[enfin!][Paris] un petit détour par la Bastille

source NouvelObs.com
Régularisation : des centaines de sans-papiers à la Bastille
Depuis jeudi, ces salariés sans papiers occupent les marches de l’opéra Bastille à Paris pour obtenir “des critères de régularisation garantissant l’égalité de traitement entre tous les salariés”, selon la CGT.
Des sans-papiers dorment devant l’Opéra Bastille, à Paris pour réclamer un texte définissant des critères de régularisation échappant à l’arbitraire préfectoral. (AFP)

Dimanche 30 mai, plusieurs centaines de travailleurs sans-papiers en grève, 1 500 selon la CGT, occupent les marches de l’Opéra Bastille, sur la place de la Bastille à Paris, pour réclamer un texte définissant des critères de régularisation échappant à l’arbitraire préfectoral. Ils sont présents depuis jeudi. Les travailleurs ont reçu le soutien de plusieurs personnalités du monde politique, social ou culturel.
“On ne bouge pas”
Les salariés sans-papiers, ont élu domicile devant l’opéra à l’issue de la manifestation parisienne contre la fin de la retraite à 60 ans jeudi, pour “obtenir enfin des critères de régularisation garantissant l’égalité de traitement entre tous les salariés”, a annoncé la CGT.
“On ne bouge pas”, avait indiqué vendredi soir au nom des onze syndicats et associations soutenant le mouvement Raymond Chauveau, responsable CGT, reprochant au ministère de l’Immigration de “nous faire lanterner”.
Soutien des politiques et de personnes connues
Samedi, les salariés sans papiers ont reçu le soutien de plusieurs partis politiques comme le PCF, Lutte ouvrière, le parti socialiste, La gauche unitaire, ou encore NPA, dont le leader, Olivier Besancenot est venu assurer aux grévistes son “soutien fidèle, tenace, indestructible, jusqu’à la victoire”. “Le regard sur l’immigration a changé dans ce pays grâce à votre lutte”, a-t-il ajouté.
Des représentants des syndicats CGT et Solidaires, de la Ligue des droits de l’homme, de l’association Droit Devant, ou encore du Réseau éducation sans frontière (RESF), sont venus également les soutenir, ainsi que des personnalités du spectacle comme l’actrice Josiane Balasko ou le cinéaste Romain Goupil.
Une nouvelle réunion “courant” juin
Deux nouvelles réunions ont eu lieu avec les services d’Eric Besson, ministre de l’Immigration les 14 et 20 mai au sujet des travailleurs sans titre de séjour pour lesquels syndicats et associations demandent des critères clairs et identiques de régularisation. Mais selon eux, le ministère “semble vouloir retarder le plus possible les échéances”.
Vendredi le ministère de l’Immigration a fait savoir que le directeur de cabinet du ministre avait réuni le jour même l’ensemble des secrétaires généraux des préfectures concernées sur le sujet, et qu’une nouvelle réunion pourrait avoir lieu “courant juin”.
Il a assuré que “La démarche de bilan de l’application de la circulaire du 24 novembre 2009”, créant un dispositif de régularisation pour motif professionnel, était “engagée”.

(Nouvelobs.com avec AFP)


bon, je vous cite en préambule un extrait de médium national. probable qu’on en parle ailleurs.
c’est juste pour fixer un cadre à l’appel que j’adresse aux parisien(ne)s qui passent par ici, et que je viens de recevoir par courriel de RESF.
si certain(e)s d’entre vous sont sensibles à cette situation et ont un peu de disponibilité à lui consacrer, c’est pas facile, mais je vous assure que vous et eux en serez un peu réchauffés.
s’il vous plait, n’y voyez en aucun cas un sujet polémique et je vous en prie, ne le transformez pas en arène.
je peux tout à fait comprendre qu’on ne partage rien sur ce sujet; alors, dans ce cas, passez juste à côté sans esclandre.
je transmets un appel, je ne lance pas un débat. son seul sort sera d’être entendu ou pas.
des infos complémentaires ici :
http://www.educationsansfrontieres.org/rubrique26.html



To: “>” ; “Liste de discussion du réseau éducation
> sans frontières”
> Sent: Sunday, May 30, 2010 2:29 AM
> Subject: [Resf] Avis aux parisiens et aux autres
>
>
>
> Il faut aller à la Bastille!
>Pas seulement aux moments “forts” des
> prises de parole et des arrivées de people mais tôt le matin et tard
> le soir, y passer la nuit pour les plus courageux et les plus
> résistant parce que dormir sur les marches de l’opéra relève de la
> prouesse d’endurance.
>Ils n’en peuvent plus, ils sont à bout. cela
> fait maintenant plus de 7 mois qu’ils sont en grève (12 Octobre) et
> les mises en demeure d’expulsion et de saisie bancaire pleuvent, sans
> compter les mauvaise nouvelles du pays; les familles qui ne reçoivent
> plus rien .

> Ce qui faisaient tenir la plupart de ces travailleurs qui cumulaient
> boulots harassant et solitude affective, c’était de savoir qu’ils
> étaient utiles, que leur esclavage servait à payer les soins médicaux
> de leurs parents et l’école privée de leurs enfants afin que ceux ci ne
> soient pas contraints à l’exode à leur tour. Là, ils arrivent au
> bout de ce qu’il sont capables d’endurer . Une défaite serait
> dramatique pour eux et pour nous tous et un recul n’est tout
> simplement pas envisageable. Le pouvoir acculé est capable de tout,
> de reculer comme de provoquer . Il faut aller à la Bastille pour les
> protéger d’une tentation des forces de police de rentrer dans le tas
> . la situation est tendue à l’extrême là bas et les nuits qui arrivent
> sont celles de tous les dangers. Alors oui, nous sommes fatigués, oui
> , nous avons nos contraintes , nos difficultés, nos engagements divers
> et nos petits renoncements quotidiens mais là j’ai envie de vous
> dire: s’il vous plait encore un petit effort, débrouillez vous pour
> passer une nuit, une seule , à leurs côtés. une poignées de têtes
> blanches au milieu de ces hommes profondément “n’tampis” (fatigués en
> soniké) mais aussi oh combien courageux et oh combien digne de
> respect et d’admiration . une petite poignée de justes peut faire
> reculer les matraques. Il en va de leur sauvegarde mais il en va aussi
> de notre avenir et de notre honneur que de les défendre" .
>
>
> –
> Douce nuit - ONA MOVE - Yalla! - Yang-Kà!


merci de m’avoir lue jusqu’au bout :)

hop ! :china:

J’ai fait passer le message à mes peu nombreuses connaissances à Paris…

:idea: Je viens de comprendre l’intitulé du sujet… :oops:

J’y accours donc et apporte ma pierre:


La Cimade dit:Travailleurs-euses sans papiers : aidons-les à tenir!
Soutenez la lutte des travailleurs sans papiers, 28 euros = 1 semaine de repas
Depuis le 27 mai, des centaines de travailleurs-euses sans papiers occupent les marches de l’opéra Bastille (voir le diaporama). Ces hommes et ces femmes sont en grève depuis plus de 7 mois pour obtenir des critères équitables et objectifs de régularisation… Une demande simple et de pure justice que les ministères refusent pourtant de satisfaire…
Les grévistes ne revendiquent pas seulement leur propre régularisation, c’est un appel à la justice lancé par des centaines d’hommes et de femmes qui vivent, travaillent en France, et payent des impôts malgré leur situation illégale.
Pour un travailleur sans papier, des critères objectifs de régularisation c’est :
> Un espoir de sortir de la clandestinité, pouvoir arrêter de vivre dans la peur de l’arrestation
> Pouvoir faire valoir ses droits de travailleur au même titre que n’importe quel autre salarié
> Lutter contre l’exploitation dont ils sont trop souvent victimes
Les conditions de l’occupation sont difficiles et, surtout, les moyens financiers sont insuffisants pour assurer la nourriture de tous les grévistes…
En grève, ils n’ont d’autre source de revenus pour vivre que la générosité du public et des organisations qui les soutiennent. Aujourd’hui, ces travailleurs en lutte ont besoin de vous!
Chaque repas coûte 2 euros par personne et l’objectif est que chaque gréviste puisse manger deux fois par jours. Un don de 28 euros, c’est donc une semaine de repas pour un travailleur en lutte…
Ils luttent pour la justice, ne les laissons pas seuls dans ce combat ! Cliquez sur le lien ci-dessous pour faire un don.


Non parisiens, nous pouvons donc aussi les soutenir en faisant un don

Edit Euh… :oops: Les Parisiens aussi ont le droit de faire un don: pas d’ostracisme 8)

fait :)
merci bertrand, je ne connaissais pas cette possibilité.

Kouynemum dit:fait :)
merci bertrand, je ne connaissais pas cette possibilité.


de l'utilité de Facebook :P ...Et des amis qui ont bon gout :wink:
La police évacue les sans-papiers de la Bastille
LEMONDE.FR | 03.06.10 | 09h18 • Mis à jour le 03.06.10 | 11h46
Les forces de police ont procédé jeudi matin à l'évacuation des salariés sans papiers, dont beaucoup d'Africains, qui occupaient les marches de l'Opéra Bastille, à Paris, depuis jeudi pour réclamer des critères clairs de régularisation, a constaté un journaliste de l'AFP. La préfecture de police de Paris a confirmé auprès de l'AFP "l'évacuation de cent soixante personnes qui occupaient les marches de l'Opéra Bastille depuis le 27 mai". Les policiers affirment que l'évacuation s'est passée relativement dans le calme et qu'il n'y a pas eu d'interpellation.
En revanche, Maurice Amzallag, un délégué CGT qui soutient le mouvement des travailleurs sans papiers, a affirmé au Monde.fr que la police avait procédé à une "quarantaine d'interpellations", au cours de l'opération. "La police est arrivée de l'intérieur de l'opéra en gazant tout le monde et en dégageant les sans-papiers qui étaient sur les marches, encore endormis. Ils les ont délogés sans qu'ils aient le temps de prendre leurs affaires. Au moins une quarantaine ont été emmenés, a priori jusqu'au commissariat du cinquième arrondissement", a raconté Maurice Amzallag au Monde.fr.
Des photos prises par un photographe de l'AFP semblent également montrer que des travailleurs sans papiers ont été emmenés par la police (voir ci-dessous).
Un commerçant ambulant interrogé par l'AFP place de la Bastille a livré sensiblement le même récit : "Les policiers sont arrivés par la place de la Bastille, puis par le haut des marches, ils ont répandu du gaz lacrymogène et ensuite, ils ont procédé à des interpellations." Selon lui, il y a eu des blessés légers au cours de l'opération.
Peu après 8 heures, les marches de l'Opéra Bastille étaient complètement vidées, seuls restaient des dizaines de couvertures, sacs de couchage éparpillés, tandis qu'un groupe de gendarmes mobiles courait derrière un groupe de travailleurs sans papiers dans une rue adjacente.
"Cette manière de faire est vraiment indigne. Hier nous étions en train de discuter au ministère du travail, et ce matin on sort le bâton ! C'est indigne et incohérent", déplore Maurice Amzallag. "Ce n'est pas comme ça que l'Etat va régler le problème, ça ne peut qu'envenimer les choses. Nous restons mobilisés et attendons toujours un texte clair du ministère."
Le Monde.fr avec AFP

y avait pourtant pas qu’eux qui réclamaient une clarification…

Sans-papiers : Veolia et Derichebourg demandent des “critères clairs de régularisation”
LEMONDE.FR avec AFP | 21.05.10 | 19h17 • Mis à jour le 21.05.10 | 19h17
Deux grandes entreprises françaises ont demandé vendredi 21 mai plus de clarté au gouvernement sur les règles de régularisation de leur salariés sans papiers. “Les entreprises ont besoin de critères clairs de régularisation pour garantir une équité de traitement”, a ainsi défendu Pascal Decary, directeur des ressources humaines de Veolia Propreté et également administrateur du Syndicat national des activités du déchet, dans une interview aux Echos.
“La circulaire prise en novembre 2009 n’est, comme la précédente, pas appliquée de la même façon d’un salarié à l’autre, car son interprétation varie selon les préfectures”, ajoute-t-il. La loi du 20 novembre 2007 a créé un “dispositif de régularisation pour motif professionnel” et une circulaire du 24 novembre 2009 l’a précisé.
Le ministère de l’immigration a proposé jeudi aux organisations syndicales de procéder à une évaluation de la mise en œuvre de cette circulaire, six mois après son entrée en vigueur. Il engagera lui-même une évaluation à partir des résultats enregistrés dans les préfectures. “Chez Veolia Propreté, comme dans les autres entreprises de gestion et traitement des déchets, cela nous paraît indispensable” d’avoir des “critères clairs de régularisation”, poursuit le DRH.
Il ajoute : “C’est pour cela que nous avons décidé […] de travailler à une approche commune avec la CGT, pour demander des critères clairs de régularisation des faux-papiers ou sans-papiers et que nous avons souhaité être partie prenante des discussions qui viennent de démarrer avec le ministère de l’immigration et le ministère du travail.”
“LE SUJET EST TABOU”
Pour sa part, Derichebourg Multiservices, société spécialisée dans les services aux collectivités (nettoyage, gardiennage…) se dit “consciente de la nécessité de définir des critères clairs et objectifs de régularisation de la situation administrative des salariés sans papiers”. La société souhaite que les discussions “puissent aboutir à la définition d’un cadre juridique formalisé, juste et équitable permettant la régularisation rapide des salariés sans papiers employés et déclarés par des entreprises de bonne foi”.
Par ailleurs, interrogé sur le fait que peu d’employeurs ont pris position sur les sans-papiers, le DRH de Veolia Propreté affirme que “le sujet est tabou”. “J’ai reçu beaucoup de coups de fil de soutien, mais il y a une crainte diffuse de se voir mis en accusation si l’on s’exprime officiellement sur le sujet”. “Cela explique aussi les réticences de certains employeurs à délivrer les documents nécessaires à la régularisation par le travail”, précise-t-il.

la Cimade dit: De nombreux travailleurs sans papiers, artistes, intellectuels et élus sont revenus prendre les marches de la Bastille, évacuées ce matin par les forces de police.
Ils ont besoin de soutien!

Le monde/AFP dit:Quarante-trois militants étaient en garde à vue à la mi-journée dans quatre commissariats parisiens, affirment Europe Ecologie et Les Verts dans un communiqué. La préfecture de police n'a pu confirmer ce chiffre dans l'immédiat.
Les écologistes demandent leur libération et la régularisation de tous les sans-papiers résidant en France.
Un rassemblement de soutien aura lieu à Paris dans l'après-midi, en présence notamment de la dirigeante des Verts Cécile Duflot.

Je confirme qu’il y a dû avoir un peu de grabuge car ce matin dans le bus 65, on a été « terminusés » à République pour cause de, je cite la radio du chauffeur : « bagarres à la Bastille avec des CRS »

les inrocks :

source : Les Inrocks
Vers 7h30, ce matin, des membres des forces de l’ordre sont arrivés place de la Bastille afin d’évacuer les travailleurs sans-papiers qui occupaient les marches de l’Opéra depuis le 27 mai.
“Les policiers nous ont d’abord demandé de partir mais on a refusé”, explique Samuel, un étudiant qui soutient le mouvement depuis plusieurs mois.
Les forces de l’ordre sont ensuite passées par l’intérieur de l’Opéra pour arriver en haut des escaliers et faire descendre les sans-papiers à l’aide de gaz lacrymogènes. Samuel raconte :
“Ils nous ont gazés et tout le monde a été poussé vers le bas, ils ont ensuite dispersé la foule, et les grévistes qui se sont opposés ont été arrêtés.”
De légers heurts entre les CRS et les militants ont été rapportés. Selon la police, des jets de pierre auraient fait quatre blessés légers parmi les forces de l’ordre et environ quatre manifestants auraient été fortement incommodés par les gaz lacrymogènes.
Au total, 43 personnes ont été arrêtées, sans-papiers et militants. Le NPA s’est indigné de cette évacuation dans un communiqué.
“Y-a-t-il un pilote dans l’avion ?”
Les syndicats se disent surpris par cette évacuation. Hier encore, une réunion informelle se tenait avec la direction générale du travail. Il s’agissait de la première rencontre depuis le 20 mai. L’objectif : fixer une date afin de finaliser les négociations sur la mise en place de critères clairs de régularisation par le travail.
“Ce n’était pas du tout la tonalité de nos discussions d’hier, je suis pour le moins étonné”, a déclaré Raymond Chauveau, responsable du mouvement des sans-papiers à la CGT, qui a tenu une tribune improvisée devant les manifestants ce matin (voir notre diaporama).
“Y-a-t-il un pilote dans l’avion ? On ne sait pas d’où vient l’ordre d’évacuation. Qui dirige ? La Préfecture de Police ? Le ministère de l’Immigration ? Le ministère de l’Intérieur ?”, a-t-il scandé devant un auditoire de sans-papiers encerclés par des CRS.
Vers 11h, Raymond Chauveau a appelé les grévistes à quitter les lieux. “Chacun rentre chez soi, pour le moment on n’a pas le choix. Mais les négociations ne sont pas terminées”, a-t-il insisté.

pour avoir une idée concrète de leur situation aberrante

UBU PRÉFET
SANS PAPIERS, MAIS PAS SANS PAPERASSE
Jeudi 27 mal, après la manifestation nationale sur les retraites, les travailleurs sans papiers ont occupé te parvis de l’Opéra Bastille pour obtenir des critères de régularisation clairs et objectifs.
Qu’est-ce qu’il va donc falloir qu’ils fassent d’autre? Ils sont en grève depuis octobre. Avec les onze syndicats et associations qui tes soutiennent, ils ont rencontré Besson, les 14 et 20 mai. Certains patrons eux-mêmes commencent à plaider leur cause publiquement. Mais rien. Le gouvernement continue à fermer les yeux sur les milliers de sans-papiers qui triment dans nos entreprises sans jamais pouvoir jouir de leurs droits de salariés. La situation devient aberrante.
Déjà, les « sans-papiers », il faudrait leur trouver un autre nom parce que, en réalité, ils croulent sous la paperasse. Pour contenter le délire papivore de l’administration préfectorale, ils ont collecté et archivé des mètres linéaires de documents, certificats, photocopies, fiches, imprimés… Tout ce qui, de près ou de loin, peut prouver leur présence sur le territoire français et les aider à bétonner leurs demandes de régularisation. Du passe Navigo à la facture EDF, sans oublier leurs déclarations d’impôts, bien classées, année après année.
Comme Aliou, par exempte. Hyper réglo depuis 2002, il paie ses impôts, sa taxe d’habitation, sa redevance tété, sans jamais rechigner. Il a rangé toutes ses déclarations dans une pochette en carton frappée d’un gros titre en lettres majuscules: « DOSSIER IMPORTANT ». Il travaille dans le nettoyage et a deux employeurs. « Un pour le matin et un pour le soir. » Ses salaires oscillent entre 1150 et 1250 euros. « J’ai toutes les fiches de paie, sur deux contrats », explique-t-il. Ses employeurs savent pertinemment qu’il n’est pas en règle, mais ils ferment les yeux. « Tant qu’ils ont besoin de gens comme moi, ils me gardent. Et puis, un beau matin, ils me diront: « Faux papiers, tu t’en vas d’ici! ». »
L’HOMME VIRTUEL
En attendant, il bosse, il cotise pour nos retraites et il paie ses impôts. Cette année, il devra s’acquitter de 1100 euros. Ce qu’il fera, comme il a toujours fait. Même si aujourd’hui il craque.
C’est bête, mais, depuis quelque temps, Aliou, a l’impression de ne pas exister. À se taper la tête contre les murs pour vérifier. Il a beau être dans la réalité jusqu’au cou, du petit matin au soir, avec ses balais et ses bassines de détergent, c’est comme s’il était devenu un être virtuel. D’ailleurs, il ne s’appelle pas Aliou. Et il n’a pas une identité, ni deux, mais trois. Deux fausses et une vraie, non reconnue.
Sa première identité, elle lui colle à la peau depuis 2001. Peu de temps après son arrivée à Paris, dans un café, on lui a proposé de lui procurer les papiers d’un prête-nom. « C’est devenu mon alias. » Et c’est avec son alias qu’il a travaillé, payé des impôts, trouvé un logement. Et puis, quelques années plus tard, il ne l’a plus supporté. Ras le bol de vivre comme s’il n’existait pas. Et il a eu ce rêve fou : avoir des papiers à son vrai nom. Et payer sous son vrai nom, vivre sous son vrai nom. « Quand même! C’est mon nom de naissance et maintenant que j’ai un enfant, je dois retrouver mon nom. » Alors, un jour, une « connaissance » lui a proposé de lui procurer, cette fois, des papiers avec son vrai prénom, son vrai nom, son âge réel… mais avec un lieu de naissance différent. Au lieu d’être né au Mali, on l’a fait naître à la Réunion, département d’outre-mer. Pas le choix…
RIEN ICI, RIEN LÀ-BAS
Aujourd’hui, Aliou, qui ne s’appelle pas Aliou, se retrouve donc avec des papiers au nom de son alias et des faux papiers à son vrai nom. Et deux déclarations d’impôts. Et, au bout du compte, un malaise encore plus lourd qu’avant.
Pour clarifier tout ca, on lui a conseillé d’aller dire toute la vérité aux impôts et de faire tout basculer sur son vrai nom. Ce qui lui permettrait, qui plus est, de déclarer son enfant né en 2009 et, du même coup, d’alléger son ardoise fiscale.
Mais, non, décidément non. Tant qu’il n’est pas régularisé, Aliou, pense que c’est dangereux… « Le Trésor public, attention, c’est l’État! » En plus, c’est compliqué: son appartement, son chéquier sont sous son faux nom, il ne peut pas faire disparaître son alias comme ca ! Non, tant pis, Aliou, n’ose pas sauter le pas. Alors il continue à trimer comme s’il n’existait pas.
L’homme virtuel soupire: « Je travaille, je cotise pour les autres et je ne récolte rien. Pas même pour mon fils! Je n’ai rien là-bas. Je n’ai rien ici. »
Sylvie Coma/Charlie hebdo/3 juin

Satisfaits, les travailleurs sans-papiers quittent la place de la Bastille
LEMONDE.FR | 19.06.10 | 08h45 AFP/BERTRAND LANGLOIS
Le gouvernement a accepté des “ajustements” pour harmoniser les critères de régularisation par le travail à l’application problématique selon les syndicats et une partie du patronat.
Les travailleurs sans-papiers qui campaient depuis trois semaines devant l’Opéra Bastille à Paris ont quitté les lieux, vendredi 18 juin, dans la soirée. L’évacuation a été décidée à l’issue d’une réunion marathon entre le gouvernement et les syndicats, qualifiée de “sérieuse” et “positive” par la CGT. Confronté depuis l’automne à une mobilisation des travailleurs sans-papiers, le gouvernement a accepté des “ajustements” pour harmoniser les critères de régularisation par le travail à l’application problématique selon les syndicats et une partie du patronat.
Lors de cette réunion au ministère de l’immigration – la quatrième depuis le début du mouvement –, le gouvernement a reconnu des “difficultés d’application de la circulaire” du 24 novembre 2009 sur la régularisation par le travail, elle-même une première réponse au mouvement de grève. “L’échange autour des bilans respectivement établis a permis de détecter des difficultés d’application de la circulaire et de déterminer les ajustements techniques nécessaires”, a indiqué le ministère de l’immigration. Par exemple, le ministère reconnaît que “le traitement n’est pas homogène” pour ce qui concerne la liste des métiers ouvrant droit à une régularisation, au nombre de 30 pour les ressortissants non communautaires.
Les ajustements envisagés par le ministre de l’immigration Eric Besson sont censés permettre d’accélérer les dossiers. Mais aussi “de mieux tenir compte des spécificités de certains secteurs professionnels (intérim, nettoyage, aide à la personne)” et de donner leur chance à des personnes travaillant chez différents employeurs, notamment comme nounou ou auxiliaire de vie, pourvu qu’elles arrivent à cumuler suffisamment d’heures pour totaliser un Smic. Le nouveau dispositif sera évalué trimestriellement avec les syndicats.
Pour autant, une “grosse ambiguïté” demeure, selon Raymond Chauveau de la CGT car le ministère de l’immigration continue de considérer l’ancienneté en France, sous-entendu y compris les périodes de travail au noir. “M. Besson a du mal à être conséquent. En procédant de cette façon-là, il roule pour les patrons voyous. Soit on prend en compte le temps de présence en France, soit on prend en compte les feuilles de paye”, a dit M. Chauveau.
Après un premier mouvement en Ile-de-France en 2008, grèves et occupations de sites ont repris depuis octobre 2009, faisant apparaître au grand jour de nombreux secteurs employant de la main d’oeuvre démunie de titre de séjour : l’intérim, le nettoyage, le BTP, l’aide à domicile mais aussi dans les cuisines de grands restaurants, des fournisseurs de grands commanditaires publics, etc.
Depuis mars, le sujet n’est plus un tabou pour certains dirigeants patronaux (ANDRH, Ethic, CGPME, Veolia Propreté) qui réclament eux aussi une clarification des règles de régularisation pour motif professionnel alors que le gouvernement est engagé dans une politique de maîtrise des flux migratoires.

Eric Besson assouplit la régularisation par le travail | 19.06.10 | 14h01 • Mis à jour le 19.06.10 | 14h01
Après huit mois de conflit, le ministère de l’immigration et la CGT sont parvenus à un accord, vendredi 18 juin au soir, sur des critères de régularisation des travailleurs sans-papiers. La réunion qui a permis d’aboutir à une avancée certaine dans le conflit, a duré près de six heures. Dans la foulée, la CGT a évacué le bas des marches de l’Opéra Bastille, à Paris, qu’elle occupait jour et nuit avec plusieurs centaines de sans-papiers, depuis le 27 mai.
Les nouveaux critères de régularisation
Salariés classiques
Avant : 12 mois d’activité continue dans les 12 derniers mois et dans la même entreprise.
Désormais : 12 mois d’activité dans les 18 derniers mois dont 6 dans les 12 derniers mois.
Intérimaires
Avant : régularisation quasi impossible.
Désormais : 12 mois d’activité dans les 24 derniers mois dont 6 dans les 12 derniers mois. L’agence d’intérim doit aussi garantir un cumul de 12 mois de travail sur les 18 mois à venir. Contrats de mission-formation acceptés.
Employés de maison
Avant : régularisation quasi impossible.
Désormais : promesse d’embauche chez des particuliers pour 20 heures par semaine. S’engager à les compléter pour atteindre au moins le smic mensuel.
Acceptation des multi-employeurs
Avant : n’avoir travaillé que pour une seule entreprise.
Désormais : tous les types de salariés peuvent faire valoir une activité professionnelle dans plusieurs entreprises.
Depuis huit mois, quelque 6 000 immigrés en situation irrégulière, soutenus par la CGT ainsi que dix autres syndicats et associations, faisaient valoir " l’absurdité" de leur situation juridique. Soit celle de clandestins travaillant dans des emplois “déclarés” - souvent avec des faux papiers - mais dans l’impossibilité d’obtenir une régularisation à cause de la -législation en vigueur jugée trop “restrictive”.
L’un des points les plus importants de l’accord finalement obtenu concerne les intérimaires, qui étaient jusqu’à présent exclus des possibilités de régularisation pour motif professionnel. Il fallait en effet justifier d’au moins douze mois d’activité continue dans la même entreprise lors des douze derniers mois. Or, les agences d’intérim emploient très souvent des clandestins - à leur insu ou pas.
Désormais, pour les intérimaires - comme pour l’ensemble des autres salariés - il sera possible de faire-valoir des contrats de plusieurs sociétés. La période de prise en compte de l’activité salariée a aussi été considérablement -allongée. Elle passe de douze à -vingt-quatre mois. Les exigences d’emploi “à venir” sont également assouplies.
L’autre point important de l’accord signé vendredi concerne le secteur des services à la personne et notamment celui des employés de maison. Il vise en particulier les femmes sans-papiers. Ce secteur est très parasité par le travail au noir. Or, auparavant, la nécessité d’un contrat de travail en bonne et due forme privait de facto beaucoup de celles-ci des possibilités de régularisation.
Désormais, une régularisation pourra être envisagée si elles présentent une promesse d’embauche chez des particuliers pour un volume horaire de 20 heures par semaine. Elles devront compléter ces heures pour que le salaire mensuel atteigne au moins le smic. Le ministère parie sur l’encouragement actuel aux regroupements de particuliers employeurs sous forme d’association. Un système qui permet par exemple de déclarer une nounou commune.
Dans un autre domaine, l’un des points de contestation de la CGT durant le conflit était l’hétérogénéité d’appréciation des dossiers en préfecture. Certains obtenaient des refus de régularisation, d’autres, équivalents, étaient acceptés. Après une évaluation lancée début juin, le ministère a reconnu des dysfonctionnements.
Dans le cadre de l’accord signé vendredi, le ministère d’Eric Besson s’est donc engagé à instaurer un suivi de toutes les demandes qui seront déposées en préfecture. Un comité de pilotage doit être très vite mis en place avec le ministère du travail. Il se réunira au moins une fois par trimestre et s’assurera de l’homogénéité de traitement des dossiers.
Cet accord avec la CGT, le ministère de l’immigration le justifie par la volonté “d’amener à la régularisation des personnes qui n’osaient pas se déclarer jusqu’à présent”. D’abord, parce qu’il vise à accompagner “le marché du travail”. Ensuite, parce qu’il “fluidifie” les procédures. L’objectif au bout du compte, est de vider un peu le “stock” de clandestins présents en France, évalué entre 200 000 et 400 000 personnes.
Plus politiquement, avec cet accord, au ministère de l’immigration on confie s’être sorti “d’une situation très désagréable pour tout le monde”. Les piquets de grèves depuis huit mois, un peu partout en Ile-de-France, dont celui au pied des marches de l’Opéra Bastille, faisaient désordre. Il convenait aussi de se presser face au nouveau projet de loi sur l’immigration soumis au Parlement fin septembre et qui vise justement à renforcer les sanctions contre les chefs d’entreprise employant des personnes en situation irrégulière.
Toute la difficulté pour le ministère a donc été de trouver un compromis avec la CGT qui n’enclenche pas pour autant, à ses yeux, un phénomène “d’appel d’air”. En termes de communication, il ne parle d’ailleurs pas de “processus de régularisation” mais “d’une procédure qui peut s’achever par une régularisation”.
La CGT, de son côté, s’est réjouie, sans euphorie, d’un accord “positif” avec de “véritables avancées”. Le leader syndical du mouvement, Raymond Chauveau met en avant ce qui ternit, selon lui, l’exemplarité de l’accord. Notamment, la possibilité pour l’administration de tenir compte de la durée de séjour en plus des critères professionnels, et les restrictions de l’accord sur les agents de sécurité. “Le gouvernement a du mal à aller jusqu’au bout de sa logique”, a-t-il regretté.
Sur la place de la Bastille, vendredi soir, la nouvelle n’en a pas moins suscité de la part des travailleurs sans-papiers présents, des hourras de joie.
Elise Vincent
Article paru dans l’édition du 20.06.10.