Au-delà du divertissement : Interview de Henri Kermarrec et Julien Prothière au sujet du Manifeste métaludique

Je vais me répéter. Mais si tu ne t’étonnes pas qu’un manifeste soit péremptoire et polémique, tu ne peux pas t’étonner que les réactions soient tranchées et violentes.

C’était le but.

En ce sens là démarche est manifestement une réussite.

A titre personnel je trouve le propos un peu hors sujet car effectivement tout existe déjà. Mais je pense que nous ne sommes pas la cible finale. La vraie cible ce sont les pro et les éditeurs, que nos réactions pourraient amener à modifier leurs critères pour déterminer ce qui est publiable ou non.

Allez, j’en rajoute une couche:

Croire que le jeu n’est pas politique, c’est par exemple croire que le Monopoly n’a eu aucune influence sur l’infusion dans les esprits que le capitalisme sauvage est une bonne chose (ou tout du moins est acceptable); pour moi, c’est évident que le Monopoly a eu (et à encore) une influence politique non négligeable et que de refuser de le voir, c’est refuser de voir les dynamiques sociales mis en oeuvre par tout produit culturelle quelqu’il soient.

3 « J'aime »

Je trouve que si l’idée de départ peut être intéressante, la forme fait que le message rate complètement son propos.

Déjà vu le nombre d’interprétations, visiblement on ne comprends pas facilement le but.

Autres points problématiques:

  • l’utilisation du mot jeu. Trop large, trop fourre tout. Ici on parle de quoi? Des jeux de société ou du jeu qui recouvre beaucoup plus de choses.
    Comme je pense que le document parle de jeu de société pourquoi ne pas l écrire clairement?

  • l’utilisation du terme divertissement. Ce terme contient au moins 2 concepts différents. Divertissement qui correspond à faire diversion. Faire regarder ailleurs.
    Et divertissement qui a une connotation loisir. Donc activités non contraintes.
    Donc en quoi le jeu de société ne doit pas être un divertissement? Pour ne plus être un loisir, donc non contraint? Ou ne plus servir à cacher des choses? Et lesquels?

Outre ces termes sources de malentendus.
A qui s’adresse ce document?

  • aux joueurs/ client? Mais aucun joueur n’a jamais interdit à un auteur d’imaginer ce qu’il veut. On achète ou pas ensuite en fonction de ses goûts.
  • aux éditeurs? Mais dans ce cas pourquoi le mettre sur la place publique durant un salon grand public?

Autre point que j’ai lu ici.

Un jeu aujourd’hui ne peut plus aborder certaines thèmes!
Et pourquoi?
Le délire que certains thèmes dans le jeu risque de modifier la mentalité du joueur n’est pas nouveau.
Mais où sont les preuves qu’un jeu de société peut rendre violent, esclavagiste, hors la loi?
Lorsque l’on joue on a toujours un minimum de recul.
Si la personne a certains penchants, ils existent avant et indépendamment de la pratique d’un jeu. Sinon va falloir le prouver.

Les jeux n’abordent pas de sujet sérieux ou qui font réfléchir?
Pourtant il en existe beaucoup sur le racisme, la guerre, l’exploitation etc. Où sont les sujet interdit et non abordés et censuré?

Le document est maladroit et pas clair sur son but.
Ces revendications tombent à plat car soit ne s’adresse pas à la bonne cible. Soit enfonce des portes ouvertes car le type de jds existent déjà.

1 « J'aime »

Mes commentaires sur ce débat.

Je ne comprends pas l’objet de ce manifeste. Quelle est l’objectif???

Le manifeste ne me dérange pas à part la derniere assertion : Le jeu est politique. il faudrait plutot dire que le jeu PEUT etre politique.

Moi ca m’agace de lire cela. Car cela enferme toute action dans une dimension politique. Je me suis fadé dans diverses associations des gens qui essayaient de tirer les assoc à servir un objet politique alors que l’objet de l’association c’est son sujet d’abord et ensuite la rencontre des gens, les apprentissages, la convivialité, la nourriture d’un égo aussi (il faut le dire). Dans ces débats, on a perdu énormément d’adhérents, ca a démotivé les gens qui se sentaient exploités à des fins d’idéologie.

Donc, j’aimerais savoir l’objet clairement… pourquoi un tel manifeste? quel est votre agenda? Et dites le franchement. Cherchez vous de nouvelles débouchés économiques en influencant les joueurs à acheter des jeux à l’objet politique? Cherchez vous à servir une idée? Si oui lesquelles? Pour qui vous votez? dites le franchement! n’ayez pas honte! Il faut que vous disiez les choses… assumez les clairement. Ce n’est pas honteux de le faire à ces fins là du moment que c’est justifié.
Plein de fois, j’ai vu des gens tourner autour du pot et vous tournez un peu trop à mon avis.

Je ne reprocherai jamais à quiconque de déployer des choses pour se faire connaitre… juste de la sincérité. Et c’est parfait.

1 « J'aime »

Mais le jeu EST politique, comme tout le reste. Pas forcément de façon consciente, pas forcément de la manière dont ses auteurs le voudraient, mais rien n’existe dans une sorte de vide isolé de la société. Sortir un énième dérivé du jeu du golf avec des illustrations choupis, C’EST politique, au sens où ça vient de quelque part et ça a un impact (aussi minime soit-il) sur la société. Pas besoin de mettre en avant un avis, de suivre un parti ou de déclarer pour qui on vote pour que nos actes soient politiques.

De mon point de vue, ce manifeste ne pose aucun problème, il affirme simplement une position et une volonté d’élargir ce qui n’est encore aujourd’hui qu’une niche dans le monde du jeu. Comme le disent les auteurs, ce qui est compliqué c’est qu’on est déjà pas au point sur certains termes, et encore moins sur ce qu’on met derrière. Par exemple, les wargames sont-ils divertissants ? A quel moment quitte-t-on la modélisation d’un système pour rentrer dans un jeu ? Etc.

Sur un autre point, Je trouve que la question du rapport art/divertissement est similaire à l’interrogation qu’on peut avoir dans d’autres médias, notamment le cinéma. Sujet abordé dans la dernière video de House of tabula The art to entertainment pipeline (uniquement en anglais, désolé).

6 « J'aime »

Ce qui est certain c’est qu’un jeu de société répond à une politique éditoriale.

Que, comme toutes actions, jouer à un jeu de société ou autre ai un impact sur les participants, c’est certain.

Que cet impact soit politiquement important j’ai beaucoup plus de doute.
Sauf un régime politique qui impose ou censure certains jeux.

Quand au monopoly et son impact sur notre acceptation du capitalisme. J’aimerais bien des preuves de ça et une évaluation précise de cet impact.

Non… pas forcemment, le jeu peut l’être mais je ne me sens pas articuler une politique de gauche, de droite ou d’autres.

Ce genre de propos, c’est juste une récupération, une prise d’otage morale. C’est mal de voir ces choses comme ca.

Encore une fois, libre à ceux qui le veulent d’en voir des choses politiques. Laissez juste ce préfixe "PEUT etre politique et tout ira bien… arrretez de communiquer avec un absolu. Les choses sont toujours nuancées.

Et je n’ai rien contre les combats politiques, a mon sens, si des jeux peuvent sensibiliser sur des causes, je trouve ca formidable (Spirit Island etc…), si le jeu peut arreter aussi des clichés racistes, oui, il le faut. et même, je suis tout à fait d’accord pour boycotter des jeux qui ne prennent pas de pincettes avec notre passé sombre (Puerto Rico etc…) je trouve très bien de traiter de cela et de renouveler les choses…

MAIS il ne faut jamais être dans un absolu catégorique. Soyez plus nuancé. Et arretez de faire des choses un véhicule de vos intérêts économiques et où politiques.

Ce n’est pas tant le Monopoly en lui même que notre conditionnement à vivre au sein d’un monde capitaliste qui nous fait accepter le Monopoly comme étant une “”“simulation”“” ludique économique. Et je dis bien économique, puisque finalement quand nous y jouons enfants, à moins de vivre dans une famille très politisée à gauche et t’apprenant très tôt que le capitalisme n’est qu’un mode de production possible parmi d’autres, on a tendance à voir dans le Monopoly une représentation de l’économie par défaut et qu’il n y a pas lieu de remettre en question.

Tout ça participe d’un imaginaire, qui, qu’on le veuille ou non même à travers un simple “jeu” nous inculque une façon de voir les choses. Et on se rend d’autant plus compte du truc quand on sait que le Monopoly crée à la base par Elizabeth Magie -avant d’être volé par un homme puis édité par Parker- était une critique du capitalisme et ses abus qui faisait sens jusque dans ses mécaniques, puisque on pouvait faire en sorte de gagner collectivement dans un des modes de jeux. L’autre mode étant le “Monopolist” qui est le seul à avoir été conservé. Bref, la critique contenue dans la version originale a purement et simplement été supprimée par des capitalistes à des fins capitalistes et idéologiques.

Je pense qu’on pourrait parler d’une forme de “soft power” quand il est question du jeu de société édité le plus vendu de tous les temps à travers le monde.

Ben dans la catégorie « il faudrait s’entendre sur les termes », ce serait pas mal de définir « politique », parce que de façon très claire, il n’est pas lu de la même façon par tous les intervenants.

2 « J'aime »

on va arreter l’hypocrisie ici rapidement. on parle de politique, on voit de l’écriture inclusive les termes “education populaire” etc… (je n’ai rien contre) on sait que c’est de gauche. Qu’ils le disent et fin du débat.
Qu’ils disent que le jeu doit etre un véhicule de luttes diverses etc… et que c’est comme ca qu’il faut faire. Parce que c’est ce qu’on lit entre les lignes.
Qu’ils veulent que le jeu soit un support d’idées politiques assumées.

Mais qu’ils cessent de se cacher. Vous, les auteurs de ce manifeste, voulez que les jeux soient des véhicules politiques de gauche. Dites le et arretez de tourner autour du pot.

Et c’est très bien… tant mieux si des gens engagés peuvent faire des choses cools avec le jds. Mais arretez de l’enfermer uniquement dans un truc politique, c’est la que je ne suis pas d’accord avec vous.

Evidement, et c’est pour ça que les militants conservateurs sont aussi véhéments sur le sujet.

Le fond, on s’en fou.

Hypocrisie ?? Wow.

Plutôt que de brasser du vent, la preuve par l’exemple, rien de tel pour faite bouger les lignes.

Je vous propose un exercice qui consiste à réunir les auteurs et adoptants du manifeste afin d’étudier le developpement d’un jeu qui pourrait atteindre une bonne partie des objectifs du manifeste.

Premièrement il s’agirait de choisir le thème du jeu : 2 propositions :

  1. Le destin du peuple Palestinien : développer un jeu dont l’objectif de victoire serait la création d’un état Palestinien.

La ca va vraiment bouillonner en terme de créativité et de discusssion : cooperatif, coopératif / compétitif ? Quelles mécaniques ? Des limites (si card driven, une carte 7 octobre ?) ?

Bases de travail d’inspiration pour les mécaniques : Twilight Struggle / FITNA / Labyrinth the war on terror / Guerilla (un Avalon Hill de 1984) / Diplomacy / autres (c’est le moment d’être créatif)

Commercialisation, possible sans financement participatif ? Quel arguments mettre en avant pour le vendre à un éditeur (si il existe) sinon comment le présenter à la communauté du financement participatif ?

Si le projet voit le jour : l’expérience acquise (le making of) sur le projet peut si exposée de la bonne manière vraiment montrer que c’est possible, vraiment ardu mais possible.

Ensuite lorsque le jeu est commercialisé et joué : demander activement et exposer les retours des joueurs et de l’expérience qu’ils ont retiré de la pratique du jeu.

Avec ce theme la barre est très haute.

  1. L’horreur SDF : thème inspiré de la lecture de « Le sang nouveau est arrivé : l’horreur SDF » de Patrick Declerck.

Un theme moins historique et plus social, qui peut parler à tous et dépasse les clichés

Clodo est là pour enseigner cette terrible vérité : la normalité est sans issue. Sous le masque bienveillant de nos démocraties se cache cette totalitaire injonction : Citoyen sera productif ou lentement, et sans bruit, mis à mort. Qu’on ne s’y trompe pas. La souffrance des pauvres et des fous est organisée, mise en scène, nécessaire. La République tout entière verse des larmes de crocodile à la mémoire de nos chers disparus de la rue. Clodo vivant embarrassait ; voici son cadavre, garanti pur misérable hypothermique, déclaré d’utilité publique

La il va falloir être très créatif car ce thème, de plus en plus présent dans notre environnement direct, est absent du monde du JdS.

Même exercice que pour le theme 1.

Bon mon petit doigt me dit que déjà le choix du thème va être explosif…

1 « J'aime »

C’est juste inquantifiable…
Je pense que l’explication donnée par gregorsamsa est par contre une bonne piste de réflexion sur le sujet.

Sérieux ? ça craint un peu comme injonction :grin:
Tu as lu le message de @shaudron (l’un des auteurs du manifeste) un peu plus haut ?
Je crois que tu trouveras pas mal de réponses à tes questions dans son message.

Après, pour ce qui est de l’injonction de choisir son camp, au sens de camp politique, franchement ça m’a l’air hors-sujet.
Shaudron évoque par exemple des jeux à portée émotionnelle, et si on peut estimer que cela incorpore un fond politique, ça n’a rien à voir avec de la politique institutionnelle.
Se revendiquer de tel ou tel camp dans ce cas là reviendrait à dire que les émotions sont des préoccupations de gauche et pas de droite, par exemple. Un truc stupide, quoi.

Ok mais où sont les études, les preuves que cela nous conditionne à ce point?

Où sont les études de l’importance de l’impact d’une activité ( jds ou autre) sur notre façon de penser?

Je suis d’accord que chaque chose que nous vivons nous " change" mais certaines plus que d’autres.

Je sais reconnaitre un “bullshit” qui tourne autour d’idées politiques :-). Je suis très cynique.
Il y a tout un champ lexical qui flanque ce manifeste dans un courant politique.

Encore une fois, rien ne me choque, je trouve très bien de s’engager politiquement et même d’utiliser le jds à des fins politiques, à faire avancer des thèses… aucun problème. C’est vraiment chouette aussi les propositions comme Daybreak.

C’est juste le coté absolu que je mets en évidence et les idées subliminales.
Ces tartines peuvent très facilement se résumer à “je veux que le jeu de société soit un support pour mes idées de gauche et ca DOIT être le cas pour tout le monde” quand on écrit “le jeu de société EST politique”. Et c’est donc un peu totalitaire.

Tu vois il suffit juste d’écrire Le jeu de société peut etre politique… et moi j’applaudis. C’est pas pareil là. Car j’attends aussi que le jds s’attauque à des sujets politiques, je veux juste que ce ne soit pas quelques chose d’imposé à tous.

Perso, ces auteurs si pas de révision de ce propos “le jeu EST politique”, c’est black list direct pour moi. Ca suffit les coups de pression sur les gens, sur les auteurs, sur les joueurs.

Mais c’est vraiment si difficile à comprendre que la politique ne se limite pas à « gauche-droite-élections » ??

6 « J'aime »

Désolé mais quand on me dit cela à un impact ( visiblement important) qu’il faut prendre en compte.
Et que la réponse c’est que l’importance est “inquantifiable”, j’ai un peu l’impression que l’on me prend pour un gogo.
Comme les charlatans du far West avec leur produit miracle.

qu’ils utilisent un autre mot alors s’ils voulaient qu’on comprenne autre chose. La politique sa définition c’est “l’exercice du pouvoir”… donc désolé, oui, si on met politique, on y met gouvernement, election, idées, vote etc…

TU y mets.