[Byzantium] un article "à la Loic"

[Byzantium]

Cela fait longtemps que je veux écrire quelque chose d’assez concis et complet sur Byzantium (ce qui n’est pas une mince affaire avec ce jeu). Cela fait également assez longtemps que je veux me livrer à l’exercice d’écrire un article comme Loic le fait sur son site et l’occasion de lui dire ainsi merci pour le très beau boulot qu’il effectue pour faire connaître le plus honnêtement et professionellement possible au plus grand nombre les jeux qu’il apprécie.

Je fais donc d’une pierre deux coups avec cet article sur Byzantium “à la Loic”. J’ai conservé la structure qu’il donne à ses articles et ai tenté de me conformer du mieux que j’ai pu à ses “chartes rédactionnelles”…

:wink:
En tout cas, au-delà du clin d’oeil, j’espère que cet article vous donnera envie de découvrir ou de redécouvrir ce magnifique jeu de Wallace.


BYZANTIUM

Editeur : Warfrog
Joueurs : (2) 3 à 4
Parties jouées : plus d’une douzaine
Durée : 100-150 minutes
Design : 4/5
Tactique : 4/5
Hasard : 2/5
Reflet du thème : 4/5
Mon avis : 9/10

Le jeu

Les joueurs vont être au coeur de la lutte qui a opposé Arabes et Byzantins à partir de 630, date du début de l’expansion arabo-musulmane. La Perse, qui vient d’être défaite par les Byzantins, sombre dans des luttes intestines pour le pouvoir mais Constantinople doit à présent faire face aux armées des Califes musulmans. A la fin du VIIème siècle, les Bulgares fondent leur premier État. Ils deviennent rapidement une dangereuse menace pour l’Empire Byzantin. Constantinople n’aura plus de repos et chutera finalement en 1453 suite aux attaques ottomanes.

C’est dans ce contexte historique si important mais si atypique ludiquement parlant que les joueurs vont décider du déclin ou de la résistance de l’Empire Byzantin face à l’Islam naissant. Qui saura tirer le meilleur profit de l’écroulement de la Perse, des razzias Arabes, des foudroyantes attaques Bulgares, de l’héroïsme ou du laxisme intéressé des Byzantins face aux menaces d’agression contre Constantinople?

Comment ça marche

Le jeu est divisé en 3 époques. A chaque époque, les joueurs effectuent à tour de rôle 1 action. Une fois que tout le monde a passé, on passe à l’époque suivante.

Chaque joueur a à sa disposition un plateau individuel qui représente une armée Byzantine et une armée Arabe. Chacun contrôlera donc 2 armées antagonistes. Chaque armée est composée d’unités d’élite, de troupes d’infanterie et de logistique (sa capacité de mouvement). De plus, un corps d’armée indépendant, la milice (servant à protéger les villes), est également représenté. On trouve également sur le plateau individuel des cases pour le trésor de guerre de chaque armée et la réserve de cubes (qui peuvent servir à l’une ou à l’autre armée).

Pour pouvoir jouer, les joueurs disposent des cubes de leur réserve (ils peuvent également en acheter au moyen des trésors de guerre). Ils utiliseront ces cubes pour effectuer différentes actions :

A-Prendre le contrôle d’une cité : les joueurs marquent leur influence en prenant possession pacifiquement de villes Byzantines ou Arabes ; ils posent un cube à leur couleur sur celles qui n’ont pas encore été investies militairement ou par cette même action.

B-Renforcer son armée : les joueurs peuvent affecter jusqu’à 3 cubes à leurs armées ; ils les panachent comme ils veulent entre les Arabes et les Byzantins.

C-Choisir une action spéciale : les joueurs posent un cube sur une des actions spéciales encore disponibles ; au moyen de ces actions ils pourront fortifier ou développer des villes, s’octroyer l’appui d’un Calife ou de l’Empereur Byzantin, activer les Bulgares, provoquer des guerres civiles, prendre le contrôle de la flotte Arabe ou Byzantine.

D-Collecter une taxe : les joueurs peuvent affecter des cubes de leur réserve personnelle pour prélever des taxes.

E-Construire une église ou une mosquée : les joueurs investissent un cube (perdu définitivement) et de l’argent pour construire l’édifice religieux de leur choix ; la construction de cet édifice leur donne des points.

F-Se déplacer et/ou combattre : si les joueurs conquièrent une ville à l’issue de cette action, ils marquent immédiatement des points (qui ne sont jamais perdus même si on leur reprend plus tard la ville) et remportent un peu d’argent ; les troupes perdues au combat rejoignent la réserve de pertes constituée du surplus de cubes.

G-Passer : le premier à passer débutera l’époque suivante.
Une fois que tout le monde a passé, chaque armée de chaque joueur perçoit ses revenus et paie pour l’entretien de ses troupes. Chaque joueur récupère ensuite tous les cubes qu’il a investi sur les actions supplémentaires et sur les taxes + la moitié arrondie par excès des cubes qui restent dans leur réserve de pertes.

A la fin de la 3ème époque, les villes encore possédées par chacun donnent des points qui s’ajoutent à ceux déjà glanés. Les points Arabes et Byzantins sont additionnés (sauf si l’on a avec un score plus de la moitié de l’autre score). Le joueur avec le plus fort total l’emporte.

Le jeu peut s’arrêter plus tôt. En effet, si Constantinople chute, la fin de partie est immédiate et le joueur avec le plus fort total en points Arabes l’emporte.

Critique

Byzantium est un jeu singulier. Or, on y choisit des actions, on se déplace, on y combat, on y gère des ressources et on marque des points. Apparemment, rien de bien nouveau donc. Mais c’est dans la manière si atypique dont Wallace exploite ces éléments et dont il les imbrique que le jeu tire sa force et son originalité.

Première originalité, on joue et on préside à la destinée des deux peuples antagonistes… Les intérêts sont donc divergents entre chacune de nos deux armées Arabes et Byzantines, et il va falloir apprendre tout en suivant des objectifs forcément différents (on ne peut s’attaquer soi-même) à ce que les actions de l’une puissent indirectement servir l’évolution et les destinées de l’autre. Cette gymnastique intellectuelle de favoriser l’une tout en pensant à ne pas défavoriser l’autre voire même d’apprendre à utiliser l’une pour favoriser l’autre est déstabilisante de prime abord et assez exigeante car elle implique une vision au minimum sur le moyen terme des implications de nos actions, vision uniquement possible si l’on trouve le moyen d’imbriquer étroitement entre eux des intérêts opposés (les Byzantins gagnent des points et de l’argent sur le dos des Arabes et vice-versa). De plus, le fait de ne jouer qu’une seule action à son tour implique dans la majorité des cas que l’on devra forcément “avantager” temporairement l’une ou l’autre de nos deux armées ennemies. Le timing dans l’utilisation de ses forces et la planification de ses actions va donc revêtir une grande importance.

A Byzantium, on fait la guerre. Mais là aussi, le système guerrier est atypique. Il s’agit plus de guérilla, de harcèlement que de guerre à proprement parler : 2 armées s’affrontent rarement directement entre elles ; les pertes occasionnées au cours d’un combat ou d’un siège sont limitées et on connait par avance leur ampleur possible ; on peut toujours éviter un combat (et se déplacer ainsi gratuitement) ; les positions que l’on prend sont difficiles et un peu vaines à tenir (la solidité d’une position est plus liée à l’emplacement pertinent d’une prise qu’à un aspect strictement militaire) ; il n’est jamais mauvais de perdre des troupes ou même de voir son armée se faire décimer (on va d’ailleurs fréquemment au combat entre autres pour une de ces raisons).

Quant à la gestion, les conventions du genre explosent également puisque l’on se retrouve avec pas moins de 3 trésoreries différentes à gérer. Il y a d’abord 2 trésoreries étanches entre elles et propres à chaque armée qui permettront à chacune de payer l’entretien de ses troupes, de s’acheter des actions ou des troupes supplémentaires mais aussi des points au moyen de la construction d’églises ou de mosquées. La troisième trésorerie est un système étonnant d’ingéniosité qui va consister à gérer le flux de nos cubes qui, rappelons-le, sont le moteur de nos actions (plus on en a, plus on aura d’actions possibles). Notre marge de manoeuvre en terme de jeu se joue essentiellement ici car, au contraire des trésors propres à chaque armée, les cubes peuvent s’affecter à l’une ou à l’autre armée. Donc, en plus d’une bonne gestion de l’argent possédée et dépensée par chaque armée, il va falloir apprendre à savoir choisir entre les cubes que l’on récupèrera automatiquement (ceux investis dans les actions spéciales et les taxes), les cubes qui seront indirectement réinjectés dans notre réserve personnelles (les troupes mortes au combat) et les cubes qui seront définitivement ou au moins provisoirement immobilisés (ceux utilisés pour prendre le contrôle d’une cité ou pour construire des édifices religieux). Il faudra vite apprendre à apprivoiser les subtiles connexions entre ces 3 trésoreries et les moyens en influant sur l’une de générer des répercussions avantageuses sur les 2 autres. Tout comme pour la gestion militaire des deux antagonistes, il sera essentiel de savoir utiliser les possibilités offertes à une armée pour favoriser indirectement celles de l’autre.

Les dés, composants classiques de nombre de jeux de combat, constituent une des grandes idées de Byzantium. Wallace réussit en effet la prouesse de limiter au maximum la part de hasard alors qu’on lance des brouettes de dés. Sans entrer dans les détails, l’équilibre est maintenu grâce à l’idée de l’entretien des troupes. En effet, avoir de la “malchance” aux dés et perdre des troupes implique que l’on devra dépenser moins en fin de période pour entretenir nos troupes et que l’on en récupèrera potententiellement plus pour le tour d’après. Au contraire, quelqu’un qui a de la “chance” aux dés et ne perd donc pas beaucoup de troupes va se retrouver à devoir payer une addition corsée en fin d’époque. L’argent étant le nerf de la guerre comme dans tout jeu de gestion, on aura donc toujours un équilibre auquel il faudra être prêt à s’adapter: remporter moins de points mais avoir plus d’actions supplémentaires à acheter au tour suivant ou remporter plus de points mais avoir moins de marge de manoeuvre niveau actions pour l’époque suivante. Un peu comme les cartes à Brass, les dés sont là pour obliger les joueurs à adapter et à affiner leurs projets stratégiques à des contingences tactiques. A chacun de savoir se donner la latitude au moyen d’une gestion et d’une planification adéquate de pouvoir réagir efficacement à tout type de résultat. Les dés depuis bien longtemps ne me font et ne font plus pester mon entourage à Byzantium ce qui constitue, reconnaissons-le, un véritable exploit ludique tant ceux-ci sont nombreux et les jets fréquents. Le hasard est contrôlable tout en conservant la part de tension et d’incertitude propre aux dés : que du bon donc, le seul point négatif étant qu’avec de l’expérience, il devient difficile de justifier la défaite à une partie de Byzantium par un coup de dé…

Constantinople est la grande affaire de Byzantium. Elles sera toujours plus ou moins intégrée à toute stratégie offensive ou défensive et constituera une préoccupation constante pour chacun des joueurs. En effet, avec la prise de Constantinople la partie prend fin immédiatement et un joueur largué aux points peut se retrouver à gagner la partie. Je ne m’attarderai pas ici sur les multiples options et possibilités qu’ouvre de travailler à la concrétisation ou à l’empêchement de cet évènement (j’y reviens plus bas brièvement dans les conseils tactiques et stratégiques). Je dirai juste qu’attaquer Constantinople, c’est se donner une probabilité de gagner la partie. D’une manière générale, tous les joueurs vont oeuvrer pour faire fluctuer cette probabilité en leur faveur et/ou en la défaveur de leurs adversaires. Les moyens sont innombrables, certains immédiats, d’autres plus stratégiques et constituent un élément de plus qu’il faut constamment intégrer à sa réflexion et apprendre à anticiper et à maîtriser. La fin couperet qu’implique la chute de Constantinople constitue un des critères qui confère au jeu cette tension si particulière. Le défaut de ce système est qu’il est très permissif et que de mauvais perdants peuvent l’exploiter à mauvais escient. Ces joueurs qui attaquent ou qui permettent l’attaque de Constantinople juste pour laisser la possibilité à un autre de gagner, sont des joueurs qui de toute manière trouveront toujours des voies méprisables pour fausser une partie quel que soit le jeu. L’avantage de Constantinople dans ce cas est qu’elle permet d’abréger le temps perdu à cottoyer de tels individus.

Si le plateau est fixe, le renouvellement du jeu est très important grâce à l’énorme combinaison de choix auxquels on est constamment confronté, à la complexe combinatoire qu’il faut parvenir à mettre en place efficacement entre nos deux armées (tant dans le timing du choix de nos actions que de leur planification), aux différents degrés ludiques qu’il va falloir maîtriser (gestion des trésors, implications des placements et des mouvements, flux de nos cubes). Comme parfois avec Wallace (Brass par exemple), on a un jeu qui semble figé de prime abord et qui se renouvelle incroyablement, se nourrissant constamment de sa richesse intérieure comme si il était doté d’une vie propre, organique.

Enfin, je parlerai de l’esthétique du jeu. Les plateaux individuels sont très beaux et les couleurs du plateau de jeu chaudes et agréables. Mais il y a une grande idée qui va au-delà de critères liés à la représentation : les villes sont érigées en “3D” au moyen de pions circulaires empilés les uns sur les autres. Les villes Arabes sont blanches, les Byzantines sont mauves et leur ombre plane sur les teintes méditerranéennes et ensoleillées du plateau. Au fur et à mesure des sièges, des prises de possession successives et de l’évolution des rapports de force, l’ombre des villes va croître ou se résorber pendant qu’il va y avoir inévitablement des flux et reflux de couleurs, vagues blanches et mauves qui vont fluctuer, se croiser, s’atténuer, se répandre, donnant une sensation visuelle unique, très réussie et assez poétique. C’est aussi une des qualités de ce jeu hors du commun.

Conseils tactiques et stratégiques

-Le moyen le plus facile et rapide de gagner des points est de prendre le contrôle d’une cité (poser un cube sur une ville encore soumise à aucune influence). De nombreuses villes byzantines donnent 3 points et constituent d’ailleurs la seule manière de marquer autant de points directement.

-Les moyens de marquer 2 points Arabes en début de partie sont nombreux. Vous pouvez choisir le Calife (2 points + 1 troupe d’élite), prendre le contrôle de la Mecque (2 points + 4 de revenus quasi garantis en fin de tour de par la position très isolée du berceau de la foi musulmane), attaquer une ville Perse ou Byzantine de niveau 3 (2 points + 2 Bezants + éventuellement 4 de revenus en fin de tour), attaquer Thessalonique au moyen des Bulgares (2 points).

-Les cubes que vous placez sur les actions spéciales ne sont jamais perdus d’un tour sur l’autre et permettent même d’en gagner si vous achetez moyennant 3 Bezants le cube que vous y placerez. De manière générale, un cube acheté quelle que soit son utilisation est toujours un cube gagné ou au moins un cube qu’on ne perd pas.

-Ne négligez pas les flottes. Il n’y a que 2 voies offertes aux Arabes pour atteindre Constantinople : le Bosphore ou la Méditerranée. Les 2 sont coûteuses en déplacement et peuvent impliquer au moyen de la flotte Byzantine des pertes extrêmement lourdes. Si des troupes Arabes traversent dans des conditions optimales (c’est à dire avec les 2 flottes en leur possession), Constantinople sera forcément en danger. Il faut donc absolument éviter dans la mesure du possible qu’un joueur puisse se retrouver avec les 2 flottes…

-La parade la plus sûre contre toute attaque de Constantinople est de générer une différence de plus de 5 points Arabes avec ceux qui sont en mesure de l’attaquer.

-Pesez bien les implications d’une attaque Bulgare contre Adrianople. En effet, si les Bulgares prennent possession de cette ville, n’importe lequel de vos adversaires pourra dorénavant attaquer Constantinople si il reste une action bulgare disponible bien entendu.

-Les Bulgares font peur un peu à tort car ils sont tout sauf invincibles (au maximum de leurs moyens, ils ont une armée moins forte que l’armée Arabe de chaque joueur en début de partie). N’hésitez pas à les attaquer que ce soit par l’intermédiaire de vos Arabes (chemin maritime vers Constantinople plus long mais moins instantanément et violemment exigeant que la traversée du Bosphore) ou par l’intermédiaire de vos Byzantins (mise sous l’éteignoir du danger Bulgare et garantie de revenus/points difficilement attaquables).

-Les troupes d’élite sont fondamentales si vous voulez mener une politique de guérilla pour affaiblir et/ou faire reculer les armées adverses, ou bien mener une campagne efficace contre les Bulgares. Attention à prévoir cependant suffisamment de combats (et donc la juste proportion de cubes de mouvement) afin de vous donner un maximum de chances de décimer vos troupes d’élite qui coûtent très cher à entretenir à la fin d’une période.

-Ne négligez pas les milices, surtout à la 3ème époque. D’une manière générale, elles ont un effet dissuasif important et constituent donc une manière de prendre une option sur la conservation plus massive de positions.

-Souvenez-vous que l’empereur Byzantin peut affecter sa milice à la défense de Constantinople.

-Avant de décider de répondre à une attaque, réfléchissez bien aux implications de cette riposte au-delà du résultat tangible potentiel. Il est par exemple souvent peu pertinent de faire perdre des troupes à l’adversaire (on lui fait économiser de l’argent). Regardez bien la composition de son armée et l’état de son trésor (actuel et à venir). Payer de l’entretien à la fin d’un tour, c’est perdre des possibilités au tour suivant d’acheter des cubes supplémentaires ou des points au moyen des églises/mosquées. Ne croyez pas qu’une personne qui enchaîne les victoires pourra le faire indéfiniment : par le système des cubes, il sera forcément vite limité dans ses mouvements et/ou dans sa force. On ne peut être à la fois très mobile et bien armé sans déséquilibrer bien d’autres aspects de son jeu. Quelqu’un qui gagne des combats sans perdre beaucoup de troupes se retrouvera immobilisé tôt ou tard avec une armée coûteuse et dont la rentabilité des conquêtes dépendra de ce qu’auront fait ses adversaires (la tactique du ramasse-miettes par exemple, visant à suivre une armée victorieuse pour récupérer à moindre coût les villes affaiblies qu’elle laisse derrière elle est assez efficace de ce point de vue).

-Attention de ne jamais vous retrouver bloqué. Vous devez systématiquement penser à préserver un espace à vos armées car comme vous ne pouvez jamais en aucun cas vous attaquer (même au moyen des Bulgares…), un enfermement aurait des conséquences dramatiques. Estimer au plus juste ses besoins en terme de mobilité (les cubes mouvement dont la gestion est absolument fondamentale à Byzantium) et garder toujours de la marge de manoeuvre (éviter les auto blocages) sont des composants tactiques et stratégiques essentiels à ce jeu.

-Etre positionné à Constantinople avec son armée Byzantine garantit bien entendu une meilleure protection de la ville mais donne aussi une extraordinaire latitude de mouvement (et donc, d’action/réaction) puisque pour seulement un cube de mouvement, on peut rallier directement pas moins de 13 villes différentes (toute ville bénéficiant de liaisons maritimes + Trebizond, Sinope, Thessalonique et Dyrrachium).

-Il peut être très pertinent de se faire décimer son armée. En effet, une fois renforcé, vous pouvez réapparaître n’importe où et bénéficier donc de la progression d’une autre armée en surgissant par exemple sur une ville avancée nouvellement conquise. Souvenez-vous que les combats ne sont pas la seule voie pour décimer votre armée : affecter moyennant finances le ou les derniers cubes d’une de vos armées à des actions spéciales ou à l’autre armée fera très bien le travail et dès que vous n’aurez plus ni troupe d’élite, ni infanterie, ni logistique (cubes mouvement), vous récupèrerez votre pion armée (il peut parfaitement vous rester de la milice qui ne fait pas partie à proprement parler de votre armée et reste donc toujours opérationnelle).

-Ne créez pas dans la mesure du possible de trop grosses disparités entre vos scores Arabes et Byzantins. En fin de partie, vos adversaires pourraient facilement être tentés de faire baisser vos possessions de villes correspondant à votre score le plus faible (si le score le plus faible d’un joueur est inférieur à la moitié de son score le plus fort, il ne les cumule pas et ne marque que le meilleur des deux scores…).

-Les taxes sont souvent omises. Or, elles sont fondamentales car elles constituent l’unique action qui permette de renflouer massivement en cours d’époque l’un et/ou l’autre trésor. Elles nécessiteront cependant une fine anticipation de vos besoins puisqu’elles ne pourront être choisies qu’une seule fois par époque et qu’elles obligeront à sacrifier exclusivement des cubes de votre réserve personnelle.

-Attention à l’ordre du tour. Il peut s’avérer fondamental de savoir faire une action de moins pour jouer avant tout le monde au début de la prochaine période et mener ainsi une attaque importante avant que quiconque n’ait pu se renforcer, s’octroyer une action spéciale que le contexte rend particulièrement importante, etc.

-Les églises et les mosquées permettent de glaner beaucoup de points en une seule action. Elles sont cependant coûteuses (6 Bezants + 1cube définitivement perdu ou 9 Bezants si l’on achète le cube). En fin de partie pourtant, elles deviennent très importantes car marquer 2 points d’un coup est alors très difficile (les villes sont toujours peu ou prou dévastées à ce stade du jeu et rapportent assez peu).

Public

Byzantium est un jeu qui n’a que très peu de chances de plaire à des joueurs non confirmés. Une durée de jeu importante, des règles très denses ainsi que des mécanismes ludiques particulièrement atypiques et déroutants le réservent à des joueurs expérimentés et motivés.

Conclusion

Byzantium a le goût des jeux de conquête mais il n’en est pas véritablement un : le résultat d’un conflit est froidement calculable, on peut être amené à décider de reculer et de refuser un combat même quand on est plus fort ou à le provoquer même si l’on a absolument aucun espoir de victoire, on espère souvent perdre des troupes voire même décimer notre propre armée, gagner ou perdre n’a pas de répercussions dramatiques quant au jeu et implique une anticipation et une lecture sous-jacente des implications réelles de tout résultat et des moyens d’en tirer profit au mieux, etc. C’est donc en définitive bien plus un jeu de gestion, mais un jeu de gestion qui avance masqué et dont une des composantes primordiales est la conquête : la majeure partie des points et des revenus se construisent par la prise de positions, mais aussi par une habile gestion de ses troupes (ni trop, ni trop peu), de ses déplacements (visualiser stratégiquement les meilleurs emplacements à occuper et les moyens à investir pour y parvenir), etc. Du coup, il aura de grandes chances de laisser sceptique les amateurs tant de jeux de conquête que de jeux de gestion qui devront faire dans tous les cas l’effort de passer outre leurs réflexes établis. Byzantium est donc un jeu qui n’a pas vraiment de public ou de cible ludique prédéterminée et qui nécessitera de la persévérance et de la pratique pour que les joueurs qui s’y frottent puissent assimiler et commencer à contrôler les nombreuses originalités dont il regorge.

Malheureusement, ce “défaut” est amplifié par une rédaction réellement lamentable des règles, confuses, contradictoires, mal structurées et qui ne favorisent vraiment pas la compréhension et l’immersion dans un jeu dont l’originalité, la complexité et le niveau d’exigence méritait mieux.

Enfin, Wallace affirme que son jeu peut se jouer à 2 alors qu’il ne prévoit aucun aménagement permettant de le rendre jouable dans cette configuration. Déjà qu’à 3 le jeu fonctionne à peu près mais reste très inférieur au jeu à 4 où le choix des actions mais aussi la vision de l’espace et son occupation sont critiques tant la concurrence y fait rage. Parler de jeu à 2 est donc un non sens et vu le goût prononcé de la part de nombreux joueurs pour cette configuration, c’est faire plus de tort que de bien à Byzantium que de l’annoncer jouable dans cette configuration. Je recommande donc à ceux qui voudraient se lancer dans la découverte de ce jeu de ne le jouer qu’à 4 joueurs et de le découvrir avec un ou plusieurs joueurs qui en connaissent déjà les règles et qui l’ont déjà joué. Si tout le monde le découvre, 3 joueurs sera la config idéale car celle laissant le plus de marge de manoeuvre dans un contexte moins férocement concurrentiel tout en conservant un certain intérêt. A noter que de nombreuses FaQs existent, tant sur Boardgamegeek que sur Tric Trac.

Byzantium est un de mes jeux préférés et chacune des parties que j’ai faites m’ont laissé de grands souvenirs ludiques. C’est pour moi le jeu de gestion le plus original et le plus épique que je connaisse. Aucun ne lui arrive à la cheville de ce point de vue. Cependant, son exigence combinée au peu de soin apporté par l’auteur à en faciliter l’accès font que je ne lui mets pas la note maximale.

:pouicbravo:

ça fait longtemps qu’il me tente celui la et avec une telle analyse il fait vraiment envie…le seul problème c’est qu’on est que 3 et tu sembles suggérer qu’il est bien meilleur à 4.

Je n’ai pas dû jouer autant que Palferso (une petite quinzaine de parties quand même, mais sans parvenir à cerner les stratégies viables), mais je n’ai rencontré aucun problème au jeu à trois. Même le jeu à deux est jouable, soit en acceptant les victoires-couperet (une dizaine de PV d’avance et la victoire est instantanée), soit avec une variante interdisant de passer tant qu’on a encore des cubes en réserve.

scand1sk dit:je n'ai rencontré aucun problème au jeu à trois. Même le jeu à deux est jouable, soit en acceptant les victoires-couperet (une dizaine de PV d'avance et la victoire est instantanée), soit avec une variante interdisant de passer tant qu'on a encore des cubes en réserve.


Oui. Le jeu à 3 bien que très inférieur au jeu à 4 fonctionne. Je trouve simplement qu'à 3 joueurs, il y a beaucoup d'autres jeux bien meilleurs. Quant à 2 joueurs, même avec la variante... :pouicvomi:
Mais ce n'est que mon avis.

A 3 une partie dure combien environ?

sakurazuka38 dit::pouicbravo:
ça fait longtemps qu'il me tente celui la et avec une telle analyse il fait vraiment envie..le seul problème c'est qu'on est que 3 et tu sembles suggérer qu'il est bien meilleur à 4.


Pour finir de t'achever il est en vente flash sur une célèbre boutique qui fais le la pub ici-même. (pas de nom pas de lien conformément aux règles)

Beau boulot, ça donne envie de s’en refaire une, à 4 de préférence car mes 2 seules parties se sont déroulés à 3 joueurs, et en zappant au moins une règle à chaque fois.

J’aimerai beaucoup lire mais c’est très long. Tu ne peux pas essayer de faire un article concis :kingboulet: :kingboulet:

(promis, le je lirai, je le lirai :wink: )

Un grand merci à palferso pour ce petit “hommage” au travail que j’effectue sur le site.

Comme d’hab avec le monsieur, l’article est long et intéressant. Ca donne envie de refaire quelques parties de ce très bons jeux (il m’en manque encore pas mal pour que je puisse une critique à ma manière :wink: )

Bravo pour cet article dont je partage l’ensemble des points de vue :pouicok:

En effet, ce jeu est vraiment excellent. D’ailleurs je sors d’une partie (hier) à 4j dont 2 débutants (à Byzantium uniquement) qui ont vraiment apprécié le jeu.
Pour ma part, je me suis éclaté une fois de plus, encore une super partie 8)
Quel jeu !!!

Une partie de Byzantium à 3 ou 4 dure 2 heures entre joueurs expérimentés, 3 sinon. Attention, découvrir les règles en même temps que le jeu, c’est casse-gueule et est susceptible d’ajouter une bonne heure à ce temps.

scand1sk dit:Une partie de Byzantium à 3 ou 4 dure 2 heures entre joueurs expérimentés, 3 sinon. Attention, découvrir les règles en même temps que le jeu, c'est casse-gueule et est susceptible d'ajouter une bonne heure à ce temps.


Oui, je dirais même qu'entamer une partie de Byzantium tout en découvrant les règles est voué à l'echec, et peut même dégouter du jeu. Essayer en solo voire à deux avec deux autres joueurs fictifs me paraît être une bonne démarche...après 2 ou 3 lectures préalables des règles et sans se presser...
Le Zeptien dit:
scand1sk dit:Une partie de Byzantium à 3 ou 4 dure 2 heures entre joueurs expérimentés, 3 sinon. Attention, découvrir les règles en même temps que le jeu, c'est casse-gueule et est susceptible d'ajouter une bonne heure à ce temps.

Oui, je dirais même qu'entamer une partie de Byzantium tout en découvrant les règles est voué à l'echec, et peut même dégouter du jeu. Essayer en solo voire à deux avec deux autres joueurs fictifs me paraît être une bonne démarche...après 2 ou 3 lectures préalables des règles et sans se presser...

En effet, certaines parties des règles sont mal écrites et prêtent à confusion.
L'idéal est de faire sa première partie avec au moins 1 joueur qui connait le jeu.

Super article! :pouicok: :pouicbravo:

Brougnouf dit:
Le Zeptien dit:
scand1sk dit:Une partie de Byzantium à 3 ou 4 dure 2 heures entre joueurs expérimentés, 3 sinon. Attention, découvrir les règles en même temps que le jeu, c'est casse-gueule et est susceptible d'ajouter une bonne heure à ce temps.

Oui, je dirais même qu'entamer une partie de Byzantium tout en découvrant les règles est voué à l'echec, et peut même dégouter du jeu. Essayer en solo voire à deux avec deux autres joueurs fictifs me paraît être une bonne démarche...après 2 ou 3 lectures préalables des règles et sans se presser...

En effet, certaines parties des règles sont mal écrites et prêtent à confusion.
L'idéal est de faire sa première partie avec au moins 1 joueur qui connait le jeu.


C'est vrai que les règles sont assez mal fichues, la preuve : il y a sur BGG une super aide de jeu qui résume tout de façon limpide (à mon avis) sur un recto/verso.

Excellent article !
Pour ma part, je trouve le jeu à 3 très intéressant.
En effet, les mécanismes du jeu, et les intérêts communs dans les deux factions font que la situation “2 contre 1 puis duel pour finir” n’a pas vraiment de sens. Je n’ai pas beaucoup de parties à mon actif, donc je me garderai bien d’en faire une généralité, mais sur les deux parties que j’ai faite, à chaque fois je me suis fait démonter au tour 1 (aussi bien en armées qu’en possessions), mais j’ai réussi à rester dans la partie et même à gagner… Bref, à 3 je le trouve très intéressant tout de même !
De toute façon j’ai encore jamais trouvé 3 autres joueurs pour jouer :stuck_out_tongue:

Gustyboy dit:Pour ma part, je trouve le jeu à 3 très intéressant.
En effet, les mécanismes du jeu, et les intérêts communs dans les deux factions font que la situation "2 contre 1 puis duel pour finir" n'a pas vraiment de sens. Je n'ai pas beaucoup de parties à mon actif, donc je me garderai bien d'en faire une généralité, mais sur les deux parties que j'ai faite, à chaque fois je me suis fait démonter au tour 1 (aussi bien en armées qu'en possessions), mais j'ai réussi à rester dans la partie et même à gagner... Bref, à 3 je le trouve très intéressant tout de même !


Oui. Le jeu parvient à échapper aux problèmes classiques du "triangle amoureux" dans une partie à 3 joueurs. C'est une autre de ses qualités. Le principal problème du jeu à 3 à mon sens est la concurrence géographique et quant aux actions spéciales bien moins rude et tendue qu'à 4 joueurs.

Très bon article !!! Dix ans après, c’est toujours aussi génial !

La grande époque du palf’.

beri dit :La grande époque du palf’.

Salut mon p'tit beri.

A l'époque (aucune idée de l'ordre d'importance...):

1-j'avais plus de temps.
2-j'étais moins vieux...


En tout cas, merci à toi et à ceux qui font vivre ce post (ça me permet aussi de relire mon acienne prose...).