[ça dénonce] jeuxdeplateau.com

Knizia nous rappelle assez régulièrement qu’il est encore un auteur majeur. Il n’a pas la régularité de cette époque où il sortait 3-4 jeux forts par an, mais les sorties de Qin, Y&Y, Blue Lagoon et même, a priori, Babylonia sur la seule partie que j’en ai faite, montre qu’il a encore du répondant. Même s’il se contente toujours de refaire des jeux (et ça reste le cas de Y&Y), il a quand même quelques fulgurances plutôt bien sentie (My City semble aussi intéressant d’après ce que j’ai entendu)

Je suis assez d’accord avec l’ensemble de ton analyse qui compare Y&Y et T&E sauf sur la conclusion : si cela « améliore » le jeu car YY augmente le contrôle de son développement, je trouve qu’on y perd une des grandes qualités (ou en tout cas l’un des grands plaisirs que j’y trouve) de TE, à savoir cette géographie changeante qui donne une saveur particulière à la prise de risque et produit un jeu plutôt aérien, où l’on vient saisir les nouvelles opportunités qui se créent lors de ces bousculements.
Dans mes 3-4 parties de YY, j’ai trouvé finalement que le jeu devenait plus sage et se fondait plus dans la production des jeux actuels.

J’ai retrouvé ces plaisirs par contre dans Babylonia, règles simples, court, pouvant être brutal, abstrait juste ce qu’il faut, Knizia à son top.

En fait, tu défends l’idée que nous avons là deux jeux dont les différences sont plus importantes que les ressemblances. Intéressant. Je comprends l’idée de plus sage, mais qu’est que tu entends par “plus dans la production des jeux actuels”? Tu penses à une  forme d’aseptisation, d’affaiblissement de l’interaction directe ?

Il y a moins le côté WTF de T&E, je suis d’accord. Cependant, je viens d’en refaire une et, clairement, il ne l’a pas aseptisé je pense. Certes, il n’y a plus 20 tuiles qui peuvent disparaître d’un coup lors d’un conflit externe, les royaumes sont donc plus stables. Mais ça n’en fait pas un jeu aseptisé pour autant : il y a eu une petite dizaine de récolte paysanne et au moins autant de vol de pagodes. Certes, c’est un peu moins visuel que sur T&E, mais c’est plus cohérent et, en fait, tout aussi violent. Car ces aspects là, très interactif, sont beaucoup plus présents à Y&Y, donc, avec une partie plus au compteur, j’ai plutôt tendance à confirmer cette impression : oui, c’était drôle les royaumes qui disparaissaient complètement de la carte à T&E, mais l’ensemble me paraît bien mieux construit à  Y&Y tout en offrant une interaction largement au dessus des standards actuels
Pour le Zeptien, je pense qu’on parle ici d’une certaine volonté de limiter l’interaction dans les eurogame modernes, et que clairement T&E est très loin des canons du genre aujourd’hui. Mais je pense que Y&Y est aussi bien trop interactif pour les standards modernes. J’ai l’impression que Knizia a bien cherché à retirer certains éléments moins bien foutus plutôt qu’à essayer de plaire aux joueurs actuels

Oui, j’évoquais par là l’interaction plus faible et des jeux plus mesurés, où chaque aspect du jeu est très « équilibré », sans excès et donc avec moins d’éclat.
Je trouve que le scoring de T&E est déjà suffisamment malin pour ne rendre que partiellement utile le fait d’être super fort sur une couleur.

Aussi, dans Y&Y (enfin, ce que j’en ai joué, et tant mieux si mes impressions s’avèrent fausses avec l’expérience de jeu), j’ai eu le sentiment d’être plus dans un jeu de gestion des pouvoirs des quatre couleurs et de développement prudent,
tandis que dans T&E j’avais plus l’impression de jouer à une sorte de jeu de go simplifié avec 4 couleurs, les pouvoirs de chacune passant plus au second plan (bien qu’il faille les maitriser pour bien jouer).

Désolé, j’ai du mal à expliquer la différence de ressenti entre les deux. Je dirais que, au-delà de la question de l’interactivité entre les joueurs, c’est qu’aujourd’hui, les jeux favorisant l’attaque à la défense, sont rares. TE avait cette qualité que YY me semble perdre un peu.

Je reconnais cependant que YY est plus cohérent et moins abstrait.

salut,

j’ai été attiré par le titre du sujet vu que cela doit faire une quinzaine d’années que je vais voir le site avec plaisir. bien content que tu le continues.
je n’ai pas lu tous les posts mais une question me titille:
pourquoi ne pas avoir continué à mettre une note sur 10 comme avant?

Je pense, aujourd’hui, que la note /10 a un côté très réducteur.
Je ne suis pas face à une copie d’un élève avec des bons et mauvais points, mais face à une oeuvre culturelle. J’essaye d’apporter un certain éclairage, grâce à mon expérience. Mais, avec le recul, j’ai trouvé que la note n’apportait pas grand chose au propos, voire pouvait le dénaturer. Faudrait peut-être que je fasse un article sur le sujet.

T’inquiète pas, c’est plus trop dans l’air du temps de mettre des notes aux élèves non plus, il faut plutôt leur mettre des couleurs :wink:

Tu pourrais mettre du vert au matériel, et du jaune à la rejouabilité, ce serait nickel !

…et encore, ce n’est qu’une étape : bientôt, on pourra juste leur donner des pouces bleus…

Concernant la notation de jeux, pour les quelques avis que j’ai eu le plaisir de publier ici, j’ai toujours eu beaucoup de mal à choisir la note sur 10, car il est impossible de faire ressortir des nuances. Cependant, cela donne une idée par rapport à la catégorie d’appartenance du jeu… enfin en tout cas, c’est ce que je tente de traduire par la note.

J’avais fait un tableau pour expliquer ce que la note voulait dire pour moi.
Mais, en pratique, si je prenais le temps de bien me référer à mon tableau, ce n’est pas le cas des gens qui lisent la critique. Chacun a sa manière de “penser” une note, a une échelle de valeur dans la tête, et se réfère toujours à cette échelle de valeur, ce qui biaise encore plus la note.