Après, est ce que les réactions de méfiance voir d’opposition concrète à ce manifeste qui tente d’expliquer que le jeu de société est politique devraient nous étonner ?
Ce que démontre ce manifeste, c’est que non seulement ce thread est la preuve que le jeu de société est un objet politique, avec des gens qui s’y opposent probablement de bonne foi, pensant que leurs hobbys sont libres de tout narratifs idéologiques, mais d’autres également qui savent très concrètement ce qui se joue et font du gatekeeping.
Le jeu de société n’est pas défini par le divertissement et ne se limite pas à l’objet commercial.
Le jeu de société peut avoir d’autres buts que l’amusement, l’évasion ou la réflexion stratégique. Les impératifs financiers poussent les différents acteurs commerciaux à le restreindre à ces fonctions, entraînant dans cette logique des auteurs et autrices incité.es à répondre aux attentes supposées d’un public qui ne dispose que de peu d’alternatives.
Le jeu de société peut être expérimental : émouvant, philosophique, suréaliste…
Le jeu de société contemporain permet de vivre une multitude d’expériences fictives partagées. Après avoir prouvé qu’il n’était pas seulement dédié à l’enfance, il est maintenant en mesure d’acquérir sa maturité culturelle en proposant des œuvres plus diverses. Un jeu peut être réaliste, surréaliste, absurde, philosophique, engagé, sérieux, documentaire, émouvant, pervasif, non gratifiant, déstructuré, triste, critique, émancipateur, et bien d’autres choses encore.
Le jeu de société est politique – le jeu nous joue autant que l’inverse.
Le jeu de société agit sur le joueur autant que le joueur agit sur le jeu : par les représentations qu’il contient ainsi que par les mécaniques et les objectifs qu’il impose, le jeu impacte culturellement les joueurs et joueuses qui le jouent. Nous devons être conscients de sa portée politique, des normes sociales néfastes qu’il peut renforcer, ou des futurs souhaitables qu’il peut aider à construire. Nous, auteurs et autrices, joueurs et joueuses, ne pouvons pas ignorer cette responsabilité sous prétexte que “ ce n’est qu’un jeu ”.
C’est peut être un peu plus nuancé que le flyer et permet de se faire une meilleure idée de l’intention ?
Le seul passage qui imposerait serait celui-ci :
Nous devons être conscients de sa portée politique, des normes sociales néfastes qu’il peut renforcer, ou des futurs souhaitables qu’il peut aider à construire. Nous, auteurs et autrices, joueurs et joueuses, ne pouvons pas ignorer cette responsabilité sous prétexte que “ ce n’est qu’un jeu ”.
Et même là, je le vois plus comme une alerte sur le fait que le jeu peut être instrumentalisé en bien ou en mal.
On va pas se cacher derrière notre petit doigt, ce qui fait surtout réagir ici, c’est que les auteurs et autrices du manifeste portent un discours qui de toute façon sera considéré comme une menace ou non surtout en fonction de nos positions politiques.
J’ai quand même l’impression qu’ils veulent signifier que le jeu peut être vecteur de normes inégrées par une population de joueurs et joueuses très peu encline à avoir du recul sur les thématiques et/ou les représentations dans les jeux et qu’ils alertent en ce sens, sans dire pour autant qu’ils mettraient un trait d’égalité entre “normes sociales néfastes” et “futurs souhaitables”. J’ai pas l’impression d’y voir de la nuance, et j’ai envie de dire que ça doit être assumé.
(Je tiens à dire que je soutiens à 100% le manifeste, pour qu’il n y ait pas d’ambiguïté).
Quel dommage, que d’entrée, les auteurs du manifeste ce soient mis une balle dans le pied, en manquant de précision dans la syntaxe et le choix des mots. Les précisions apportées ne sont pas d’égales signification avec les phrases du manifeste.
C’est vraiment une grave erreur, surtout quand on veut porter un message… ils auraient pu se relire ou redoubler d’attention; du coup ça fait très amateur…
Sinon, par rapport aux souhaits des rédacteurs de ce manifeste, à savoir promouvoir des jeux expérimentaux, susceptibles de générer des émotions profondes, ou philosophiques, il y a un secteur qui le fait déjà depuis un bail : le jeu vidéo.
Je n’en suis pas du tout un expert, mais j’avais farfouillé il y a quelques années sur les plateformes indépendantes, et des olnis, il y en a.
J’en ai moi-même proposé un (If on a winter’s night, four travelers) à Tomfuel en réponse au topic sur itchio qu’il a ouvert dans la catégorie jeu vidéo.
Un point’n’click, donc un jeu au gameplay très classique, mais avec des thèmes je pense jamais évoqué dans un jeu de ce type (et rarement ailleurs).
Ceux qui finissent le chapitre sur Lady Winterbourne sans avoir les boules, je leur tire mon chapeau.
Je ne veux pas en dire plus, car si certains veulent s’y essayer, finit la surprise de la découverte, et je pense une partie de l’impact émotionnel potentiel (le résumé du jeu sur la plateforme est d’ailleurs stupide, gros spoil assuré !).
Je n’ai pas d’idée sur le succès que peuvent rencontrer de telles propositions, mais je me dis pourquoi pas ?
Et si le jeu vidéo en est capable, alors pourquoi pas le jeu de société, même si “techniquement” cela peut paraître compliqué.
Majoritairement ? Peu-t-être, j’ignore si la question a été posée, façon sondage, est quel en a été le résultat.
Mais si c’est vrai, alors je suis dans la minorité. Pour moi, tous types de média peut être porteur de sens et avoir une visée de sensibilisation. Le jeu en fait partie.
Attention, j’ai bien dit “peut”, je n’ai pas dit “doit” ni même “est”. C’est juste une possibilité, dont les auteurs se saisissent ou pas.
C’est pas franchement nouveau : rappelons-nous de l’histoire du Monopoly, créé pour dénoncé les travers du capitalisme et qui une centaine d’années plus tard en est devenu le parangon.
Est-ce que c’est bien, est-ce que c’est mal ? A chacun de juger selon sa sensibilité.
Je n’ai pas creusé le sujet et me suis contenté de lire ce qui a été posté ici. Sans en savoir plus, je suis assez d’accord. Et je pense que c’est problématique pour leur communication, parce que, personnellement, ça ne m’a pas donné envie d’en savoir plus sur leur démarche.
En réalité, si l’on exclut la forme, le fond du propos n’a rien de novateur. Ils ne font qu’afficher clairement ce que de nombreux créateurs de jeux ont déjà appliqués à travers les âges. Les échecs ne sont-ils pas la représentation de la société féodale, dans laquelle il est nécessaire de protéger le roi à tout prix ? La création du jeu intègre indéniablement une vision politique de la société.
Toutefois, ils insistent beaucoup sur les fonctions annexes que peut revêtir le jeu (philosophique, expérimental, politique…), et me donnent le sentiment de vouloir exclure la fonction “divertissante”. Ce faisant, ils perdent encore leur auditoire, car sans le divertissement, sans l’amusement, l’objet n’aura plus de jeu que le nom.
Il est difficile de dire que c’est en effet “majoritairement”. Et alors moi aussi je me sentirai du côté de la minorité mais pas péremptoire, dans le ET encore une fois.
Le côté OLNI poétique on l’a eu avec Dixit à sa sortie et plus récemment avec Nouvelles contrées.
Pas de discours politique dans ces deux jeux mais une façon complètement différente de “jouer” et de voir le jeu : c’est le voyage qui compte plutôt que la stratégie, la victoire, etc.
Je pense que les jeux sont des reflets de notre culture. Même (et surtout !) après la moulinette éditoriale.
Vouloir faire porter aux jeux des valeurs différentes de celles qui sont déjà les notres, c’est les transformer en tracts politiques .
Vouloir leur faire porter des connaissances différentes des notres pour les transmettre, c’est les transformer en objets pédagogiques.
Cela étant dit, ne faire que des jeux d’accumulation (qu’ils soient coopératifs ou compétitifs), c’est se complaire dans un univers culturel très pauvre. C’est une solution de facilité, parce que c’est dominant et omniprésent dans nos société. Mais explorer d’autres thème me semble une très bonne piste d’enrichissement de l’univers ludique et d’originalité.
Je ne vais pas être diplomate mais qu’est-ce que c’est relou ce genre de déclarations ostentatoires d’un regard qui est monté sur la marche du dessus et qui aurait mieux compris que les autres ce qu’est le jeu, ou le jeu de société ; et qui non pas peu fier de son auto-branlette veut nous la partager pour nous y faire réfléchir.
Qu’est-ce que ça peut me gaver cette attitude, ici, là-bas et dans la vie de tous les jours !
Subverti a été nommé comme exemple de ces boîtes d’édition qui prennent des risques pour faire les choses différemment. Sur leur page Internet leur slogan est « changeons le monde en nous amusant ».
Le hasard fait qu’hier mes fils réclament de jouer à Biomos des éditions Subverti donc, jeu que l’on apprécie beaucoup pour sa mécanique et ses illustrations. À la fin de la partie mon aîné regarde chaque carte comme on ferait défiler des photos tirées sur papier glacé et je l’entends dire à plusieurs reprises « tiens ça c’est un paysage islandais ». Aujourd’hui en lisant ce manifeste et les propos de ses auteurs je me dis qu’ils ne font que de nourrir leur utopie et que dans les faits, non le jeu de société ne fait pas faire changer le monde. Je reviens à notre partie d’hier, nous avons passé un bon moment en famille à jouer à Biomos et que non en aucun cas ce jeu, que nous avions avant de voyager en Islande, ne nous a fait réfléchir ne serait-ce qu’un millième de seconde sur le fait de ne pas prendre l’avion, de ne pas louer un 4x4 diesel flambant neuf à la conso moyenne de 12L au 100 pour « affronter les flammes qui ravagent notre demeure » (extrait de l’édito p.1 du jeu que je viens seulement de lire pour la première fois pour xx parties).
Maintenant que j’y pense… j’ai joué à quelques jeux d’Henri Kermarrec et quand j’y réfléchis, post lecture de ce manifeste, je n’arrive pas à voir en quoi Peanut Club, Panic Diner, Sushi Dice ou Sherlock Express rentrent dans les points de ce manifeste.
J’ai dû certainement louper leur marche qui permet de prendre de la hauteur…
C’est pas parce qu’on voie une publicité qu’on va immédiatement se jeter dans un magasin pour acheter le produit. Pourtant, les budgets publicitaires mondiaux se comptent en centaines de milliards d’euros.
Comme Larcenet (que je déteste) l’écrit très bien dans sa dernière BD, on est ce qu’on voit.
Non, mais à force de matraquages une petite voix peut peut-être un jour te faire flancher et acheter le produit de la pub auquel tu n’aurais jamais prêté attention sans, d’autant plus si une petit promo vient s’y greffer.
La différence entre les pubs et ce manifeste c’est que la première te vend un storytelling quand le second utilise les forceps pour te faire réfléchir.
Personnellement ce que j’ai compris dans ce manifeste, ce n’est pas dans le fait que l’on soit obligé de se dire que le jeu auquel ont joue à un sous-entendu politique mais plutôt que les auteurs ne peuvent pas faire l’impasse sur le fait que nécessairement des joueurs verront un sous-entendu politique dans leur jeu, ce qui est quelque part évident; quand on voit par exemple comment Monbasa fait réagir (ou la famiglia) alors que seul quelques utilisateurs se sentent concernés, les auteurs du manifeste veulent mettre en garde les auteurs sur leur responsabilité.
Edit : la seule responsabilité des auteurs c’est de produire du contenu légal : pas d’incitation à la haine et compagnie. Pour le reste ils sont bien libres d’exprimer leur sensibilité de la manière qu’ils veulent, et ça n’est pas forcément dans le sens de ce manifeste.
Très belle initiative ! Nous avons Daybreak et Fil Rouge (cités dans l’article) dans notre ludothèque mais je me permets de citer Kellia, joué chez des amis : un jeu inspiré de la vie des pères du désert qui propose une ambiance bien particulière.