[Theseus : La Station abandonnée]
Dans une ambiance proche du film Alien, vous voici coincé dans une station orbitale abandonnée. Mais ce lugubre lieu n’est pas votre seul souci car vous êtes perdu, certes, mais pas seul. Les marines, les aliens, les petits gris et les scientifiques se partagent cette station qui vogue à la dérive. Mais dans ses entrailles se cache une autre menace : Pandore. La loi du plus fort ou du plus instruit est la seule manière de vous échapper entier de cet enfer.
Theseus : La Station abandonnée
Un jeu de Michal Oracz
Illustré par Tomasz Jedruszek, Michal Oracz, Mariusz Gandzel, Piotr Foksowicz
Publié par Iello
2 à 4 joueurs
A partir de 8 ans
Langue de la règle: Française
Durée: 45 minutes
Prix: 40,00 €
Préambule :
Michal Oracz est l’auteur de Neuroshima Hex, un jeu de confrontation dans un univers post apocalyptique pour 2 joueurs, qui possède de très nombreuses extensions et qui fut adapté sur tablette. On lui doit également Witchcraft, un autre jeu de bataille, mais entre magiciens cette fois-ci. Iello, l’éditeur du jeu, est dans la place depuis quelque temps déjà, proposant une large gamme de jeux, que ce soit en petites boîtes pour des jeux de cartes, ou des boîtes plus imposantes pour des jeux plus costauds. On retrouve dans leur catalogue Andor, Smash Up ou encore King of Tokyo.
Règles :
Theseus n’est pas un jeu complexe à prendre en main, cependant il faut bien lire les règles et ne pas sauter de lignes pour ne pas se perdre. Il propose plusieurs niveaux de jeu, ce qui n’est pas expliqué d’emblée, mais au fil du livret est proposée une version allégée pour découvrir celui-ci, avec l’ajout par la suite de cartes plus puissantes. Il propose également de jouer avec la cinquième faction, Pandore, qui propose un gameplay bien différent des autres, à tester une fois que vous connaissez bien le jeu. Je trouve l’idée de proposer plusieurs niveaux très intéressants, mais pas assez mis en relief dans les règles. Je pensais donc normal de vous en parler avant de vous expliquer plus en détails les règles, même s’il s’agit d’un survol et que la lecture complète de ces dernières reste indispensable. Le livret vous explique le jeu pour jouer à 2 ; pour 3 et 4 joueurs les modifications sont précisées à la fin.
Commençons par le but, qui va être d’avoir le plus de points de vie en fin de partie ou de connaissances si vous jouez les scientifiques ou les petits gris. Une fois votre faction choisie, vous allez récupérer vos 3 unités (qui possèdent 2 côtés, une version de base avec laquelle vous débutez et une avancée avec plus de pouvoirs) et votre deck de 15 cartes. C’est ici que vous pourrez modifier la difficulté, en ajoutant ou non les cartes de niveaux plus élevés. On place ensuite les plateaux qui composent la station (3 communs au jeu, et un par faction) tout autour du plateau de vie et connaissance. Puis chaque joueur place 2 unités sur n’importe quelle salle de son secteur (un secteur est découpé en 4 salles) et pose l’unité restante sur la salle de n’importe quel autre secteur.
Un tour de jeu se découpe en 4 phases :
Phase de mouvement : on déplace l’une de ses unités. Celle-ci pourra se déplacer d’autant de secteurs que le nombre d’unités présentes dans son secteur de départ. S’il y a 3 unités (à vous ou à l’adversaire), vous pourrez vous déplacer de 3 secteurs par exemple.
Phase des cartes action : une fois arrivé sur un secteur, il se peut que cela déclenche un piège qui doit être résolu en priorité, sinon le joueur résout les cartes action du secteur où il vient de mettre les pieds.
Phase d’action du secteur : chaque secteur du vaisseau dispose d’un pouvoir. Le couloir permet de réaliser un assaut, l’atelier de déplacer une seconde unité et enfin la salle de contrôle de faire dysfonctionner une carte action, donc de la rendre caduque. Si vous arrivez sur votre secteur, vous pourrez gagner une amélioration, qui pourra servir pour l’une de vos unités ou cartes.
Phase de planification : enfin une fois tout ceci effectué, vous pourrez effectuer une de ces actions : mettre une carte en attente (chaque secteur disposant de 0 à 2 emplacements de mise en attente), activer une de vos cartes et la disposer sur une case libre d’un secteur, ou enfin défausser une carte adverse en attente pour en mettre une des vôtres.
Si jamais lorsque vous arrivez dans un secteur celui-ci comporte déjà 4 unités, vous pouvez en éjecter une dans l’espace (sur le plateau de vie et connaissance) et effectuer un assaut éclair, qui va toucher toutes les unités à portée de tir. La seconde manière d’attaquer est de faire un assaut à partir du secteur couloir. Dans ce cas toutes vos unités attaquent les autres unités leur faisant perdre des points de vie. Pour les cartes bonus, vous les récupérez lors de la phase de planification ; elles peuvent être jouées n’importe quand pendant votre tour.
Fin de la partie : lorsqu’un joueur ne peut plus approvisionner un emplacement en attente, le pion spécifique avance d’une case. Lorsque celui-ci arrive sur zéro, la partie prend fin. On compte alors les points, et le joueur qui en possède le plus gagne la partie. Pour les scientifiques et les petits gris on additionne les points de vie et de connaissance.
Voici un aperçu assez léger des règles, il faut ajouter à ceci les pouvoirs des cartes, très explicites dans leurs textes. La règle est assez bien faite (attention à la police parfois trompeuse pour les schémas [en quoi ?]) et propose même des conseils de jeu, ainsi que plusieurs niveaux ou façons de jouer. Prenez donc bien le temps de tout lire avant de vous lancer dans une partie.
Matériel :
Une véritable station spatiale dans une boîte, du jamais vu ou presque. La boîte est richement garnie : on y trouve 7 plateaux secteurs, un par faction plus 3 appartenant au vaisseau en lui-même, ainsi qu’un autre plateau pour compter les points de vie et de connaissance. Chaque faction dispose de pions et d‘un deck de cartes qui va vous permettre d’effectuer des actions, ainsi que quelques jetons additionnels selon le peuple choisi, et des cartes bonus. Ajoutez à ceci une règle bien garnie, et vous obtenez l’ensemble du matériel de la boîte.
La station est bien rendue, il est assez aisé de se prendre au jeu et de reconnaître les différents secteurs grâce aux icônes. Icônes qui sont assez nombreuses et qu’il faut retenir petit à petit pour ainsi bien profiter du jeu. Les illustrations, bien qu’étant classiques pour un jeu de science-fiction, sont fonctionnelles et de très bonne facture. Les cartes de petites tailles sont imprimées des deux côtés ce qui permet de les consulter facilement. Mes regrets iront au fait qu’il n’y a qu’une petite carte de rappel des actions de chaque tour de jeu, une par joueur aurait été utile. Des figurines pour nos factions auraient été un plus bien agréable, même si leur absence se comprend parfaitement en terme de coût. Jouer avec des figurines dans ces sombres couloirs avec une lumière tamisée aurait été fort plaisant, peut-être dans une prochaine extension ou une boîte à part, moi en tout cas je suis pour.
Ressenti durant les parties :
Theseus propose plusieurs expériences en une, que ce soit avec les différentes factions ou selon le nombre de joueurs. A 2 joueurs le jeu tourne très bien, devenant un jeu de confrontation assez méchant où la moindre erreur de calcul ne pardonne pas. On cherche à optimiser ses coups et surtout à aller assez vite, car notre deck ou celui de l’adversaire est vite épuisé, annonçant la fin de la partie. Ce qui m’a étonné dans cette configuration, c’est la rapidité du jeu, la partie se termine assez vite, il n’y a pas de temps mort, mais ce n’est pas pour autant une mauvaise surprise, bien au contraire.
A 3 joueurs le jeu change pas mal, proposant toujours des combats, mais l’équilibre qui cimentait le jeu à 2 peut ici s’effriter pour voir apparaître une alliance 2 contre 1. Heureusement, Oracz a prévu le coup en introduisant Pandore, qui prend tout son sens à 3 joueurs, la meilleure configuration pour y jouer. Vous serez alors quasi automatiquement 2 contre 1, unis contre une menace violente qui dispose de pouvoirs vraiment puissants.
A 4 joueurs le jeu devient plus complexe, mais aussi plus virulent, les combats se faisant plus nombreux de même que l’attente entre les tours. Cela n’est pas énorme, mais entre le moment de jouer et votre prochain tour, beaucoup de choses ont le temps de changer. Il faudra donc constamment s’adapter à la situation et ne pas jouer trop vite. Par contre la partie est ici plus longue, c’est logique, et le côté escarmouche et cache-cache dans le vaisseau est aussi plus présent. Du coup, toutes les factions sont présentes sur le plateau, et il est intéressant de voir comment chacun joue, ainsi que les différences que cela implique. Le jeu n’en est pas réduit à de simples combats, et cela est très plaisant. En équipe le jeu est tout aussi intéressant, même si celui-ci se concentre plus sur le combat, mais aussi la tactique. Le jeu qui est assez silencieux devient alors plus loquace. C’est une autre expérience de jeu tout aussi intéressante que de jouer chacun pour soi.
Un petit mot sur les factions qui sont au nombre de 5. On trouve les marines, les bourrins du jeu qui n’hésiteront pas à faire parler la poudre, une faction brutale, très portée sur les combats. Les scientifiques, qui tenteront d’obtenir des informations et des points de connaissances à l’aide de cartes d’installations de surveillance ; le combat n’est pas leur fort. Les petits gris, la version alien des scientifiques, qui doivent eux aussi gagner des points de connaissance, mais qui peuvent aussi utiliser les autres factions et se défendre. Les aliens qui sont plus agressifs et rapides, privilégiant les déplacements entre les secteurs et les attaques surprises. Et enfin Pandore, une faction très virulente qui se déploie et se multiplie très rapidement ; en contrepartie elle ne possède pas de cartes, mais copie celles des adversaires.
Mon seul regret ira au manque de menace extérieure, qui aurait ajouté un stress supplémentaire et pimenté un peu la partie, de manière hasardeuse et donc imprévisible. Certes Pandore joue un peu ce rôle, mais celle-ci doit être jouée par un joueur, ce qui oblige quelqu’un à représenter cette menace, et surtout ce qui retire le côté “on se bat entre nous mais aussi contre le danger qui rôde”. Non si je l’évoque ici, c’est parce qu’à mes yeux cela pourrait être un plus dans une future extension, ou bien si un joueur décide de s’y coller, pour mon plus grand plaisir. Cela n’empêche pas Theseus d’être très plaisant, calculatoire et fun, tout ceci avec un thème plutôt bien rendu, et des parties très équilibrées quelle que soit la configuration.
Durée de vie :
Theseus propose de nombreuses configurations et façons de jouer, c’est pour moi sa grande force. Il sera donc aisé d’y revenir pour tester les différentes manières de jouer. A 3 ou 4 il s’agit d’un jeu sympathique de confrontation, de guessing et de programmation, tandis qu’à 2 joueurs il sera plus exigeant et proposera une autre expérience tout aussi intéressante. Attention cependant à choisir des factions équilibrées si vous ne possédez pas le même niveau. Mais contrairement à d’autres, il peut très bien se jouer en duo, bien au contraire il s’agit là d’une excellente configuration.
Il existe plusieurs jeux de survie dans l’espace, mais Theseus arrive à tirer son épingle du jeu, en proposant une expérience assez immersive, et surtout originale. Malgré ses mécaniques complètes il propose des parties assez rapides. Le fait de proposer plusieurs factions est également un plus qui donnera envie de revenir sur le jeu afin de toutes les tester. Donc oui, si vous accrochez aux jeux typiquement SF vous devriez aimer Theseus et le faire sortir de sa boîte assez régulièrement.
Mon avis :
Autant le dire d’emblée, pour une raison qui m’échappe je croyais que Theseus serait plus coopératif, tous contre un, mais ce n’est pas le cas (enfin pas initialement). Mais pour autant le jeu ne m’a pas déçu, bien au contraire. J’ai même été surpris de sa qualité et sa rapidité à 2 joueurs. Il s’agit d’un jeu bien plaisant pour une fin de soirée à 2. Même si le jeu n’est pas facile à prendre en main pour des enfants, ces derniers après quelques tours ont vite fait de comprendre les mécanismes et de vous surprendre. Vous pourrez donc le sortir également en famille ou entre amis où celui-ci devrait bien plaire. Theseus est une expérience, un jeu très complet qui ne laisse pas sur le carreau certaines configurations, et se paie même le luxe d’introduire des concepts en plus pour renforcer la durée de vie et renouveler le jeu. Un très bon jeu que je vous recommande.
Merci à Quilicus pour sa correction