Jarlaath dit:Je suis moi-même prof de français Je fais néanmoins partie des personnes qui estiment que la simplification de la langue entraîne une simplification de la pensée.
C'est privilégier la forme au fond. Sans vouloir entrer dans de la provoc' de bas étage, notre société met plus en avant les matières scientifiques que celles des langues. Hasard ? Que penser d'un brillant mathématicien qui fera 10 fautes par phrases, car confronté à une langue irrationnelle, privilégiant l'exception ? Car le français fait bien partie de ces langues fantasques, où le cas particulier est le cas général.... Et par conséquent, la maîtrise du français n'est pas affaire de logique / "vitesse de processeur", mais plutôt de mémoire. Nous sommes plus dans le domaine de la culture que dans celui de la capacité d'abstraction. Pour revenir à notre mathématicien, s'il est, en plus, un esthète de la langue, tirons lui notre chapeau. Il pourra écrire ses formules mathématique sans faute.
Il ne s'agit pas d'opposer littérature et sciences, mais de respecter des règles de grammaire et d'orthographe. On ne demande pas aux gens d'écrire dans un style esthétique mais simplement correct d'un point de vue morphosyntaxique. Les grands penseurs du 18eme siècle étaient également des scientifiques accomplis. Pour exprimer clairement des idées complexes, il faut maitriser un minimum le fonctionnement de la langue. D'ailleurs, si j'osais, j'irais jusqu'à dire que les personnes qui luttent pour assimiler des règles mathématiques sont les mêmes qui ont du mal à assimiler des règles de grammaire et d'orthographe. [HS] Quant à privilégier les filières scientifiques, c'est le résultat d'une longue politique élitiste et discriminatoire. C'est le même principe qui poussait l'élite à choisir allemand en première langue et à faire du latin ou du grec. Pour moi, ça n'a pas de sens. [/HS] Edit : un peu grillé ^^', je suis trop lent
Sylvano dit:L'argument financier, franchement, ça ne tient pas vraiment. Un budget de relecture/traduction, sur la plupart des jeux, c'est quelques centaines d'euros, donc pas de quoi faire monter en flèche un prix de vente.
Je n'ai jamais parlé de "montée en flèche". Par contre, tous les coûts se répercutent sur le prix final, même les plus petits. Sur un jeu à 70€, ça représente pas grand-chose, sur un titre à 15€, ça se ressent déjà plus…
Jarlaath dit: D'ailleurs, si j'osais, j'irais jusqu'à dire que les personnes qui luttent pour assimiler des règles mathématiques sont les mêmes qui ont du mal à assimiler des règles de grammaire et d'orthographe.
Peut-être (j'ai pas les stats sous les yeux). Mais l'inverse n'est pour autant pas vrai. C'est là encore une sorte de raccourci simpliste : je suis mauvais en orthographe, donc mauvais tout court. Le contre exemple est tellement simple à sortir, que j'en ferai l'économie. Pendre pour argument le fait que nos plus illustres philosophes soient bons dans toutes les disciplines, est tout autant une approche simpliste. Oui, il étaient grands, beaux et forts. Mais ils sont l’exception (once again).
thyuig dit: Mais non, parce que c'est justement la langue qui aide à formuler, elle est le premier vecteur de la pensée. Du coup, l'assujettir à une règle ne devrait pas être plus compliqué que de formuler les thèses et théories évoquées plus avant.
Ce que dit Kryle, c'est que justement la langue française est davantage affaire d'exceptions que de règle. La plupart des "règles" de l'orthographe ne peuvent pas se déduire de la logique pure, comme un raisonnement mathématique. Sérieux, rien que les règles du pluriel en français... À quoi ça sert que "amour", "orgue" et "délice" deviennent féminins au pluriel ? En quoi savoir ça est un marqueur d'intelligence ?
Mais je ne sais pas et je n’ai pas grand chose à opposer à ça. Je voulais simplement mettre en évidence que bien parler permet de bien formuler et que par conséquent, la langue aide à intellectualiser au quotidien. Les plus grosses fautes ne sont pas des fautes d’accord, bien entendu. Mais elles sont symptomatiques du peu de cas qui est fait de la langue et de sa qualité de nos jours. Par exemple, pour bien écrire la règle d’un jeu, il vaut mieux bien maîtriser la langue quand même, non ? Et pour que ce soit clair, il vaut aussi mieux que l’orthographe soit respectée, non ? Je ne sais pas, à vous lire, j’ai le sentiment que ça n’a pas d’importance.
Un mot pour dire que distinguer dans un texte la forme du fond n’est qu’une question de point de vue puisque l’orthographe et la grammaire relèvent elles aussi d’un “fond”. Beaucoup d’exceptions en Français peuvent être groupées d’une manière logique même si cette langue ne manquent pas d’ornithorynques inclassables. Je pense avoir une connaissance excellente du Français mais parlant deux autres langues (l’Anglais et le Néerlandais) et ayant quelques connaissances en Allemand et Espagnol, force est de reconnaître que dans ces quatre autres langues il est assez difficile de faire des fautes d’orthographe. Au collège, les dictées anglaises et néerlandaises étaient réussies, et plutôt bien, par la grande majorité de la classe. Nous sommes nantis d’une langue difficile truffée d’emprunts directs au Latin ou au Grec (le fameux forum en est un exemple) qui par exemple ne connaissent que des pluriels typiquement français tandis que la coordination des temps et leur nombre sont effectivement un casse-tête. Tout le monde n’est pas obligé d’être un amoureux de sa langue natale mais souvent la faute d’orthographe ou de grammaire révèle des lacunes de compréhension et de distinction du sens des mots. Je souligne aussi que je ne suis pas favorable à voir les canons de langue débattus, comme une loi, au sein de petits comités d’experts. Je pense d’ailleurs que la simple tentative d’assouplir les règles d’orthographe concernant le son f et sa graphie en f ou ph sont un échec populaire. En ce qui concerne les jeux, beaucoup sont édités dans une certaine urgence par de très petites équipes et j’ai une certaine indulgence pour les fautes qui pourraient émailler le texte des règles. Par contre sur le matériel et la couverture, ça craint un peu…
Complètement d’accord avec l’OP sur les fautes, mais je ne peux que plussoyer, pour y être confronté touts les jours, aux propos de Mattintheweb et Sylvano. Les délais sont ultra serrés. Les règles VO sont quelquefois écrites avec les pieds. Mais, encore une fois, ça n’excuse rien. Je suis le premier à me taper la tronche contre un mur quand je vois une faute que j’ai laissé passer sur une trad (et ça m’est arrivé il n’y a pas si longtemps ). Pourtant, ça ne m’empêche pas d’être totalement impliqué dans ce que je fais et de vouloir rendre, à chaque fois, une règle parfaitement compréhensible, sans ambiguïté d’interprétation et exempte de fôtes . Sinon, les logiciels de correction (Antidote ou autre) ne remplaceront jamais un correcteur/correctrice en chair et en os !
thyuig dit: Et pour que ce soit clair, il vaut aussi mieux que l'orthographe soit respectée, non ? Je ne sais pas, à vous lire, j'ai le sentiment que ça n'a pas d'importance.
Oui c'est important. Mon propos ne consistait qu'à amener les djihadistes (c'est un peu fort, non ?) du 0 faute à mettre un peu d'eau dans leur vin (attention, il y a un calembour dans cette phrase).
Horatio dit:Complètement d'accord avec l'OP sur les fautes, mais je ne peux que plussoyer, pour y être confronté touts les jours, aux propos de Mattintheweb et Sylvano. Les délais sont ultra serrés. Les règles VO sont quelquefois écrites avec les pieds. Mais, encore une fois, ça n'excuse rien. Je suis le premier à me taper la tronche contre un mur quand je vois une faute que j'ai laissé passer sur une trad (et ça m'est arrivé il n'y a pas si longtemps ). Pourtant, ça ne m'empêche pas d'être totalement impliqué dans ce que je fais et de vouloir rendre, à chaque fois, une règle parfaitement compréhensible, sans ambiguïté d’interprétation et exempte de fôtes . Sinon, les logiciels de correction (Antidote ou autre) ne remplaceront jamais un correcteur/correctrice en chair et en os !
thyuig dit: Mais non, parce que c'est justement la langue qui aide à formuler, elle est le premier vecteur de la pensée. Du coup, l'assujettir à une règle ne devrait pas être plus compliqué que de formuler les thèses et théories évoquées plus avant.
Ce que dit Kryle, c'est que justement la langue française est davantage affaire d'exceptions que de règle. La plupart des "règles" de l'orthographe ne peuvent pas se déduire de la logique pure, comme un raisonnement mathématique. Sérieux, rien que les règles du pluriel en français... À quoi ça sert que "amour", "orgue" et "délice" deviennent féminins au pluriel ? En quoi savoir ça est un marqueur d'intelligence ?
A avoir de la mémoire je pense. De toute façon, je trouve que 90% de ce qu'on t'enseigne à l'école (jusqu'au lycée) ne "sert qu 'à" développer ta mémoire, ou ta capacité à jongler dans ta tête, pour faciliter, plus tard, la compréhension et la mémorisation de choses qui te seront réellement utiles. L'histoire, les maths...
L’orthographe comme la littérature, la musique, les sciences devraient nous rendre intelligents. Cela s’appelle la culture et c’est vital. Mais avec quelques nuances tout de même. De grands dignitaires nazis étaient de grands intellectuels cultivés. Comme quoi Faut juste lire cet essai remarquable, stupéfiant et dérangeant. Et ça fait bien froid dans le dos. “Ils étaient quatre-vingts et avaient à peine trente ans lors de l’arrivée d’Adolf Hitler au pouvoir. Leurs études universitaires destinaient ces juristes, économistes, linguistes, philosophes ou historiens à de belles carrières. Ils ont choisi de s’engager au sein des organes de répression du Troisième Reich. Ils ont théorisé et planifié l’élimination de vingt millions d’individus de race prétendument « inférieure ». Ils ont organisé et assisté à l’extermination d’un million d’entre eux.Au long d’une enquête éprouvante dans les archives du SD et de la SS, Christian Ingrao retrace le destin de ces enfants de la Grande Guerre, s’intéresse à leurs réseaux – militants, universitaires ou amicaux –, étudie leurs manières d’envisager la guerre et le « Monde d’ennemis » qui, selon eux, les menace. Apparaissent alors les mécanismes de l’engagement, dans le nazisme puis dans le meurtre de masse. Grâce à cette étude pionnière, on comprend comment ces hommes ont fait pour croire et pour détruire.Car l’histoire du nazisme est aussi tissée d’expériences personnelles, de ferveur et d’angoisse, d’utopie et de cruauté.Christian Ingrao dirige l’Institut de l’histoire du temps présent. Spécialiste du nazisme et du phénomène guerrier, il enseigne également à Sciences-Po. Son précédent ouvrage, Les Chasseurs noirs, a été un succès en Europe.” Bien, nous sommes loin du coup de gueule légitime initial. Mais j’aime bien en rajouter une couche Conclusions : on peut être cultivé et très con à la fois. on peut être excellent en orthographe et très con à la fois. (après la définition du “con” mériterait une bonne dissertation au BAC) Finalement les règles de jeux ne sont si truffées que ça de fautes. On a vu pire, et de loin, dans des articles de journaux, voire même dans des cours de profs de français ou de philo. Oui, oui ça existe ! Restons nuancés Mais cela n’empêche pas de défendre notre belle et riche langue française. Ne pas faire de faute d’orthographe moi j’appelle ça de la politesse et du respect pour le lecteur et je m’efforce toujours d’y veiller…y compris sur ce forum que j’adore dis-je en passant. Bon je sors et vous souhaite de bonnes parties
Sans compter les licences poétiques qu'on peut trouver ça et là et au fait que l'orthographe et les règles de grammaire ont mis du temps à se fixer. Je pense en particulier à l'Atys de Lully sur un livret de Philippe Quinault où l'on trouve le mot amour au singulier une fois au masculin et une fois au féminin : - "Mais souvient toi que la beauté quand elle est immortelle demande la fidélité d'une amour éternelle." - "Que l'amour a d'attraits lorsqu'il commence à faire ressentir sa puissance."
Je pense que dans le premier cas, ne pouvant en poésie classique faire rimer immortelle avec éternel, mais demandant bien éternelle, l'auteur a choisi de mettre amour au féminin pour que ça fonctionne...
Jarlaath dit:La langue française est en perpétuelle évolution et comme un intervenant l'a fait remarquer, la plupart des gens (profs y compris) ne sont pas au courant ou n'appliquent pas des réformes orthographiques qui datent pourtant de 25 ans.
Sans doute parce que ces réformes n'ont pas de sens... Supprimer l'accent circonflexe (par exemple) n'empêchera pas les gens qui font des fautes de continuer à en faire. On ne décide pas de l'évolution d'une langue par décret, elle évolue d'elle-même au fil du temps et les têtes pensantes qui ont pondu ces réformes auraient mieux fait d'aller jouer au golf ce jour-là.
Je fais néanmoins partie des personnes qui estiment que la simplification de la langue entraîne une simplification de la pensée. Je ne souhaite pas stigmatiser ceux qui font des fautes (j'en fais également, souvent par inattention) mais il est anormal de les considérer comme des faits négligeables et sans conséquences. C'est une forme de nivellement intellectuel par le bas.
Je suis bien d'accord là-dessus et je trouve justement que les réformes (heureusement non appliquées) tendent à renforcer ce nivellement par le bas. Le raisonnement "les gens font de trop de fautes, donc simplifions la langue" me passe un peu au-dessus de la tête...
Dire cela, c'est ignorer complètement la réalité. Les exemples de langues qui ont réformé leur orthographe "par décret" et avec succès sont légion. L'italien et l'espagnol ont la même base étymologique que le français et ont pourtant simplifié leur orthographe à de nombreuses reprises, pour aboutir à leur forme actuelle, très différente du français. L'allemand a subi il y a une quinzaine d'années une réforme de son orthographe décidée par un comité d'experts et appliquée depuis par tous les germanophones. Certaines langues sont amenées à changer d'alphabet par décision politique (le turc dans l'entre-deux guerres, les langues turques d'Asie Centrale après 1991, le vietnamien, le malais, l'indonésien à l'époque de la colonisation, etc...). L'orthographe de ces langues est alors entièrement définie "par décret" au moment du basculement. On peut même créer une langue vivante "par décret", et pas seulement sa forme écrite, comme cela a été le cas de l'hébreu formé au début du XXème siècle sur la base de la langue écrite de la Torah, et adopté comme langue vivante par l'état israélien en 1948.
Cripure dit: Bien, nous sommes loin du coup de gueule légitime initial. Mais j'aime bien en rajouter une couche
Nan mais t'excuse pas, je trouve le débat intéressant, et à vrai dire j'avais moi-même pensé aux nazis auparavant, sans les citer... Il y a bien longtemps que je ne considère plus la culture comme un marqueur d'intelligence, hélas. Un marqueur de classe sociale, oui, sans doute. Et je ne suis pas loin de faire le même sort à l'orthographe. Je suis d'accord que l'important, c'est le respect du lectorat. Quand je vois des messages sans queue ni tête syntaxiquement parlant dans la section "points de règle"... Je veux dire, des gens qui espèrent une réponse d'autres forumeurs sans avoir le respect élémentaire d'être clairs et compréhensibles dans la formulation de leur question... là oui il y a un problème. Par contre, quand quelqu'un me sort, par ignorance ou inattention, un "après que" + subjonctif, eh bien je ne m'offusque pas. Oui c'est une erreur, mais elle n'est pas grave et ne relève pas d'un manque de considération du lectorat. Pousser des cris d'orfraie devant ce genre de faute, je ne comprends pas l'intérêt, à part encore une fois en tant que marqueur social : MOI JE SAIS que c'est une faute, et PAS EUX, bouh la honte.
krile dit: C'est privilégier la forme au fond. Sans vouloir entrer dans de la provoc' de bas étage, notre société met plus en avant les matières scientifiques que celles des langues. Hasard ? Que penser d'un brillant mathématicien qui fera 10 fautes par phrases, car confronté à une langue irrationnelle, privilégiant l'exception ? Car le français fait bien partie de ces langues fantasques, où le cas particulier est le cas général.... Et par conséquent, la maîtrise du français n'est pas affaire de logique / "vitesse de processeur", mais plutôt de mémoire. Nous sommes plus dans le domaine de la culture que dans celui de la capacité d'abstraction. Pour revenir à notre mathématicien, s'il est, en plus, un esthète de la langue, tirons lui notre chapeau. Il pourra écrire ses formules mathématique sans faute.
Je n'ai jamais rencontré de brillant mathématicien faire 10 fautes par phrases (et cela vaut aussi pour ceux qui ne s'exprimaient pas dans leur langue maternelle) mais si un tel être humain existait, je pense qu'il n'aurait pas une grande crédibilité dans la communauté : être brillant est une chose, mais aujourd'hui il est fondamental de pouvoir transmettre ses idées de la manière la plus claire possible. C'est plutôt difficile lorsque l'on empile les fautes...
dr M dit: Je n'ai jamais rencontré de brillant mathématicien faire 10 fautes par phrases (et cela vaut aussi pour ceux qui ne s'exprimaient pas dans leur langue maternelle) mais si un tel être humain existait, je pense qu'il n'aurait pas une grande crédibilité dans la communauté : être brillant est une chose, mais aujourd'hui il est fondamental de pouvoir transmettre ses idées de la manière la plus claire possible. C'est plutôt difficile lorsque l'on empile les fautes...
Ce sur quoi je ne suis pas d'accord. Bien sûr, le '10 fautes par phrase' est une caricature. Partons du principe qu'il n'a qu'un niveau "moyen" en français (au sens "moyenne nationale" du concept). Et bien s'il nous sort une théorie de la relativité bis, il sera le roi du monde; on ignorera allégrement ses lacunes linguistiques. Pour moi, en ce qui me concerne personnellement et n'engage que ma propre personne en tant qu'individu indivisible (et limite misanthrope), ce principe s'applique à une règle de JdP. Il faut que je puisse la comprendre et y trouver l'info dont j'ai besoin pour jouer. Si la dite info comporte une faute, et bien fi ! Cela ne va pas m'empêcher de jouer avec joie (si le jeu est bon, of course).