Bon, le temps que je tape ma réponse, fbruntz a posté sa réponse. Je plussoie, et ajoute tout de même la mienne (parce que ça m’a pris du temps ^^)
Tout d’abord, je tiens à préciser que je ne tiens pas à faire polémique, mais je trouve que cette question thème-mécanique ainsi que ce que peut impliquer le support ludique (qui se doit d’être divertissant mais qui peut également être porteur d’une réflexion) est un élément intéressant à discuter, surtout si l’on veut voir apparaître des thèmes novateurs. A ce titre, je salue l’initiative dont vous faîtes preuve.
Après, c’est plus dans les faits et dans la réalisation que je ne vous rejoins pas et où mes opinions divergent, quitte à me faire passer pour le rabat-joie de service.
Par contre je pense qu’on ne peut pas séparer le thème et le côté ludique inhérent à un jeu. Si j’avais écrit un bouquin ou fait un blog, oui, j’aurais plutôt critiquer les dirigeants, le groupe, et la politique du tout TGV afin d’en vendre à l’étranger au détriment de l’état des réseaux régionaux. Mais Cheminot Simulator est un jeu de cartes […]
Je trouve ce point intéressant. Je suis d’accord sur le point de nouage thème/mécanique. Par contre, selon vous, du fait du support choisi, il ne pourrait pas y avoir de critique des dirigeants. Pourtant, plusieurs jeux récents critiquent le libéralisme en faisant jouer des grands patrons aux joueurs. L’ancêtre du Monopoly était lui-même un objet d’éducation et de critique du capitalisme développé par des alternatifs américains à la fin du XIXème siècle.
Un jeu où les joueurs incarnent des infirmières dont le but est de faire poireauter le plus possible les patients dans une salle d’atente et de négliger les soins des patients, même sous couvert d’humour, ferait porter la responsabillité sur les seules épaules de celles et ceux qui font bien souvent comme ils peuvent avec les moyens alloués par la direction, et je pense que posé sur un thème médical, cela choquerait plus qu’ici, alors que ce qui est en jeu est identique.
[…] et pour fonctionner il doit comme tous les jeux toucher les joueurs, soit par leur affinité avec le thème (heroic fantasy, SF, etc.), soit par leur mécanique abstraite (Abalone par exemple), soit par la proximité avec leur quotidien.
C’est ce 3ème point d’entrée que j’ai choisi, et les cheminots sont les plus proches des voyageurs, il était donc logique que les joueurs les incarnent. Après chacun y verra ce qu’il souhaite, j’espère simplement que la majorité des gens, qu’ils soient voyageurs ou cheminots, saura prendre le recul nécessaire pour comprendre ce que le jeu dénonce.
Ce qui sous entend que c’est moi (et les autres que cela dérange) qui ne sait pas prendre le recul nécessaire.
Plus sérieusement, choisir l’aspect de la proximité avec le quotidien est assez intéressant. En effet, c’est un parti pris ludique pas si courant finalement (on joue plus souvent des seigneurs/rois/chefs/marchands que des conducteurs de train). Et ça, c’est chouette. Mais là où je ne suis plus aussi d’accord, c’est que sous couvert d’humour, vous caricaturez la personne dont le joueur était sensé être proche, or l’exercice de caricature exacerbe certains aspects, faisant du sujet caricaturé quelque chose qui de fait n’est plus humain, puisque coupé de la complexité de ce qu’il est en globalité.
Un développement possible aurait par exemple pu être de faire incarner un cheminot à chaque joueur, et lui donner l’objectif d’être le plus à l’heure possible malgré tous les évènements négatifs qui arrivent (on joue chez les autres des cartes “vol de cuivre”, “troupeau de bovins” …). En posant les choses de cette façon, on critique les retards, mais du côté du système, et plus du côté des cheminots. En posant un système de points où il s’agit d’être le moins en retard malgré tout, on pousse les joueurs dans quelque chose de positif face à une mécanique négative, et du coup l’idéologie transmise n’est plus “quelles feignasses ces cheminots” mais bien “raah la SNCF ça craint”.
Pour l’instant c’est plutôt le cas, mais je comprends tout à fait votre point de vue (à tous les 3). Le temps nous dira si j’ai fait une erreur en faisant incarner des cheminots aux joueurs, ou si au contraire le jeu est apprécié et compris.
Une fois de plus, la formulation sous entend que ceux que cela dérange n’ont “rien compris”, alors qu’à priori, nous comprenons, mais n’en tirons pas les mêmes conclusions que vous, ce qui est bien différent.
“L’erreur”, comme vous dîtes, n’est pour moi pas dans le choix de faire incarner des cheminots mais dans la façon de les incarner (cf. développement ci-dessus).
J’ajoute enfin pour revenir sur l’humour, qu’il est très souvent basé sur les clichés et les généralités. À bon entendeur 
Cela est surtout vrai parce qu’il est plus facile de faire de l’humour basé sur des clichés et des généralités, quitte à transformer l’humour en vecteur de transmission de ces clichés plutôt qu’en outil de lutte contre ces clichés.
De plus, ce n’est pas parce que c’est “généralement” le cas qu’il faut le reprendre du coup… Mais j’ai du mal entendre…
Une dernière chose qui peut-être a pu vous manquer dans votre analyse : Cheminot Simulator fonctionne autour d’un système d’événements aléatoires grâce auxquels les joueurs vont pouvoir réagir en posant des cartes. Ce sont ces événements, qui traitent autant des problèmes d’affluence de voyageurs que d’avaries matérielles en passant par les intempéries, qui permettent de mettre des passagers en retard dans le jeu.
J’avais bien saisi cette remarque que vous aviez déjà posé plus haut dans le débat, cependant, en terme ludique, les joueurs-cheminots “utilisent” ces cartes évènements pour “travailler moins et mettre en retard les passagers”, ce qui sous-entend donc que les cheminots utiliseraient ce que l’ont peut qualifier de prétextes au profit de leur fainéantise et de leur mépris des passagers.