Cartes politiques à Löwenherz 1

[Löwenherz]

Comme je l’avais déjà fait entre autres pour Magna Grecia et Goa autour de certains mécanismes qui me plaisaient, je vous livre ici mon point de vue sur les fameuses cartes politiques de Löwenherz première mouture.

Les cartes politiques à Löwenherz sont souvent source de polémique et à l’origine de nombreuses variantes plus ou moins discutables. Cette étude tente de clarifier certains points tant il y a d’idées fausses qui circulent autour de ces cartes. Les appréciations données ici sont théoriques. Löwenherz, comme tous les grands jeux, fait souvent naître des situations particulières qui font varier certaines données que l’on croyait établies. De par sa capacité à surprendre, Löwenherz implique que l’on ait sa capacité créative et d’adaptation sans cesse aux abois. Mais l’analyse effectuée ici permettra au moins d’avoir une donnée argumentée à partir de laquelle pouvoir jauger et juger de l'éventuelle meilleure décision à prendre en fonction du contexte propre à chaque partie.

Le premier point est d’ordre général. L’intérêt et la valeur des cartes politiques ne tient pas seulement à la carte qui pourra être choisie (pour soi et/ou pour contrer un autre joueur) : savoir ce qu’a pu prendre un adversaire ou empêcher un adversaire de savoir ce que l’on a pu choisir antérieurement feront fluctuer la valeur de l’action politique en fonction du moment et du contexte propre à chaque partie.

Il y a en fait deux types de cartes politiques :
1-les cartes à gain assuré
2-les cartes à gain aléatoire et/ou ponctuel

1-les cartes à gain assuré :
a) Les cartes « or »
Moins le gain de l’action politique sera cher, plus les cartes « or » seront intéressantes. En effet, le gain net pourra être énorme. Les cartes « or » sont très fortes pour remporter une confrontation. Elles seront donc souvent décisives sur une action qui ne pourra être négociée. La confrontation n’est intéressante en général qu’après la première moitié du jeu, quand une action peut être fondamentale si l’un ou l’autre l’effectue. Sinon, personne n’a rien à gagner à une confrontation. En effet, s’exposer à perdre une confrontation revient à n’avoir rien gagné (ni or, ni possibilité de jouer) alors que laisser une action après négociation a au moins permis de gagner de l’argent en vue de joutes futures. Même un joueur qui sait avoir plus d’argent que l’autre n’a pas intérêt à aller à un duel qui lui fera sûrement dépenser plus qu’il n’aurait pu donner à un joueur plus nécessiteux que lui. Les cartes « or » interviennent et prennent donc toute leur valeur aux moments clés du jeu, quand la résolution d’une action par l’un ou par l’autre va forcément faire pencher la balance de manière significative… Choisir une carte « or » n’est donc jamais un mauvais choix et souvent le meilleur que l’on puisse faire.
b) Les cartes « parchemin »
Les cartes « parchemin » garantissent des points ce qui à Löwenherz est loin d’être négligeable. Associées à une stratégie orientée vers les mines, elles deviennent redoutables. En effet, les mines, au contraire des villes, garantissent des points (les points que j’ai gagné au cours d’une décompte « mines » ne seront jamais perdus). Il faut donc prendre gare à une personne bien munie en mines qui va souvent vers l’action politique ou à une personne qui a profité deux ou trois fois de l’action politique et qui attaque résolument toutes les mines à sa portée… A noter que 12 points assurés (5+4+3 des cartes « parchemin ») représentent au minimum 20% des points d’un joueur à la fin d’une partie… Il faut donc ne pas hésiter à aller chiper une carte « parchemin » à un joueur qui pourrait cumuler une telle quantité de points. On peut aussi l’affaiblir singulièrement en mines ce qui réduira assez sensiblement l’impact des cartes « parchemin ». Il faut souligner qu’une option « parchemin » comme toute stratégie très ciblée sera de toute manière assez risquée entre autres pour les ouvertures économiques et/ou militaires qu’elle offre à ses adversaires directs. Mais ce qui est acquis à Lowenherz n’est jamais mauvais…

A noter que ces deux types de cartes seront d’autant plus forts que vous en aurez beaucoup. Par exemple, si trois joueurs ont trois cartes « parchemin », celui qui aura le plus investi dans sa carte, sera celui qui aura le plus perdu. En effet, la différence entre les joueurs ne sera pas grande. Par contre, si j’ai gagné le droit de prendre deux cartes « parchemin », la troisième vaut très cher puisque je créerai un différentiel de 12 points avec tous les joueurs. Si un adversaire récupère ne serait-ce que la carte « parchemin » qui vaut 3 points, il réduit l’écart de points avec moi à 6 points (au lieu de 12 si je prends la carte…) et s’adjuge un avantage de 3 points avec ses autres adversaires. Cet exemple est d’autant plus vrai et redoutable avec les cartes « or »… Le différentiel créé en terme d’argent peut être énorme.

2- les cartes à gain aléatoire et/ou ponctuel
a) Les cartes « renégat »
Cette carte est celle qui est la plus sujette à erreurs. Elle est considérée comme une carte offensive alors que c’est tout le contraire : elle n’est réellement efficace que défensivement. Je m’explique. Utilisée comme carte offensive, elle est beaucoup plus faible que toutes les autres cartes politiques. D’abord, avec de bons joueurs, il faudra sûrement lutter ou payer très, très cher pour pouvoir effectuer l’action bouclier qui permettra de valider « renégat » comme choix offensif efficace. C’est donc une action expansion qui vaudra toujours très cher (souvent au moins le double d’une expansion normale : acquisition de la carte + action bouclier au prix fort). Une supériorité numérique de chevaliers n’est intéressante que si le coût pour en profiter ne devient pas trop excessif. Il faudra en plus prendre gare à ce que ce ne soit pas une tierce personne qui profite de votre « renégat » pour attaquer tranquillement la région affaiblie par vos soins. Autre désavantage et/ou risque, le potentiel offensif d’une carte « renégat » peut être annulée provisoirement par une carte « alliance ». Et là, le coût devient ahurissant (la carte « renégat » en soi + 10 ors pour annuler l’alliance + la difficile et coûteuse négociation ou lutte pour l’action bouclier). Quand je joue « renégat » offensivement, j’essaie de voir qui est en position de m’imposer une alliance et les possibilités qu’il me restera. Dans tous les cas, il ne faut jamais se mettre dans la position d’être dans la quasi-obligation de payer l’annulation d’une « alliance » après avoir joué une carte « renégat », situation qui se révèlerait souvent catastrophique en terme économique et donc d’influence sur le jeu… Par contre, défensivement, « renégat » est très intéressante et c’est quasiment toujours ainsi que je l’utilise. En effet, si je la joue pour équilibrer mon rapport de force avec une région plus puissante, le gain est directement effectif et assuré : je me retrouve à égalité de chevaliers avec un voisin et n’ait donc pas à lutter avec lui pour une expansion qui dans l’immédiat ne peut se faire et il n’y a aucun intérêt à m’imposer une « alliance » dans un contexte d’égalité de chevaliers. Je peux donc me consacrer tranquillement à d’autres objectifs et/ou priorités en laissant mon adversaire s’essouffler en perdant un temps et de l’argent précieux si il s’entête…
b) Les cartes « alliance »
C’est le contraire de la carte « renégat » : elle est considérée comme défensive alors que c’est une carte offensive redoutable… Ces effets sont toujours plus dévastateurs qu’on le pense et la contrer pour pouvoir attaquer une région avec laquelle on est en paix revient à payer triple : l’action politique ou bouclier qui a permis de prendre l’avantage en terme de chevaliers + 10ors pour annuler l’alliance + sûrement beaucoup d’or pour pouvoir emporter l’action bouclier qui permettra enfin d’attaquer (voir ci-dessus carte « renégat »). Un autre effet pervers et génial de la carte « alliance » que j’ai mis longtemps à comprendre est qu’elle déséquilibre très finement les rapports de force tactiques et stratégiques entre les joueurs. En effet, les joueurs qui ont intérêt à lutter avec le royaume fort avec qui on est en paix, ce sont les autres. Ceci donne une relative tranquillité et liberté pour aller fouetter d’autres chats… La carte « alliance » augmente donc les possibilités de luttes entre d’autres joueurs en les focalisant vers un type d’action particulier (l’action bouclier), ce qui ouvre pour soi d’autres horizons plus paisibles et donc forcément très profitables en terme de tactique et de stratégie. La carte « alliance », si elle est bien utilisée, est une carte beaucoup plus forte qu’on ne le croit.

Des cartes qui garantissent de l’or et donc une certaine emprise sur le jeu, des cartes qui garantissent des points précieux, des cartes défensives, des cartes offensives… Merveilleux équilibre où l’on voit que chaque option est intéressante ou peut l’être et garantit de belles réflexions à chaque choix. Pour conclure, je dirai simplement qu’à coût faible, les cartes « or » sont très intéressantes pour le gain qu’elles garantissent. J’oriente très souvent mon choix vers celles-ci dans ce cas de figure. A coût moyen, les cartes « renégat » ou « alliance » peuvent être un excellent choix, tout dépend du contexte et du relief que vous voulez donner à votre jeu. Quant aux cartes « parchemin » ce sont les plus dépendantes du contexte. Le prix peut fluctuer très sensiblement que ce soit comme choix propre ou pour gêner un adversaire.

Ludiquement.

PS : pour plus de précisions sur les cartes politiques, vous pouvez consulter le lien suivant : //www.trictrac.net/forum/sujet/lowenherz-1-variantes-et-reflexions

Très bonne analyse.

J'y ai joué hier: y a pas à dire ce jeu et génial. Mais je profite de l'occasion pour poser une question sur la carte politique.

Dans les règles de base, une carte politique ne peut être jouée que si le joueur joue une action (en clair que si dans le tour en question il a gagner le droit de jouer l'action 1, 2 ou 3 ).

En l'occurence, si cette action est le choix d'une carte politique, peut il jouer la carte politique en quetion immédiatement après l'avoir choisie ?

Une carte politique est jouée en même temps quen la carte de choix et immédiatezment exécutée, même si on ne réalise pas l'action que l'on a choisi.

Tout pareil que Loic. La règle que tu évoques est en fait une variante. Tu la trouveras analysée et critiquée sur le lien que je mets à disposition à la fin de mon premier post ci-dessus.