de vos lectures...

Je viens de terminer de lire Les monades urbaines de Robert Silverberg.

Le pitch : dans quelques centaines d’années, la très grande majorité des humains vivent dans des monades urbaines, des ensembles immobiliers de 1000 étages pour environ 850 000 habitants (pendant que les autres vivent dans des communes de façon relativement primitives afin de nourrir les habitants des monades). Derrière des règles de vie qui réduisent les frustrations, la jalousie et autres, la vie n’est pas si simple…

Ce livre est un recueil de 7 nouvelles qui sont intimement liées. Les thèmes abordées reviennent régulièrement et au final on a sentiment de redondance en lisant ces nouvelles. De même, l’écriture date des années 70 et cela se ressent fortement dans la description du monde idéal ou tout le monde (les hommes) peut coucher avec tout le monde, et cela est même fortement recommandé.

Bref, un livre pas désagréable à lire mais qui est daté et qui n’apporte au final pas grand-chose de mon point de vue (contrairement à l’avis de Gérard Klein).

Je viens de terminer Une femme à Berlin - journal 20 avril 1945 - 22 juin 1945 d’une inconnue.

Il s’agit du journal intime tenue par une femme d’une trentaine d’année sur une période de 2 mois couvrant l’arrivée des Russes à Berlin - et ce que cela a induit - l’armistice, et le tout début de la paix.
Il faut préciser que la personne qui a écrit ce livre était quelqu’un de cultivée et avait beaucoup voyagé en Europe car elle parlait correctement le Russe et le Français. Il en découle un témoignage poignant où la faim et les viols sont les craintes quotidiennes, et les petits rien de tous les jours deviennent de grandes victoires.

Je ne savais pas ce que contiendrait ce livre, mais j’ai énormément apprécié cette lecture, une sorte de documentaire très personnelle, loin de la “grande” histoire, et pourtant tout aussi intéressante, sans être pour autant du voyeurisme malsain. En bref, je conseille vivement cette lecture.

Je voulais vous parler de Mikhaïl Boulgakov dont je viens d’achever une lecture assez complète (merci les éditions de la Pléiade), mais je me sens soudainement incapable de communiquer tout ce que son oeuvre a pu me faire ressentir.
Il y a évidemment un biais. J’ai toujours eu une attirance pour l’histoire de l’URSS et un certain intérêt pour le fantastique. Voir mêler les deux d’une façon aussi brillante ne pouvait que me réjouir. Cela va pourtant bien au-delà.
J’ai lu deux fois Le Maître et Marguerite. Je pourrais le relire et y trouver encore des choses à en tirer. C’est un chef-d’oeuvre, sans hésitation, qui parvient à réunir tellement de thèmes. C’est une réflexion sur la foi, une satire de l’URSS, un récit fantastique, une magnifique histoire d’amour. C’est beau, c’est d’une incroyable densité et c’est surtout superbe à lire.

J’ai lu deux fois La Garde blanche. Roman historique, saga familiale, plongée dans l’histoire sanglante et dramatique de Kiev en 1919-1920, qui se voulait une suite et un hommage au Guerre et Paix de Tolstoï. Il y a une force dans les descriptions, un souci du détail, des personnages tellement vivants et une atmosphère crépusculaire qui vous happent tout au long de la lecture.

A côté de ces deux grands livres, je me suis régalé en lisant Les Oeufs du destin, une histoire fantastique, qui fait penser à du H.G. Wells par son ancrage dans une réalité sociale. C’est souvent drôle, parfois effrayant, toujours écrit dans un style d’une limpidité tellement évidente.

Je peux parler aussi de Coeur de chien, roman qui mélange aussi fantastique et description du quotidien moscovite des années 1920, où un chien devenu homme à la suite d’une opération (décrite avec des détails qui rappellent de Boulgakov était médecin et donne des sueurs tant elle est crue) entre en conflit avec son “créateur”, un médecin qui lutte pour préserver son appartement dans un contexte de collectivisation des logements. Comme ailleurs, critique du régime, humour et fantastique cohabitent dans un équilibre parfait.

Il y a aussi Carnets d’un jeune médecin, roman semi-autobiographique racontant la prise de poste d’un médecin fraîchement diplômé dans un petit dispensaire de la campagne russe. Récit initiatique, réflexion sur le rôle et la place du médecin de campagne, considérations sur l’état sanitaire de la Russie de l’époque. Pas du tout de fantastique mais beaucoup de situations tragiques.

Morphine exploite la même veine. La nouvelle raconte la déchéance d’un médecin de campagne (encore), incapable de surmonter son addiction à la morphine, dont à souffert Boulgakov. Forcément, on sent le vécu. C’est touchant et plutôt déprimant, mais quelle talent de conteur.

Je passe rapidement sur les pièces de théâtre et sa belle Vie de Molière, sur les récits écrits pour gagner sa croûte dans diverses revues, souvent très drôles, toujours avec un sens de l’économie des mots et un génie pour trouver la formule qui en exprime beaucoup avec peu. Quand on voit le niveau de ce qu’il écrivait en se faisant violence et contraint par la nécessité, on ne s’étonne pas que les romans qu’il a conçus avec toute son âme et tout son coeur soient de tels monuments de la littérature.

Le problème avec des écrivains comme Boulgakov est qu’après, on trouve tout le reste fade.

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C’est noté :+1:

Déjà lu
Le maître et Marguerite, journal d’un jeune médecin.

Du coup intéressé par la garde blanche
Merci :+1:

le grand cahier Agota Kristof

Un pays en guerre, les deux jumeaux sont confiés à leur grand-mère, à la campagne. La grand-mère est analphabète, méchante, avare…et sans doute meurtrière.
Du coup les jumeaux commencent leur propre éducation et notent tout dans un grand cahier.
Violence, privation, sexe.
Livre écrit dans un style froid et clinique. On n’est pas là pour rigoler

Au sud de la frontière, à l’Ouest du soleil Haruki Murakami
Un homme fait le bilan de sa vie, surtout amoureuse, réfléchit à ses choix d’adolescent. Jusqu’au retour de son amour de jeunesse (mais pourquoi apparaît elle toujours un jour de pluie ?)
Pour ceux qui ont aimé le grand Meaulnes (déjà ça limite), mais un Meaulnes qui consomme, lui.
Il y a un twist à comprendre qui donne une autre dimension au livre :wink:

Je vénère ce livre, l’un de mes favoris.

Merci pour ce cr, je note pour Coeur de chien et Les oeufs du destin, je ne les ai pas lu.

[quote=“Mr le Néophyte, post:4566, topic:16635, full:true, username:mr-le-neophyte”]

Je vénère ce livre, l’un de mes favoris.

Ah mince, va falloir que je le relise, pas de gros souvenir

Je viens de terminer le second tome de la série A la croisée des mondes, La tour des anges de Philip Pullman.

Dans ce tome, sans spoiler, on en apprend plus sur la poussière et un nouveau héro fait son apparition: Will.
Tout comme pour le premier tome, j’ai eu le sentiment de lire un concurrent d’Harry Potter mais dans une catégorie très inférieure. Ce n’est pas désagréable à lire mais je n’ai pas trouvé cela exaltant non plus et les personnages m’ont semblés moins charismatiques.

Je lirai le dernier tome, mais je ne pense pas que j’en conseillerais la lecture.

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J’ai eu une révélation pendant la nuit : Tolkien était dyslexique.
Et c’est pourquoi les Efles s’appellent les Elfes, et les Cros s’appellent les Orcs.
Il a aussi inversé les deux b des Hobbits, mais ça ne se voit pas.
Une question demeure : pourquoi n’a-t‑il pas aussi inventé les Nocs ? :thinking:

J’ai profité d’un moment de calme non anticipé pour dévorer les 3 tomes du chevalier aux épines de JP Jaworski.

J’imagine qu’il a déjà été présenté ici.

Qu’en dire sans en dire trop ?

L’écriture est parfois trop virtuose, trop érudite, trop indirecte. De ce point de vue, si le récit s’inscrit dans la continuité de gagner la guerre, la filiation avec les rois du monde est bien plus nette.

Le récit présente un corps solide mais s’enfuit parfois en digressions vaporeuses ou à l’inverse revient effleurer ses racines chtoniennes et chimériques. Cette architecture se révèle par touches successives. D’ailleurs, peut-être est-ce déjà déflorer que de le mentionner.

J’ai beaucoup aimé le voyage. Il ne plaira probablement pas à tout le monde. Comme les rois du monde, donc. Le récit commence fermement ancré à raz du sol, dans un contexte simple et familier mais l’écriture y est d’une virtuosité presque désagréable tant elle contraste avec le sujet. Comme si l’écrivain se regardait écrire, une forme f’onanmisme intellectuel. Pour un peu cela rappellerait du Damasio. Faites l’effort de passer outre, laissez vous enchanter par le récit et le verbe, tout finira par s’éclaircir.

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J’ai lu quelques histoires de Jaworski et de Damasio. Je préfère de loin le premier. L’érudition de son écriture est au service du récit. Il use d’un vocabulaire qui correspond parfaitement à ses personnages, au cadre et à son histoire.
C’est avec Damasio que j’ai du mal. Je trouve qu’il se regarde écrire. Il fait dans le néologisme, dans l’emphase, dans l’esbroufe. Il y a des choses bien vues ou bien décrites, mais je trouve qu’il fait trop dans le style pour le style.
Son essai “Vallée du Silicium” ouvre quelques pistes de réflexions ou des observations pas inintéressantes, mais il veut trop jargonner, inventer des concepts et fabriquer des mots qui claquent, des choses visiblement inspirées par sa lecture de Jean Baudrillard. Au bout d’un moment, je trouve que ça nuit à la clarté de son exposé.

En bref, Jaworski, ça m’a impressionné, Damasio, ça m’a vite lassé.

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Je trouve le parti pris de Damasio couillu, il tente, triture, invente, au risque de perdre du monde en route.
C’est à des années lumières de ce qui se fait habituellement dans le genre dans lequel il s’inscrit.
Je n’y vois pas de coquetterie mais une façon de faire différente, un amour de la littérature également, et je trouve que ça fait du bien.
Et ça ne dénature en rien le fond, au contraire, ça contribue grandement à rendre davantage vivant et immersif la plongée dans ses “mondes”.
Après forcément ça clive, mais j’apprécie qu’il y ait encore des écrivains qui prennent des risques.

Pas encore eu l’occasion de lire Jaworski, j’espère y remédier un jour.

Je te rejoins sur “les furtifs” DamDam, clairement il se regarde écrire. En revanche, “La horde du Contrevent” est clairement une claque littéraire. L’esbrouffe tout ça je te comprends ça peut perdre le lecteur, mais ça décoiffe et sur “la horde” j’adore. Qui est ce Jean Baudrillard ? Un titre peut être a proposé à lire pour exposer ton point de vue ?

Je ne connais pas non plus Jaworski, j’ai un peu peur des suites qui n’en finissent plus, un titre à proposer ?

Je fais partie de ceux qu’il a perdu en route.
J’admets que c’est très différent et je ne nie pas qu’il aime les mots et jouer avec, mais je trouve qu’il en fait trop et, je persiste, je pense qu’il se regarde écrire en ce qu’il abuse de ses effets de styles inédits qui n’apportent rien d’autre qu’une démonstration de virtuosité littéraire.
La scène du duel d’éloquence ou de poésie dans la Horde du Contrevent est pour moi le parfait exemple. C’est long et ça ne sert qu’à montrer comment il manie bien les mots.

Jaworski, à l’inverse, c’est la recherche du mot le plus précis pour éviter de faire des circonvolutions qui alourdissent la phrase. Ca le mène à explorer un lexique archaïque ou technique mais toujours dans le souci d’apporter une distinction profitable à son histoire.

La Horde du Contrevent c’est un bon livre, c’est original, c’est prenant, ça décrit des personnages et un univers singulier. Mais par moments, c’est trop.

Jean Baudrillard, je n’en ai jamais rien lu, mais Damasio en parle à plusieurs reprises dans Vallée du Silicium.
C’était un philosophe qui s’est intéressé à la sémiotique et à la communication. Il faut demander à Internet ce qu’il a écrit de plus accessible.

Jaworski, j’ai lu Janua Vera, Gagner la guerre et le Sentiment du fer. Le premier est un recueil de nouvelles, dont certaines sont excellentes. C’est une bonne introduction. Si tu accroches, Gagner la guerre prolonge une des histoires de Janua Vera.

Je suis plutôt d’accord avec @jer concernant Damasio. Et moi aussi je lui préfère Jarowski. Mais j’ai trouvé que Jarowski tombait dans des travers comparables dans ses écrits plus récents (cycle des rois du monde), peut-etre plus perdu dans -ou grisé par- sa virtuosité qu’auto-admiratif. Mais ça reste vraiment excellent, voire exceptionnel. Le traitement du fantastique dans le premier tome m’a particulièrement marqué, tout est presque comme un semi rêve éveillé permanent et on ne sait si le merveilleux est dans la nature ou dans l’oeil de celui qui la regarde, j’ai adoré.

Dans le chevalier aux épines l’écriture des premières pages m’a fait initialement craindre une bascule encore plus marquée dans le paganinisme littéraire. Mais passé cette ouverture, l’ensemble d’équilibre et devient une partie même du récit.

Très chouette.

Selon moi il faut débuter directement par gagner la guerre.

Les nouvelles sont à mon avis d’un abord plus difficile. D’autant que pour certaines d’entre elles, il s’agit de pastiches plus ou moins appuyés (ou alors je me plante totalement). Bref. Autant partir directement sur le morceau de bravoure je pense !

A part sa saga des “Rois du monde”, il n’y a pas trop de suites chez Jaworski.

edit : j’ai écrit le paragraphe ci-dessous avant de voir que des copains avaient déjà répondu plus haut.

Je conseille le recueil de nouvelles Janua Vera, où l’on fait connaissance dans l’une d’elle de Benvenuto, cette canaille qui sera le héros de Gagner la Guerre, mais on y croise aussi Ædan, le fameux Chevalier aux épines du roman sus-cité.

Comme dit, il s’amuse un peu dans Janua Vera : chaque nouvelle est faite sur un style en mode gros clin d’oeil, et l’amateur ne devrait pas avoir trop de peine à deviner les hommages à Lovecraft, Chrétien de Troyes voire même une touche d’humour à la Pratchett (avec le très bon “Jour de Guigne”).

Après, si tu n’as pas trop de temps ou la flemme , je te conseille directement Gagner la Guerre, qui a été une bonne petite claque ici. Janua Vera peut se lire après coup. Et j’ai aussi fort aimé le recueil Le Sentiment du Fer, qui pimente un peu son univers du vieux royaume de touches surnaturelles bienvenues.

En résumé, mon conseil pour démarrer, Gagner la Guerre pour la baffe épique directe, ou Janua Vera pour découvrir l’univers et le style assez caractéristique de l’auteur.

Pour le Chevaliers aux Epines, j’ai lu le premier tome, et même avis que @fabericus plus haut : ça part parfois bien loin (le ruisseau qui coule sur un chapitre entier, ou encore ce scrogneugneu de chat :sweat_smile:) mais ça retombe toujours sur ces pattes (comme ce scrogneugneu de chat)… dans l’ensemble, j’ai quand même bien aimé. Cela dit, j’attends un peu avant de démarrer la suite.

En effet, je démarre le tome 5 de The Expanse, et c’est toujours aussi épique.

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Gagner la Guerre a été un de mes très gros coups de cœur des dernières années ainsi que Janua Vera. Par contre, autant j’ai adoré la série The Expanse, autant je me suis lassé un peu vite de la série de romans du même nom. Peut-être la faute à la série TV qui est géniale.

Sinon ma mère m’a refourgué un peu de force quelques tomes de la série des Poulpe. J’en avais un souvenir mitigé, de part le côté fan service de chaque tome et la gouaille un peu forcée de certains auteurs. Et puis certains tomes ont un peu vieilli mais c’est de la littérature de gare qui s’assume, c’est très bien entre deux stations de métro.

J’ai aussi récemment lu « Sur les Rails » de Julien Hervieux. On reste dans un style de polar un peu misanthrope ou un jeune dealer sans envergure croise à la sortie du tribunal un col blanc qui lui propose une association pour le moins surprenante. Impossible de ne pas penser à Breaking Bad auquel ce livre emprunte sans doute beaucoup mais ce livre déborde d’humour et de personnages tous plus détestables les uns que les autres. J’ai bien aimé.