Le jeu : Culture ou Loisir ?

godassesdor dit:
alainE dit:
maester dit:[...] mais les joueurs qui ont une vision artistique du jeu se prennent peut-être un peu trop la tête sur le jeu de société moderne au lieu de prendre du plaisir tout simplement. Un peu comme les joueurs qui testent des jeux au lieu d'y jouer (mais ce n'est pas dans le même contexte).

Euh quand tu lis un livre tu te prends la tête ou tu prends du plaisir ? Quand tu vas voir un film, tu te prends la tête ou tu y trouve du plaisir ? Quand tu vas voir une exposition de peinture, tu... ? Je crois que tu as un rapport assez malsain (rien de péjoratif la dedans) à la culture et à l'objet culturel, mais comme bon nombre de français malheureusement et c'est peut être là le problème.

le "ou" est inclusif ou exclusif ?


Ni l'un, ni l'autre bien au contraire. Et à tous dire je dirais explosif car en réaction à un commentaire qui m'a fait un peu iriser le poil... comme si le fait de penser culture ou art pour un jeu faisait de nous des personnes non sensible au plaisirs et/ou au ludique. Et de la même façon on peut tester un jeu tout en y jouant. Cela ne me semble pas antinomique à ce point même à aucun point du tout d'ailleurs.
godassesdor dit:
alainE dit:
godassesdor dit:
Docteur Mops dit:J'aime bien ce débat.
De toute évidence la création est un élément important dans la conception d'un jeu. Plusieurs acteurs du milieux dont je suis, militent pour l'acceptation du jeu en tant que produit culturel (pas art mais culture). Plusieurs raisons nous motivent, celles de légiférer sur le statut de créateur de jeu mais aussi de dépoussiérer une image d'activité perçue comme étant encore essentiellement puérile, tantôt désuète, tantôt réservée à un milieu geek underground.

Pour devenir un produit culturel, il devra se démocratiser.
Les acteurs du monde du jeu sont-ils prêts à remettre en cause les circuits d'édition/diffusion actuels ?

Les circuit de d'édition/distribution actuel du jeu correspondent peu ou prou à celui du livre, objet culturel.

Ca évolue mais on en est encore loin.
Certains crient au loup en voyant ce qui se passe en Allemagne.


ah bon en quoi il est différent... si ce n'est que dans le circuit du jeu il n'y a pas le maillon diffuseur présent pour le livre, et qu'au niveau du jeu, on ne pratique pas le retour.
MOz dit:
El comandante dit:La question qui se pose ici est celle de la qualification de l'usage, produit culturel ou produit de loisir (à supposer que ce soit exclusif), à situer sur un curseur (qui est au fond celui de la densité du rapport au capital) allant de l'art à la production industrielle en passant par l'artisanat.

Je ne vois pas de rapport entre la nature (ou l'usage, si tu veux) de l'objet (culturelle ou pas) et son mode de production (industriel ou pas). Pourquoi production industrielle et culture s'opposeraient-elles ? On parle bien des "industries culturelles" (musique, cinéma).


Parce que la culture est initialement liée à l'art, un savoir particulier, et en tire sa légitimité, et la création relève plus du temps de loisir que du temps de travail. Je ne dis pas que la production culturelle est impossible, ce serait nier l'évidence. Mais leur légitimité est sans doute moins forte parce que nouvelle - la production culturelle de masse - le loisir-marchandise, ou finalement temps de loisir et temps de travail sont nécessaires l'un à l'autre pour acheter et vendre ce qui est produit et permettre de produire plus - est quelque chose de très récent, de moins d'un siècle. Au pied du Parthénon, c'est nib. On a encore peu de recul sur la valeur pour notre civilisation de ces processus. Je crois que le jeu contemporain comme nous le connaissons et le pratiquons est en plein dans cette problématique et est ainsi un peu non identifié.

Mais il y a plusieurs approches. C'est de la création, celle du statut du créateur, celle de la diffusion. celle de la pratique aussi : jouer contribue-t-il à la culture ? (De mes vagues souvenirs d'Ethique à Nicomaque, Aristote disait que non...). Jouer nous cultive-t-il ?
alainE dit:
ah bon en quoi il est différent... si ce n'est que dans le circuit du jeu il n'y a pas le maillon diffuseur présent pour le livre, et qu'au niveau du jeu, on ne pratique pas le retour.

Je suis d'accord pour dire que le maillon diffuseur ne change pas grand chose, mais on ne peut pas en dire autant des retours. C'est une différence fondamentale, de même que ce qui est le noyau du fonctionnement du livre, à savoir la loi lang, qui a des répercussions sur l'organisation dudit circuit.
Rodenbach dit:
alainE dit:
ah bon en quoi il est différent... si ce n'est que dans le circuit du jeu il n'y a pas le maillon diffuseur présent pour le livre, et qu'au niveau du jeu, on ne pratique pas le retour.

Je suis d'accord pour dire que le maillon diffuseur ne change pas grand chose, mais on ne peut pas en dire autant des retours. C'est une différence fondamentale, de même que ce qui est le noyau du fonctionnement du livre, à savoir la loi lang, qui a des répercussions sur l'organisation dudit circuit.


La loi Lang est justement là pour protéger l'oeuvre culturel et la viabilité de la chaîne. En ce sens, si le jeu de société venait à être considéré comme un objet culturel à part entière par nos gouvernant, il y a de forte chance qu'il bénéficie aussi de ce type de loi protectrice pour le bien de tous. Le retour étant la contrepartie à cette protection, même si celui-ci est de plus en plus contourné, certaines pratiques faisant que le retour ne peut pas (plus) être pratiqué. En ce qui me concerne, un tel système ne me dérangerait pas du tout bien au contraire, tout cela ayant quand même au final plus ou moins protégé la filière et notamment les libraires et éditeurs indépendants.

J’ai loupé un e ou deux pages mais il ne me semble avoir lu quelque chose sur u n raprochement possible entre le jeu, tel qu’on le pratique ici en tout cas, et le sport. Je n’y avais pas vraiment songé dans ce débat jusqu’à tomber sur une intervention qui évoque la réappropriation du jeu par les joueurs. Le cinéma, la littérature, la peinture… les objets culturels produits “demandent” à être contemplés, appréciés. Plus rarement à être “pratiqués” (évidemment, il y a l’art du XXe siècle qui chamboule souvent tout ça). Là où je veux en venir, c’est à la notion de compétition. Dans la pratique culturelle du jeu, on se mesure, il y a un (ou plusieurs) gagnants. Je ne sais pas si c’est déterminant mais une chose est sûre en ce qui me concerne : ça m’a souvent et longtemps éloigné du JdS tout comme du sport pratiqué avec des “matchs”.
Voilà, juste du grain à moudre.
Sinon, pour ma part le JdS est “culturel” et “loisir” comme il a été dit et argumenté ici, ça me paraît évident - et dès que je me suis ré-intéressé au JdS, je me suis tourné vers les auteurs, en m’étonnant qu’autour de moi les pratiquants de longue date du jeu se fichaient pas mal de la notion de créateur.

El comandante dit:Parce que la culture est initialement liée à l'art, un savoir particulier, et en tire sa légitimité, et la création relève plus du temps de loisir que du temps de travail.

C'est un argument contestable. Sans parler de la période contemporaine, où il me semble évident que la plupart des artistes sont des professionnels - on pourrait même soutenir que la professionnalisation d'une activité créatrice lui confère le statut d'art - il n'y a qu'à regarder quelques siècles en arrière les grands peintres de la Renaissance flamande ou italienne pour se rendre compte qu'ils étaient avant tout des chefs d'entreprise, qui recevaient des commandes des grands puissants de l'époque, de l'Église ou des corporations. Commandes qui étaient réalisées dans des ateliers qui fesaient vivre des dizaines de personnes. Rubens, par exemple, était un véritable homme d'affaire. J'ai visité sa maison à Anvers : la peinture, ça rapportait !
El comandante dit:Je ne dis pas que la production culturelle est impossible, ce serait nier l'évidence. Mais leur légitimité est sans doute moins forte parce que nouvelle


Si tu te places du point de vue des tenants de la culture dominante classique, c'est incontestable. Mais les sciences sociales, Bourdieu en tête, ont mis en avant que ce point de vue est avant tout celui d'une classe. Ce point de vue et les hiérarchisations qu'il implique au sein de la culture (pour ne pas dire "entre les cultures") ne sont pas plus légitimes qu'un autre. Je ne peux donc pas te laisser dire qu'un album des Beatles ou un film de Kubrick sont "nib" à côté du panthéon. Ce n'est pas parce que c'est récent que ça ne vaut rien.

Je suis d’accord avec El Commandante sur le fait que le changement du mode de production a tout à fait bouleverser le rapport qu’a l’individu avec l’objet manufacturé. Avant Honoré Leblanc et Ford - donc avant la production de masse - chaque objet manufacturé était le fruit d’un travail particulier qui faisait que chaque objet avait quelque chose d’unique. Par exemple, quand tu achetais un meuble, ce meuble était unique. Aujourd’hui, tu achètes un meuble suédois, tu sais que ce même meuble est présent dans des centaines de foyer. Après, est-ce que cela doit entrer en compte dans l’aspect culturel d’un objet ? J’en doute fort. Ainsi, certain objets issus de la production de masse sont devenus des symboles de la culture contemporaine.

Pour ma part, la réponse du Docteur Mops “une chose est ce qu’on en fait” est à la fois terriblement vraie, et à la fois vraiment insuffisante au sens où on reste sur notre faim et que ça fait pas vraiment avancer le Schmilblick Simone !

Quant à la reconnaissance de l’auteur, je ne suis pas sûr que ce soit le point d’appui qui puisse permettre d’affirmer le statut culturel du jeu. Bien sûr que la reconnaissance de l’auteur d’un jeu est nécessaire (pas taper), mais quid des jeux anonymes (échecs, dame, go, shôgi…) ? Ne sont-ils pas eux aussi des objets culturels ?

Je me répète, mais je crois vraiment que la distinction loisir/culture est inopérante. Même si ce n’est qu’une supposition, la supposition même est intenable.

Quant à la distinction entre compétition et culturel, il faut se rappeler que les sports étaient initialement pratiqués comme rites religieux, et donc sont bien une pratique culturelle.

alainE dit:
Rodenbach dit:
alainE dit:
ah bon en quoi il est différent... si ce n'est que dans le circuit du jeu il n'y a pas le maillon diffuseur présent pour le livre, et qu'au niveau du jeu, on ne pratique pas le retour.

Je suis d'accord pour dire que le maillon diffuseur ne change pas grand chose, mais on ne peut pas en dire autant des retours. C'est une différence fondamentale, de même que ce qui est le noyau du fonctionnement du livre, à savoir la loi lang, qui a des répercussions sur l'organisation dudit circuit.

La loi Lang est justement là pour protéger l'oeuvre culturel et la viabilité de la chaîne. En ce sens, si le jeu de société venait à être considéré comme un objet culturel à part entière par nos gouvernant, il y a de forte chance qu'il bénéficie aussi de ce type de loi protectrice pour le bien de tous. Le retour étant la contrepartie à cette protection, même si celui-ci est de plus en plus contourné, certaines pratiques faisant que le retour ne peut pas (plus) être pratiqué. En ce qui me concerne, un tel système ne me dérangerait pas du tout bien au contraire, tout cela ayant quand même au final plus ou moins protégé la filière et notamment les libraires et éditeurs indépendants.


Le retour est la contrepartie dans la mesure où les règles sur les soldes sont très rigides pour les bouquins, mais s'il fallait pour les jeux une mesure équivalente à la loi lang, il faudrait maintenir la liberté sur les soldes et oublier les retours : stockage trop coûteux, frais de transports supplémentaires... D'autant que dans les livres le corollaire du retour c'est le pilon (pour éviter le stockage justement). Pilonner des livres, ça va c'est facile c'est que du papier, tout va dans la même benne de recyclage, mais pour les jeux, c'est quand même plus compliqué :mrgreen: et surtout plus difficile à assumer financièrement...
Bushinone dit:Quant à la reconnaissance de l'auteur, je ne suis pas sûr que ce soit le point d'appui qui puisse permettre d'affirmer le statut culturel du jeu. Bien sûr que la reconnaissance de l'auteur d'un jeu est nécessaire (pas taper), mais quid des jeux anonymes (échecs, dame, go, shôgi...) ? Ne sont-ils pas eux aussi des objets culturels ?


Bien sûr mais ils prennent leur statut d'objet culturel de part leur caractère traditionnel. D'ailleurs on parle plus de jeu traditionnel que de jeu de société pour ceux-ci. Le caractère culturel est lié à leur origine et personne n'oserait remettre en cause cela, tout comme certains manuscrit ou peinture (grotte de Lascaux par exemple) le sont aussi malgré que leur auteurs ne soient pas identifiables en tant que tel. On peut aussi aller plus loin en prenant le cas du monopoly qui pour moi est un objet culturel à part entière malgré son côté anonyme car il est le reflet d'une société, d'une période. Il est devenu une référence qui en fait son caractère culturel. Je n'en dirai pas autant de tous les produits de grande consommation sous licence ou pas qui peuplent nos grandes surfaces à l'approche des fêtes de fin d'année et qui font qu'aujourd'hui, malheureusement , le jeu de société est considéré comme un sous produit de loisirs pour enfant par bon nombre de nos concitoyens. La culture est multiple même pour un même type d'objet et le jeu de société ne déroge pas à la règle. Cet aspect culturel peut venir du fait d'un processus de création d'un auteur reconnu comme tel (nom sur la boîte), d'une origine ethnique, géographique,... ou tout simplement d'une surmédiatisation qui a fait de l'objet une référence incontestable, reflet d'une époque, d'un système (au sens large) comme les lego, les playmobil ou autres Barbie.
Rodenbach dit:
alainE dit:
Rodenbach dit:
alainE dit:
ah bon en quoi il est différent... si ce n'est que dans le circuit du jeu il n'y a pas le maillon diffuseur présent pour le livre, et qu'au niveau du jeu, on ne pratique pas le retour.

Je suis d'accord pour dire que le maillon diffuseur ne change pas grand chose, mais on ne peut pas en dire autant des retours. C'est une différence fondamentale, de même que ce qui est le noyau du fonctionnement du livre, à savoir la loi lang, qui a des répercussions sur l'organisation dudit circuit.

La loi Lang est justement là pour protéger l'oeuvre culturel et la viabilité de la chaîne. En ce sens, si le jeu de société venait à être considéré comme un objet culturel à part entière par nos gouvernant, il y a de forte chance qu'il bénéficie aussi de ce type de loi protectrice pour le bien de tous. Le retour étant la contrepartie à cette protection, même si celui-ci est de plus en plus contourné, certaines pratiques faisant que le retour ne peut pas (plus) être pratiqué. En ce qui me concerne, un tel système ne me dérangerait pas du tout bien au contraire, tout cela ayant quand même au final plus ou moins protégé la filière et notamment les libraires et éditeurs indépendants.

Le retour est la contrepartie dans la mesure où les règles sur les soldes sont très rigides pour les bouquins, mais s'il fallait pour les jeux une mesure équivalente à la loi lang, il faudrait maintenir la liberté sur les soldes et oublier les retours : stockage trop coûteux, frais de transports supplémentaires... D'autant que dans les livres le corollaire du retour c'est le pilon (pour éviter le stockage justement). Pilonner des livres, ça va c'est facile c'est que du papier, tout va dans la même benne de recyclage, mais pour les jeux, c'est quand même plus compliqué :mrgreen: et surtout plus difficile à assumer financièrement...


Le retour est une contrepartie possible. Il y en a surement d'autre, peut être plus adapté. Ce n'est pas tant cette contrepartie que je défends que l'idée qu'il puisse y avoir une protection du secteur avec des contreparties afin que toute la filière soit sur un pied d'égalité. Si cela se produit un jour se sera à la filière de définir ses règles comme le livre l'a fait.

Je déplore comme toi le marketing asséné par certains industriels qui, essayant d’atteindre le panier des ménages par les enfants, enferme le jeu de société dans cette image totalement dépassée mais malheureusement largement partagée.
Cependant, ces jeux restent pour moi des objets culturels, au sens où ils sont l’indice justement de ces pratiques marchandes qui sont aujourd’hui notre pain quotidien.
Et je crois qu’on ne pourra sortir le jeu de société de ce carcan non pas en refusant ces jeux-là (comment le pourrait-on ?), mais en montrant que le jeu de société n’est pas que ça.
Combien de fois, animateur dans un festival parisien (moment pub), ai-je vu des parents débarqués et me dire “Si je suis venu, c’est pour les enfants”, pour finalement leur présenter des jeux qui leur plaisent à eux, adultes, (avec le petit speech “la majorité de la production du jeu de société s’adresse aux adultes”) et les voir s’amuser sincèrement ?

Vu le boom connu par le secteur en ce moment, je crois qu’on est en bonne voie.

MOz dit:
El comandante dit:Parce que la culture est initialement liée à l'art, un savoir particulier, et en tire sa légitimité, et la création relève plus du temps de loisir que du temps de travail.

C'est un argument contestable.

Je m'en voudrais d'utiliser un argument d'autorité. ;) :1900pouic:
MOz dit:Sans parler de la période contemporaine, où il me semble évident que la plupart des artistes sont des professionnels -

Tes exemples sont justes (même s'ils appartiennent tous à cette culture "officielle" que tu dénonces dessous) mais cela ne veut pas dire que créer était alors un travail - songe à Mécène, au ban de l'Eglise sur les acteurs, aux peintures rupestres, à la misère de Baudelaire, au gratteux qui compose le dimanche dans son garage, etc. Pour dépasser les accumulations d'exemples, je ne crois pas que ce soit la même sphère. La création artistique ne vise pas d'abord la production de valeur (économique). Après, que le business de l'art ait été présent et croissant jusqu'à aujourd'hui, aucun doute.

MOz dit:
El comandante dit:Je ne dis pas que la production culturelle est impossible, ce serait nier l'évidence. Mais leur légitimité est sans doute moins forte parce que nouvelle

Si tu te places du point de vue des tenants de la culture dominante classique, c'est incontestable. Mais les sciences sociales, Bourdieu en tête, ont mis en avant que ce point de vue est avant tout celui d'une classe. Ce point de vue et les hiérarchisations qu'il implique au sein de la culture (pour ne pas dire "entre les cultures") ne sont pas plus légitimes qu'un autre. Je ne peux donc pas te laisser dire qu'un album des Beatles ou un film de Kubrick sont "nib" à côté du panthéon. Ce n'est pas parce que c'est récent que ça ne vaut rien.


Là aussi, d'accord. La définition de la culture appartient au rapport de classe - mais la création l'est-elle ?
Et je comparais pas la valeur artistique du Parthénon (mauvais exemple d'ailleurs, puisque c'était un temple) et des Beatles, mais le temps écoulé depuis que la culture était devenu un produit de masse. C'est tout récent.
Bushinone dit:Pour l'aspect culturel basé sur la tradition, je suis entièrement d'accord.
Je déplore comme toi le marketing asséné par certains industriels qui enferme le jeu de société dans cette image totalement dépassée mais malheureusement largement partagée.
Cependant, ces jeux restent pour moi des objets culturels, au sens où ils sont l'indice justement de ces pratiques marchandes qui sont aujourd'hui notre pain quotidien.
Et je crois qu'on ne pourra sortir le jeu de société de ce carcan non pas en refusant ces jeux-là (comment le pourrait-on ?), mais en montrant que le jeu de société n'est pas que ça.
Combien de fois, animateur dans une convention parisienne (moment pub), ai-je vu des parents débarqués et me dire "Si je suis venu, c'est pour les enfants", pour finalement leur présenter des jeux qui leur plaisent à eux, adultes, (avec le petit speech "la majorité de la production du jeu de société s'adresse aux adultes") et les voir s'amuser sincèrement ?


Autant cela ne me dérange pas de dire que le monopoly est un objet culturel car je pense réellement qu'il l'est, autant j'aurais beaucoup plus de mal avec Toutourista ou autre jeux de ce style qui pour moi non rien de culturel. Ils ne seront jamais des référence comme peuvent l'être le monopoly, barbie ou lego, qui ont dépassé le stade d'objet de consommation (quasi courante) pour devenir de véritable objet culturel. Et en disant cela je ne refuse pas pour autant ces jeux là qui existe et correspondent à un besoin d'un certain public, public qui n'est pas le même que notre public à nous par rapport à nos jeux à nous, public qui nous revient aussi de conquérir ou d'éduqué sur la pratique d'une autre forme de jeux de société, une forme plus culturel et moins commercial. Et cela ne me dérange pas que ces deux formes de jeux de société cohabite ou coexiste, ni même que des passerelles puissent se faire entre les deux monde (jungle speed par exemple ou Time's up). Par contre, ce qui me gêne plus, c'est quand je vois des institutionnels, voir des profesionnels du monde du jeu (de trop nombreuses ludothèques), refuser de voir, par ignorance ou en toute conscience et par intérêt, les deux aspects de la chose pour ne garder que l'aspect commercial, certes le plus répandu et le plus majoritairement admis, mais aussi le plus rétrograde (minimaliste) de la filière ludique.
El comandante dit:
MOz dit:
El comandante dit:Parce que la culture est initialement liée à l'art, un savoir particulier, et en tire sa légitimité, et la création relève plus du temps de loisir que du temps de travail.

C'est un argument contestable.

Je m'en voudrais d'utiliser un argument d'autorité. ;) :1900pouic:

Surtout étant donné l'autorité relative dont il est question :wink:
el commandante dit:
Tes exemples sont justes (même s'ils appartiennent tous à cette culture "officielle" que tu dénonces dessous) mais cela ne veut pas dire que créer était alors un travail - songe à Mécène, au ban de l'Eglise sur les acteurs, aux peintures rupestres, à la misère de Baudelaire, au gratteux qui compose le dimanche dans son garage, etc. Pour dépasser les accumulations d'exemples, je ne crois pas que ce soit la même sphère. La création artistique ne vise pas d'abord la production de valeur (économique). Après, que le business de l'art ait été présent et croissant jusqu'à aujourd'hui, aucun doute.


Je crois qu'il s'agit là d'une vision fantasmée de l'art. La grande majorité des oeuvres de la culture classique sont issues de commandes passé à l'artiste. Ceci dit, je ne vois pas comment la distinction entre travail et loisir permettent d'éclaircir le débat.
Bushinone dit:Je crois qu'il s'agit là d'une vision fantasmée de l'art. La grande majorité des oeuvres de la culture classique sont issues de commandes passé à l'artiste.

Oui, mais on les passait plus pour leur valeur d'usage que leur valeur d'échange.
Bushinone dit:Ceci dit, je ne vois pas comment la distinction entre travail et loisir permettent d'éclaircir le débat.

C'est parmi de mon hypothèse selon laquelle on avait aujourd'hui des difficultés à situer le produit ludique entre culture et production (et donc loisir dans la société de consommation), du fait de sa double identité - création libre, mais produit industriel.
alainE dit:Par contre, ce qui me gêne plus, c'est quand je vois des institutionnels, voir des profesionnels du monde du jeu (de trop nombreuses ludothèques), refuser de voir, par ignorance ou en toute conscience et par intérêt, les deux aspects de la chose pour ne garder que l'aspect commercial, certes le plus répandu et le plus majoritairement admis, mais aussi le plus rétrograde (minimaliste) de la filière ludique.


Oui, effectivement, et si je n'ai pas ta connaissance du secteur du jeu, je dois bien avouer que c'est un véritable problème. Si ces acteurs dont le rôle même serait de promouvoir le jeu de société véhiculent cette image rétrograde, la situation peut dès lors semblé compliquée.
Cependant, même si je répète que je ne connais pas le milieu autant que toi, je dois remarquer que j'ai plutôt vu la tendance inverse.
Pour donner un exemple précis, Orchys, membre de ce forum que je salue et remercie au passage, a monté un atelier jeu dans un centre de la Ville de Paris et il s'est battu (et a réussi) pour faire comprendre à ses supérieurs hiérarchiques que cet atelier ne devait pas être limité aux enfants.

Après, comme cela concerne des institutions, j'imagine qu'il y a toujours une certaine inertie qui empêche de rendre compte rapidement du changement d'état d'esprit qui, je crois et je l'espère, s'opère en ce moment.

Pourrais-tu, s'il-te-plaît, expliquer quels intérêts ont les ludothèques à tenir cette image vieillotte du JdS ? J'ai du mal à comprendre...
El comandante dit:La création artistique ne vise pas d'abord la production de valeur (économique).

Je ne sais pas si c'est ce qui fonde la démarche de création - ça doit dépendre des artistes et probablement aussi du moment de leur carrière - mais c'est indéniablement conjoint. Les comédiens d'une pièce de théâtre vendent deux heures de détente, de divertissement, de catharsis, de dépaysement... à leurs spectateurs. Du fait d'une vision romantique de la création, on néglige souvent l'aspect purement économique de la culture. Ça s'achète et ça se vend. Ça peut même se revendre s'il s'agit d'un objet. J'entendais encore hier à propos de Damiens Hirst un expert qui disait qu'on pouvait véritablement le considérer comme un marchand d'art, soucieux du marketing de ses oeuvres. Pour avoir travaillé dans la production cinématographique, je peux t'assurer qu'un producteur ne réunit pas une équipe juste pour la beauté du geste, c'est un investissement. Ce qui n'en fait pas moins un produit culturel. Quand Coppola fait Apocalypse Now - il est à la fois producteur et réalisateur - c'est autant pour créer que pour en vivre. Ce que je veux dire, c'est que les deux ne sont pas incompatibles (et depuis longtemps). Si la plupart des gens n'arrivent pas à percevoir cela, c'est justement parce qu'ils sont imprégnés (via l'Éducation Nationale entre autre) de cette vision romantique de l'art véhiculée par la pensée dominante "élitiste" qui considère que tout ce qui est produit en masse, c'est-à-dire produit pour les masses populaires, n'a pas de valeur culturelle et relève au mieux du loisir. Que les jeux soient produits en masse est très certainement un frein à la reconnaissance de leur valeur culturelle par la société, mais ça n'a pas d'influence sur le fait qu'ils en ont véritablement une.
El comandante dit:La définition de la culture appartient au rapport de classe - mais la création l'est-elle ?


Si on parle juste de la création, non (encore que... ça se discute peut-être). Mais si on parle de son appréciation, c'est-à-dire de lui donner une valeur culturelle, oui.
godassesdor dit:
Ad tib dit:
Pour répondre à Sylvano, je suis d'accord avec toi et j'ai les mêmes doutes. Après certains jeux que nous pouvons classer dans ces "modernes", sans être complètement d'ambiance, ont tout pour faire de belles carrières "culturelles" :mrgreen: -Les aventuriers du rail, King of Tokyo, etc.- Mais c'est vrai que c'est dur de casser les habitudes familiales ancrées depuis des générations de Monopoly et consorts...

Oui mais es-tu prêt à faire des efforts pour promouvoir ces jeux ?
Parce que y'a quand même eu des réflexions assez désobligeantes de certains hardcore gamers qui jouent à des jeux que, selon eux, seule l'élite est à même de comprendre et qui ne voient aucun intérêt à ce que les autres découvrent ce monde puisqu'ils n'ont aucun problème pour trouver des gens qui jouent aux mêmes jeux qu'eux...


Oui, pour le deuxième surtout, parce que le premier je ne l'apprécie guère... Je l'ai déjà fait découvrir à mon frère qui est devenu fan et je lui ai donc offert, par exemple...
edit : mon frère n'est pas un joueur particulièrement, il aime le risk, qu'il jouerait toute la nuit sur playstation, et le monopoly...

Pour le reste, les gens parlent trop vite et je lirai donc plus tard. :mrgreen:
Bushinone dit:Pourrais-tu, s'il-te-plaît, expliquer quels intérêts ont les ludothèques à tenir cette image vieillotte du JdS ? J'ai du mal à comprendre...


Surement parce que cela nécessite moins d'investissement personnel, moins de remise en question de ses propres pratiques, moins de confrontation avec les institutionnels qui tiennent généralement les cordons de la bourse,... Parce qu'au final ça rassure car cela correspond au stéréotype que ce fait le plus grand nombre. Après je n'ai pas dit que toutes les ludothèques étaient dans ce cas là. J'en connais qui ont adopté une vision moderne du jeu de société plus uniquement basé sur l'enfance ou le 3ème âge pour les jeux de lettre (bon je caricature peut être un peu là mais pas forcément). Je prend pour exemple la ludothèque d'Issy les Moulineaux que j'ai pu visiter récemment. Mais lorsque je consulte le site l'ALF, je suis assez stupéfait de voir certaines choses, alors qu'ils devraient être en première ligne sur cette reconnaissance tant attendu par beaucoup d'acteurs ludiques. Les sous entendu au monde de l'enfance sont quasi permanente dans tous le site et même dans leur charte. Quand tu regardes par exemple la sélection du mois de mars 2012 tu n'as que des jeux pour enfant. Aucune mise en avant d'un jeu pour adulte (+12 ans) avec, qui plus est, presque pas de nouveauté ou de jeu sortie récemment. Face à une production de plus en plus importante je trouve cela un peu dommage et ne montre pas la richesse du secteur du jeu.