’eurogames, vous connaissez sans doute le nom d’Alexander Pfister. Il est notamment l’auteur d’Isle of Skye, de Mombasa et de Great Western Trail, ces deux derniers ayant remporté le Diamant d’or (devant Terraforming Mars notamment, excusez-moi du peu !), prix récompensant les meilleurs jeux « à l’allemande ». Maracaibo, son dernier jeu, s’inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs puisqu’il a terminé au pied du podium cette année. Les connaisseurs y retrouveront des mécaniques similaires à Great Western Trail. Petit tour d’horizon de ce qui vous attend…
Dans Maracaibo, vous incarnez un aventurier du XVIIème siècle à la tête d’un navire flambant neuf cherchant à tirer son épingle du jeu dans les Caraïbes. Vous naviguez de port en port pour livrer des marchandises, accomplir des quêtes, recruter des membres d’équipage, explorer la jungle, améliorer votre navire et combattre au nom des puissantes nations qui contrôlent ces mers.
Plateau de joueur représentant votre navire, paré à appareiller !
Chaque joueur dispose d’un plateau représentant son navire, d’une figurine bateau qui lui servira à se déplacer sur le plateau principal, d’un explorateur, d’espions et de marqueurs d’influence auprès des 3 puissances européennes. Chaque amélioration du bateau est recouverte par 2 disques qui seront à enlever avant de pouvoir y accéder. Les joueurs reçoivent des doublons, 8 cartes projet parmi lesquelles ils vont en planifier une et en conserver 4 autres dans leur main ; ils reçoivent également 2 cartes carrière et en gardent une. Le plateau central représente une carte des Caraïbes. On y place des tuiles ville qui changent d’une partie à l’autre, des tuiles quête, des tuiles combat et une carte histoire qui indique des conditions spéciales de partie (placement de quêtes et de tuiles héritage).
Le jeu se déroule en 4 manches. Les joueurs naviguent d’île en île grâce à leur pion bateau. Ils peuvent avancer d’une à sept cases. Selon le lieu où votre bateau s’arrête, vous avez différentes actions possibles. S’il s’agit d’une ville, vous pouvez effectuer une livraison de marchandise puis réaliser l’action de la ville. Les villages quant à eux ont des actions qui leur sont propres (notamment acheter des cartes projet ou des bâtiments de prestige), et vous pouvez en débloquer d’autres en faisant évoluer votre navire, et vous pouvez en réaliser un certain nombre en fonction de la quantité de cases que vous avez passées pour y accéder. Si une quête se trouve sur le lieu où votre bateau s’est arrêté, vous pouvez l’accomplir en défaussant les objets demandés pour obtenir la récompense. Enfin, si vous disposez d’un espion au port, vous pouvez réaliser son action.
Tant d'actions possibles mais le temps passe si vite !
Cependant, vous ne pouvez faire qu’une des actions disponibles sur le lieu où vous vous arrêtez. Par exemple, si vous avez un espion sur une ville, vous pouvez réaliser soit l’action de la ville, soit l’action de l’espion, mais pas les deux. En plus de cela, vous pouvez durant votre tour planifier une de vos cartes, ce qui signifie que vous ne pourrez plus la défausser pour sa marchandise ou son objet mais uniquement l’acheter, ou encore réaliser l’un de vos objectifs de carrière, qui vous octroient de nouveaux espions et des récompenses en argent et en points de victoire. Pour terminer votre tour, vous piochez des cartes afin de compléter votre main jusqu’à sa limite.
Selon les actions choisies, vous allez pouvoir retirer des jetons de votre bateau afin de débloquer de nouvelles actions et améliorations, faire avancer votre explorateur afin de gagner par exemple de l’argent, des points de victoire ou d’accomplir des quêtes, ou encore combattre au nom des trois nations présentes afin de les aider à étendre leur domination sur les îles tout en augmentant votre influence auprès d’elles.
Course à l'influence auprès de la France, de l'Espagne et de l'Angleterre
Une manche se termine lorsqu’un bateau arrive au terme du circuit. Il reste alors un tour à jouer à tous les autres. On procède alors à un décompte intermédiaire : chaque joueur peut acheter une carte de sa main ou recevoir des points de victoire, puis chacun reçoit ses revenus en doublons et en points de victoire, on retire les jetons de livraison des villes, on change la rivière de cartes projets, le bâtiment de prestige suivant est révélé et l’on vérifie les conditions de la carte histoire en cours. Puis une nouvelle manche commence. Au terme de la quatrième et dernière manche, on effectue un décompte final ; en plus de pouvoir acheter une dernière carte, les joueurs reçoivent leurs revenus de points de victoire, marquent les points de leurs cartes et bâtiments de prestige ainsi que des majorités d’influence auprès des nations. À cela se rajoutent des points de victoire selon le rang de noblesse dans chaque nation. Enfin, on résout une dernière fois la carte histoire. Le joueur ayant le plus de points de victoire est le plus grand aventurier des Caraïbes !
Dès la première partie, on comprend pourquoi Maracaibo a été sélectionné pour le Diamant d’or et fait un énorme buzz à Essen 2019. La mécanique est léchée, fluide mais propose de vrais choix tactiques. Déjà par le choix de l’utilisation des cartes projets : vaut-il mieux les acheter pour bénéficier de leur pouvoir, les défausser pour honorer des livraisons ou les défausser pour récupérer de précieux doublons (surtout en début de partie !) ? Ensuite, par le timing d’avancée de votre bateau : vous pouvez vous arrêter dans chaque port afin de réaliser plus d’actions, mais si l’un de vos adversaires prend trop d’avance, vous risquez de ne pas pouvoir livrer de marchandises ou de vous retrouver à rusher pour atteindre la fin du parcours en vous privant de nombreuses possibilités sur le chemin !
Exemples de cartes projets aux usages multiples
Même s’il s’agit d’un jeu « à l’allemande », les illustrations de Maracaibo sont loin d’être austères, contrairement à ce que l’on peut parfois voir (coucou M. Feld) et l’iconographie est d’une clarté lumineuse. Si vraiment vous êtes un peu perdu (vous le faites exprès !), des aides de jeu vous assisteront et tous les effets des icônes sont détaillés en fin de livret de règles. Si vous avez joué à Great Western Trail, vous ne serez pas dépaysé et retrouverez des sensations similaires : amélioration du plateau personnel, avancée de l’explorateur sur une piste (telle la locomotive), … Cependant, le système de gestion de main, la progression de l’influence des grandes nations et les cartes histoires apportent une nouvelle expérience très agréable. C’est comme si l’on était en terrain connu mais qu’on découvrait un lieu que l’on n’avait pas encore exploré !
Ce sentiment de se retrouver chez soi implique que les joueurs ayant pratiqué Great Western Trail entreront sans doute extrêmement facilement dans le jeu. Pour les autres, les règles sont parfaitement rédigées et ne laissent aucun point de côté ; un glossaire à la fin reprend toutes les iconographies et explique tous les effets de cartes en cas de doute. La durée de partie à 2 joueurs tourne autour d’1h30, il sera donc difficile d’y passer le même temps à 4, surtout si vous aimez prendre votre temps pour réfléchir, mais c’est bien souvent le cas dans ce genre de jeu, et c’est pour cela qu’on les aime d’ailleurs !
Quelle sera votre première destination ?
Et si vous avez envie de vous lancer dans une aventure épique, vous pouvez suivre l’histoire en mode campagne. Au fur et à mesure des parties, votre plateau de jeu se transformera à l’aide des tuiles héritage que vous aurez débloquées. De simples villages deviendront des villes, les conditions de navigation changeront et … Non, j’en ai déjà trop dit, à vous de découvrir la suite ! Et les amateurs seront ravis du mode solo dans lequel vous affrontez une IA modulable en 5 niveaux de difficulté, de quoi vous donner du fil à retordre !
Pour conclure, Maracaibo est un excellent Pfister. Les joueurs habitués à Great Western Trail retrouveront en partie les sensations de ce jeu tandis que les autres découvriront les mécaniques qui font le succès de l’auteur. Le jeu est très riche, la rejouabilité est garantie entre les cartes histoire et les cartes projets dont vous n’utilisez qu’une faible proportion à chaque partie. Si vous recherchez un très bon jeu de gestion, ou si vous avez apprécié les précédents titres de l’auteur, je ne peux que vous recommander Maracaibo qui pour moi coche toutes les cases, un must have !
Fiche technique
Éditeur : Super Meeple
Illustrateurs : Andreas Resch, Fiore GmbH et Aline Kirrmann
Nombre de joueurs : 1-4 joueurs
Âge : 14+
Durée : 90 minutes
Et pour rester dans l’ambiance : la bande originale de Tropico, un jeu vidéo dans lequel vous incarnez un dictateur des Caraïbes, ou un bon vieux Ricky Martin (guilty pleasure).