Personnellement, les termes techniques comme kubenbois, ameritrash et autres catégories, je ne sais pas trop ce que cela représente. Et j’arrive à jouer à beaucoup de jeux de société sans même y penser, à ces termes. Ça a sans doute un intérêt pour les grands spécialistes que vous êtes, mais je ne suis qu’un modeste adepte que pourtant l’histoire des jeux intéresse.
Or donc, l’age avançant et avant que la sénilité m’ote tous mes souvenirs, je peux raconter mon cheminement dans cette passion du jeu en général et peut être plus particulièrement des jeux de société…
Mais non, je blague, je ne vais pas faire tout mon historique mais avancer quelques remarques :
J’ai débuté avec les grands classiques, vers 7 ou 8 ans : échecs, go, pente, dames. Des jeux de confrontation en tête à tête.
Puis, en allant acheter une pendule d’échecs, j’entre dans un des premiers magasins spécialisés dans les jeux, avant les relais Descartes, et je découvre les wargames. Historiques d’abord, très pointus comme ASL.
Et peu après, je découvre le magazine Casus Belli qui a la base est une revue de wargames.
Et j’ai vu peu à peu se transformer la pratique du wargames dans deux directions : celle des jeux de rôle et aussi celle des jeux de simulations, lesquels se pratiquaient souvent sur un plateau. World In Flames, Days of Decision sont mes jeux de cette époque.
Parallèlement, il existait déjà certains jeux qui se démarquaient plus ou moins des wargames purs : Diplomatie, Tactics… des ancêtres.
Et il y eu aussi des tentatives de toucher un public plus large comme Peaux Rouges et Longs couteaux…
On est au debut des années 70. Les jeux Spi et Avalon Hill, entre autres célèbres marques, commencent à étoffer leur catalogue en proposant des alternatives aux wargames mais quand même souvent en direction des wargameurs.
Et cette diversification commence à attirer un nouveau public que les wargames rebutaient. Un public qui cherchait plus de convivialité sans nécessairement être des spécialistes en Histoire.
Et puis des plus jeunes aussi, saturés des jeux de supermarchés, cherchant d’autres défis.
On arrive peu à peu au milieu des années 80. Othello-Reversi, Abalone tentent de se frayer une place dans l’univers des jeux classiques.
C’est l’époque aussi des jeux Descartes et aussi, pour ceux qui avaient la chance d’aller en Allemagne, la découverte de jeux familiaux d’une part et de jeux qui ne se rattachaient plus à quelque réalité du monde mais proposaient des mécanismes originaux. Je découvrais les jeux de Knizia. Une révélation.
Alors bien sûr, c’est très parcellaire et il y a eu tellement de jeux inventés entre les années 70 et 90 dans le monde entier, même en Russie avec l’ancêtre des Loups Garous.
Il semble que cela correspond à deux facteurs : du temps libre plus important et un pouvoir d’achat en progression.
Alors le besoin s’est-il créé pour meubler intelligemment ce temps ? La démocratisation des jeux demandait elle une meilleure accessibilité que les classiques ne pouvaient offrir ?
Et bien sur, un marché en expansion attire… Les auteurs en premiers lieu qui font leurs armes, les sociétés spécialisées qui vont investir et tenter de développer diverses gammes pour ratisser large.
On ne peut pas nier qu’il existe des effets de mode avec son lot de fans d’un auteur en particulier comme dans bien des aspects de notre société. Mais ce serait beaucoup trop réducteur et même s’il y a diverses tendances dans les publics du jeu de société, il y a toujours cette recherche de l’originalité qui viendra chatouiller nos neurones… ou pas.
Le jeu moderne est un concept très vague et à mon avis très peu défini et pertinent. On pourra toujours essayer de fixer une date pour son origine, par exemple celle des Colons de Catan mais, comme pour la recherche des premiers humains, on pourra encore trouver des exemples plus anciens.
Et pour finir, la dernière véritable révolution, ça a été Magic, avec le concept du deckbuilding. Il a été maintes fois repris.
Mais, pour beaucoup de pays qui n’ont pas notre train de vie, l’essentiel du jeu, ce sont encore les grands classiques avec des versions locales comme l’awele par exemple. Des jeux dont la richesse ne se lit pas dans le matériel mais dans les nécessaires réflexions pour ne serait ce qu’effleurer un début de maîtrise.
Gabriel Ombre dit :[...] La vie ludique de Gabriel
Merci pour ce demi-siècle de jeux.
Comme ça, je dirai que tu as environ 10 ans de plus que moi
Réponse : je suis de 1972
Merci pour ce partage!
et d’avance merci au gentil modérateur qui va nous faire le ménage dans ce topic ^^
Oui, je suis carrément hors sujet par rapport au titre du topic. Mais c’est pas moi qu’à commencer
Je réagissais juste aux remarques des historiens du jeu qui n’ont pas connu de leurs yeux la transformation de ce petit monde qui devient grand et qui font parfois un peu rapidement table rase d’un passé plus ancien qu’eux.
Mais bon, j’envie leur jeunesse
Ps : en 1972, je terminais le collège…
Et merci pour ça, Gabriel !
Gabriel Ombre dit :Mais bon, j'envie leur jeunesse :)
Ps : en 1972, je terminais le collège...
En 72, j'étais comme le poisson: pas né.
Rodenbach dit :Et merci pour ça, Gabriel !
+1
Ça me fait toujours mal de voir des tableaux statistiques.
Je préfère voir des tables de jeux.
Oui merci Gabriel
Gabriel Ombre dit :
Ps : en 1972, je terminais le collège...
Moi aussi !
Vicen dit :Gabriel Ombre dit :Mais bon, j'envie leur jeunesse :)
Ps : en 1972, je terminais le collège...En 72, j'étais comme le poisson: pas né.
Je te rassure on est encore un grand nombre dans ce cas. Je suis né que 10 ans plus tard soit 25 après nos papis (qui ont l'âge approximatif de mes parents).
jmguiche j'avais déduit ton âge depuis quelques temps déjà, mais Gabriel je pensais que tu avais encore quelques années de plus !
Jai tendance à penser que nos appellations jeu de plateau et jeu moderne sont à l’origine une erreur d’utilisation/ traduction.
Jeu de plateau est une traduction de boardgames. Mais en français cela correspond plus à jeux de société.
Mais justement à un moment on a voulu en France se démarquer des “vieux jeux” de notre enfance. Montrer sa différence et son "sérieux “.
Donc nous ados ou jeunes adultes on ne jouaient pas à des jeux de sociétés ni à des jeux pour enfants.
Non nous on joue à des jdr et des jeux de plateau sérieux et plus largement à des jeux de sociétés " moderne”.
Il y a même eu une période ou on ne voulait pas que le jdr soit un jeu de société.
Pour bien se démarquer du côté traditionnel et enfantin des autres jeux.
Sauf que concrètement nos appellations ne se sont pas construient sur des paramètres clairs et objectifs. Ni même sur une réflexion consciente. Juste une volonté de différence et de caution de sérieux.
Il y a sûrement de ça effectivement.
Oui je suis assez d’accord sur cet avis / envie subjective de se démarquer.
Je pense toutefois qu’il y a réellement eu un chalengement dans l’approche des createurs de jeux de société.
a un moment donné des gens se sont mis à réfléchir à ce qu’était un bon jeu, a ce qu’était une mauvaise règle , etc. Dépasser le simple roll and move interminable , dépasser le hasard total et donner du contrôle au joueur, faire une passerelle entre les jeux traditionnels abstraits (sans hasard à info complète) et les jeux récents , en y mettant ce qu’il faut de mécaniques pour que ça tourne.
Et je situe ça (peut être à tord, j’aimerais d’autres avis) au milieu des années 60s, Avec Sackson et Randolf. Puis ça a explosé dans les années ‘70 et ‘80 avec Olotka, Kramer…
Randolf est quand même l’auteur classique du jeu moderne si j’ose dire. Peut être le premier grand auteur ? Considéré mondialement pour son inventivité et sa prolixité (?) Sur une période assez longue, multiprimé, à l’honneur dans les musées du jeu…
J’ai connu un jeu d’Alex Randolf sans même savoir que c’était lui l’auteur : Twixt, un jeu de connexion à la Hex, sans aucun hasard et se jouant en duel.
A l’époque, vers 1973 je crois, il était édité par Avalon Hill. Je n’ai plus la boîte mais ce jeu de réflexion plutôt sympathique n’a jamais eu une popularité monstrueuse. Et Randolf avait déjà la cinquantaine.
Je connais aussi Intrigue à Venise où il est co-auteur. Pas mal de ses jeux ont ete edites par Ravensburger, ce qui avait l’aventage de lui ouvrir les rayons des supermarchés.
Il a aussi créé des jeux pour les enfants tres populaires… en allemagne car édités chez Haba.
Mon impression est que malgré son talent indéniable, ses jeux étaient plus proches du monopoly , Cluedo… que de ce qu’on pourrait appeler un jeu moderne.
Peut etre un candidat sérieux à l’origine des jeux actuels serait Acquire. Non ?
Prince-Baron dit :Jai tendance à penser que nos appellations jeu de plateau et jeu moderne sont à l'origine une erreur d'utilisation/ traduction.
[...]
Sauf que concrètement nos appellations ne se sont pas construient sur des paramètres clairs et objectifs. Ni même sur une réflexion consciente. Juste une volonté de différence et de caution de sérieux.
Je suis complétement d'accord avec ça.
Alfa dit :..
a un moment donné des gens se sont mis à réfléchir à ce qu’était un bon jeu, a ce qu’était une mauvaise règle , etc. Dépasser le simple roll and move interminable , dépasser le hasard total et donner du contrôle au joueur, faire une passerelle entre les jeux traditionnels abstraits (sans hasard à info complète) et les jeux récents , en y mettant ce qu’il faut de mécaniques pour que ça tourne.
Et je situe ça (peut être à tord, j’aimerais d’autres avis) au milieu des années 60s, Avec Sackson et Randolf. Puis ça a explosé dans les années ‘70 et ‘80 avec Olotka, Kramer…
T'as le Cluedo d'Anthony Pratt qui date de 1949 et qui correspond à ce que tu décris.
Le Stratego de Jacques Johan Mogendorff date lui de 1947 et correspond aussi. Je le rangerai pour ma part dans la famille des jeux de guerre tout comme Tactics (de Charles S. Roberts), l'ancêtre des wargames actuels, qui date de 1954. Pour certains, les jeux de guerre ont une parentalité ancienne, remontant aux échecs (voire aux ancêtres des échecs) et au kriegspiel allemand créé pour enseigner la stratégie. Le Buffalo de Randolph (2000) ou son Bosen und Guten Geiser ne sont guère moins abstraits. Ils seraient tous des jeux modernes ?
Sur ce site, l'auteur fait remonter l'histoire des jeux modernes au Monopoly.
Sur ce site, l'auteur qualifie de jeux modernes des jeux du milieu du XIXe siècle, apparus du fait de la révolution industrielle et de l'accroissement des capacités d'impression.
J'ai de plus en plus l'impression, comme le dit Prince-Baron, que chacun met derrière le terme jeu moderne ce qu'il croit, en fonction de son histoire personnelle (moi y compris).
Bon ben on fait quoi, on ouvre un topic et on définit une nouvelle terminologie ?
Bonjour,
Oui ce serai mieux qu’un modo déplace toute cette discussion, fort intéressante, qui se retrouve au milieu de ce sujet.
Hop, hop le modo !
Je pense qu’il y a eu une rupture quand un éditeur a édité un jeu original.
Meme après l’invention de l’imprimerie, les « éditeurs » ont édité des jeux de cartes classiques (ou locales, mais c’est pareil), des jeux de marelles connus, des jeux de dames, d’échecs, jeux de l’oie, nains jaunes, … des jeux dont les règles étaient connues, des jeux traditionnels, dont on apprenait les règles des « anciens ».
Puis… un jour… un éditeur a édité un jeu qui « n’existait pas avant », dont il fallait lire la règle pour jouer parce qu’on ne la connaissait pas de ses parents, avec un matériel qui n’existait pas avant.
Je crois que cela s’est passé du côté des usa avec Parker, avec un jeu dans le thème de la banque, dans les années 188x… ou avec le reversi à la même époque.
Apres, il y a presque toujours eu une filiation, une logique d’histoire de création.
La rupture suivante c’est quand le jeu pour adulte est sorti du carcan des classiques (échec, cartes…).
Je vois cela venant d’un côté des jeux américains, principalement des wargames, qui s’adressent à des adolescents jeunes adultes qui, adultes, continuent à jouer. Les jeux de rôles ont suivi. Années 70 80 donc.
En Allemagne, un type de jeu très différent est apparu dans les années 80 90, mais, si on regarde bien, ces jeux s’adressent aux enfants et aux familles, pas aux adolescents/adultes. C’est dans le courant des années 2000 que des jeux ne pouvant pas être joué par des enfants (trop complexes pour qu’ils soient autonomes) se sont généralisés. C’est exactement la même logique que ce qui s’est passé aux usa : des enfants ados jouent à autre chose qu’au Monopoly, ont envie de jouer une fois ados adultes, un marché se crée et est occupé.
Alors, qu’est-ce que l’ère « moderne » des jeux ?
Si c’est la sortie du carcan de « jeu classique » et de la création, c’est, à mon avis, la fin du 19 ieme siècle aux usa.
Si c’est la sortie du carcan création de « jeu pour les enfants », c’est, à mon avis, fin du 20 ieme siècle, aux usa puis en Allemagne.
Edit : le jeu Parker de 188x, c’était Banking. Un jeu de spéculation, je n’en sais pas plus…