Félicitations pour ce nouveau format qui prouve encore que Tric Trac tente toujours de se renouveler. C’est beau, c’est pro, vous tentez de brosser un panel de sujets variés, vous donnez la parole à des « special guests », vous incorporez du « sang frais ». Sur la forme, on ne peut donc que vous saluer.
Sur le fond, en revanche, je m’interroge. Le secteur du jeux de société a énormément changé ces dernières années - oui, je sais, c’est d’une banalité, de dire ça, mais quand même : des dizaines de nouveautés chaque mois et une diversification des publics cibles font qu’il est de plus en plus difficile de s’y retrouver. Alors, je retiens plusieurs choses.
Les joueurs/consommateurs sont noyés. Je ne vais pas donner une leçon stupide de marketing, mais l’offre et la demande, tout ça. C’est évident. Alors, bien entendu, personne ne nous demande de tout essayer. Et c’est justement parce que c’est impossible de tout essayer que vous avez chez Tric Trac un rôle à jouer (sans jeu de mot) ; vous êtes, à ma connaissance, dans le monde francophone la seule entité capable de toucher à autant de jeux.
Cette production ludique génère inévitablement la sortie d’innombrables OK games, terme tellement judicieux tant on ne peut peut jamais dire d’un jeu qu’il est franchement mauvais (sinon, il ne serait pas édité). Oui, sauf que moi, les OK games, je n’en veux pas. De plus en plus partisans du « jouez à moins de jeux, jouez mieux », je suis triste de constater qu’on ne peut non seulement pas suivre le rythme, mais que la production médiocre (comprenez bien le terme « médiocre ») fait par ailleurs que certaines pépites (parce que oui, il y en a chaque année) passe complètement sous les radars. « C’est à ça que nous servons ! » me direz vous ? Je n’en suis plus sûr du tout. Si depuis plusieurs mois Tric Trac brille par sa capacité à chercher, à innover, à trouver de nouveaux formats, bref, se cherche dans ce monde en pleine transformation, il convient aussi de dire que, du point de vue de la critique, vous enfoncez beaucoup de portes ouvertes ; si vous arrivez à donner envie d’acheter/jouer à un jeu, vous ne convainquez presque jamais de ne pas le faire. Ben oui. C’est un peu brutal, ce que je dis. Et pourtant. En regard de la production pléthorique de ces dernières années, c’est ça qu’il faudrait faire. Faire le tri. Montrer aux gens ce qui marche vraiment, ce qui est nouveau ; mais aussi admettre et souligner ce qui tourne en rond, ce qui marche bof.
Alors. Que fait-on ? On ne va pas tourner en rond. Tric Trac doit tourner. Tric Trac doit gagner sa vie. Tric Trac doit être financé. Cela fait des années maintenant que vous vous posez cette question chez Tric Trac, M. Phal en tête. Je me souviens de ses considérations très intéressantes sur la valeur de l’infirmation. Le serpent se mort désormais sérieusement la queue, puisque, sans rentrer dans vos petits papiers, vous êtes partiellement financés par les éditeurs afin que vous fassiez la promo de leurs jeux ; par ailleurs, c’est justement ce mode de fonctionnement qui vous empêche de descendre ce qui doit être descendu.
« Mais Tric Trac, c’est aussi la communauté ! C’est vous ! C’est les joueurs avec leurs avis, le forum. » Oui, merci. Et heureusement d’ailleurs, sinon je ne serais même pas là à écrire ces lignes. Mais n’oubliez pas votre part de responsabilité, puisque si les joueurs (grands, majeurs et vaccinés) sont capables de se faire leur propres opinions en se persuadant de ne pas être des vaches à lait, vous restez, chez Tric Trac, une interface du monde ludique, vous nous montrez ce à quoi on peut jouer (ou ce à quoi on doit jouer). Ce qui sous-entend que vous ne nous montrez peut-être pas tout (sciemment ou non), parce que vous répondez à des impératifs promotionnels auxquels vous êtes liés. Et c’est normal. Mais voilà.
Alors voilà, c’est un peu un coup de gueule. J’espère que vous l’entendrez et que vous l’interprèterez avec toute la courtoisie et la bienveillance (ce mot est insupportablement à la mode, je sais) dont je voulais imprégner mon propos. Cela fait 10 ans que je suis Tric Trac (et je joue depuis bien plus longtemps que ça). Je suis très triste de ressasser dans ma mémoire les cris du coeur de M. Guillaume et de M. Phal, il y a quelques années maintenant, lorsque je les entendais expliquer vainement que le financement de Tric Trac devenait problématique, tenter d’expliquer aux gens qu’on a rien sans rien, que si on veut de l’information de qualité et objective, beeeen… beeeeen… Ben il faut payer en fait ! C’est aussi simple que ça. Je suis triste parce qu’à ce moment là, même moi je n’ai pas pris la balle au bond en prenant la chose au sérieux. Donc, ça veut dire qu’une majorité de joueurs ne l’ont pas fait non plus. Et merde, moi je vous aime chez Tric Trac, mais je n’aime pas la façon dont les choses évoluent. Et c’est que j’en suis responsable en partie ! Ne me voyez donc pas en train de vous pointer du doigt en faisant « boooooouuuuh ! ». Non. Et maintenant, on en est là… Avec un contenu qualitatif de par sa forme, mais moins par son fond. Mais je le répète, c’est normal. Je comprends. Je suis persuadé cela dit que les choses peuvent encore évoluer. Mais s‘il lest clair que Tric Trac pèse toujours dans le monde ludique, ce n’est pas par son objectivité.
Ironie et épilogue de l’histoire - Mais c’est qu’il y a du monde dans ce générique de fin du Tric Trac Show ! Et des producteurs ceci, et des associés cela. Tiens, des Youtubeurs aussi ! Comme c’est moderne. Il y a des moyens déployés…
Je suis navré d’user de sarcasmes pour terminer. Je ne peux pas m’en empêcher. Mais le tric Trac Show illustre tout ce dont je viens de parler. Tout. Et moi, personnellement, je n’ai pas besoin de ça pour me dire que je pratique un chouette hobby. Je reste là cependant. Je suis ouvert à la discussion. Go Tric Trac ! Faites ce que vous aimez.