Au-delà du divertissement : Interview de Henri Kermarrec et Julien Prothière au sujet du Manifeste métaludique

Y a aussi Toussaint Louverture et la révolte des esclaves en Haïti…

1 « J'aime »

Moi je veux bien parler sciences, bon, ça me semble carrément H.S ici, mais s’il vous plait, quand vous parlez d’épistémologie des shs évitez de faire croire que ces dernières sont des sciences “poppériennes”, la reproductibilité et la falsifiabilité ne peuvent évidemment pas s’appliquer à des sciences essentiellement de terrain.

Les sciences sociales tirent leurs particularités de leur historicisme, donc leur capacité à penser leur objet sur le temps long. Dire que les shs se basent sur du déclaratif ou autres index, c’est oublier qu’elles partagent un socle commun théorique basé sur une construction transversale de leur objet. Parler de l’histoire des femmes par exemple, est commun bien évidemment à l’histoire mais aussi à l’anthropologie, à la sociologie etc… Toutes partagent un même socle de connaissances, et toutes ces connaissances passent par la validation par les pairs. Bien évidemment, comme vous le dites, leurs objets restent mouvants, mais justement l’historicité permet de comprendre d’où on part dans l’idée de comprendre vers ou on va, et là c’est le travail des chercheurs du présent, de terrain, sociologues mais aussi anthropologues. Cela fait quand même depuis les années 60-70 que le regard dominant sur l’épistémologie des shs est à voir du côté de Passeron et sûrement pas de Popper.

2 « J'aime »

Bonjour gregorsamsa,

méta analyse
sciences poppériennes
falsifiabilité
historicisme
construction transversale
objets mouvants
Passeron

C’est comme de la poésie DADA…

Et j’aime ça !

Bons jeux à toi.

3 « J'aime »

J’ai pas dit que ce n’était pas validé ni sérieux. J’ai dit que c’est plus compliqué que de compter les globules blanc d’un chimpanzé, that’s all.
(Oui c’est HS mais pour le coup le manifeste je pense qu’on a dit 200x tout ce qu’il y a à dire dessus : il y a ceux qui ne supportent pas qu’un texte leur dise quoi faire ou penser, et il y a ceux qui maîtrisent le lâcher prise :grin: Donc bon les digressions me semblent presque salutaires ici :wink: )

J’adore vous digressions. J’y connais presque rien en sciences humaines , c’est super intéressant de suivre ces échanges comparatifs avec les sciences physiques que je connais bien mieux…

PS : les neuro sciences cognitives vous les situez où du coup ? C’est du tout dur popperisable ou du tout mou déclaratif et historiciste ?

J’ai un peu de mal à cerner les limites précises de ce champ disciplinaire.

De manière générale la biologie c’est un peu le cul entre deux chaises. On y étudie des objets issus d’un processus historique, mais il est possible d’intervenir expérimentalement sur les dits objets. C’est donc exactement comme la physique en fait :grin:

(n.b: un soupçon de mauvaise foi peut s’être infiltré dans ce message)

À noter que l’expérimental existe aussi en shs, même si il est difficile pour la sociologie ou l’anthropologie d’étudier des sociétés “sous cloche” d’oû le peu d’intérêt. Par contre en psychologie cette méthode est beaucoup plus répandue, l’expérience de Milgram en tête. Après l’expérimentation est avant tout une méthode, avec ses avantages mais aussi ses limites.

on parle d’un tirage de 200 auteurs dans une population globale.
Ce tirage serait manifestement une preuve que le milieu du jds est phallocrate.
Je ne puis le dire et je ne pense pas qu’on puisse déduire cela de ces données.
Dejà le problème de la fréquence de base : un tirage parmi combien ? Qu’en est-il de la répartition de tous les tirages ? Il y bien des activités humailes où il y autant d’homme que de femmes et où la proportion est l’inverse est ce que statistiquement celà ne peut pas se concevoir (écart à la moyenne) sans crier au sexisme ?
Paul le poulpe a réussi a deviné tous les résultats des matchs de foot de la coupe du monde, doit-on en déduire qu’il est médium ?
Le petit soucis chez Paul c’est peut être la non prise en compte de la fréquence de base : Sophie la girafe, Léon le cameléon, Pierre le ver de terre ont peut être quant à eux échoué lamentablement …
Paul a réussi mais combien ont raté ???
Certes quand on regarde une occurrence le résultat semble extraordinaire (la probabilité qu’il advienne est très faible). Mais rien d’étonnant quand on multiplie l’expérience d’avoir de temps en temps des résultats qui s’éloignent de la moyenne
Sur des milliers, voir des dizaines de milliers de groupes de 200 personnes tirées au hasard combien s’éloigneront de la parité ?
Il faudrait idéalement faire une régression vers la moyenne (c’est excessivement rare de voir ce genre de pondération dans des études en sciences humaines) donc oui les études en sciences humaines ne sont pas toujours l’alpha et l’oméga.
Le p-hacking est fréquent (cf crise de la réplication) et les biais sont courants.
Les profs de stats en psycho aiment à dire que les études en psychologie cognitive permettent de savoir comment pensent les étudiants en psychologie (la plupart sont faites uniquement sur les étudiants) !
Le biais de généralisation est courant.
Dès fois on a raison de géneraliser parfois non.
Pendant longtemps on a émis des hypothèse par exemple sur le fait que quand on demande de donner un chiffre au hasard entre 1 et 10 la répartition des réponse n’est pas homogène et le chiffre 7 est significativement plus cité.
Pendant des années on a donné de nombreuses explications avant de se rendre compte que ce résultat n’était pas du tout généralisable et que dans d’autres groupes c’était le 3 ou le 5 qui étaient le plus cité.
Pour revenir à Paul le poulpe : peut être n’est ce pas que le hasard mais dès lors est-il vraiment médium ? N’y a-t-il pas d’autres hypothèses ?
Généralement en science on évite d’émettre des conclusions via une simple observation : on essaye ensuite d’infirmer l’hypothèse émise (la médiumnité ou le côté phalocrate des jds) et c’est parce qu’on n’arrive pas à le faire qu’on va conclure que celle-ci est probablement vraie.
Peut-être Paul est-il juste attiré par la couleur des drapeaux des vainqueurs ?
Quant à déterminer les causes et les conséquences ce n’est pas toujours chose aisée.
On utilise les critères de Bradford Hill mais il existe bien des exemples où ce n’est pas si évident que cela.
Les enfants qui ont le plus de punitions sont ceux qui sont les plus turbulents mais est-ce parce qu’ils sont turbulents qu’ils ont des punitions ou est-ce les punitions qui les rendent plus turbulents ?
C’est parfois le problème des études observationnelles : difficile de différencier les causes et les conséquences.
Quant à la différence science dure vs molle il ne me semble pas que soit une différenciation entre sciences à forte prédictibilité contre sciences imprécises dans leur prédictions.
En physique il y a des domaines peu prédictibles (volcanologie, météorologie) et pourtant ce sont des sciences dures.
Le terme molle vs dure c’est avant tout une différence sur le champ d’application de celles-ci : les sciences de la matière et les sciences de systèmes construits par l’homme qui sont immatériels (économie par exemple).
Et je suis d’accord que ces termes sont désuets : les neurosciences ont clairement rendu “matériels” des champs entier de la psychologie cognitive et avant de connaitre les déterminismes “physiques” de celle-ci cela ne faisait pas des résultats de la psychologie cognitive une forme de sous science.
D’ailleurs les critères de démarcation entre sciences et pseudo sciences ne sont pas si simples que cela (falsifiabilité, généralisation, prédictibilité peut être).
La science est un processus institutionnel avant toute chose et les paradigmes d’autrefois ne sont plus ceux d’aujourd’hui.
Bref vous émettez une hypothèse à partir d’une donnée et vous proposez de mettre en place des mesures (c’est une démarche purement prescriptive) mais avant de dire qu’il faut s’en remettre aux décisions de Paul le poulpe pour nos actions futures il serait peu être bon déjà de tester l’hypothèse que celui-ci est vraiment médium me semble-t-il …
Avant d’instaurer un quota, de punir les auteurs masculins dans le jds, de sanctionner les maisons d’éditions qui ne font pas preuve de parité il faudrait peut être déjà prouver que ce déséquilibre est en effet une expression d’un sexisme patent …

Ce message me paraît surtout être celui d’un homme se sentant menacé qu’on puisse émettre une telle hypothèse… Certaines femmes du milieu pro pourront vous en parler du sexisme ambiant et de l’ambiance boys club si vous voulez, posez leur la question. Elles le vivent, pas besoin des sciences pour ça. Et puis cette façon de m’inventer des propos, sérieusement, je n’ai jamais dit et ce à aucun moment qu’il fallait instaurer des quotas ou punir qui que ce soit, c’est ridicule d’en arriver à ce genre de procès d’intention, franchement.

Je ne conteste pas qu’on puisse émettre cette hypothèse (le monde du jeu de société est sexiste), je dis juste que le fait qu’il y ait plus d’auteurs que d’autrices ne me semble pas un argument suffisant pour affirmer que cette hypothèse est vraie c’est tout.
Je me méfie des chiffres et surtout de ce qu’on leur fait dire.
A partir du moment où une activité est principalement féminine doit on dire que les personnes qui font cette activité sont d’affreuses féminines castratrices ?
Je ne suis pas sûr que ce soit le cas des nonnes qui vivent dans le couvent de Bénédictines à 60 km de chez moi … Bon ok, c’est caricatural mais est-ce que il y a une corrélation parfaite entre la proportion d’homme pratiquant une activité et le sexisme qui y règne ?
Je ne me sens pas vraiment concerné par le sexisme dans le monde du jeu de société, je suis joueur mais je ne connais pas plus ce monde que cela.
La seule vision que j’ai de celui-ci c’est ici et j’ai plutôt l’impression que les gens ont des idées plus progressistes que réactionnaires sur les sujets sociétaux tel que l’identité de genre ou la parité homme/femme.
J’ai bien conscience que ce sont des liens para sociaux et qu’ils ne reflètent pas la réalité.
J’ai bien conscience aussi que la communauté trictracienne est un microcosme et qu’il peut très bien ne pas refléter la réalité du monde du jeu de société.
D’ailleurs j’ai surtout l’impression que le “monde du jeu de société” est une chimère : cette communauté existe-t-elle vraiment ? Il y a un secteur industriel structuré et des consommateurs mais peut-on parler du monde de la brosse à dent sous prétexte que nous ayons tous en commun d’acheter ce bien de consommation ?

Quelle hypothèse? En lisant ton pavé à la fin j’avais un peu oublié le reste :sweat_smile:

C’est marrant que vous preniez comme exemple les “nonnes” pour parler d’un milieu majoritairement féminin, quand on sait la vie qui leur est imposée par l’église, institution patriarcale par excellence.

En fait, le tout n’est pas de savoir qui est en majorité ou en minorité dans un milieu, l’important est qui à le pouvoir et comment un milieu social est influencé très directement par ce qui. Vous n’auriez pas pu me donner meilleur exemple que celui-ci pour rebondir.

Je ne crois pas qu’il y ait de communauté du brossage de dents ? Qu’il puisse y avoir des afficionados technophiles des dernières brosses électriques ne m’étonnerait pas cependant, mais l’industrie du jeu est moteur dans la création de communautés de pratiques, comme celle du JV ou toute autre industrie du divertissement.

Donc par conséquent si l’expression “monde du jeu de société” est nébuleuse et pourrait être précisée, on sait quand même de quoi on parle. Le milieu du jeu de société est tout petit : industriels, joueurs et joueuses, influenceurs, influenceuses peuvent se côtoyer, notamment à travers les festivals et ces gens discutent d’une même pratique, pratiquent la pratique en question, en discutent, bref, voilà de quoi on parle quand il est question de “monde du jeu de société”.

Je mettrais cette phrase au passé. Il est loin le temps où essen était dans un petit hall pas plein, cannes open bar et essentiellement belote-scrabble-echecs, ou plus récent le PEL dans un petit boulodrome…

Oui, le milieu a grossi c’est une évidence, mais par rapport à d’autres industries, pour prendre un parallèle facile, le JV, on en est trèèèèèèès loin encore. Le JV est aujourd’hui beaucoup plus fermé, la plupart des salons sont sans public et seulement ouverts au journalistes, il y a vraiment une distance mise entre les créateurs et le public, alors qu’il y a 20 ans, c’était assez différent et plus proche du JDS d’aujourd’hui. Mais désolé, je persiste à dire que ça reste globalement encore “petit” même si il y a des mutations évidentes.

Un des délires de ma fille est de se filmer et de se prendre en photos avec ses copines en se brossant les dents… Si elle n’a pas un compte insta pour ça (et ça ne m’étonnerait même pas), elle a au moins de belles séries de photos exclusivement dédié à cette pratique. Mais c’est un bastion féministe, elle ne fait ça qu’avec ses copines…

Euh… A de très rares exceptions près ça a toujours été comme ça, il me semble. Même il y a 25-30 ans.

Mais ma mémoire peut me faire défaut :smiley:

J’avais surtout l’E3 en tête, mais c’était effectivement fermé dans un premier temps, puis ils ont ouvert, et refermé au public, après je sais pas dans quelles proportions c’était mais visiblement ça faisait débat haha.

Mais à priori, ça n’est pas aussi fermé que je le pensais, la Gamescom accueille du public avec un jour réservé exclusivement à la presse, donc je m’auto débunk sur ce point.

Pour nourrir la discussion et mettre cette chouette interview en lumière :slight_smile:
(Le Joueur de Flûte est l’un de nos jeux chouchous avec le Petit Prince)

4 « J'aime »

Super interview en effet, merci du lien

En effet c’est intéressant à lire.
Des interviews ou réponses des auteurs du manifeste sur j’ai pu lire jusqu’ici c’est de loin celle que je trouve la plus nuancée et la moins intrusive.