Un jeu peut corriger cette possibilité sans que ce soit forcément artificiel. Vouloir gommer l’effet leader, c’est essayer d’impliquer chaque joueur dans un coop de la même façon. Amener chacun à faire ses propres choix, à améliorer sa compréhension du système. Si on perd, chacun a fait de son mieux, mais chacun a réellement participé, c’est bien plus gratifiant que de se contenter de lancer des dés en écoutant le leader. Même si je ne doute pas que certains passent une bonne soirée en jouant comme ça, on peut légitimement leur souhaiter mieux.
Oui, c’est un effet normal. Non, ce n’est pas inévitable. Et pas la peine de défier qui que ce soit, personne ici n’a voulu toucher à Pandemie.
shaudron dit:Un jeu peut corriger cette possibilité sans que ce soit forcément artificiel.Oui, je suis du même avis. Des jeux plus récents que Pandémie ont prouvés que c'était possible. Et ils ont marqué leur originalité grâce à ça.
Il existe une différence de taille entre avoir une dynamique qui limite d’elle-même l’émergence d’un leader et chercher un mécanisme qui le limite. J’ai cité Atlantis Rising, par exemple, qui “élimine” le leader jusque parce que les options, en se réduisant, dirigent d’elles-même les décisions.
Quoi qu’il en soit, rien n’a été ajouté pour limiter le leadership : la disparition des workers placements a pour effet secondaire de ne pas laisser de place pour un “leader”. Néanmoins, si personne ne prend le leadership lors des premiers tours pour imposer la stratégie de base (maximiser le nbre de workers, maximiser l’énergie, optimiser la défense vs Athéniens et sacrifier certaines portions de l’île peu rentables), alors le groupe échouera. La stratégie n’est pas compliquée à deviner mais il faut l’installer rapidement. Une fois cela fait, et de plus en plus que le jeu avance, le leader n’a plus de raison d’être.
Le jeu, par sa dynamique, élimine le leader. Mais il s’agit d’un effet induit. Quand on parle de jeu qui se démarque par son originalité, Atlantis Rising et son board qui “s’efface” est pour moi une réussite exceptionnelle. Même le moins gamer des joueurs ne reste pas de marbre avec ce board qui disparait.
Vouloir créer des outils de gestions artificiels est une affaire différente. Un jeu comme Pandémie bénéficie à 100% de la présence d’un leader. Si c’est un poser, tant pis pour le groupe qui ira au devant d’un échec. Si le joueur est “compétent”, tant mieux pour lui. J’ai assez joué à ce jeu pour avoir surtout constaté que le leadership change facilement selon qui semble (pas toujours le cas réellement) avoir le mieux compris le “puzzle”. Atlantis Rising a besoin d’un leader au démarrage mais roule ensuite tout seul et le bully de service la ferme en général vite tellement la situation semble désespérée et hors de contrôle.
Ces deux jeux sont aux extrêmes opposés mais, dans les deux cas, la mécanique se charge d’elle-même de gérer un possible leader. Ou de faire avec. Peu importe. Encore une fois, c’est de la responsabilité des joueurs, pas du jeu. S’ils se laissent bully, c’est qu’ils le veulent bien.
Mais ce que je lis sur ce thread, ce sont des gens mettant en avant des mécaniques non coopératives pour gérer un défaut non-inhérent à un jeu coopératif. Les infos partielles sur un team work, c’est juste absurde. Ajouter du hasard/adresse pour empêcher la mise en place d’un plan? Autant dire qu’on ne s’adresse plus aux mêmes joueurs (franchement, pousser du token pour gérer les combats, ça m’amuse 10mn. Et on revend la boîte A peu près la même chose pour Escape, d’ailleurs -ok, on revend pas mais on le sort quand même de moins en moins).
Un jeu coop est un jeu d’équipe. Il en va des équipes comme des gens: on trouve de tout. Certaines fonctionnent naturellement comme des machines de guerre, d’autres sont sources d’affrontement. Il est juste illusoire pour le créateur que de décider à l’avance de comment fonctionneront les équipes qui joueront à son jeu. S’il décide d’orienter la dynamique d’équipe, il va surtout modifier son jeu plus qu’autre chose.
Dungeon Fighter n’est pas Darkest Hour. Le second est un bon coop, le premier a plus sa place au rayon fun (et Castle Panic me semble mieux fait dans ce cas).
Mais je ne vois aucun coop correct qui ait introduit quoi que ce soit pour limiter le leader-risk. Que certaines mécaniques inhérentes au jeu (Castle Panic car peu de stratégie, Atlantis Rising car de moins en moins de choix par exemple) y arrivent est un effet secondaire d’une bonne mécanique.
Horreur à Arkham est le paradis du bully mais le “simplifier” en Elder Sign n’a pas changé le leader-risk malgré le nombre moindre d’options ET le hasard plus grand. Dans les deux cas, j’ai vu les mêmes se poser en leader et les mêmes se laisser faire. C’est juste dans le principe de fonctionnement de chacun des groupes que de tendre naturellement à un équilibre donné.
Une note à propos des traîtres qui seraient “une” solution: certains joueurs sont incapables de jouer les traîtres. Certains groupes se connaissent tellement qu’un traître n’a aucune espérance de vie. SoC et Battlestar ont disparu de certains de mes groupes très rapidement. D’autres adorent. Mais, comme pour le risque de leader-bully, ce sont des jeux auxquels on ne peut pas jouer dans le plaisir avec tout le monde.
Ces deux jeux sont aux extrêmes opposés mais, dans les deux cas, la mécanique se charge d'elle-même de gérer un possible leader. Ou de faire avec. Peu importe. Encore une fois, c'est de la responsabilité des joueurs, pas du jeu. S'ils se laissent bully, c'est qu'ils le veulent bien.
Dans les deux cas, le leader n'est pas éliminé. A Atlantis Rising, le leader joue plein pot jusqu'en fin de partie où les choix deviennent plus évidents, tu le dis toi même. Il reste présent tout le reste du jeu. Dans ces jeux où le leader est possible, c'est effectivement la responsabilité des joueurs de gérer. Ailleurs, je ne vois pas pourquoi une règle ne pourrait pas (ne devrait pas ?) l'empêcher.
Mais ce que je lis sur ce thread, ce sont des gens mettant en avant des mécaniques non coopératives pour gérer un défaut non-inhérent à un jeu coopératif. Les infos partielles sur un team work, c'est juste absurde. Ajouter du hasard/adresse pour empêcher la mise en place d'un plan? Autant dire qu'on ne s'adresse plus aux mêmes joueurs (franchement, pousser du token pour gérer les combats, ça m'amuse 10mn. Et on revend la boîte A peu près la même chose pour Escape, d'ailleurs -ok, on revend pas mais on le sort quand même de moins en moins).
Déjà, on ne parle pas de public cible dans ce thread. Jeux pour gamers ou pas, peu importe, ce qui nous intéresse c'est de discuter de l'effet leader. Les infos partielles sur un jeu d'équipe, c'est loin d'être absurde, Hanabi joue précisément sur cette corde, et il est nominé au SdJ. Pour moi le seul truc absurde au final, c'est d'être péremptoire sur le sujet.
Il ne s’agit pas d’être péremptoire mais juste de constater un fait : il existe autant de dynamique de groupe que de combinaisons du nombre d’individus au sein du groupe.
Certaines personnes ont naturellement un comportement leader/agressif/alpha dans ce cadre et d’autres un comportement plus passif. Dans le cadre du jeu, toute personne qui a fait un peu de JDR le sait parfaitement. Tout comme on sait qu’il est assez illusoire de vouloir lutter contre ces tendances naturelles.
D’ailleurs, un jeu coop est une forme de JDR sur un plateau. Il n’est donc pas étonnant que les mêmes dynamiques s’installent.
La plupart du temps, cela ne pose pas trop de problème et un équilibre finit par s’installer. Parfois, ça clash. Mais cela n’est pas non plus réservé aux jeux de coop/JDR. Toute partie est susceptible de tourner mal si un joueur part dans un trip alpha. Je pense qu’on a tous des souvenirs épiques de ce genre de soirée…
Personnellement, je pratique essentiellement 2 groupes: un mixte avec une majorité d’occasionnels. Et un second où tout le monde a 20+ années de jeu compétitif. Je n’ai jamais vu le moindre souci sur un coop dans le premier groupe alors qu’il y a toujours un joueur pour se mettre en leader. Dans le second groupe, il ne peut y avoir de leader autre que le joueur qui apportera la meilleure réponse stratégique. Ca peut discuter ferme, il peut y avoir de la poussée d’ego mais ça se passe toujours bien.
Maintenant, je l’ai dit, pas de joueurs chiants.
Les seuls jeux où j’ai eu des problèmes sont au contraire des jeux où le leadership est délicat. SoC qui dure 3mn chaque fois qu’un joueur est traître. BSG qui tourne mal car un joueur ne supporte pas d’être un cylon et de ne pas coopérer avec les autres. (Truc où on combat en pinchant les tokens) avec des joueurs qui n’y arrivent pas. Elder Sign où un joueur malchanceux dans ses tirages s’acharne sur une mission au grand désespoir d’un leader…
Dans chaque mauvaise expérience, c’est en fait une mécanique du jeu extérieure au principe de coop qui m’a posé problème. Jamais le principe de coop et ses dérives éventuelles (il y en a eu, évidemment; mais aucune qui ait posé in fine un véritable problème).
Je ne cite pas Pandémie à loisir seulement parce que c’est un des jeux les plus élégants auquel il m’ait été permis de jouer. Mais, surtout, car c’est le jeu où un leader émerge à chaque partie, systématiquement; où ce leader est vital à la réussite du groupe; et où je n’ai jamais vu personne s’en plaindre.
Je cite Atlantis Rising pour la même raison (et pas seulement pour la mécanique qui permet une visualisation extraordinaire du thème et de l’impératif de la mission -ce qui manque en passant un peu à Pandémie): il faut un leader (dans un groupe non hardcore) au départ de la partie même si, ici, le leader va disparaître peu à peu faute d’avoir quoi que ce soit à diriger.
Ces jeux gèrent les leaders de par leur principe même (pandémie en ne le gérant pas. Mais cette gestion est totalement anecdotique, purement induite.
Mon opinion péremptoire est donc qu’il n’y a rien à gérer. Si le jeu est bon, s’il est fluide, dynamique et apporte aux joueurs du plaisir et de la satisfaction dans l’effort collectif, alors personne ne se plaint qu’un joueur ait été dirigiste. Dans le cas contraire…
En poussant le bouchon plus loin, il y a beaucoup plus de risques à introduire des mécaniques qui limitent l’efficacité d’un groupe (comme le non partage d’informations). Je ne vois absolument pas en quoi cela empêche un profil bully/alpha de faire ce qu’il aime faire mais je vois très bien en quoi on dénature la “collectivisation” de la partie.
Cela n’implique pas que tout coop doit être un Pandemic-like. Au contraire. Mais c’est la leçon de Pandemic qui est intéressante: un groupe peut jouer un jeu et prendre beaucoup de plaisir alors même que, fondamentalement, un seul de ses joueurs a réellement joué contre le jeu.
Dans ces jeux où le leader est possible, c’est effectivement la responsabilité des joueurs de gérer. Ailleurs, je ne vois pas pourquoi une règle ne pourrait pas (ne devrait pas ?) l’empêcher.
la 1 répond à la 2, non ?
on peut aussi empêcher que “votre adversaire se fasse aider par un ami, même si cela vous convient”. Ou qu’un “joueur donne un conseil à son adversaire même si celui-ci le demande”, non ?
En fait, c’est purement une question d’intention. Dans tous les exemples que tu cites, la priorité est toujours donnée à la gagne : le leader serait bénéfique au jeu puisque c’est la façon naturelle, et surtout la plus efficace de l’emporter. En cherchant à gommer l’effet leader, la priorité est donnée à l’expérience de jeu, où quitte à perdre en efficacité globale, chacun offre une réelle participation complémentaire.
Cette réelle coopération est possible dans tous les jeux cités avec un groupe de joueurs qui s’écoutent. Mais comme tu le soulignes, on ne peut pas prévoir quel type de joueurs va jouer au jeu. Donc soit on prévoit le pire en incluant une mécanique qui gomme l’effet leader, soit on espère le meilleur et on laisse effectivement les joueurs gérer ça en ne prévoyant rien du tout.
L’enjeu ici est de trouver des solutions, pas de savoir si c’est un faux problème : manifestement le postulat de base du sujet, c’est que c’est un problème…
Dans cette discussion, j’ai souhaité que l’on se place comme l’auteur du jeu et non pas comme un joueur qui choisit ses camarades de jeu ou un joueur qui décide de transformer les règles d’un jeu existant.
C’est le rôle de l’auteur d’anticiper sur les comportements possibles/probables des joueurs. C’est lui qui créé des mécaniques capables d’offrir un espace de liberté aux joueurs. C’est donc aussi lui qui peut brider ou renforcer les interactions pour peu qu’il estime que cela améliore l’expérience de jeu. Une mécanique maligne n’empêche pas mais oriente subtilement les actions. Tout est dans la mesure de la dose de frustration évidemment.
Le leader n’est pas la bête noire à museler mais l’auteur doit s’interroger sur sa place au regard de l’expérience de jeu des autres joueurs, d’autant plus dans un jeu coopératif. Dire que cela ne dépend que du groupe ne me convainc pas. L’auteur dispose de leviers sur lesquels il peut agir en coulisse, ce qui transformera le gameplay d’un jeu coop à un autre même si l’on joue avec le même groupe de joueurs.
Un article qui pose de bonnes questions - pas spécifiquement sur le leader, mais sur les jeux coop :
http://faidutti.com/blog/?p=2264
ThierryT dit:Un jeu coop est un jeu d'équipe. Il en va des équipes comme des gens: on trouve de tout. Certaines fonctionnent naturellement comme des machines de guerre, d'autres sont sources d'affrontement. Il est juste illusoire pour le créateur que de décider à l'avance de comment fonctionneront les équipes qui joueront à son jeu. S'il décide d'orienter la dynamique d'équipe, il va surtout modifier son jeu plus qu'autre chose.
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Je partage ce sentiment. Je suis un grand fan de Ghost Stories (assez proche de Pandemie sur le fonctionnement général) et j'aurais été très déçu que mon expérience de jeu soit tronquée par des mécaniques censées museler les leaders (mécaniques souvent bancales).
Finalement, le choix en temps qu'auteur est entre :
- brider mon jeu coopératif pour éviter des expériences de jeu frustrantes pour les groupes de joueurs hétéroclites (où un leader peut émerger)
- aller jusqu'au bout de la démarche coopérative pour que les joueurs qui sont faits pour ce style de jeu aient une expérience optimale.
Ce qui est bien, c'est qu'il existe des jeux dans les deux catégories. Comme ça chacun trouve chaussure à son pied !
Pour ma part, très clairement, je préfère les jeux 100% coopératiifs. C'est une expérience humaine forte. C'est à l'auteur de préciser l'esprit du jeu dans la règle : par exemple, préciser que chacun joue librement son personnage.
Sur ce seul principe, j'ai pu jouer avec grand bonheur à l'Ile Interdite avec mon fiston qui a 9 ans. Je le laissais faire ses bourdes avec son personnage et avec le mien je lui montrais l'exemple en expliquant mes choix. Et du coup cela reste un défi collectif, l'idée étant d'échouer pour les premières parties, pour progresser ensuite.