[Cinema] Two lovers de James GRAY

[Cinema]

C’est un des cinéastes dont j’irais voir n’importe quel film sur n’importe quel sujet. Celui-là n’a pas fait exception et j’ai encore un peu de mal à m’en détacher pour dire ce que j’en pense, sinon que ce sentiment est complexe. Il y a des films comme çà qu’on ne zappe pas facilement. Allez-y, je vous le conseille, et ce sujet est ouvert pour qu’on puisse en discuter.

Tout pareil :mrgreen:

Vu y a près de 3 semaines et j’y repense encore régulièrement mais c’est bizarre parce qu’à la sortie du ciné j’étais tout de même assez mitigé et je crois l’être encore, pourtant certaines scènes tournent en boucle dans ma tête et j’ai envie de le revoir, c’est donc plutôt très bon signe !! :D

En tout cas les acteurs sont géniaux (comme d’hab chez Gray), la photo est sublime (comme d’hab chez Gray), la musique est belle mais peut-être un peu en-dessous de ce à quoi il nous avait habitué et la scène obligatoire dans la boîte de nuit est ENORMEEEEEEEEE as usual…

Il y a vraiment quelque chose dans ce film qui d’abord peut décevoir au regard des attentes placées en lui-- on se dit au départ : “c’est un peu mou”, “c’est un peu artificiel”, “c’est un peu convenu”, “ça manque de rythme”“c’est un James Gray raté“d’ailleurs on n’y croit pas une seule seconde à ces histoires d’amours” – pour ensuite mieux nous mettre une claque derrière. Je pense, particulièrement, aux personnages des parents, de l’avocat, ou de la troisième amoureuse. Je pense à la scène que tu évoques qui vient embraser le film tout d’un coup, alors qu’on avait baissé la garde. Et à chaque fois il semble procéder ainsi. Comme si, ce qui était montré et éprouvé n’était pas du à une défaillance de la construction, du scénario, de la mise en scène, du rythme, de la direction d’acteur, mais bien une volonté délibérée de l’auteur.

Preuve en est l’évolution du jeu de J. Phoenix: forcément on attend beaucoup de lui dans ce rôle et au départ on est franchement déçu, c’est n’importe quoi, il semble jouer faux, en deça, à coté, n’importe comment, et, finement, très finement, il se transforme, puis la scène de la boite de nuit arrive, puis ça retombe et il se transforme encore. Ainsi, de l’anodin, du trivial on passe à un film grandiose, bien contents de s’être fait avoir et avec l’envie forte de le revoir, dans tous ses détails en apparence anodins.

Le raisonnement peu paraître tordu ou incompréhensible, mais je ne pense pas qu’un film aussi finement construit que Two lovers ait des défaillance de ce type.

Ainsi, j’aime bien sa manière de contourner les scènes évidentes, ou de les désamorcer, ou de nous emmener ailleurs. J’aime bien ces constructions en double – par exemple les deux fêtes interrompues par des portables, par exemple – , sa manière de filmer une histoire d’amour comme un polar, et même le clin d’oeuil à Fenêtre sur Cour. La maniière dont il ouvre et clôt son film est superbement construite. La liberté qu’il prend sans son récit est excellente.

Les acteurs sont excellents, particulièrement J. Phoenix qui livre une performance énorme. Surtout, les rôles de femmes sont magnifiques. Eva Mendes, dans la nuit nous appartient prenait une consistance supplémentaire. De la même manière, dans Two Lovers, G. Paltrow, plus douloureuse, moins glacée, plus en mouvement, plus foldingue, dans ce film donne vraiment une autre image d’elle même. Vinessa Shaw, dont le personnage est loin d’être secondaire et anecdotique est superbe aussi. Isabella Rosselini, personnage le plus réussi, est merveilleuse.

soze dit:
Preuve en est l'évolution du jeu de J. Phoenix: forcément on attend beaucoup de lui dans ce rôle et au départ on est franchement déçu, c'est n'importe quoi, il semble jouer faux, en deça, à coté, n'importe comment, et, finement, très finement, il se transforme, puis la scène de la boite de nuit arrive, puis ça retombe et il se transforme encore. Ainsi, de l'anodin, du trivial on passe à un film grandiose, bien contents de s'être fait avoir et avec l'envie forte de le revoir, dans tous ses détails en apparence anodins.


Je ne suis pas trop d'accord avec toi!
La scène d'ouverture du film est grandiose avec un grand M. Phoenix!!!
Le ciel est d’un bleu nuit parfait, les réverbères d’un pont scintillent dans une lumière entre chien et loup, un homme arpente ce pont d’une démarche bizarre, va peut-être se jeter à l’eau…
Le jeu d'acteur, la qualité de la lumière et du cadre, ce silence parfait..... quelle scène magnifique!!

Un film à voir absolument :D

Je me suis mal fait comprendre. Je ne dis pas qu’il joue mal ou que le film est mauvais, mais bien qu’à certains moments on peu en avoir l’impression. Evidemment, la scène d’ouverture est splendide – et vient rappeler, chez moi en tout cas, le final de La nuit nous appartient – c’est un moment fort. On aurait pu imaginer qu’il fasse tout son film dans la même splendeur. Mais ensuite quelque chose semble retomber, et dans le jeu et dans le scénario: voir par exemple comment sont traitées les deux scènes de rencontre qui sont, en apparence, un peu pataudes, un peu creuses. (Quoique j’ai peut-être été induit en erreur par cette VF.) On est un peu comme embourbés, mal à l’aise. Comme les personnages. Ce que je voulais dire c’est que, peut-être, c’était intentionnel.

soze dit:Je me suis mal fait comprendre. Je ne dis pas qu'il joue mal ou que le film est mauvais, mais bien qu'à certains moments on peu en avoir l'impression. Evidemment, la scène d'ouverture est splendide -- et vient rappeler, chez moi en tout cas, le final de La nuit nous appartient -- c'est un moment fort. On aurait pu imaginer qu'il fasse tout son film dans la même splendeur. Mais ensuite quelque chose semble retomber, et dans le jeu et dans le scénario: voir par exemple comment sont traitées les deux scènes de rencontre qui sont, en apparence, un peu pataudes, un peu creuses. (Quoique j'ai peut-être été induit en erreur par cette VF.) On est un peu comme embourbés, mal à l'aise. Comme les personnages. Ce que je voulais dire c'est que, peut-être, c'était intentionnel.


Je comprends mieux!
soze dit: (Quoique j'ai peut-être été induit en erreur par cette VF.)


Raaaaaaaaaaa........... Fou, va!
soze dit:Ce que je voulais dire c'est que, peut-être, c'était intentionnel.


Je suis convaincu que ça l'était...

Ma semi-déception (et ça reste très très relatif ! J'aimerais être déçu comme ça souvent...) vient plutôt du fait que j'en attendais quelque chose plus dans l'esprit tragédie grecque alors que le film est finalement juste "humain" et réaliste/crédible. Un film sans chichis, sans artifices émotionnels !
krapoto dit:
soze dit: (Quoique j'ai peut-être été induit en erreur par cette VF.)

Raaaaaaaaaaa........... Fou, va!


+1 lol :mrgreen:

Surtout que la voix de Phoenix est très particulière !!!

Pour le dire vite, je trouve le film énorme. L’un des très grands films de cette année. :)

Mirmo dit:
krapoto dit:
soze dit: (Quoique j'ai peut-être été induit en erreur par cette VF.)

Raaaaaaaaaaa........... Fou, va!

+1 lol :mrgreen:
Surtout que la voix de Phoenix est très particulière !!!


:lol:
Cela me donnera une raison de le revoir...
... et de prévenir les autres de ne pas faire la même connerie.
Mirmo dit:
Surtout que la voix de Phoenix est très particulière !!!


La voix en VF est particulière aussi, mais pas dans le sens le plus flatteur. De même pour Mlle Paltrow.

Vous m’avez donné envie d’y aller. Je trouvais qu’il y avait rien à voir actuellement, je me suis trompé. :pouicok:

Jarkus dit:Vous m'avez donné envie d'y aller. Je trouvais qu'il y avait rien à voir actuellement, je me suis trompé. :pouicok:

Y a rien à voir? :shock: Hunger? Mesrine? L'Echange?

Je voulais voir ce film, James Gray est un réalisateur dont j’apprécie les films, et l’idée qu’il puisse quitter, le temps d’une histoire, l’univers de la mafia m’enthousiasmait.

[bon, si vous ne l’avez pas vu, inutile de lire ce qui suit]

Le film s’ouvre sur cette image grise au petit jour, et cette vision clair-obscure déprimante ne m’a plus quitté. On y découvre le personnage joué par Joaquim Phoenix qui, à lui seul, tient le film sur ses épaules. Et c’est ce personnage un peu largué, dont Gray choisit de nous raconter l’errance sentimentale. Que cache encore ce mot, amour, trop souvent représenté ou réduit à un sentiment mièvre, douceureux, dans tant de comédies romantiques.

Comme souvent chez James Gray, la famille, cette organisme branlant, disloqué, étouffant, joue ici à fond son rôle de dernier refuge où s’abriter. Isabella Rosselini est très attachante en “mère juive” qu’on imagine trop vite en mère castratrice, pour la découvrir tout simplement attachée au bonheur de son fils. Car s’il est de la responsabilité des hommes d’offrir un foyer aux femmes, et par extension à la famille, il est du devoir ou du pouvoir des femmes d’y insuffler leur affection chaleureuse. Cet équilibre est un des enjeux du film. C’est étonnant de constater comment cette idée de l’homme garant du lieu-foyer est présente tout au long de l’histoire : le loyer de l’appartement où vit le personnage de Paltrow est payé par son amant, l’entente pour la fusion des deux entreprises familiales conclue par les deux pères de famille, outre la pérénité de l’entreprise, a pour but d’offrir au futur couple Phoenix-Shaw de quoi s’installer dans la vie.
A ce déterminisme social de la relation, convenue, arrangée, les sentiments amoureux de Paltrow et Phoenix ne paraîssent pas plus un acte libre. On retrouve un mécanisme central du désir ; à savoir qu’on désire moins les choses que le regard que les autres portent sur elles. Comme si l’amour, pour être vrai, fort, devait être fou. Echapper à toute emprise extérieure. C’est le choix du personnage de Phoenix et que seul le regard aimant d’une mère sur son enfant peut comprendre. Cette scène entre la mère et le fils dans la cage d’escalier est d’ailleurs une des séquences qui m’a le plus ému.
Les familles ont donc tout autant le pouvoir d’unir que de séparer ; la séparation d’avec sa première fiancée étant sans doute à l’origine du trauma du personnage de Phoenix. Le dénouement apporte une conclusion à cette autre histoire qui avait déjà eu lieu au moment où le film débute. Car le film s’achève au moment où la vie reprend son cours normal, suit à nouveau l’ordre des choses. Cet ordre des choses que l’artiste et le fou remettent en cause. La production d’œuvres est certainement ce qui sépare l’artiste du fou. Cette ambivalence est présente chez le personnage de Phoenix qu’on présente, soit comme un artiste, soit comme un malade qui doit prendre sa médication pour redevenir “normal”.

Il y a quelque chose dans ce classicisme, finalement, qui m’a laissé sur ma fin, même si l’histoire est racontée avec une justesse et une puissance que peu de réalisateurs parviennent à transmettre.

Pendant la projection, je me suis demandé pourquoi il y avait si peu de séquences avec Vinessa Shaw. On sait très peu de chose d’elle, et finalement, je pense que c’est mieux. Elle reste la bouffée d’oxygène de l’histoire ; cet espoir ou ce mensonge en la possibilité d’un sentiment amoureux qui ne soit pas que calcul, désir d’appropriation. Je pense qu’elle n’a pas l’ambivalence des autres personnages. Elle doit être comme le personnage de cette comédie sentimentale qu’elle regarde dès qu’elle passe à la télévision. Et comme on apprend beaucoup des films par mimétisme, on peut présumer de la sincérité de ses sentiments.