Du salaire des administrateurs de grands groupes

Il s’agit ici des dirigeants des grandes entreprises multinationales, pas des patrons de PME.

bigsam dit:Par exemple, les “jetons de présence” sont des indemnités versées à des administrateurs de sociétés anonymes lorsqu’ils assistent aux conseils d’administration.
Alors oui, c’est beaucoup d’argent pour une “réunion”, mais un administrateur engage sa responsabilité civile, notamment pour “faute de gestion”, et pénale.
Un administrateur risque donc, parce qu’il a mal fait son travail de payer sur ses deniers propres ou d’aller en prison.
Moi je vois ça comme un risque…


Total est impliqué dans les deux dernières catastrophes industrielles françaises. Le naufrage de l’Erika et l’explosion d’AZF. Dans le premier cas, c’est le FIPOL qui banque : un organisme d’assistance mutuelle en compagnie pétrolière.
Dans le second, je ne sais pas trop ou cela en est, mais seule la société gérant l’usine est encore en examem. On notera que nombre de salariés de l’usine ont été poursuivis sans pour autant qu’ils aient un salaire en rapport avec les risques encourus.
Les agents de circulation de la SNCF (les gars qui manipulent les aiguillages) sont également responsables pénalement sans pour autant avoir de compensation du niveau de celle des administrateurs de grands groupes.

Mais tu parles d’erreur de gestion.
Michel Bon a racheté Orange et endetté FT jusqu’à l’os. Qui paye ? Tout d’abord les prestataires qui ont vu leur carnet de commande se réduire comme peau de chagrin. Ensuite les salariés dont les conditions de travail se sont dégradés et dont les effectifs ont été réduits. Michel Bon a quitté FT avec des indemnités.
Aujourd’hui : la mauvaise gestion d’Airbus est au devant de la scène. Qui paie ? 10000 salariés licenciés sans compter les sous-traitants à l’agonie.

Peux-tu me citer un cas où des administrateurs ont assumé leurs erreurs de gestion à leur hauteur de leur rémunération ? On en voit poursuivi pour corruption ou pour délit d’initiés ou pour d’autres malversations mais pour avoir mis leur entreprise en faillite, je ne vois pas. Si tu as des exemples…

Pour moi, ces rémunérations sont surtout à la hauteur de leur réseau de relation et de leur pouvoir.

j’ai l’exemple d’un patron qui a passé deux/trois semaines en détention préventive pour être soupsconné d’entente (accord avec les autres entreprises pour se répartir l’attribution des marchés). Ce n’est pas des malversations ou autres délits d’initiés dans la mesure où lui n’y gagnait rien. par contre ça ne répond pas clairement à ta demande parce que ce n’était pas le patron d’un grand groupe, mais juste d’une filiale locale assez grosse pour qu’on ne puisse plus vraiment parler de PME.

xavo dit:
Pour moi, ces rémunérations sont surtout à la hauteur de leur réseau de relation et de leur pouvoir.


Et souvent aussi de l'appartenance familiale, quelle que soit la compétence.
J'ai l'exemple d'une amie dans une "petite" société immobilière, qui n'appartenait pas à la "famille" et qui pestait parce qu'elle se défonçait pour son travail, mais que les avantages, les promotions revenaient aux membres de la "famille" qui se la coulait douce parce qu'ils savaient de toute manière leur avenir assuré, et qu'il savait que des salariés "non membres" assuraient la rentabilité par leur travail assidu...
Peux-tu me citer un cas où des administrateurs ont assumé leurs erreurs de gestion à leur hauteur de leur rémunération ? On en voit poursuivi pour corruption ou pour délit d'initiés ou pour d'autres malversations mais pour avoir mis leur entreprise en faillite, je ne vois pas. Si tu as des exemples...


Y'en a, y'en a plein. Des actions en extension pour comblement du passif, c'est très fréquent. Des condamnations avec interdiction de gérer pour 5 ans, pour fautes ge gestion, ça tombe tous les jours au Tribunal de commerce.

On en parle pas puisque ça touche principalement les PME.

Bien évidemment, pour que ce soit intéressant médiatiquement, il faut que ce soit leur responsabilité pénale qui soit engagée - abus de biens sociaux, malversations, dividendes fictifs, etc. Là seulement, on en parle, mais c'est plus rare.
Duda dit:On en parle pas puisque ça touche principalement les PME.


Oui mais les dirigeants de PME, ce n'est pas le sujet ! :)
Là, il s'agit des administrateurs des grands groupes français qui ont des rémunérations, parait-il, à la hauteur de leur prise de risque.
Duda dit:
Y'en a, y'en a plein. Des actions en extension pour comblement du passif, c'est très fréquent. Des condamnations avec interdiction de gérer pour 5 ans, pour fautes ge gestion, ça tombe tous les jours au Tribunal de commerce.

Exact,
je n'ai pas le temps de développer là maintenant mais :

1. je crois qu'il y a pas mal d'amalgame entre groupes privés / semi-publics, familiaux, responsabilité personnelle, reponsabilité de la personne morale, etc.

2. pour confirmer ce que dit Duda, au tribunaux de commerces, il y a entre 5 et 10% des procédures de liquidation de biens qui donnent lieu à des condamnations de comblement d'insuffisance d'actifs

Je reviendrai quand j'aurai plus de temps pour expliquer mon 1.
P.S : puisque je viens de voir ton message Xavo, personnellement, je n'ai jamais parlé de grands groupes, j'expliquai juste le rôle et les responsabilités d'un administrateur
bigsam dit:P.S : puisque je viens de voir ton message Xavo, personnellement, je n'ai jamais parlé de grands groupes, j'expliquai juste le rôle et les responsabilités d'un administrateur

Je suis peut-être allé trop vite en besogne mais tu répondais à Pierre 2.0 qui dit :
Seillère qui touche un "jeton de présence" de 15 000 euros pour une conférence d'un après-midi, les patrons de Moulinex qui bradent leur capital, ceux de Enron, de MetalEurope, qui sait peut être celui de Total (mais présomption d'innocence), Dumez, la Lyonnaise et la Générale, et d'autres sans doute....

C’est vrai que ce n’est pas le sujet, les PME, mais pour ton point 2 : 5 à 10%, ca laisse 90% d’affaires où ce n’est pas le cas, non?

Qu’un entrepreneur, suite à la faillite de son entreprise, soit atteint dans ses biens propres, c’est bien malheureux, et la solidarité nationale devrait agir (n’est-ce pas le cas?), mais je ne t’entends pas parler des salariés qui eux se retrouvent sans rien, ne retrouvent pas de travail, et n’ont pas de capital personnel pour se retourner.

xavo dit:
bigsam dit:P.S : puisque je viens de voir ton message Xavo, personnellement, je n'ai jamais parlé de grands groupes, j'expliquai juste le rôle et les responsabilités d'un administrateur

Je suis peut-être allé trop vite en besogne mais tu répondais à Pierre 2.0 qui dit :
Seillère qui touche un "jeton de présence" de 15 000 euros pour une conférence d'un après-midi, les patrons de Moulinex qui bradent leur capital, ceux de Enron, de MetalEurope, qui sait peut être celui de Total (mais présomption d'innocence), Dumez, la Lyonnaise et la Générale, et d'autres sans doute....

Je corrigeais donc l'erreur qui était de dire qu'on touchait des jetons de présence pour une "conférence"...
Pierre2.0 dit: Qu'un entrepreneur, suite à la faillite de son entreprise, soit atteint dans ses biens propres, c'est bien malheureux, et la solidarité nationale devrait agir (n'est-ce pas le cas?), mais je ne t'entends pas parler des salariés qui eux se retrouvent sans rien, ne retrouvent pas de travail, et n'ont pas de capital personnel pour se retourner.


pas de solidarité nationale en cas de liquidation de biens et de clôture pour insuffisance d'actifs, ni pour les créanciers, ni pour le débiteur.

dans les procédures collectives, impots, charges sociales et salaires bénéficient dans l'ordre des paiments d'un superprivilège qui permet de passer avant les autres créanciers, quand il y a des fonds.
par contre, pour les salariés, la solidarité nationale fonctionnera ensuite à travers les assedic et l'anpe.

POur se mettre d’accord,
définition par actufinance :


Jeton de présence

Rémunération accordée aux présidents directeurs généraux, directeurs généraux et administrateurs, membres des conseils de surveillance de sociétés anonymes, qui est en principe calculée en fonction de l’assiduité aux réunions auxquelles ils assistent. Mais en pratique il s’agit d’une rémunération fixe qui peut être attribuée même aux absents.

Par netPME
L’assemblée générale des actionnaires peut allouer des jetons de présence aux administrateurs, en rémunération de leur activité, sous la forme d’une somme fixe annuelle. L’assemblée détermine librement le montant de ces jetons de présence en votant une somme globale (ainsi, et à la différence des dividendes versés aux actionnaires, il n’est pas nécessaire qu’un bénéfice distribuable soit constaté pour que la société alloue des jetons de présence). La répartition des jetons de présence entre les différents administrateurs est effectuée librement par le Conseil d’administration (celui-ci peut par exemple allouer une part plus importante aux administrateurs les plus assidus).


Et voilà un petit article intéressant du Nouvel Obs sur le sujet :

"
Daniel Bernard : la retraite
à 38 millions d’euros
Daniel Bernard est parti avec l’assurance de toucher 29 millions d’euros au titre d’une “retraite-chapeau”, ainsi que trois ans de salaire.


Daniel Bernard (Sipa)


Daniel Bernard, l’ancien Pdg du groupe Carrefour évincé début février, est parti avec l’assurance d’un complément de retraite d’un montant maximal de 29 millions d’euros ainsi qu’une indemnité d’un montant de trois ans de salaire soit 9,8 millions d’euros, a indiqué la direction de Carrefour mercredi 20 avril.
Les conditions du départ de Daniel Bernard ont été révélées par les nouveaux dirigeants de Carrefour devant l’assemblée générale des actionnaires, en réponse à des questions de la salle. L’annonce a provoqué des réactions hostiles dans l’assemblée, quelques actionnaires criant même : “remboursez”.
Le nouveau président du conseil de surveillance Luc Vandevelde a expliqué que le groupe avait provisionné 29 millions d’euros pour la “retraite-chapeau” qui serait allouée à Daniel Bernard, dans le cadre d’un accord convenu en 1999.

Evincé pour manque de performances

Cette “retraite-chapeau” – une pratique assez répandue pour les dirigeants, appelée ainsi parce qu’elle vient “au dessus” des autres indemnités de retraite – n’est pas une somme versée d’un bloc mais un complément de retraite dont le versement est étalé pendant toute la durée de la retraite du bénéficiaire.



Pour Daniel Bernard, ce complément sera de 40% de son dernier salaire. Vue l’incertitude sur le montant final de ce complément de retraite, Carrefour a pourvu ce poste d’une provision de 29 millions d’euros.
Daniel Bernard a été évincé début février 2005 pour n’avoir pas réussi à redresser les performances du groupe et surtout son cours de Bourse. En 2004 il avait touché une rémunération de 3,13 millions d’euros.

Compensation

Le système de la retraite-chapeau avait été mis sur pied chez Promodès (fusionné avec Carrefour en 1999, ndlr) pour compenser le fait que les dirigeants des groupes français étaient moins bien payés que leurs homologues d’autres pays, mais ce n’est plus le cas actuellement, a commenté le groupe.
Le système, qui a profité à une dizaine d’anciens dirigeants du groupe, prendra fin avec la retraite chapeau allouée à M. Bernard ainsi qu’à un autre cadre dirigeant, a précisé Luc Vandevelde, qui lui-même n’en bénéficiera pas.
Daniel Bernard a en outre perçu une indemnité “équivalant à trois années de salaires”, en contrepartie de l’engagement de ne pas travailler “dans un métier proche du nôtre pendant 4 ans”, a expliqué Luc Vandevelde.
S’il avait accepté le poste de président du groupe allemand KarstadtQuelle, évoquée mardi par la presse, Daniel Bernard aurait dû renoncer à une partie de cette indemnité, selon Carrefour.

“Jetons de présence”

Egalement interpellé par de petits actionnaires sur les “jetons de présence” (rémunérations attribués aux membres du conseil de surveillance), Luc Vandevelde a précisé qu’il percevrait pour sa part, comme président du conseil, un jeton de présence de 150.000 euros par an.
Il a aussi déclaré à quelques journalistes que sa propre rémunération annuelle, ainsi que celle du nouveau président du directoire Jose-Luis Duran, représentaient à elles deux “moins” que celle de l’ancien Pdg.
“Je touche 600.000 euros, plus un jeton de présence de 150.000 euros par an, sans stock-option. José-Luis Duran a un salaire fixe de 1,1 million d’euros auquel s’ajoute un bonus variable, qui pourrait être d’environ 700.000 euros s’il fait bien son travail”, a-t-il précisé.

Pierre2.0 dit:Et souvent aussi de l'appartenance familiale, quelle que soit la compétence.
J'ai l'exemple d'une amie dans une "petite" société immobilière, qui n'appartenait pas à la "famille" et qui pestait parce qu'elle se défonçait pour son travail, mais que les avantages, les promotions revenaient aux membres de la "famille" qui se la coulait douce parce qu'ils savaient de toute manière leur avenir assuré, et qu'il savait que des salariés "non membres" assuraient la rentabilité par leur travail assidu...


où la ploutocratie succède à la noblesse de droit divin... Il nous reste encore assez de boulot pour quelques nuits du 4 août...
xavo dit:Mais tu parles d'erreur de gestion.
Michel Bon a racheté Orange et endetté FT jusqu'à l'os. Qui paye ? Tout d'abord les prestataires qui ont vu leur carnet de commande se réduire comme peau de chagrin. Ensuite les salariés dont les conditions de travail se sont dégradés et dont les effectifs ont été réduits. Michel Bon a quitté FT avec des indemnités.


Il ne s'agit pas spécialement de prendre sa défense et encore moins de le plaindre, mais Michel Bon était le patron du CAC le plus mal payé, et de très très loin.

Je vais pleurer si si je vous jure …
Mon pere etait inspecteur principal DG machin truc dans l’aube, cad qu’il s’occupait du personnel, des dossiers, des saisies, controles etc
Il avait un salaire qui ferait rire les messieux de Total : 3500 € / mois.
Pour ce prix il avait le boulot de 3 personnes, et on lui demandait d’assurer sur ses deniers propres la comptabilité totale de la circonscription.

En VF ça veut dire que si une erreur comptable apparaissait dans les cahiers, il en etait de sa poche envers son employeur, comme un caissier de la BNP envers son patron. Donc il a du prendre une assurance couvrant 1 000 000€ de pertes par an, au cas où, et bien sur à ses frais. Je vous raconte pas la gueule de la fiche de paye apres les divers prelevements, la facture d’essence, usure du vehicule (oui car on veut de la flexiblité pour le petit personnel, madame!) because il se tapait 100 km/jour pour ce job de merde.

Apres 2 greves du personnel en 1 an, les engueulades du Directeur, et une paye qui au final n’avait augmenté que de 150 €, il a jeté l’eponge et est revenu à son ancien statut.

Donc les malheurs des millionnaires de firmes internationales ne font bien rire. J’aimerais payer autant d’impots qu’eux, et avoir leurs responsabilités sous proportionnée aux salaires, sans parler des parachutes dorés.

Kouynemum dit:dans les procédures collectives, impots, charges sociales et salaires bénéficient dans l'ordre des paiments d'un superprivilège qui permet de passer avant les autres créanciers, quand il y a des fonds.


Je me permets juste une petite rectification : il y a effectivement des créanciers privilégiés en cas de procédure collective, mais ils n'ont pas un privilège équivalent. On ne parle de superprivilège que pour les salaires, ensuite seulement viennent les créances assorties d'un privilège simple comme les impôts.
Leonidas300 dit:
Il ne s'agit pas spécialement de prendre sa défense et encore moins de le plaindre, mais Michel Bon était le patron du CAC le plus mal payé, et de très très loin.


Quel était le montant de son salaire + stock options + parachute doré Leonidas?
brunbrun dit:j'ai l'exemple d'un patron qui a passé deux/trois semaines en détention préventive pour être soupsconné d'entente (accord avec les autres entreprises pour se répartir l'attribution des marchés). Ce n'est pas des malversations ou autres délits d'initiés dans la mesure où lui n'y gagnait rien. par contre ça ne répond pas clairement à ta demande parce que ce n'était pas le patron d'un grand groupe, mais juste d'une filiale locale assez grosse pour qu'on ne puisse plus vraiment parler de PME.

Mais si ce sont des malversation et des delits !!!
yamaneko dit:
Kouynemum dit:dans les procédures collectives, impots, charges sociales et salaires bénéficient dans l'ordre des paiments d'un superprivilège qui permet de passer avant les autres créanciers, quand il y a des fonds.

Je me permets juste une petite rectification : il y a effectivement des créanciers privilégiés en cas de procédure collective, mais ils n'ont pas un privilège équivalent. On ne parle de superprivilège que pour les salaires, ensuite seulement viennent les créances assorties d'un privilège simple comme les impôts.


merci pour la rectification.

Alors, dans l’autre topic, quand j’ai répondu à Pierre 2.0, c’était sur les déclarations suivantes :

Pierre 2.0 dit:beaucoup de cadres cravatés passant pas mal de temps en réunion à rien faire sont très chers payés et bien loués, alors que les gens qui produisent vraiment et se crèvent le cul sont bien moins payés et les premières victimes des licenciements
Pierre 2.0 dit:l’actionnaire qui empoche ses bénéfices de votre travail sans rien faire
Pierre 2.0 dit:le chef qui donne ses ordres et a un salaire du double alors qu’il ne fait pas grand chose

Donc en résumé, les cadres (même de “management de proximité”, ceux qui gagnent le double du salaire de l’ouvrier/employé) et les dirigeants (et pas forcément ceux du CAC 40) ne font rien et par conséquent ne méritent pas leur salaire. De même pour les actionnaires.

Je ne suis absolument pas d’accord avec ça.
Je pense que l’échelle des rémunérations a un sens. Comme le signalait Vinz dans l’autre topic, elle est effectivement plus basée sur la “remplaçabilité” et la reponsabilité que sur la pénibilité.
On peut trouver ça injuste, mais l’entreprise rétribue la création de valeur, et considère qu’un cadre y participe plus qu’un technicien.

Pour revenir à ce topic, où on parle des patrons du CAC 40, comme je l’ai déjà écrit je pense, même si la logique de rétribution est la même, qu’il y a 3 cas :
- Les entreprises familiales (type Michelin/Lagardère/Pernod Ricard)
- Les entreprise dans lesquelles l’état à une part importante (type EADS/France télécom/EDF)
- les autres.

Cas N°1 : que des descendants du créateur aient des parts dans la société familiale (donc soient au conseil d’administration), je trouve ça plutôt normal. Ils ont payé des droits de succession dessus (jusqu’à 30% de la valeur de la société). Qu’ils soient les plus compétents pour diriger, pas sûr. D’ailleurs souvent ce type d’entreprises va chercher des dirigeants à l’extérieur ou sinon risque de péricliter.

Cas N°2 : Là, il y a clairement des cas choquants de collusion. Le réseau dont parlait Xavo est trés présent et les nominations trés politiques. C’est pour moi le seul cas où les rémunérations / golden parachute / chapeau retraite peuvent être complétement injustifiées.

Cas N°3 : Une entreprise privée lie un contrat de droit privé entre elle et un dirigeant. La rémunération et les conditions sont librement négociées.

Est-ce que les montants sont trop élevés ? peut-être !!!

D’un côté, on parle des 40 salariés les mieux payés de France. En quelque sorte, ce sont des champions au même titre que les tout meilleurs joueurs de foot, pilotes de F1, etc. et eux aussi sont trés bien payés.
On paye l’unicité, le talent et théoriquement la performance. Si cette dernière n’est pas au rendez-vous, on rompt le contrat.
Donc comme pour un sportif de haut niveau, un poste de dirigeant de haut niveau est un poste exigeant, que peu de gens peuvent occuper, et qu’on peut perdre d’un moment à l’autre (d’où les garanties négociées à l’entrée).

De l’autre côté, est-il normal que quelqu’un gagne 366 SMICs par an ? soit en une journée ce que leurs ouvriers gagnent en un an ?

Personnellement, je n’ai pas la réponse, mais il me semble qu’à moins de sortir globalement de l’économie de marché (ce qui ne me semble ni réalisable, ni souhaitable) les rémunérations des patrons de grandes entreprises resteront au niveau où elles sont.

Ci-dessous un article éclairant de l’économiste Daniel Cohen sur la rémunération des grands patrons, paru dans le Monde du 6 septembre, qui souligne la distorsion introduite par les considérations boursières, éloignées en fait des critères de performance.
Lisez-le jusqu’au bout, ça vaut la peine.


Le salaire des patrons est-il « juste » ?
Article paru dans l’édition du 06.09.06
es patrons sont payés aujourd’hui comme des rock stars ou des sportifs de haut niveau. Aux Etats-Unis, les dirigeants des cinq cents premières entreprises ont gagné l’an passé, selon le magazine Forbes, une moyenne de 10 millions de dollars. Pour moitié il s’agit de salaires, pour moitié de stock-options encaissées au cours de l’année, lesquelles expliquent quelques pointes au-dessus de 200 millions de dollars, comme pour le patron de Yahoo !.
Les PDG français sont à moitié, environ, du niveau américain (2,3 millions hors stock-options en moyenne pour les dirigeants du CAC 40, ce qui les place devant leurs collègues britanniques) avec des pointes également dues aux stock-options. La dernière en date est celle d’Antoine Zacharias, le désormais célèbre ex-président de Vinci, dont les plus-values sont évaluées à 170 millions d’euros. Par comparaison, le revenu annuel de Zinédine Zidane est estimé à 15 millions d’euros.
Le parallèle avec le revenu des sportifs pose une question : si l’on trouve « naturel » que Zidane gagne beaucoup, pourquoi devrait-on être choqué que les PDG, dont les décisions commandent le destin de plusieurs centaines de milliers de personnes, gagnent autant ? En d’autres termes, sur quelle échelle morale faut-il inscrire, si besoin était, le jugement porté sur leurs rémunérations ?
Au Moyen Age, les penseurs scolastiques, interpellés par la renaissance du commerce et de la monnaie, se sont posé la même question : qu’est-ce qu’un prix « juste » ? Saint Thomas notait que « le prix des choses qui se vendent ne s’estime pas d’après la hiérarchie des natures, puisqu’il arrive parfois qu’un cheval se vende plus cher qu’un esclave ». Duns Scot, autre grand penseur scolastique, estimait qu’un prix était juste à deux conditions : « La première est que l’échange soit utile à la communauté et la seconde que la personne reçoive dans l’échange une récompense fonction de sa diligence, de sa peine et du risque encouru » (cité par André Lapidus dans Nouvelle Histoire de la pensée économique, Economica).
Est-ce que le salaire des patrons récompense leur diligence, leur peine et le risque encouru ? Il y a plusieurs manières de comprendre cette question. S’il s’agit de savoir si leur diligence serait atténuée s’ils gagnaient, disons, dix fois moins, la réponse est clairement négative. Le patron d’une petite entreprise ne travaille pas moins que celui d’une grande et le risque qu’il encourt n’est pas moindre.
A défaut de rémunérer leur peine, s’agit-il de créer des incitations adéquates ? Avant la révolution des stock-options, les patrons étaient des salariés comme les autres, gagnant certes davantage que leurs subordonnés, mais partageant leurs préoccupations. Les stock-options leur font épouser le point de vue des actionnaires. Sont-elles, du strict point de vue de la création de valeur boursière, la meilleure façon d’y parvenir ?
Force est de répondre négativement aussi à cette question. La Bourse a été multipliée par dix au cours des vingt dernières années pour une masse de raisons, dont la baisse des taux d’intérêt, l’émergence de nouvelles technologies ou la mondialisation, qui échappent pour l’essentiel aux décisions de tel ou tel chef d’entreprise. Du strict point de vue des incitations à la bonne gestion, la hausse générale de la Bourse n’a aucune raison de profiter à un PDG en particulier.
D’autres contrats eussent mieux convenu, plus économes des deniers de l’entreprise. On aurait pu ainsi parfaitement envisager d’accorder des bonus à concurrence de l’écart entre la performance boursière de la firme et de celles des autres firmes appartenant au même secteur (voir Marianne Bertrand et Sendil Mullainathan « Are CEOs Rewarded for Luck ? », Quarterly Journal of Economics, 2001).
Quelles autres explications reste-t-il ? Revenons à saint Thomas : pourquoi le cheval est-il plus cher que l’esclave ? Parce qu’il est rare. Il n’y a qu’un Zidane et on ne s’étonne pas de sa rémunération pour cette raison même. Est-ce que la rareté des chefs d’entreprise pourrait expliquer leur rémunération ?
DÉBAUCHER LE MEILLEUR MANAGER
Dans une étude brillante, qui circule beaucoup à Wall Street, Xavier Gabaix et Augustin Landier ont proposé une quantification de cette rareté ( « Why Has CEO Pay Increased So Much ? », MIT, janvier 2006). Par des méthodes statistiques ingénieuses, ils mesurent la part qui revient au talent propre, rare, des PDG des grandes entreprises américaines dans la valeur des firmes qu’ils dirigent. Ils montrent que celle-ci est réelle, mais très faible. Selon les auteurs, si le PDG de la 250e entreprise (par sa capitalisation) devait remplacer celui de la première, il en résulterait pour celle-ci une perte de valeur de 0,014 % !
Cet écart mince suffit pourtant à comprendre pourquoi la rivalité des firmes pour débaucher le meilleur manager représente un enjeu, et pourquoi les chefs d’entreprise en tirent un profit proportionné à la valeur boursière des firmes qu’ils dirigent et de celles qui se disputent leurs services.
Le salaire des dirigeants d’entreprise ne vise donc pas à récompenser leurs efforts, qui ne justifieraient pas de telles sommes. Il ne s’agit pas non plus de les inciter à bien faire : on utiliserait en ce cas d’autres types de contrat. Il est le résultat d’une mise en concurrence des firmes, savamment entretenue par les dirigeants eux-mêmes (ce qui serait en tant que telle une autre histoire à raconter…), pour que les meilleurs managers dirigent les meilleures firmes.
Si telle est l’explication de leurs rémunérations, une conclusion s’impose : rien n’interdit, du strict point de vue de l’efficacité économique, de taxer, disons, 90 % des gains des chefs d’entreprise ! Les meilleurs dirigeants continueraient d’aller aux meilleures firmes et aucune perte d’efficience ne serait à craindre. Comme le cheval qui ne courrait pas moins vite s’il valait moins cher, les chefs d’entreprise ne seraient pas moins diligents s’ils étaient (tous) moins payés.
La difficulté pratique de mise en oeuvre de cette mesure tient au fait que les managers sont mobiles, à l’image du capital dont ils font désormais partie. C’est une difficulté réelle, mais qui n’est pas nécessairement l’argument auquel les patrons tiennent le plus.
Les dirigeants qui réclament des indemnités de départ à la retraite stratosphériques voudraient convaincre qu’ils sont « utiles à la communauté », que les firmes qu’ils dirigent leur doivent tout, bref : que leur rémunération est « juste ». Il ne semble pas que l’analyse économique les aidera beaucoup dans ce plaidoyer.
DANIEL COHEN pour « Le Monde »