[Botswana][Huit minutes pour un empire]
Le jeu dit “minimaliste” titille, et depuis déjà un certain temp en fait (et le vénérable Docteur Mops de citer par exemple un Flinke Pinke de Knizia en 1994 avec 5 jetons et 25 cartes pour simuler un processus boursier), les cerveaux de nos auteurs. Et les jeux de civilisations n’y ont pas échappé comme “Huit minutes pour un empire” par exemple.
Celui qui arrive de chez Portal, traduit par Edge, est signé de Kristian Čurla (avec un petit quelque chose en plus sur le C, mais désolé, mon clavier ne fait pas... ah ben si, tiens ?!?) dont c'est le premier jeu édité. Kristian Čurla s'affronteront pour bâtir le plus bel empire au bout de trois générations. Normalement, Kristian Čurla, vous saurez qui a réussi... et tout ça avec seulement 18 cartes !
Une civilisation en deux temps, trois mouvements
Les trois manches sont très simples puisqu'elles se résument en un draft des 5 cartes que vous avez en main en début de manche. Mais à 10 cartes par manche, ça fait 30, çà, non ? Et bien pas du tout ! Parce qu'à l'issue de chaque manche, une des cartes que vous avez jouées sera marquée d'un jeton "Relique du passé", un bâtiment qui restera vôtre jusqu'au bout de la partie, trace des différentes âges de votre empire. Une deuxième carte parmi les cinq cartes jouées sera, elle, défaussée... et là encore, pour le reste de la partie, bâtiment détruit et perdu à jamais dans les mémoires.
Chaque joueur piochera donc deux cartes pour compléter les trois qui lui restent en main et hop, c'est reparti. Au final, 10 cartes plus 2x2 cartes piochées pour la manche 2 et idem pour la manche 3 font bien 18 cartes. Elles seront donc toutes jouées, pesées et soupesées pour savoir laquelle jouer, laquelle ne pas laisser à l'adversaire, laquelle garder pour la suite... Bref, une succession de dilemme !
À chaque fin de manche, les cartes jouées sont décomptées et le plus grand total l'emporte à la fin des trois manches.
Des cartes à points
Ces cartes sont de 5 couleurs, à raison de 3 cartes dans chaque famille, chacune permettant de marquer des points en fonction d'une autre couleur : 3 points de victoire pour chaque carte de telle couleur ou 7 points de victoire pour la majorité dans telle couleur, chaînées de façon différentes dans ces deux séries (vert, rouge, rose, jaune, bleu et vert, jaune, rouge, bleu, rose). La dernière carte dans chaque couleur est différente et demande une combinaison (de 2,3 ou 5 couleurs), permet de rentabiliser vos misères en couleur ou de remporter les égalités de majorité. Les 3 dernières cartes sont sans couleur : Si l'une permet de doubler le montant de votre (vos) couleurs la plus nombreuse, l'autre vous permet de gagner des points si vous avez le plus de couleurs en un seul exemplaire et la dernière de maximiser vos points si vous remportez plus de points en une seule carte que votre adversaire.
Avis en 18 lignes
Les illustrations d'Artur Sadlos, Krzysztof Ostrowski, Blake Rottinger, Tomasz Jedruszek et Dan Pellow ont une patte, une couleur, une sorte de grandeur qui fait presque regretter que le grand format des cartes ne soient pas encore plus grand pour en profiter davantage.
La teneur des parties garde un bon ratio entre sa durée et les petits choix drastiques (majorité sur trois cartes... carte à garder pour la suite... ) à faire à chaque draft de cartes. Les points, à part grosse erreur de sélection, se tiennent et parfois les stratégies construites sur les trois manches amènent à un retournement de situation à quelques points sur la dernière manche. De bons p'tits choix permanents, des parties rapides donnant envie de faire la belle pour maximiser encore son score, illustrations inspirantes... un bon p'tit jeu à deux, vraiment !... Seulement....
Seulement le côté Civilisation s'efface quasiment. Les titres des cartes et leur effet n'ont pas vraiment de lien avec la couleur (Temple, Forteresse, Jardin, Palais et Bibliothèque) et la fonction du bâtiment. Pas vraiment d'impression donc de bâtir un civilisation en l'axant plutôt politique ou militaire ou culturel. Tout au plus les cartes gardées d'une manche à l'autre et le fait que les bâtiments puissent être chez soi lors d'un tour et chez l'adversaire lors du tour suivant (comme les conquêtes qui vont et viennent) permettent de se rattacher au thème avant de repartir sur "bon, là, il me faut une carte rose et bleu pour scorer un max"...
Si le jeu est bien bon et tactique, avec un vrai intérêt alors qu'il n'y a que 18 cartes à disposition, ce n'est pas tant pour l'empire que l'on construit que pour ses mécanismes et les choix à faire. Peut-être finalement qu'un autre thème, avec des va-et-vient incessant au cours des manches aurait eu plus d'efficacité. En attendant, reste le plaisir de faire une (ou deux... ou trois) p'tites parties sur le pouce.