café/goûter/théo/philosophique

Bon, à la demande d'un méchant lapin crétin et d'une gentille trictracienne de base, j'ouvre un sujet exprès et je répète

Puisque ça vous amuse, on a défini ce matin le titre de notre prochain café biblique : Dieu contre la morale

on a longuement hésité entre La morale : Quand l'homme se fait Dieu et Bien ou mal : qui décide ?

Eric dit:Bien ou mal : qui décide ?


ça va pas être une surprise mais personnellement je préfère celui-ci. :)

Trop tard pour choisir le titre : on a opté pour la provoc' concernant notre public effectif...

Mais les trois titres vont en fait dans le même sens et le thème c'est de toute façon la morale...

Eric dit:Mais les trois titres vont en fait dans le même sens...


bon, ok, vu comme ça. :wink:
en fait, c'est parce que je voyais mal ce que pourrait exprimer, dans la durée, les athées ou les agnostiques potentiels, une fois posée leur agnosticisme ou leur athéisme, puisque la question dans 2 sujets sur trois, repose sur le lien entre Dieu et morale.

edit : ah, et si tu pouvais m'expliquer ce que tu envisages dans la formulation "Dieu contre la morale" ?

ben en fait ce sera expliqué par le verset biblique choisi pour cette affiche "collecteurs d’impôts et prostituées vous précèdent dans le Royaume de Dieu"
L'idée est de rappeler à quel point le point le message de Jésus Christ est amoral et que si l'homme éprouve toujours le besoin d'avoir une morale et de juger les autres avec celle-ci (ce qui devrait s'établir assez facilement au cours de la première partie), Jésus Christ nous appelle toujours à réviser notre propre morale...

Clairement je n'ai pas beaucoup de connaissances sur le message de Jesus mais c'est la première idée qui m'est venue à l'esprit.

Allez! J'ouvre les hostilités :twisted:

Pourquoi morale et non éthique ?

On posséde deux termes pour désigner la même chose mais l'un vient du grec (ethos : habitude) et l'autre du latin (mores: moeurs).

Ils désignent tout deux la science du bien et du mal , la théorie de l'action humaine soumise au devoir et ayant pour but le bien ( Robert).

Cependant la morale induit aussi une idée de transcendance ou tout au moins l'idée du devoir universel. Ce qui compte c'est d'agir en fonction de ce devoir universel, la morale. C'est l'idée de Kant avec par exemple son opposition "sur un prétendu droit de mentir par humanité".

L'éthique, par contre, tendrait plus vers l'idée de l'immanence: une recette pour mener une vie bonne et heureuse. Le bien en soi n'existe pas: le bien est l'utile, le mal le nuisible.L'homme ne doit pas agir aveuglément en des lois qui le dépassent. C'est plutôt l'esprit de Spinoza.

Quoi qu'il en soit, que je choisisse la morale ou l'éthique pour agir, je vais me retrouver confronté aux conséquences de mes actes.

Partisan de la morale, je suis lavé par avance de toute faute si j'ai respecté les lois morales universelles. Je suis en définitive irresponsable.

Partisan de l'éthique, c'est la conséquence de mes actes qui va compter. je suis alors responsable de mes actions et ne peut cacher ma responsabilité derrière des lois universelles.

Et Dieu dans tout ça? Présuposons qu'il existe :wink: .

Dieu contre la morale. ...Est-ce que par hasard Eric tu ne voudrais pas faire arriver à la conclusion que Dieu n'attend pas des hommes qu'ils suivent aveuglément ses commandements ( edit: et les imposent aux autres)mais qu'il leur permet de chercher leur voie vers une bonne vie, de construire leur l'éthique en s'appuyant sur lui?

edit :Le débat est lancé avant la fin de mon texte ! ça m'apprendra à faire un long laïus :pouicboulet:

bertrand dit:
Dieu contre la morale. ...Est-ce que par hasard Eric tu ne voudrais pas faire arriver à la conclusion que Dieu n'attend pas des hommes qu'ils suivent aveuglément ses commandements ( edit: et les imposent aux autres)mais qu'il leur permet de chercher leur voie vers une bonne vie, de construire leur l'éthique en s'appuyant sur lui?


Non. Pour moi qu'on parle d'éthique ou de morale, ce qui est, comme tu le soulignes bien, étymologiquement la même chose (l'éthique c'est la version politiquement correcte de la morale), on pense toujours que l'homme a un libre arbitre qui lui permet de se tourner vers le bien (ce qu'en protestant intégriste, je nie vigoureusement).
En fait l'idée est bien plus de dire que l'homme, du fait de sa nature sociable a toujours besoin de se donner une morale mais que cette morale n'a pas grand chose à voir avec Dieu et qu'elle a vite fait de devenir une idole (c'est à dire qu'on a vite fait de lui donner un pouvoir salutaire ou vivifiant qui ne revient qu'à Dieu). En fait le titre aurait du être : la morale contre Dieu mais moi, je préférai les deux autres...

Et sans même postuler l'existence de Dieu, il ne me paraît pas complètement inintéressant de se rendre compte que, dans le texte biblique, le péché de l'être humain n'est pas de faire le mal mais précisément de vouloir "connaître le bien et le mal" et ce, de la Genèse jusqu'aux évangiles...

En effet éthique ou morale, pour moi, mécréant, l'homme a toujours un libre arbitre.C'est plus la question de la responsabilité qui m'interpelle.

Eric dit:En fait l'idée est bien plus de dire que l'homme, du fait de sa nature sociable a toujours besoin de se donner une morale mais que cette morale n'a pas grand chose à voir avec Dieu et qu'elle a vite fait de devenir une idole
.

Oui c'est parce que l'homme n'est pas seul, ne peut vivre seul qu'il a besoin de cette éthique ( ou morale).

Par contre que Dieu ( ou ses représentants) a imposé une morale me parait, si je me souviens bien de mes cours de catéchismes ( catholiques il est vrai)( et des peplums :pouicboulet: ) incontournable: Ce sont les dix commandements de la Bible,

Il publia son alliance, qu'il vous ordonna d'observer, les dix commandements ; et il les écrivit sur deux tables de pierre.

Il est vrai que le message de Jesus a modifié radicalement le message de l'ancien testament ( on est passé du local à l'universel, du Dieu jaloux et vengeur à un Dieu d'amour) mais ces commandements sont, si je ne me trompe, partie intégrante des Eglises chrétiennes.

Avec ces dix commandements ,il ne me semble donc pas que la morale soit nécessairement extérieure à Dieu.

D'une part je suis complètement en désaccord entre la différenciation que tu fais entre le nouveau et l'ancien testament, ça c'est la vieille lecture catholique et simpliste (je veux juste dire par là qu'il y a belle lurette que les cathos eux-mêmes ont renoncé à cette lecture)

D'autre part, les dix commandements constituent une loi, or sur un plan juridique comme sur un plan théologique, la loi et la morale sont bien des choses distinctes : ainsi avoir un autre Dieu que Dieu n'est pas forcément immoral, se reposer un jour dans la semaine n'est pas forcément moral... Et que dire du dernier commandement "Tu ne convoiteras pas"qui est impraticable et que Jésus a encore radicalisé :se mettre en colère, c'est déjà commettre un meurtre, désirer une femme mariée c'est déjà avoir commis l'adultère (on croirait entendre El Commandante ;) )

bertrand dit:Avec ces dix commandements ,il ne me semble donc pas que la morale soit nécessairement extérieure à Dieu.


c'est bizarre parce que je n'y vois pas spécialement un code moral mais majoritairement un code religieux qui réglemente les rapports des fidèles et de Dieu, auquel s'ajoute un embryon de code pénal qui interdit des atteintes aux personnes, aux biens, aux contrats ou aux procédures.

edit : ah ben voilà, Eric a répondu avant moi.

Bien ou mal, qui décide?

Les USA et pis c'est tout!!

Ou cette partie m'a échappée ou tu as édité pendant ma réponse.


Eric dit:
Et sans même postuler l'existence de Dieu, il ne me paraît pas complètement inintéressant de se rendre compte que, dans le texte biblique, le péché de l'être humain n'est pas de faire le mal mais précisément de vouloir "connaître le bien et le mal" et ce, de la Genèse jusqu'aux évangiles...


L'abandon de l'innocence pour la connaissance . Sauf que la faute n'en est pas vraiment une: il est coupable mais pas responsable de cette perte de l'innocence puisque par définition, avant la faute "vouloir connaitre le bien et le mal", il ne connaissait pas le mal. Le péché originel en est-il vraiment un ?

Il n'est pas une faute si tu l'entends au sens moral du terme justement... Mais péché ne veut pas dire faute morale...

quand même, en essayant de réfléchir, j'ai du mal à concevoir le Bien et le Mal déconnectés de certaines notions : comme la justice ou le plaisir.
parce que le Bien qui serait injuste est-il toujours le Bien ?
ou même le Bien qui fait souffrir est-il aussi toujours le Bien ?
qui décide ? est-ce que le Bien ne se définit ni par rapport à soi-même ni par rapport à Dieu, mais par rapport à l'autre ?

Visiblement je fais une confusion entre Lois et morale au sens théologique, voire sociétale.

Mais la loi n'est-elle pas censée tenter de mettre en place les conditions nécessaires à l'éthique, à la bonne vie pour tous?

Eric dit:Il n'est pas une faute si tu l'entends au sens moral du terme justement... Mais péché ne veut pas dire faute morale...

Il est donc juste coupable d'avoir désobéi à une Loi de Dieu? le péché est donc une désobéissance envers la loi de Dieu ?
C'est là que Dieu s'oppose à l'éthique car vouloir juger du bien ou du mal d'une action et l'appliquer pourrait amener à s'opposer aux lois de Dieu?
Quelles sont-elles d'ailleurs ce lois? Et quid des sept péchés capitaux?
D'une part je suis complètement en désaccord entre la différenciation que tu fais entre le nouveau et l'ancien testament, ça c'est la vieille lecture catholique et simpliste (je veux juste dire par là qu'il y a belle lurette que les cathos eux-mêmes ont renoncé à cette lecture)


C'est parce que je suis un crétin et toi un parpaillot! :P Cela dit j'ai arrété le catéchisme après ma communion et je ne suis pas au courant d'une évolution des catholiques :mrgreen: C'est une question qui m'interroge car la vision que j'ai me fait apparaitre le Nouvel Evangile comme un collage grossier sur l'ancien testament et je n'arrive pas à comprendre le lien profond entre les deux. Rapidement, quels sont les élements de continuité doctrinale?

Kouynemum dit: quand même, en essayant de réfléchir, j'ai du mal à concevoir le Bien et le Mal déconnectés de certaines notions : comme la justice ou le plaisir.

C'est parce que, je pense , que tu as tendance à envisager le bien et le mal comme des valeurs transcendentales.
Si je change ces termes par utile et nuisible,ils deviennent immanents et s'articulent plus facilement avec justice ou plaisir

Kouynemum dit: parce que le Bien qui serait injuste est-il toujours le Bien ?
ou même le Bien qui fait souffrir est-il aussi toujours le Bien ?

Il n' a pas d'absolu mais plus ou moins d'utile ( plaisir) et plus ou moins de nuisible (injustice)
Kouynemum dit: qui décide ? est-ce que le Bien ne se définit ni par rapport à soi-même ni par rapport à Dieu, mais par rapport à l'autre ?


Pour moi, c'est le rapport à l'autre , la responsabilité dans la recherche du bonheur n'excluant pas les autres . L'Ethique est la recherche du compromis entre plaisir ( moi) et justice ( les autres) et conséquence imaginée du choix.

bertrand dit: Si je change ces termes par utile et nuisible,ils deviennent immanents et s'articulent plus facilement avec justice ou plaisir
Il n' a pas d'absolu mais plus ou moins d'utile ( plaisir) et plus ou moins de nuisible (injustice)
Pour moi, c'est le rapport à l'autre , la responsabilité dans la recherche du bonheur n'excluant pas les autres . L'Ethique est la recherche du compromis entre plaisir ( moi) et justice ( les autres) et conséquence du choix.


non non je ne suis pas d'accord, les notions ne se recouvrent pas.
le plaisir n'est pas ce qui est utile.
au même titre que l'injustice ne se traduit pas seulement par la notion de dommage.
de même que plaisir et égo ne se superpose pas et la justice ce n'est pas seulement les autres.
j'arrive au contraire au point que la définition d'une morale ne se conçoit que dans l'altérité.

Eric dit:Pour moi qu'on parle d'éthique ou de morale, ce qui est, comme tu le soulignes bien, étymologiquement la même chose (l'éthique c'est la version politiquement correcte de la morale),


en ce qui me concerne même si éthymologiquement c'est la même chose, les deux s'appliquent à des domaines différents.
pour moi la morale régit notre sphère privée dans nos rapports aux autres.
l'éthique c'est la même chose, le Bien et le Mal, mais vus au niveau d'entités collectives dans les rapports sociaux.
de ce point de vue, autant la loi, au sens juridique et social, a sa place dans la définition de l'éthique, autant elle ne l'a pas dans celle de la morale.
il me semble que vis à vis de l'individu qui la porte et la met en pratique la morale est une notion à la fois plus exigeante et plus proteiforme.
plus exigeante, parce dans sa propre morale, on est son premier juge mais aussi son juge permanent; plus protéiforme, parce qu'elle permet par analyse fine, une correspondance étroite aux situations rencontrées.

Kouynemum dit:
bertrand dit: Si je change ces termes par utile et nuisible,ils deviennent immanents et s'articulent plus facilement avec justice ou plaisir
Il n' a pas d'absolu mais plus ou moins d'utile ( plaisir) et plus ou moins de nuisible (injustice)
Pour moi, c'est le rapport à l'autre , la responsabilité dans la recherche du bonheur n'excluant pas les autres . L'Ethique est la recherche du compromis entre plaisir ( moi) et justice ( les autres) et conséquence du choix.

non non je ne suis pas d'accord, les notions ne se recouvrent pas.
le plaisir n'est pas ce qui est utile.
au même titre que l'injustice ne se traduit pas seulement par la notion de dommage.
de même que plaisir et égo ne se superpose pas et la justice ce n'est pas seulement les autres.
j'arrive au contraire au point que la définition d'une morale ne se conçoit que dans l'altérité.


Et bien voilà tu es fachée avec Spinoza! :P

Sinon on arrive à la même conclusion, qu'Eric avait déja donné par ailleurs en d'autres termes , l'homme , animal sociable a besoin d'une morale, ou éthique selon moi, pour vivre avec les autres.

Mais nous n'empruntons pas le même chemin.

Dans mes propos précédents la justice, c'est l'utile de l'autre. La vie est la poursuite du bonheur. L'utile y contribue. L'utile améne le plaisir. Le nuisible le freine.La justice c'est permettre à l'autre la même chose.

Pour l'égo, j'ai besoin que tu définisses ce que tu entends par là mais je pense qu'on peut réduire notre "je "(corps et esprit,) à un réceptacle de plaisir qu'elle soit intellectuelle , ou physique. Y compris dans la glorification éventuelle de son sacrifice. La source étant l'action.