Le style graphique débilitant des nouveaux jeux de format familial

serraangel dit :Un grand merci pour ces détails !

Tu as réussi à faire mentir M. Phal. Le sujet n'est pas parti en cacahuète, ça prend même une tournure intéressante.

Merci les éditeurs, ça fait plaisir de lire votre vision de la choses et d’avoir des informations qui permettent d’en savoir plus !

serraangel dit :Sur un plan pratique je me demandais plusieurs trucs :
- est ce que l'auteur du jeu a une quelconque influence sur le choix graphique ?
- est ce que le graphiste n'est que simple "exécuteur" ou est ce qu'il peut influencer l'éditeur ?
- est ce que les décisions du visuel final se prennent entre auteurs/graphistes/éditeurs ?

Bon, j'imagine que c'est un cas particulier pour chaque jeu, mais il doit bien y avoir des "tendances" (on est en plein dedans).

1/ Pareil que Sebduj, on essaye d'intégrer au mieux l'auteur dans le processus de choix de l'illustrateur, du style et du thème. Le but est de le rendre fier de son bébé, pour que la collaboration se passe au mieux, qu'il ait envie de bosser avec nous et que l'on participe tous au succès du jeu (que l'on tire tous dans le même sens).

Après, suivant les auteurs, ils s'impliquent plus ou moins. Les auteurs qui ont de la bouteille sont plus présents et nous font aussi profiter de leur expérience. Après, c'est sûr que l'éditeur est le "capitaine" du navire, c'est donc lui qui fixe le cap. Tout en gardant à l'esprit qu'il vaut mieux qu'il n'y ait pas mutinerie pour aller le plus loin possible.

2/ Si je pars du même postulat que Seb, j'imagine que tu voulais dire "illustrateur". Et bien, cela dépend des projets. Sur les projets, nous avons une image plus ou moins précise de ce que nous voulons, ce qui laisse donc plus ou moins de place à l'imaginaire de l'illustrateur. Les illustrateurs qui ont le plus de bouteille, sont ceux qui arrivent à s'approprier les projets et à intégrer le plus des idées à eux. Coimbra a été fabuleux sur Sea of Clouds, je lui ai balancé des idées pas forcément toujours bien senties, et lui il s'est approprié l'univers et à tout créé.

Parfois, la réflexion se fait avec eux dès le départ. Sur Time Bomb, on a réfléchis au thème et au style avec Biboun et je pense que l'on a tous amené un peu de nos idées. Avant notre rendez vous à Cannes, je lui avais dit : "le thème est un peu touchy, il faudrait le changer, voilà à quoi ressemble le jeu, tu y réfléchis avant Cannes, on fait pareil et on compare".

Ma façon préférée de bosser est d'arriver avec une idée de l'ambiance que je veux avoir (qui reste à discuter avec l'illustrateur), des idées concises et pas trop précises, mais surtout en nombre. Mon but est plus de lancer la réflexion et de laisser l'illustrateur finir cela avec ses idées à lui. Un peu comme si je plantais plusieurs graines et seules quelques-unes donneraient des fleurs (et pas forcément celles auxquelles je pensais).

3/ Redondant, j'ai l'impression avec les questions précédentes, non?

oui effectivement merci.
Après je suis partiellement d’accord avec M. Cocker Bleu, certes notre surinformation nous rend plus sensible à cette aspect des choses en tant que geek mais tout de même, en rayon de boutique, même le joueur occasionnel va percevoir cette proximité visuelle.

serraangel dit :Sur un plan pratique je me demandais plusieurs trucs :
- est ce que l'auteur du jeu a une quelconque influence sur le choix graphique ?
Chez moi, l'auteur participe à toutes les décisions sur le jeu quelques qu'elles soient. Par participe , je veux dire qu'il peut exprimer son avis, qu'on en débat mais que je garde la décision finale.
- est ce que le graphiste n'est que simple "exécuteur" ou est ce qu'il peut influencer l'éditeur ?
Pour l'illustrateur, c'est pareil, mais le type de contrat ( essentiellement au forfait , même si pour moi, je file aussi des royalties aux illustrateurs) fait que je discute bcp avant le début du travail, puis je fourni une charte graphique, et je ne travaille qu'avec des illustrateurs qui acceptent de jouer au proto. Il y a aussi le fait que l'illustrateur entre dans le process une foi que le développement du jeu est quasiement terminé. De cette façon, l'illustrateur peut plus précisément estimé le travail à faire , et il y a bcp moins d'aller-retours en cours de travail. Mais j'attends d'un illustrateur qu'il soit force de propositions sur tel ou tel manière de magnifier le game play par son illustration. C'est donc bien un travail à 3 têtes.
- est ce que les décisions du visuel final se prennent entre auteurs/graphistes/éditeurs ?

Bon, j'imagine que c'est un cas particulier pour chaque jeu, mais il doit bien y avoir des "tendances" (on est en plein dedans).

 

Harry Cover dit :... mais tout de même, en rayon de boutique, même le joueur occasionnel va percevoir cette proximité visuelle
oui mais au contraire , cela peut être un support pour identifier ce qu'est le jeu et si il est pour lui.

 

oui peut être pensera t il que c’est pour ses enfants

Harry Cover dit :oui peut être pensera t il que c'est pour ses enfants

Après que l'on fasse des erreurs... Je pense que ça peut parfois être le cas.

Pour moi, Fourberies ou Happy Pigs ne font pas enfant. Poulettes fait enfant : 

effectivement ils ne font pas enfants mais à titre purement personnel je ne les trouve pas assez matures dans le traitement visuel, mais ça ne m’empêche pas de les acheter hein !!
Je déteste l’univers Kawai et manga mais j’ai pris arcadia quest tout de même.
Après l’unique jeu que je n’ai pas acheté uniquement à cause des graphismes c’est Barbarossa le jeu de deckbuilding.

Harry Cover dit :Après l'unique jeu que je n'ai pas acheté uniquement à cause des graphismes c'est Barbarossa le jeu de deckbuilding.

Moi c'est Vendredi 

Après y’a aussi l’ajout d’un côté fun via les illustrations.
Un Happy Pigs serait devenu un “Elevage Porcin”, avec des illustrations réalistes de cochons. Un jeu à l’allemande, avec des cochons en bois.

Mais bon, ça aurait fait trop sérieux, trop kukenbois. Le style graphique donné, coloré et déjanté, ajoute du fun à l’ensemble, et le rends moins “terne”, moins “sérieux”.

Et oui, je comprends bien. C’est pour ça que sur un jeu de pli, on fait des dessins plus mature que sur un jeu destiné aux 8+.

Pour l’Auberge Sanglante, dont je suis fan, je n’y jouerais pas avec mon fils de 8 ans (chiffre arbitraire), mais avec mon fils de 12-14 ans (chiffre arbitraire aussi). Et là, on me dira que c’est dommage, je répondrais : et oui.

Là mon fils a 4.5 ans, j’essaye de l’éduquer à Astérix, mais clairement, il préfère Pyjamask, Winnie, Ouioui et autres trucs de son âge. Je ne peux pas directement lui faire lire de la BD indé… Quoique j’ai essayé, car ça existe dans les livres pour enfants, mais franchement, ça fait plus plaisir au papa bobo que je suis parfois qu’à mon fils. Donc voilà, plus un jeu s’adresse à un public large, plus c’est galère à trouver un dénominateur commun original.

Mais bon, vous verrez dans nos prochaines sorties, j’espère que certaines vous feront plaisir graphiquement (pour cette année mais aussi pour l’année prochaine).

Heuhh dit :Et oui, je comprends bien. C'est pour ça que sur un jeu de pli, on fait des dessins plus mature que sur un jeu destiné aux 8+.

Pour l'Auberge Sanglante, dont je suis fan, je n'y jouerais pas avec mon fils de 8 ans (chiffre arbitraire), mais avec mon fils de 12-14 ans (chiffre arbitraire aussi). Et là, on me dira que c'est dommage, je répondrais : et oui.

Là mon fils a 4.5 ans, j'essaye de l'éduquer à Astérix, mais clairement, il préfère Pyjamask, Winnie, Ouioui et autres trucs de son âge. Je ne peux pas directement lui faire lire de la BD indé... Quoique j'ai essayé, car ça existe dans les livres pour enfants, mais franchement, ça fait plus plaisir au papa bobo que je suis parfois qu'à mon fils. Donc voilà, plus un jeu s'adresse à un public large, plus c'est galère à trouver un dénominateur commun original.

Mais bon, vous verrez dans nos prochaines sorties, j'espère que certaines vous feront plaisir graphiquement (pour cette année mais aussi pour l'année prochaine).

Héhé, c'est du Cathala ça :)
Et j'adore !
Je trouve que de toute façon, il y a beaucoup de styles différents (Vincent Dutrait fait aussi plus "sérieux").
Après, en familial, forcément, ça tourne autour du "kawai" modéré !

Pit0780 dit :Après y'a aussi l'ajout d'un côté fun via les illustrations.
Un Happy Pigs serait devenu un "Elevage Porcin", avec des illustrations réalistes de cochons. Un jeu à l'allemande, avec des cochons en bois.

J'adore

Heuhh dit :

Mais bon, vous verrez dans nos prochaines sorties, j'espère que certaines vous feront plaisir graphiquement (pour cette année mais aussi pour l'année prochaine).

Aaaaaahhh merci ! Enfin quelque chose qui sort du lot !

serraangel dit :
Heuhh dit :

Mais bon, vous verrez dans nos prochaines sorties, j'espère que certaines vous feront plaisir graphiquement (pour cette année mais aussi pour l'année prochaine).

Aaaaaahhh merci ! Enfin quelque chose qui sort du lot !

ah ben oui là, j'ai les fesses qui font bravo !! en même temps que les mains

Pit0780 dit :Après y'a aussi l'ajout d'un côté fun via les illustrations.
Un Happy Pigs serait devenu un "Elevage Porcin", avec des illustrations réalistes de cochons. Un jeu à l'allemande, avec des cochons en bois.

Mais bon, ça aurait fait trop sérieux, trop kukenbois. Le style graphique donné, coloré et déjanté, ajoute du fun à l'ensemble, et le rends moins "terne", moins "sérieux". 

D'ailleurs les allemands sont plutôt doués en élevage porcin, ça aurait du sens

@Euhhh : c'est magnifique ! C'est pour quel jeu ?

Pikaraph dit :@Euhhh : c'est magnifique ! C'est pour quel jeu ?

C'est pour Kanagawa (anciennement "Okami"), le prochain jeu de Bruno Cathala et Charles Chevallier à paraître à Essen. 

Allez moi je vais poster une illus “de style graphique débilitant des nouveaux jeux de format familial”
Mais bon moi j’adore ça ^^

Bonjour à tous,

C’est en consultant le Moisnal du mois de mai que j’ai appris qu’il y avait un débat autour des illustrations des jeux actuels et Fourberies a été mentionné plusieurs fois dans ce topic. Je ne vous cache pas ma surprise car étant le nez dans le guidon, je passe à côté de pas mal de choses qui se déroulent sur Tric-Trac. En tant qu’illustrateur et vu le ton employé par certains, je suis obligé de vous écrire quelque chose afin que les plus réfractaires puissent comprendre. 

Vomitif, “débilisant”, infantilisant ? Ce sont en effet des mots durs. Mais en tant que professionnel de l’image depuis des années, j’ai l’habitude d’entendre tout un tas d’avis sur des visuels et une chose est sûre : on ne peut pas plaire à tout le monde. Même les plus doués et connus d’entre-nous s’en sont déjà pris plein la poire, mais cela fait partie de notre métier…

Parlons Fourberies (je vous invite d’ailleurs à aller votre le Carnet d’illustrateur associé à ce jeu que j’ai publié il y a quelques mois).
J’ai entendu beaucoup de gens parler “marketing”, choix éditoriaux, etc … . Je travaille avec Bombyx depuis 3 ans et Fourberies est de ceux sur lesquels l’identité graphique a été un gros boulot. Comme expliqué, c’est le genre de projet où l’on s’investi à 100 % dans sa production, en partant du test du proto jusqu’au rendu final. Alors que j’ai toujours réalisé des humains “classique” jusqu’à présent, Bombyx m’avait proposé de faire une chose que je n’avais jamais faite : de l’anthropomorphisme (animaux humanisés). 

Pour ceux connaissent mon travail depuis des années, j’ai roulé ma bosse sur des projets touchant des publics très différents, allant du cartoon au plus réaliste. Adapter mon style et l’orienter vers cette direction artistique était un réel challenge. En plus d’une documentation historique poussée, il a fallu donner du caractère à tous les personnages et créer une vraie cohérence. Je rappelle que bombyx m’a laissé une entière liberté. Je n’ai jamais été bridé et j’ai pu m’exprimer comme je le souhaitais. Il a jamais été question de “il faut faire comme ça pour vendre plein de jeux”. On n’a pas cherché à faire “comme les autres” mais a faire quelque chose selon nos goûts, quelque chose de vivant et onirique.

Au niveau du style, comme l’a dit Erwan précédemment, ce que certains trouvent “infantilisant” ne l’est pas forcément. Il faut aller au delà du premier degré de lecture qui vous laisse croire que “c’est coloré, bien dessiné et expressif, donc c’est pour les enfants”. Pour ma part, je m’éclate toujours devant des Pixar ou autres films d’animation et suis toujours attiré par des jeux colorés (j2s et jeu vidéo).

Voilà, il fallait bien qu’un gribouilleux s’exprime un peu sur le sujet.

A bientôt pour plein de nouveaux jeux et à la prochaine !