Si l'Oulipo a formulé cette idée de "plagiat par anticipation" c'est bien pour mettre en avant la difficulté que pose la notion même de plagiat en littérature, et de manière générale celle de propriété intellectuelle, concept à la fois nécessaire (pour la survie des auteurs) et abusif, car peut-on vraiment être propriétaire d'une idée, d'un sujet, d'un thème littéraire — ou ludique ?
Ce qui me paraît plus gênant, c"est que Frédéric Henry se déclare incompétent en matière de jeu, et révèle que son éditeur l'est tout autant.
Cela n'empêche pas de créer, mais c'est s'exposer justement au plagiat, ainsi que le faisait remrque un auteur russe des années 20 :
"Les jeunes écrivains, et même ceux qui plus tard deviennent bons, sont très portés au plagiat, autrement dit à l’emprunt de formes qui ne leurs appartiennent pas.
[…] Les jeunes écrivains de province expédient régulièrement à la rédaction des textes extrêmement célèbres, sous une forme à peine remaniée. Et ce n’est nullement par malhonnêteté, mais parce qu’ils absorbent ces œuvres en bloc et que lorsqu’ils veulent écrire quelque chose eux-mêmes, ils régurgitent le texte d’un autre, sans rien y changer que les noms de famille. C’est pourquoi, si l’on tient à conserver son originalité d’auteur, il faut lire non pas un peu, mais beaucoup, et surtout lire en décortiquant le texte des autres, en l’analysant, en s’appliquant à comprendre la raison d’être de chaque ligne, et quel effet l’auteur a compté qu’elle produirait sur le lecteur"