Ce n’est pas complètement faux, et tu pointes du doigt ici ce que l’on appelle dans la pensée catholiques les “scrupules”, c’est-à-dire le risque de te paralyser parce que tu analyses trop ton action et les petits désirs de ton amour-propre. A la rigueur, tu risques de ne plus donner de peur de faire un don aux motivations douteuses, et là ce serait dommage tout de même, ne serait-ce que pour celui qui, sans le savoir, attend ton don.
En ce qui concerne l’aumône, qui n’est pas à rejeter d’emblée, j’ai décidé il y a quelques années de donner au premie rque je rencontre et qui demande l’aumône lorsque je me suis acheté quelque chose de superflu. Je m’en suis fait une règle de façon à ne pas tomber dans le piège qui consiste à juger celui qui mendie, en me demandant s’il “mérite” mon argent, ou autre… ce qui conditionnerait mon don à mon appréciation, et me placerait en position supérieure par rapport à mon frère qui souffre.
Allez, je me permets de citer le début d’un mémoire écrit par mon père sur le don dans le cadre familial (mémoire de pastorale familiale) :
“Le don est partout, du moins partout où il y a de la vie « en abondance », de l’épanouissement, et le don suscite le don, dans une sorte de dynamique.
Une promenade instructive dans le dictionnaire fait ressortir de nombreux sens du mot don : donation, dévouement, sacrifice, cadeau, présent, libéralité, bienfait, aumône, grâce, générosité. Mais on dit aussi : il a un don ; alors c’est un charisme, une aptitude, une capacité, un talent.
On peut donner ses biens, sa parole, son temps, ses talents. On peut se donner soi-même, se consacrer, se dévouer, se sacrifier. On peut aussi s’adonner à un travail, un sport ou tout autre activité. Le plus facile n’est sans doute pas d’offrir sa passivité, sa fatigue, ses souffrances, de renoncer à toute maîtrise et de se livrer en toute confiance aux autres. Le don devient alors abandon. La générosité n’est-elle pas, elle-même, oubli de soi, désintéressement, don de soi et, d’une certaine façon abandon (même si étymologiquement, le mot abandon ne dérive pas du mot don. (« à bandon » = au pouvoir de).
Quant au pardon, il est vraiment un beau cadeau puisqu’il offre la possibilité de reprendre des relations, de se rapprocher, là où il y a eu blessure grave et rupture ou éloignement.
Don et pardon, formes actives du don, et abandon, forme passive, jalonnent notre existence.
On peut aussi envisager le don selon la place qu’il occupe par rapport au donateur et au donataire. Pascal Ide dans son livre « Eh bien, dites : Don » (Editions de l’Emmanuel.1997), de ce point de vue, distingue le don reçu, le don recueilli et le don offert. Un don nous est fait. Allons-nous le reconnaître, l’accueillir et l’intégrer pour, à notre tour, donner ? Ici c’est la dynamique du don qui est en jeu.”
Une chose intéressante à la fin de cet extrait est la réflexion sur le don que nous recevons. il est intéressant que nous n’ayons parlé jusque là que du don que nous faisons… Savons-nous recevoir le don ?