tisseur_de_reves dit:Ok ok, je change la "controverse".
C'est mieux je pense ça évitera la polémique.
Là je ne suis pas tout à fait d'accord. La victoire et sa quantification à Hanabi est le fruit d'une collaboration de tous les instants pendant le jeu et jusqu'à sa toute fin. Dans Witness, une fois que les informations ont été passées, chacun reste dépendant de sa propre mémoire pour trouver les réponses aux énigmes. Bien qu'il n'y ait pas de dimension compétitive, je trouve quand même que le côté coopératif se perd dans l'attribution finale du score. Et de fait, j'ai plus le sentiment que la quantification de la réussite se fait plus au niveau individuel que collectif, bien que la passation des informations soit, par nécessité, bel et bien collectif.
Evidemment c'est un point de différence. D'ailleurs, les jeux sont différents. Reste que c'est plutôt du rôle du score dont je parlais et que dans les deux cas il sert à quantifier la valeur du travail de communication de l'équipe, même si ce travail a été effectué différemment. Il y a évidemment une différence dans le fait qu'on demande également de la déduction et que cela est un travail individuel, mais ce que voulais surtout dire c'est qu'au final le score à Witness, tout comme à Hanabi, n'a au final que la valeur qu'on veut bien lui donner.
Dans ce genre de jeux, je reste persuadé que le "voyage" est bien plus intéressant que la "destination" et c'est tout au moins ce que j'essayais d'exprimer.
Sur l'adéquation du thème :
On ne parle pas de la même chose. Je ne dis pas que B&M ne colle pas au thème. Mais à aucun moment je ne me suis senti dans la peau de Mortimer par exemple. C'est en ça que je trouve le thème un peu artificiellement plaqué sur la mécanique. Puisqu'il faut rester dans le thème des enquêtes, Tintin aurait parfaitement pu coller aussi, ou pourquoi pas Harry Potter... Encore une fois, je ne dis pas que B&M n'est pas un thème qui ne colle pas, je trouve juste qu'il n'apporte rien à la mécanique du jeu. Je n'ai pas eu le sentiment d'une réelle immersion. Puisque tu évoques Sherlock, à l'inverse la narration des enquêtes permet, elle, de se sentir véritablement dans l'ambiance de l'époque. Là... non.
Comme je l'ai dit, la question d'un thème est vraiment vaste. Certains jeux n'appellent qu'un thème, d'autres un "genre de thème" et enfin d'autres n'importe quoi, voire rien (et toutes les nuances de gris). Ici, je pense qu'on est dans le "genre de thème" tout comme Sherlock l'est.
A priori, oui, n'importe quel thème à dominante "enquête" aurait fait l'affaire. Ce n'est pas une raison pour ne pas en choisir un. C'est également vrai pour Sherlock qui a d'ailleurs été décliné dans d'autres univers (voir Gumshoe de mémoire). Est ce que Sherlock est moins adapté dans l'univers des polars américains ? Probablement pas. Aurait-on pu faire du Agatha Christie, du Maigret ? Probablement. Sherlock n'en reste pas moins un excellent thème, mais le jeu fonctionnerait également facilement tant qu'on reste dans le champ lexical "policier".
Il s'avère que c'est le style de l'auteur et des enquêtes qui nous ont poussé vers B&M et pas une raison "commerciale". Witness n'est pas un jeu de licence, mais un jeu tout court. Alors oui, Tintin aurait fait l'affaire, Sherlock la ferait également (et ça c'était gratuit), mais il se trouve que dans mon esprit cela collait parfaitement. Il faut faire des choix et les assumer, c'est ce que j'ai fait...
Maintenant pour ce qui est de la "personnification", comme l'a dit Thomas il est forcément plus difficile de se sentir impliqué dans un rôle quand on joue une (forcément) courte enquête de 10 minutes plutôt qu'une aventure de 2h avec des pages de texte. Pour installer la dramaturgie nécessaire à une bonne implication des joueurs, il faut du temps (dans le sens : pas mal de phrases). Ce temps, nous n'en disposons pas dans Witness et il rendrait le jeu moins jouable (là encore, les tests l'ont prouvé, la longueur du texte est une barrière pour la communication).
Bref, c'est un peu la loi du genre et si nous avions mis Sherlock ou Tintin, ce serait strictement la même chose. Reste que les enquêtes sont écrites dans l'esprit et que je peux dire que cela a été surveillé scrupuleusement par la licence. Mais il ne faut pas demander l'impossible.
Je serais d'ailleurs intéressé de savoir qui est le cœur de cible de ce jeu... J'ai du mal à le cerner de ce point de vue, et je serais ravi d'avoir tes lumières sur ce point.
Franchement, je n'aime pas trop réfléchir "cœur de cible", mais plutôt "coup de cœur". Quand j'ai testé Witness, il a vite été évident pour moi que ce jeu méritait amplement l'édition de par son originalité et les réactions qu'il suscitait. Si je réfléchissais en matière de public, je me cantonnerais à faire du Caylus et ma "cible privilégiée" y trouverait sans doute son compte. Mais ce n'est pas une chose que je veux faire forcément. J'adore toujours les jeux de gestion, mais j'aime également m'intéresser à des choses différentes parce que c'est ainsi que je continue à prendre du plaisir.
Cela dit pour te répondre, je serais bien en peine de définir la "cible" de Witness. Il n'a clairement pas été développé pour le "grand public" en tout cas, dans le sens où nous ne saurions le rencontrer. Malgré tout, il reste accessible à tous. Donc je ne sais pas
Mais en tout cas nous n'avons pas choisi cette licence pour "élargir" la cible. Encore une fois, et c'est très honnête, je vends des jeux et pas des produits. Toutes ces considération "produit" me passent un peu au dessus, je l'avoue, et ce n'est pas très malin dans la société actuelle. Mais pour l'instant j'ai encore ce luxe. Ça me permet de choisir cette licence que j'aime bien parce que je crois que c'est adapté au jeu ou encore de travailler sur Timeline Challenge avec Frédéric Henry, dans un contexte totalement différent sans trop me poser la question de ce qu'on attend de moi.
Enfin bref, je digresse