Avouez-le, vous avez toujours eu des envies de piraterie. Naviguer sur les flots, revendre vos marchandises volées dans les divers ports de la mer des Caraïbes, pourquoi pas même devenir corsaire et vous mettre à la barre d’une frégate pour chasser les pirates ? Vous vous dites que faire tout cela en même temps est impossible, eh bien laissez-moi vous répondre que non ! Black Fleet est là pour vous permettre de réaliser vos rêves.
Préambule :
Il s’agit du nouveau jeu de Sébastien Bleasdale, le précédent étant Keyflower. Ancien testeur de jeux pour Reiner Knizia, excusez du peu, il a un jour décidé de s’adonner à sa passion en créant des jeux dont Black Fleet, en évolution depuis de nombreuses années.
Les Space Cowboys publie ici leur second jeu après Splendor, moins familial et qui ne proposait pas un thème aussi immersif que Black Fleet. Un choix qui suit donc la ligne éditoriale annoncée par les éditeurs : se faire plaisir avant tout.
Les règles :
Black Fleet vous place aux commandes de 3 navires différents dans le but de récolter le maximum de doublons afin de payer la rançon de la fille du gouverneur (dernière carte objectif à acquérir).
Votre main se composera de deux styles de cartes :
Les cartes mouvement : on y retrouve trois informations de déplacement, chacune correspondant à un type de navire que vous contrôlez. En haut la frégate, jaune ou violette, accompagnée d’un chiffre, en dessous le bateau pirate toujours en compagnie d’un chiffre, et encore en dessous le marchand (lui aussi couplé à une valeur). Parfois figure également une icône qui représente la pioche d’une ou deux cartes ou la défausse d’une carte fortune de mer. Les joueurs auront toujours deux de ces cartes en main.
Les cartes fortune de mer : il s’agit de cartes bonus, qui vous permettront d’utiliser des déplacements, des pouvoirs ou encore des objectifs secrets. Il vous est en revanche interdit d’en posséder plus de trois. Vous les récupérerez grâce à certaines cartes de mouvement.
À votre tour de jeu, vous pourrez jouer une carte déplacement et autant de cartes fortunes de mer que vous désirez. Vous déplacerez ensuite vos différents navires dans le but de couler les autres pirates, de les dépouiller d’un cube de couleur ou bien pour livrer vos marchandises à bon port.
Votre pirate peut récupérer une marchandise sur les autres navires marchands pour ensuite l’enterrer sur une plage en échange de doublons. Votre marchand peut vendre et livrer des marchandises dans les ports les plus offrants contre des doublons. Quant à la frégate, elle pourra couler les pirates en échange de doublons (les pirates reviendront au tour suivant par l’une des mers extérieures).
Chaque port propose de racheter vos marchandises pour 2 ou 3 doublons, mais n’en accepte que trois types parmi cinq et ne vous permettra d’en charger qu’un seul type.
La dernière action disponible lors de votre tour de jeu sera d’acheter une de vos cartes développement, ce qui coûte entre 5 et 14 doublons. Chaque carte confère un pouvoir, particulièrement puissant et différent pour chaque joueur. Il n’y a pas d’ordre à respecter, si ce n’est que la carte de la fille du gouverneur ne peut être achetée qu’en dernier (ce qui vous offrira la victoire).
Voici ce qu’il vous sera interdit de faire :
- Piller un marchand et enterrer une marchandise dans le même tour ;
- Vendre des marchandises non acceptées par le port dans lequel vous faites escale ;
- Attaquer vos propres navires ;
- Attaquer un navire marchand avec une frégate ;
- Attaquer un bateau pirate avec le vôtre ;
- Avoir plus de 5 cartes en mains.
Le matériel :
Comment ne pas être immédiatement attiré par ces petits bateaux en couleurs et cette grande carte maritime qui nous invite aux voyages ? C’est tout simplement impossible. Les navires marchands comportent 3 encoches où seront entreposés les cubes, augmentant l’immersion, tandis que les pirates pourront en recevoir un. Les deux autres types de navires ne sont pas en reste et sont tout aussi réussis, le bateau pirate et son canon faisant son petit effet.
Le style graphique du jeu est également très agréable à l’œil, collant parfaitement au thème en lui apportant un côté humoristique qui dédramatise le tout. C’est aux petits détails que l’on voit que le travail a été bien fait et bien pensé, à l’image des cartes objectifs qui forment une illustration complète une fois mises bout à bout.
Les règles sont joliment mises en pages et proposent des visuels clairs, le plateau étant pour sa part tout à fait lisible. Je chipoterais un peu sur les ports de Salvador et Santa Claudia, qui sont un peu trop proches du bord et où il est plus difficile de déposer les cubes. En dehors de ce petit détail, tout est réussi, du thermoformage en forme de tête de mort aux pièces en métal qui nous rappellent que nous sommes bien dans un jeu de pirates.
Moi, conquis par le matériel de Black Fleet ? Pas du tout, voyons… Je suis faible et je l’avoue le matériel est souvent décisif à mes yeux, mais quoi de plus agréable que de jouer avec du joli matériel ? C’est l’un des avantages du jeu de société, ça fait parti du plaisir et, lorsque cela est bien fait, il est plus aisé de plonger dans le jeu.
Le ressenti durant les parties :
Pour être tout à fait honnête la première partie à quatre joueurs, bien que plaisante, ne m’a pas enchantée. J’ai trouvé le jeu très familial et finalement assez calme mais un peu déséquilibré, une partie de la carte étant peu empruntée. C’était chouette, sans plus. Puis j’ai joué une nouvelle partie à 4, subissant la fourberie de mes adversaires et ne pouvant que regarder, avec un certain suspens certes, le dernier duel offert par mes 3 adversaires au coude à coude. Autant dire que ça partait mal pour Black Fleet.
J’y ai ensuite rejoué à 3 joueurs et j’ai davantage apprécié le jeu : les joutes étaient équilibrées et le jeu très tendu, ma victoire n’ayant été acquise que d’une malheureuse pièce de plus. Ca roulait à la perfection, c’était fluide, plaisant et tout s’est joué sur les derniers tours.
Je vous vois venir, vous allez me dire que c’est parce que je suis mauvais perdant. J’ai pourtant eu une nette préférence pour cette configuration à 3 que j’ai retesté par la suite (comme à 4 d’ailleurs). Mes premiers doutes se sont alors estompés. Black Fleet est certes un jeu familial mais cela n’a rien de péjoratif et lui permet de se mettre à la portée du plus grand nombre.
J’ai donc révisé mon jugement sur et je suis très content de l’avoir fait car Black Fleet est un très bon jeu de pirate : prenant, proposant un rythme qui va crescendo, il fait monter la pression de tour en tour et n’oublie pas d’être stratégique avec ses 3 navires à déplacer, les cartes fortunes de mer capables de renverser une situation. Mon seul regret ira au fait qu’une fois mal embarqué vous aurez du mal à rattraper votre retard, les autres bénéficiant de leurs cartes de développement pour vous écarter encore plus et prendre de l’avance (sensation moins marquée à trois joueurs).
Que ce soit en famille ou entre amis, Black Fleet est tout aussi plaisant, par contre n’espérez pas conserver un esprit “gentillet” autour de la table car les coups fourrés sont nombreux. Comme le disaient les pirates, pas de quartiers !
La durée de vie :
Le jeu est sympathique, dynamique, et se met rapidement en place, autant de raisons qui le feront souvent sortir. Si en plus vous avez des enfants, je suis certain que le jeu sera usé à force d’être manipulé par des petites mains. De plus, les cartes objectifs sont toutes différentes, ce qui permet de bien renouveler les parties en modifiant la gestion de votre flotte.
Le jeu est également assez différent en fonction du nombre de joueurs. Plus tendu et moins changeant à 3, il devient plus chaotique et implacable à 4.
Voici quelques variantes que je vous propose pour modifier vos parties :
L’offre et la demande : lorsque vous livrez des marchandises dans un port, elles y restent quelle que soit sa couleur. Les ports vont alors petit à petit proposer des marchandises différentes qui pourront être choisies lors des réapprovisionnements ou des pillages. Si un navire arrive dans un port avec une marchandise qui ne peut pas y être achetée, elle est perdue.
La gestion des marchandises deviendra alors un peu plus complexe mais aussi plus réaliste, et les pillages prendront un côté plus stratégique.
Pas vu pas pris : lorsqu’un pirate enterre un butin, celui-ci ne retourne pas auprès du port concerné mais est retiré du jeu. Les ressources vont très vite commencer à manquer, rendant le jeu sera plus tendu.
Mon avis :
Comme je l’indiquais dans le paragraphe sur le ressenti, j’ai changé d’avis sur Black Fleet en découvrant peu à peu ses qualités et sa profondeur qui ne m’avaient pas sauté aux yeux lors de la première partie. Black Fleet possède un rythme de jeu intéressant, une rejouabilité importante grâce aux pouvoirs différents et un brin de stratégie machiavélique. Jouable avec un large public, aussi bien au niveau de l’âge que des joueurs potentiels, Black Fleet est un très bon jeu de pirates et, de manière plus générale, un bon jeu, possédant un matériel qui saura vous plonger immédiatement dans l’ambiance.
Alors, allez-vous résister à l’appel de l’océan ?
Merci à Chips pour sa correction.
Plus de photos sur la page facebook Les 1D Ludiques.