Les jeux de Lacerda vs. Terra Mystica / Projet Gaia

fdubois dit :

Hyperborée dit :
Pourrais-tu me dire s'il te plaît pourquoi ce serait le "jeu le plus abouti" de Lacerda selon toi ?
Peux-tu développer un peu aussi sur Co2, histoire de me/nous donner envie ?

Parce que, pour moi, dans Kanban et Co2, le thème est plus présent que dans ses autres jeux (je n'ai pas joué à Gallerist et Escape Plan). Et je rejoins Vesil : ces 2 jeux me racontent une histoire.

Alors certes, construire des bagnoles, être évalué par un supérieur et faire mieux que ses collègues ne plait pas à tout le monde.

Mais objectivement, et comme certains l'ont déjà dit ici ("on se croirait au boulot"), si on prend un peu de recul et au delà des goûts et des couleurs, le gameplay et les mécanismes sont au service du thème et l'ensemble forme un tout cohérent, tout fait sens :
- Sandra qui se balade dans les départements
- les évaluations en fin de semaine de travail
- le système de formation et de certification
- les actions hyper thématiques : design d'un modèle, collecter des pièces, assembler des voitures, tester des voitures...

Il n'a pas tous les artifices mécaniques d'un Lisboa (influence, navires abstraits au possible, clergé...).
Il n'a pas certains manques thématiques d'un Vinhos (les 4 niveaux d'évaluation du pinard qui sont abstraits au possible, les bonus des experts...)

Malgré le fait que ce soit un jeu hyper geek et réservé aux "professionnels de la profession", je trouve qu'il reste épuré pour un jeu de cette catégorie : il n'y a rien à ajouter/retirer dans Kanban contrairement à un Lisboa par exemple.

Et Co2 est dans la même veine :
- soutenir les continents pour les aider dans la transition énergétique
- système de recherche dans différentes énergies renouvelables
- actions hyper thématiques : proposer un projet de centrale, construire les installations, construire une centrale, acheter/vendre des permis d'émission de polluer, participer à des sommets scientifiques...

Par contre, vous n'aurez pas mon avis sur Januhairy, les LGBT etc....

Merci d'avoir développé. Hélas, je ne suis toujours pas convaincu. J'ai trouvé quant à moi que l'assemblage de tous les éléments constitutifs du jeu ne créait pas d'étincelle. Un bout-à-bout indigeste, où on court à droite à gauche pour faire plein de petits trucs, sans la satisfaction de construire. Et le thème, sorry, vraiment répulsif pour moi. En plus une camarade au fait de la méthode Kanban m'a affirmé que le jeu n'exprimait pas du tout ce qu'elle est en réalité, mais je ne saurais dire, n'ayant pas creusé la question.

J'essaierai Co2 je pense par contre. Mieux vaut-il jouer en full coop ou l'autre mode de jeu ?

Hyperborée dit :
Iskander dit :Encore une fois, Lacerda à clairement une vision personnelle, il suffit de comparer Vinhos à Viticulture pour voir par exemple que les relations humaines et le système d'échanges qui les entretient sont un objet de fort intérêt pour lui.

Autant je te suis pour l'ironie (légère) sur la foire et les bouteilles de vin refilées aux VIP, autant là je ne suis pas sûr de saisir la comparaison avec Viticulture. Pourrais-tu éclairer ma lanterne ?
 

Dans ses divers jeux revient l'idée de la multiplication de la capacité d'action via la mobilisation des autres. Pour Lacerda, l'idée que nous nos réalisons via l'action de tirs est très prégnante. 

l'entretien de deux niveaux de communication dans les rapports humain revient aussi sans cesse.

Peux-tu nous donner quelques exemples en situation dans les gameplay s'il te plaît ?

 

Je ne vais pas faire une comparaison exhaustive de Vinhos et Viticulture, mais en substance dans Vinhos Lacerda s'intéresse davantage à l'aspect managérial et de création d'entreprise que de vin à proprement parler. L'existence d'une valeur pour la qualité du vin, et une autre pour son prix dans le marché montre déjà qu'il est intéressé par les aspects de promotion, marketing et valeur symbolique du vin, que le joueur entrepreneur va devoir créer. Dans vinhos les joueurs ne font pas du vin, ils créent une marque de vin, tout comme Stegmaier ou Apple ont réussi à créer des marques qui suscitent un attachement fort de leurs clients, au delà de la qualité intrinsèque des produits. C'est cet exercice de branding qui est au coeur de Vinhos, et absent de Viticulture, et montre par là la vision de Lacerda.

Pour réussir dans la création d'une marque prestigieuse, Vinhos nous enseigne que l'établissement de rapports personnels et de réseautage sont essentiels, d'où la place disproportionnée donnée aux salons et concours par rapport à la partie "création d'un bon vin" ou même de vente dans le jeu. Ce sont les Salons qui donnent accès aux VIP, et ce sont les VIP qui te permettent de vraiment gagner en capacité d'action. C'est via les actions obtenues via les VIP que un joueur peut démultiplier sa capacité d'action. Sans réseautage, point de salut.

Dans les jeux de Wallace cette question de développer ses moyens d'action via la création d'un réseau relationnel est absent, et on opère souvent via des prêts qui créent la tension et le risque, mais qui sont des moyens "solitaires", le joueur reste à l'initiative et implémentation des actions, ils n'amène pas des agents indépendants à agir dans son intérêt [NB: il y a bien des intérêts partagés qui peuvent se développer dans les jeux de Wallace, mais c'est encore autre chose]

De même dans Lisboa l'influence est une ressource essentielle, et on passe sont temps dans la cour des puissants pour obtenir des "faveurs" qui démultiplient notre capacité d'action. On existe via les autres, plutôt quel e self-made man ou le robinson crusoé.

Iskander dit :

On existe via les autres, plutôt quel e self-made man ou le robinson crusoé.

C'est ce que reussi Brass pour moi, d'une maniere tres differente.
Et c'est peut etre la que tout se joue : la ou a Brass on ne peut exister que via les autres joueurs (c'est a dire d'autres humains bien reels), a Lisboa ou Vinhos on ne peut exister que via des elements thematiques censes representer des humains (c'est a dire des humains fictifs).

Je pense que ce qu'il me manque, dans un Lacerda, c'est l'interaction avec les autres joueurs autour de la table.
Je ne parle pas (directement) d'interaction mecanique, mais de connection entre les joueurs. Brass force les joueurs a se connecter, et cree donc une connection forte entre les joueurs a la table. Une connection particulierement riche, vu qu'elle est basee sur la coopetition.

Je me demande donc si la petite etincelle qui fait la difference se situe dans la complexite, la profondeur et la diversite de la connection entre les joueurs creee, promue ou induite par le jeu et ses mecanismes.
Pas necessairement besoin d'une interaction forte ou destructrice, juste quelque que chose qui va creer un rapport entre les joueurs, un moment partage particulier.

Alors bien sur, il y a le probleme des jeux solo.
J'ai beaucoup de mal, tant sur plateau qu'en video. Quand je joue, je cherche avant tout une connection avec les autres personnes autour de la table.

Hyperborée dit :Je précise que les jeux dits abstraits ne sont pas des jeux mécaniciens pour moi. Un jeu mécanicien est un jeu qui a la prétention d'avoir un thème mais n'en fait strictement rien, créant ainsi une dissonance cognitive. On se demande si ça fonctionnerait sans thème, et si non, bah ça fonctionne pas avec le thème retenu (généralement générique et impensé).
Dominion est typiquement un jeu mécanicien.

Les jeux abstraits ont l'élégance de ne pas avoir le cul entre deux chaises. Ils sont, comme leur nom l'indique, dans l'abstraction (qui a ses charmes spécifiques).

J'adhère avec cette vue des choses. Pour moi, tout jeu est de toute manière forcément abstrait. La fameuse thématique n'est toujours qu'une esbrouffe, un habillage plus ou moins sexy, plus ou moins bien coupé, discret ou pas, etc. mais toujours de fait fondamentalement superficiel et artificiel. La qualité de certains auteurs, comme les grands couturiers, est au moins de tenter et parfois d'arriver à dessiner l'habit qui mettra le mieux en valeur son "modèle" et (surtout...) vice versa: l'un et l'autre devenant alors presque indissociables.

Quant aux jeux abstraits, ils sont la liberté: celle de se créer (ou pas) un univers à partir d'éléments qui en soi ne signifient rien et/ou ne se réfèrent à rien d'autre que ce qu'ils sont (une pierre, une pièce de bois, un quadrillage, un enchevêtrement de lignes, etc., etc., etc.). Le joueur de GO peut se voir en faiseur d'univers, le joueur d'échec en général polymorphe et omniscient, le joueur de Zertz en magicien qui fait apparaître et disparaître des molécules de différentes natures et couleurs sur un espace qu'il meut et modèle à son gré, etc., etc., etc.

Mais souvent, les joueurs (et les non-joueurs aussi d'ailleurs) sont consciemment ou inconsciemment effrayés par la liberté (sensation de se jeter dans le vide et l'inconnu) et préfèrent être guidés, la thématique (qu'elle soit finement dessinée ou pas) fonctionnant elle aussi comme cadre et comme guide/berger/référent visant à conforter que l'on est en territoire connu, dans un pré carré immédiatement reconnaissable, bien délimité et clairement identifié.

Je précise que je ne m'exclus d'aucun des cadres que je brosse ci-dessus et que je prends ludiquement autant de plaisir (en fonction des moments et des circonstances) à me laisser guider qu'à jouir d'une liberté créative.

 
Hyperborée :
Merci d'avoir développé. Hélas, je ne suis toujours pas convaincu. J'ai trouvé quant à moi que l'assemblage de tous les éléments constitutifs du jeu ne créait pas d'étincelle. Un bout-à-bout indigeste, où on court à droite à gauche pour faire plein de petits trucs, sans la satisfaction de construire. Et le thème, sorry, vraiment répulsif pour moi.

J'avais pourtant pris des pincettes pour expliquer mon propos ("objectivement", "prendre du recul", "les goûts et les couleurs"...).

Tu n'aimes pas le thème, OK fine.
Mais il n'en est pas moins certains que dans Kanban, tu as vraiment l'impression de construire des bagnoles.

Tous les micro trucs & les micros mécanismes de Lisboa ne transpirent pas le thème, loin s'en faut.
T-Bow dit :
Iskander dit :

On existe via les autres, plutôt quel e self-made man ou le robinson crusoé.

C'est ce que reussi Brass pour moi, d'une maniere tres differente.
Et c'est peut etre la que tout se joue : la ou a Brass on ne peut exister que via les autres joueurs (c'est a dire d'autres humains bien reels), a Lisboa ou Vinhos on ne peut exister que via des elements thematiques censes representer des humains (c'est a dire des humains fictifs).

Je pense que ce qu'il me manque, dans un Lacerda, c'est l'interaction avec les autres joueurs autour de la table.
Je ne parle pas (directement) d'interaction mecanique, mais de connection entre les joueurs. Brass force les joueurs a se connecter, et cree donc une connection forte entre les joueurs a la table. Une connection particulierement riche, vu qu'elle est basee sur la coopetition.

Je me demande donc si la petite etincelle qui fait la difference se situe dans la complexite, la profondeur et la diversite de la connection entre les joueurs creee, promue ou induite par le jeu et ses mecanismes.
Pas necessairement besoin d'une interaction forte ou destructrice, juste quelque que chose qui va creer un rapport entre les joueurs, un moment partage particulier.

Alors bien sur, il y a le probleme des jeux solo.
J'ai beaucoup de mal, tant sur plateau qu'en video. Quand je joue, je cherche avant tout une connection avec les autres personnes autour de la table.

Il est vrai que si dans Lacerda ce que tu fais est très dépendant de ce que font les autres, et que donc il y a une forte interaction entre les joueurs, l'aspect intérêts partagés me semble bien moins présent (en tout cas c'est clair dans Vinhos). Il y a bien de la coopétition (pousser une certaine tendance dans le salon de vin, ou profiter d'une certaines configuration dans le remplissage des bâteaux ou niveau de trésorerie dans Lisboa), mais c'est plus situationnel que les relations plus structurelles que l'on peut voir dans Brass, et encore plus dans les jeux mobilisant un actionnariat partagé.

Pour rebondir sur la discussion theme vs. abstrait, je pense que ma preference pour un theme bien integre vient du fait qu’il enrichit ma connexion.
C’est pas pour rien que je me dirige de plus en plus vers des jeux a theme historique. Quand l’abstraction d’un theme (qui existe toujours, je suis d’accord) arrive malgre tout a generer la sensation de vivre pleinement le theme propose…
L’exercice me parait en plus beaucoup plus difficile que celui du jeu abstrait, et donc d’autant plus exceptionnel lorsqu’il est reussi.

Ceci etant dit, pour moi les jeux dits “a theme plaque” feraient mieux d’assumer et d’aller directement a la case abstraction (sans toucher 20 000). C’est un point quasi redhibitoire pour atteindre ma vision de l’excellence.
Et c’est pour cela que je prefere 20 000 fois n’importe quel Eklund a n’importe quel Feld, Rosenberg… La liste est longue.

Iskander dit :

mais c'est plus situationnel que les relations plus structurelles que l'on peut voir dans Brass, et encore plus dans les jeux mobilisant un actionnariat partagé.

Salut Imperial!

Merci pour ton développement intéressant Iskander. Je suis d’accord avec toi sur le fait que Vinhos est un jeu sur le branding du vin (Lacerda vient du marketing et de la pub, ne l’oublions pas). C’est sa singularité.

Mais… Viticulture ne met-il pas aussi en scène le nécessaire réseautage via les cartes Saisonniers ?
Alors oui, c’est fait de manière peut-être moins systémique que chez Lacerda, de façon plus diachronique et plus aléatoire, mais au final plus… humaine peut-être ?

Viticulture nous donne à voir une multitude de métiers, de visages singuliers (on est loin de l’approche stéréotypée des Experts business-business d’O’Toole) ; un monde divers et vivant s’offre à nous, où il n’y a d’autre grande loi que celles des échanges interpersonnels, des saisons et du travail de la terre (toutes choses dont Lacerda l’urbain se contrefiche).

Je veux bien qu’on dise que pour Lacerda l’individu isolé n’est rien, que nous ne sommes qu’interdépendance et animaux sociaux voués à réseauter… mais son gameplay ne nous le fait pas réellement ressentir sur un plan émotionnel. Ça reste éminemment cérébral et surplombant.

Alors que Viticulture donne a ressentir peu ou prou la même idée des échanges au sein d’un collectif humain, mais à hauteur d’homme.
(outre le fait que Viticulture est un jeu plus profond)

T-Bow dit :
Iskander dit :

On existe via les autres, plutôt quel e self-made man ou le robinson crusoé.

Je pense que ce qu'il me manque, dans un Lacerda, c'est l'interaction avec les autres joueurs autour de la table.
Je ne parle pas (directement) d'interaction mecanique, mais de connection entre les joueurs. Brass force les joueurs a se connecter, et cree donc une connection forte entre les joueurs a la table. Une connection particulierement riche, vu qu'elle est basee sur la coopetition.

Je me demande donc si la petite etincelle qui fait la difference se situe dans la complexite, la profondeur et la diversite de la connection entre les joueurs creee, promue ou induite par le jeu et ses mecanismes.
Pas necessairement besoin d'une interaction forte ou destructrice, juste quelque que chose qui va creer un rapport entre les joueurs, un moment partage particulier.

Je pense que tu mets le doigt sur quelque chose, en effet...
(c'est pour ça que je me tue à dire qu'Inis est un grand jeu ! Mais les pousseurs de cubes ont les idées bien arrêtées...!) x-)

T-Bow dit :
Ceci etant dit, pour moi les jeux dits "a theme plaque" feraient mieux d'assumer et d'aller directement a la case abstraction (sans toucher 20 000). C'est un point quasi redhibitoire pour atteindre ma vision de l'excellence.
Et c'est pour cela que je prefere 20 000 fois n'importe quel Eklund a n'importe quel Feld, Rosenberg... La liste est longue.

Dans mes bras mec ! :-)
Suis 100% d'accord avec ça.

Feld, Rosenberg... => les seigneurs des jeux mécaniciens, lol.

T-Bow dit :
Iskander dit :

mais c'est plus situationnel que les relations plus structurelles que l'on peut voir dans Brass, et encore plus dans les jeux mobilisant un actionnariat partagé.

Salut Imperial!

Absolument! ^_^)b

Hyperborée dit :Merci pour ton développement intéressant Iskander. Je suis d'accord avec toi sur le fait que Vinhos est un jeu sur le branding du vin (Lacerda vient du marketing et de la pub, ne l'oublions pas). C'est sa singularité.

Mais... Viticulture ne met-il pas aussi en scène le nécessaire réseautage via les cartes Saisonniers ?
Alors oui, c'est fait de manière peut-être moins systémique que chez Lacerda, de façon plus diachronique et plus aléatoire, mais au final plus... humaine peut-être ?

Vinhos a aussi ses "oenologistes" et "experts", qui comme les saisonniers sont plus des relations contractuelles, mais c'est clairement pas l'intérêt principal de Lacerda, qui s'intéresse davantage au positionnement d'une entreprise au sein de son secteur que viticulture, qui est décrit une exploitation qui vit sur elle même par rapport aux autres acteurs du secteur viticole. C'est clairement un parti pris de cet auteur, mais c'est justement pour ça que je dis qu'il a une vision claire, que l'on peut aimer ou pas.

Viticulture nous donne à voir une multitude de métiers, de visages singuliers (on est loin de l'approche stéréotypée des Experts business-business d'O'Toole) ; un monde divers et vivant s'offre à nous, où il n'y a d'autre grande loi que celles des échanges interpersonnels, des saisons et du travail de la terre (toutes choses dont Lacerda l'urbain se contrefiche).

Je veux bien qu'on dise que pour Lacerda l'individu isolé n'est rien, que nous ne sommes qu'interdépendance et animaux sociaux voués à réseauter... mais son gameplay ne nous le fait pas réellement ressentir sur un plan émotionnel. Ça reste éminemment cérébral et surplombant.

Alors que Viticulture donne a ressentir peu ou prou la même idée des échanges au sein d'un collectif humain, mais à hauteur d'homme.
(outre le fait que Viticulture est un jeu plus profond)

Je suis intéressé d'entendre que Viticulture te mobilise plus sur le plan émotionnel que Vinhos. Je pense que c'est probablement dû à tes préférences esthétique et les éléments que tu mentionnes (lien à la terre par exemple).

En ce qui me concerne personnellement, et c'est aussi l'expérience que ma femme ressent, un jeu de Vinhos est plein de tension et une aventure de grande ampleur qui laisse loin derrière ce que Viticulture peut produire. Je ne dis pas que l'un de nous a raison, l'autre tort, mais que les goûts sont différents. Je ne trouve pas du tout que Vinhos soit sans émotion, mais tout dépend de ce qu'on parle, et de nos propres préférences.

Par ailleurs, en terme de profondeur, je ne suis pas non plus convaincu que Viticulture en aie plus que Vinhos, mais c'est un autre débat et je pourrais totalement envisager (et même souhaiter) me tromper, car Viticulture n'est pas un jeu qui m'a beaucoup intéressé.

A noter que l’actionnariat n’est pour moi ni plus ni moins qu’une forme de coopetition… Cependant, elle n’interdit pas intrinsequement l’isolationnisme (etre actionnaire unique).

D’ailleurs, l’actionnariat dans les jeux n’est qu’un cas particulier d’une notion plus large : le partage d’un element de jeu. Et lorsque ces elements partages sont au coeur du jeu et le partage tres fortement incite, on obtient la coopetition.
A Brass, l’actionnariat c’est les capacites d’activation des industries. A Wildcatters, les capacites associees a chaque region d’extraction de petrole. A Liberte, l’influence dans les 3 factions.
La coopetition me semble impliquer une orthogonalite minimale entre les joueurs et les ressources du jeu. Impossible (au moins dans les faits) de s’accaparer les leviers centraux du jeu, en tout cas pas au-dela d’un certain point.

Pour en revenir a Maria, je ferais rentrer Richard Sivel dans la categorie des grands auteurs sans grande hesitation.
Maria et Wir sind das Volk suffisent largement a mon sens.

Iskander dit :
Hyperborée dit :Je veux bien qu'on dise que pour Lacerda l'individu isolé n'est rien, que nous ne sommes qu'interdépendance et animaux sociaux voués à réseauter... mais son gameplay ne nous le fait pas réellement ressentir sur un plan émotionnel. Ça reste éminemment cérébral et surplombant.

Alors que Viticulture donne a ressentir peu ou prou la même idée des échanges au sein d'un collectif humain, mais à hauteur d'homme.
(outre le fait que Viticulture est un jeu plus profond)

Je suis intéressé d'entendre que Viticulture te mobilise plus sur le plan émotionnel que Vinhos.

Je fais aussi partie de ceux qui considèrent Viticulture comme un grand jeu et qui me mobilise (pas seulement sur le plan émotionnel...) bien plus que ne l'a jamais fait Vinhos (j'y avais joué au moment de sa sortie et il faudrait peut-être que je lui redonne sa chance mais rien que l'idée me submerge de flemme et d'une profonde envie de dormir... donc, il est (malheureusement) quasi certain que je m'abstiendrai).


Bon, je n’ai pas de point de comparaison avec d’autres jeux de Lacerda, je n’ai joué qu’à On Mars. Mais, dans ce dernier, n’y a-t-il pas tout de même un aspect “coopétitif” relativement important ? Au moins à 2 niveaux :
- sur la carte (dimension spatiale): les bâtiments construits n’appartiennent à personne
- sur les plateaux persos : tout le monde peut utiliser les technos “appartenant à d’autres joueurs”

Une partie non négligeable des actions importantes que peut faire un joueur peut favoriser ou servir d’appui aux autres joueurs, en particulier à la surface de Mars. Je pourrais donner d’autres exemples (fonctionnement des scientifiques, façon dont apparaissent les contrats terrestres…).

Pour ceux qui y ont joué, est-ce une spécificité de On Mars parmi la production ludique de Lacerda ?

Je n’ai malheureusement pas eu l’occasion de jouer à Brass (notamment parce j’exclus depuis longtemps les jeux qui sont peu ou bien moins intéressants à 2 joueurs) qui semble être un modèle de ce que certains appellent un jeu “coopétitif”.

Iskander dit :
Hyperborée dit :Merci pour ton développement intéressant Iskander. Je suis d'accord avec toi sur le fait que Vinhos est un jeu sur le branding du vin (Lacerda vient du marketing et de la pub, ne l'oublions pas). C'est sa singularité.

Mais... Viticulture ne met-il pas aussi en scène le nécessaire réseautage via les cartes Saisonniers ?
Alors oui, c'est fait de manière peut-être moins systémique que chez Lacerda, de façon plus diachronique et plus aléatoire, mais au final plus... humaine peut-être ?

Vinhos a aussi ses "oenologistes" et "experts", qui comme les saisonniers sont plus des relations contractuelles, mais c'est clairement pas l'intérêt principal de Lacerda, qui s'intéresse davantage au positionnement d'une entreprise au sein de son secteur que viticulture, qui est décrit une exploitation qui vit sur elle même par rapport aux autres acteurs du secteur viticole. C'est clairement un parti pris de cet auteur, mais c'est justement pour ça que je dis qu'il a une vision claire, que l'on peut aimer ou pas.

Viticulture nous donne à voir une multitude de métiers, de visages singuliers (on est loin de l'approche stéréotypée des Experts business-business d'O'Toole) ; un monde divers et vivant s'offre à nous, où il n'y a d'autre grande loi que celles des échanges interpersonnels, des saisons et du travail de la terre (toutes choses dont Lacerda l'urbain se contrefiche).

Je veux bien qu'on dise que pour Lacerda l'individu isolé n'est rien, que nous ne sommes qu'interdépendance et animaux sociaux voués à réseauter... mais son gameplay ne nous le fait pas réellement ressentir sur un plan émotionnel. Ça reste éminemment cérébral et surplombant.

Alors que Viticulture donne a ressentir peu ou prou la même idée des échanges au sein d'un collectif humain, mais à hauteur d'homme.
(outre le fait que Viticulture est un jeu plus profon

Je suis d'accord avec toi : ce jeu exprime une vision claire et tout à fait recevable.
Pour moi Vinhos et Viticulture sont complémentaires.

Mais par contre, je ne suis pas certain que Lacerda soit aussi clair sur Gallerist, Lisboa ou Kanban...
 

Je suis intéressé d'entendre que Viticulture te mobilise plus sur le plan émotionnel que Vinhos. Je pense que c'est probablement dû à tes préférences esthétique et les éléments que tu mentionnes (lien à la terre par exemple).

Bof. J'aime beaucoup l'esthétique de Vinhos Deluxe pondue par O'Toole, et pour tout dire c'est vraiment ce qui m'a aidé à plonger dans Lacerda. Et puis j'ai pas de connexion perso particulière avec la terre. Disons que les jeux de pur business sont pas ce qui me transporte le plus.
 

En ce qui me concerne personnellement, et c'est aussi l'expérience que ma femme ressent, un jeu de Vinhos est plein de tension et une aventure de grande ampleur qui laisse loin derrière ce que Viticulture peut produire. Je ne dis pas que l'un de nous a raison, l'autre tort, mais que les goûts sont différents. Je ne trouve pas du tout que Vinhos soit sans émotion, mais tout dépend de ce qu'on parle, et de nos propres préférences.

Par ailleurs, en terme de profondeur, je ne suis pas non plus convaincu que Viticulture en aie plus que Vinhos, mais c'est un autre débat et je pourrais totalement envisager (et même souhaiter) me tromper, car Viticulture n'est pas un jeu qui m'a beaucoup intéressé.

D'accord sur la tension de Vinhos (encore qu'à deux joueurs, ça tombe considérablement), mais  je le trouve plus directif que Viticulture. De parties en parties, on doit à peu près faire les même chose dans un timing donné. Pas top pour la rejouabilité.
Cela dit, j'ai joué 1 fois à la version 2010 et 9 fois à la version 2017, donc peut-être que je rate qqch à cause de ça...
Quoi qu'il en soit, Viticulture est beaucoup plus ouvert, grâce à la combinatoire de cartes (j'ai déjà vu des parties gagnées sans honorer une seule commande !) et c'est l'impulsion donnée par les joueurs qui va faire le tempo du jeu, ce qui, en terme de game design me parait plus puissamment impliquant qu'un nombre de tours fixes.

Ara Qui Rit dit :
Bon, je n'ai pas de point de comparaison avec d'autres jeux de Lacerda, je n'ai joué qu'à On Mars. Mais, dans ce dernier, n'y a-t-il pas tout de même un aspect "coopétitif" relativement important ? Au moins à 2 niveaux :
- sur la carte (dimension spatiale): les bâtiments construits n'appartiennent à personne
- sur les plateaux persos : tout le monde peut utiliser les technos "appartenant à d'autres joueurs"

Une partie non négligeable des actions importantes que peut faire un joueur peut favoriser ou servir d'appui aux autres joueurs, en particulier à la surface de Mars. Je pourrais donner d'autres exemples (fonctionnement des scientifiques, façon dont apparaissent les contrats terrestres...).

Pour ceux qui y ont joué, est-ce une spécificité de On Mars parmi la production ludique de Lacerda ?

Je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de jouer à Brass (notamment parce j'exclus depuis longtemps les jeux qui sont peu ou bien moins intéressants à 2 joueurs) qui semble être un modèle de ce que certains appellent un jeu "coopétitif".

oui c'est assez présent chez l'auteur, quoique particulièrement marqué ici :
- vinhos : mouais pas trop
- CO2 : forcément (semi-coop oblige) à tel point qu'il fallait 3 étapes pour construire quelque chose et généralement par des personnes différentes (dans la première édition, la 2ème étape avait tendance à être plus ingrate d'ailleurs)
- Kanban : le principe de l'organisation de travail c'est cette séquence d'atelier et c'est plutôt bien exploité : travailler sur un atelier va donner de la matière au suivant
- Gallerist : on a le principe de cote d'artiste qu'on peut promouvoir. Naturellement si on est 2 à miser lsur e même "cheval" c'est mieux :)
- Lisboa : les bateaux sont utilisables par tous, le système de déblaiement de la ville fait que chaque travaux dans une rue qu'on fait rend la tâche pour les suivants plus facile.
- escape plan : bon là on est plutôt chacun pour soi :) dans un aspect course. Outre cet aspect l'interaction tient aussi dans les mouvements de policier : en les éloignant de là où on est, on complique la tâche pour les autres tout en se donnant de l'air.

pour viticulture , pas du tout le ressenti du thème. A tel point que la seule partie perdue est celle où j'ai essayé de jouer thématique (planter de la vigne, récolter, faire vieillir, bien le vendre). Les autres fois, j'ai fait méthode 51ème état en craquant du combo de carte, au lieu de piller des drugstores , je plantais des vignes et je les arrachais. Mais ça ne racontait rien que du combo technique..
 

ocelau dit :
Ara Qui Rit dit :
Bon, je n'ai pas de point de comparaison avec d'autres jeux de Lacerda, je n'ai joué qu'à On Mars. Mais, dans ce dernier, n'y a-t-il pas tout de même un aspect "coopétitif" relativement important ? Au moins à 2 niveaux :
- sur la carte (dimension spatiale): les bâtiments construits n'appartiennent à personne
- sur les plateaux persos : tout le monde peut utiliser les technos "appartenant à d'autres joueurs"

Une partie non négligeable des actions importantes que peut faire un joueur peut favoriser ou servir d'appui aux autres joueurs, en particulier à la surface de Mars. Je pourrais donner d'autres exemples (fonctionnement des scientifiques, façon dont apparaissent les contrats terrestres...).

Pour ceux qui y ont joué, est-ce une spécificité de On Mars parmi la production ludique de Lacerda ?

Je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de jouer à Brass (notamment parce j'exclus depuis longtemps les jeux qui sont peu ou bien moins intéressants à 2 joueurs) qui semble être un modèle de ce que certains appellent un jeu "coopétitif".

oui c'est assez présent chez l'auteur, quoique particulièrement marqué ici :
- vinhos : mouais pas trop
- CO2 : forcément (semi-coop oblige) à tel point qu'il fallait 3 étapes pour construire quelque chose et généralement par des personnes différentes (dans la première édition, la 2ème étape avait tendance à être plus ingrate d'ailleurs)
- Kanban : le principe de l'organisation de travail c'est cette séquence d'atelier et c'est plutôt bien exploité : travailler sur un atelier va donner de la matière au suivant
- Gallerist : on a le principe de cote d'artiste qu'on peut promouvoir. Naturellement si on est 2 à miser lsur e même "cheval" c'est mieux :)
- Lisboa : les bateaux sont utilisables par tous, le système de déblaiement de la ville fait que chaque travaux dans une rue qu'on fait rend la tâche pour les suivants plus facile.
- escape plan : bon là on est plutôt chacun pour soi :) dans un aspect course. Outre cet aspect l'interaction tient aussi dans les mouvements de policier : en les éloignant de là où on est, on complique la tâche pour les autres tout en se donnant de l'air.

pour viticulture , pas du tout le ressenti du thème. A tel point que la seule partie perdue est celle où j'ai essayé de jouer thématique (planter de la vigne, récolter, faire vieillir, bien le vendre). Les autres fois, j'ai fait méthode 51ème état en craquant du combo de carte, au lieu de piller des drugstores , je plantais des vignes et je les arrachais. Mais ça ne racontait rien que du combo technique..
 

Merci pour ce tour d'horizon, Ocelau :)

ocelau dit :

pour viticulture , pas du tout le ressenti du thème. A tel point que la seule partie perdue est celle où j'ai essayé de jouer thématique (planter de la vigne, récolter, faire vieillir, bien le vendre). Les autres fois, j'ai fait méthode 51ème état en craquant du combo de carte, au lieu de piller des drugstores , je plantais des vignes et je les arrachais. Mais ça ne racontait rien que du combo technique..

Marrant, parce que pour le coup je ne comprends pas le ressenti de Hyperboree et palferso a la lumiere de ce commentaire.
Quand un jeu se veut thematique, je trouve qu'un gros destructeur d'immersion est la possibilite de suivre une voie anti-thematique valorisee positivement par le jeu. Je vois pas comment on peut faire un jeu completement sandbox et sublimant son theme.
Les interesses, je loupe quoi?