Jeux de réflexion : de l'amusement

Il y a déjà eu (au moins) un sujet approchant, mais j’avoue que j’ai la flemme de le rechercher.

A priori j’avais déjà du répondre en citant l’excellent billet de Bruno Faidutti : Le jeu contre l’angoisse du monde
(pareil : flemme, tout ça… “Cherchez et vous trouverez”. C’est vraiment très bien, érudit, intelligent et bien écrit. Et j’adhère à 200%.

Il est probable qu’à une époque (lointaine) j’ai été attiré par le côté “compétition intellectuelle” mais ça m’a passé. Un jeu où l’on réfléchit beaucoup ne me rebute pas, mais s’il ne me fait pas vibrer je vais m’y ennuyer.
Raison pour laquelle les très belles mécaniques comme Darwin’s journey ou Sankoré (par exemple) me laissent un peu froid, alors que je considère Root comme du pur génie alors que je n’aime pas trop mes jeux d’affrontement à la base.

Accessoirement, lorsqu’il y a trop d’ego autour de la table l’ambiance a tendance à se dégrader… et j’ai bien assez du boulot tous les jours pour me tartiner un combat de coqs supplémentaire le soir :sweat_smile:

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Ouiiii ?

C’est évident que je joue aux jds pour me creuser la tête. Je ne sais pas expliquer en quoi faire un effort intellectuel peut engendrer du plaisir – on pourrait penser que résoudre un casse-tête, compter, se creuser la tête serait plutôt pénible, fatigant –, mais c’est comme ça.

Maintenant, à quel moment l’effort intellectuel cesse de procurer du plaisir ? C’est une bonne question. J’ai une petite idée qui me vient : quand le retour sur investissement est disproportionnément bas. Et là, je vois deux cas (dans ce qui suit, par “coût”, j’entends le coût d’un coup, mais aussi le coût en énergie et en ressources mentales qu’il faut mettre dans le jeu pour y jouer un minimum correctement) :

  • A) coût faible et gain pas beaucoup moins faible. Par exemple, sur Narak ou sur Charterstone, je n’ai pas trouvé de plaisir car chaque coup rapporte trop peu. La gratification n’est pas là. Il faut faire plusieurs coups moisis pour enfin avoir un waouh (et même le waouh n’est pas si pharamineux).
  • B) coût élevé et gain pas beaucoup plus élevé. C’est quand l’investissement nécessaire n’est pas à la hauteur du plaisir procuré.
    Par exemple, Indonesia, où il m’aurait fallu un tableur Excel ou un ordi pour m’épargner des calculs rébarbatifs pour bien jouer (problème d’opacité).
    À Spirit Island, les possibilités à chaque tour sont trop nombreuses pour moi, je n’ai pas envie de passer 30 minutes à réfléchir à la meilleure façon de pisser parce que le jeu est tellement violent qu’il faut en passer par-là (problème d’excès de possibilités).
    Et enfin, les jeux où ton tour peut être composite, càd où tu as ton action principale mais où quasi à chaque tour tu peux décider de faire des actions annexes moyennant ci et ça, ou alors tu vas garder ci et ça pour plus tard mais faut quand même prendre une décision (problème de non-fluidité). Ça fait des tours trop longs, pas fluides, et ça me gonfle.

Ça, ça m’arrive aussi clairement : Caylus, Goa, Steam, je les adore, mais je les sortirais pas toutes les semaines, ou même tous les mois.
Pareil pour certains films : j’ai apprécié leur visionnage, mais je les reverrais pas.

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C’est marrant, parce que ça fait un bout de temps que je me pose la question du lien plaisir-souffrance dans les jeux de réflexion que tu aimes.


Par exemple : tu aimes le jeu de go. Tu es en train d’y jouer et l’adversaire fait un coup qui te pose vraiment problème, qui te demande une réflexion intense parce que si tu te plantes tu vas perdre et tous tes efforts auront été inutiles.

Tu cherches, tu cherches, tu ne trouves pas, tu te creuses la cervelle, tes neurones carburent à plein.

À ce moment-là, est-ce que tu souffres, alors que tu as choisi délibérément de jouer à ce jeu qui te plaît tant et dont tu sais ce qu’il implique d’effort mental, ou est-ce que tu prends du plaisir, alors même que tu joues pour gagner et que tu es en train de griller plein de ressources mentales dans une situation si difficile qu’elle compromet très grandement cet objectif ?

Je suppose que cette phrase n’est pas à prendre au sens littéral dans ton message mais je la mets quand même en avant car c’est un des points de la réflexion : quel est son objectif ?

Sur un jeu abstrait, est ce que ça procure du plaisir de chercher comment perdre en 5 coups au lieu de perdre en 2 coups ? Moi je pense que oui. :grin:

Certains jeux très dépendant des « mains » de départ et/ou des premières actions (Race for the Galaxy, Res Arcana), tu vois parfois clairement a 30% de la partie qui va gagner.
Mais ça n’empêche pas de prendre du plaisir à essayer de construire quelque chose et de l’optimiser, même en sachant qu’en face il y aura mieux.