J'ai reçu tout à l'heure un mp d'un camarade TTcien qui me faisait remarquer que nous partagions un vocable commun, lequel trouve sa source originelle dans l'oeuvre de Jarry... du coup, j'ai bien envie de partager avec lui -et, tant qu'à faire avec vous tous- le joli texte ci-dessous dont je me suis délecté dans le canard de la semaine dernière (vu que le nouveau est sorti je pense ne pas trop franchir les bornes de la loi du respect de l'auteur en le recopiant ici). Donc, spéciale dédicace à la ruminante éminence ainsi qu'à tout ceux que ce texte saura faire rire :
Activons la pompe à phynances !
Dommage que l'écrivain Alfred Jarry (1873-1907) n'ait pu assister à ce Krach historique. Père Ubu, son immortel héros, en aurait été tout retourné...
Mère Ubu. - Ventre-dieu, Père Ubu, je vous croyais fort grand voyou, mais je dois déchanter ! Comparé à messieurs les salopins de la finance interationale, vous n'êtes qu'un maladroit petit escroc.
Père Ubu. - Sotte bourrique, je te vais arracher les yeux...
M. - Tais-toi, bouffre, et dis-moi comment ces salopins de wall Street et d'ailleurs ont réussi à fabriquer une pompe à phynances si puissante qu'elle a aspiré toutes les finances de la terre et qu'aujourd'hui nos poches sont vides autant que ta cervelle.
P. - Merdre alors ! J'avoue que je n'y comprends rien.
M. - Si tu veux t'enrichir et manger fort souvent de l'andouille, dépêche-toi d'éclaircir ce phénomène, Père Ubu !
P. - Corne à finances ! Tout s'effondre et nous allons passer comme les autres dans la trappe à récession.
M. - Il en reste pourtant beaucoup, du bel argent tintant...
P. - De par la chandelle verte, où donc ?
M. - D'un côté le gouvernement affirme peiner à trouver un malheureux milliard pour les nécessiteux de Martin Hirsch, de l'autre, d'un grand coup de pompes à phynances, il aspire dans les caisses pourtant réputées vides des milliards par centaines pour arroser ses amis de la finance. Expliquez-moi ce tour de magie, Père Ubu !
P. - Vous me fatiguez avec vos sornettes...
M. - Perce ce mystère et nous serons riches, sac à vin ! Comment se fait-il que d'un côté on ne trouve jamais d'argent pour le trou de la Sécu, pour la faim dans le monde, pour les bas salaires, pour, que sais-je, les pays de claquedents criant misère, et que tout soudain les milliards se débloquent et grouillent comme vermine dès qu'il s'agit de renflouer de gras banquiers victimes de leurs propres machinations calculatoires !
P. - Décervelée que tu es, c'est que les gouvernements et les banquiers s'entraident, étant amis comme cochons, ainsi que le sait le premier saguouin venu. Mais j'y pense...
M. - Stupide personnage !
P. - Cornegidouille, une ruse m'est venue, Mère Ubu ! Il me suffit de racheter le trou de la Sécu, et tout les trous du monde, celui que fait la faim dans l'estomac des affamés aussi bien que les autres, puis déguisé en salopin de la finance j'irais mendier auprès de l'Eurogroupe, de la Fed, du généreux Paulson et autres grands argentiers du grand monde, et leur réclamerai aide urgentissime au nom de notre amitié financière ! Ces messieurs mes amis déverseront alors leurs milliards à gogo pour remplir tous mes trous ! Avec ce système, j'aurai vite fait fortune !...
M. - Es-tu sûr que ce sera du bel argent bien trébuchant ?
P. - Ventrebleu ! Ils connaissent leur affaire : comme d'habitude ils opéreront une ponction générale dans les poches les plus plates, lesquelles étant les plus nombreuses font belle tirelire...
M. - Nous sommes sauvés !
P. - Active la pompe à phynances, ma douce enfant !
pcc Alfred Jarry
Jean-Luc Porquet
in "Le canard Enchaîné" - mercredi 15 octobre 2008, p.5