Boycott : tout ce que vous avez toujours voulu savoir
Par Olivier Esteves angliciste et historien, maître de conférences à l’université de Lille-III. dansLibé
Ces dernières semaines, il ne s’est pas passé un jour sans que l’on entende parler de «boycott», qu’il s’agisse des Jeux olympiques de Pékin, mais aussi du Salon du livre axé sur le soixantième anniversaire de l’Etat d’Israël.
Saluons d’abord le fait que ce terme de boycott soit débattu aussi passionnément. Car force est de constater que ces dernières années, il n’en a pas toujours été ainsi. A tel point que, notamment en janvier 2003, plusieurs intellectuels «de gouvernement», au premier rang desquels Bernard-Henri Lévy, avaient proclamé «Pas de boycott ! Pas la honte du boycott !» lorsque l’université de Paris-VI avait simplement remis en question des accords académiques passés avec Israël. En effet, cet Etat n’avait pas respecté les termes desdits accords, touchant principalement au sort de la population palestinienne. BHL et d’autres avaient assimilé ce type de pratique au boycott nazi des magasins juifs, décrété le 1er avril 1933 avec des conséquences désastreuses pour la minorité juive allemande (très vulnérable car constituant moins de 1 % de la population nationale). Aujourd’hui pourtant, notre BHL national appelle au boycott des JO. Est-ce à dire que ce mot serait soudain devenu respectable à ses yeux ?
En réalité, le boycott a toujours été, sauf cas exceptionnels (Allemagne nazie contre magasins juifs), l’arme du faible contre le fort, l’arme d’un peuple qui ne peut compter que sur son seul nombre face à un pouvoir jugé excessif et injuste, qu’il soit politique (gouvernement) ou bien économique (multinationales). Né officiellement en 1880 dans une Irlande vivant encore sous le joug britannique, le boycott est historiquement lié aux grandes luttes anticoloniales : Irlande, donc, mais aussi Birmanie et Inde dans les années 1920, sans oublier l’Afrique du Sud de l’apartheid. Qu’il soit économique (Gandhi et le boycott des textiles importés de Grande-Bretagne), social (il prend alors la forme d’un ostracisme total, comme en Irlande en 1880) ou bien politique (multiples Etats africains décrétant un boycott, c’est-à-dire un embargo du régime honni de Pretoria), ce type de mise en interdit repose sur une dynamique du nombre. «Un boycott organisé par six ou sept personnes, voilà qui revient à battre un éléphant avec un fétu de paille», déclarait le Mahatma Gandhi en janvier 1920.
De multiples freins s’opposent à l’efficacité d’un boycott. On peut en citer deux. Notamment depuis la fin de la guerre froide, certaines décisions économiques d’entreprises multinationales ont suscité l’indignation de consommateurs, vite traduite en appel au boycott. Pareille démarche repose sur la solidarité transnationale. Or, Antonio Gramsci nous rappelle un fait simple mais ô combien crucial ici, dans ses Chroniques de Turin : «Pour qu’un fait nous intéresse, nous émeuve et devienne une partie de notre vie intérieure, il est nécessaire qu’il se produise à côté de nous, près de gens dont nous avons entendu parler et qui sont pour cette raison dans le cercle de notre humanité.» Internet, l’engouement globalisé pour le bouddhisme tibétain, enfin les migrations touristiques des classes moyennes aisées vers le Tibet, ne changent pas grand-chose à l’affaire : la plupart de ceux qui s’intéressent aux JO ne ressentent sans doute que peu, voire pas, de solidarité à l’égard des Tibétains, ou d’ailleurs des Chinois. A l’inverse de cette solidarité branlante, les gens de Liverpool ont boycotté et beaucoup boycottent toujours le tabloïd The Sun, coupable d’avoir insulté la mémoire de dizaines de supporters emportés par la tragédie de Hillsborough, en 1989. Le journal de Rupert Murdoch a perdu des millions de livres sterling dans la ville des Beatles.
Le deuxième frein est sans doute le plus insidieux : il s’agit de l’ubiquité des annonceurs, dont les petits LU de Calais avaient dû souffrir lors de leur appel au boycott d’une star du CAC 40, j’ai nommé Danone. En 2001 en effet, cet annonceur ultrapuissant dans les médias avait, très naturellement, découragé bien des journalistes de relayer la lutte des ouvriers «plan-socialisés» de Calais ou de Ris-Orangis.
L’actuel débat autour des JO de Pékin présente quelques points communs troublants avec l’Afrique du Sud de l’apartheid. Si le régime de Pretoria était un «allié déplorable mais essentiel» des pays de l’Ouest, il apparaît que, commercialement, la Chine actuelle est encore plus essentielle et sans doute encore plus déplorable, car sa seule démographie fait d’elle la plus grande dictature mondiale. Ensuite, les arguments des antiboycotts, on pense à Bernard Laporte, consistent à faire un distinguo intenable entre «sport» et «politique», comme si le choix lamentable d’organiser les JO à Pékin n’était pas lui-même un choix politique. A la fin des années 60, les Etats-Unis sous l’impulsion de Henry Kissinger défendaient l’idée d’une «relation constructive» avec Pretoria, prétextant que «l’économie» devait être séparée de ce qui est strictement «politique» ; précisons que cette «relation constructive» pouvait inclure les ventes d’armes, bientôt utilisées contre les Noirs sud-africains. En matière de sport, au même moment, M. Peter Hain organisait un boycott très suivi de l’équipe de rugby sud-africaine ; les propos s’opposant à cette brillante initiative, qui faisait prendre conscience aux Sud-Africains blancs de l’isolement du régime d’apartheid, étaient singulièrement proches de ceux de M. Laporte.
La plupart des grandes entreprises ayant un intérêt économique en Chine avancent qu’y organiser les JO, c’est ouvrir l’empire du Milieu à la démocratie, dans un, cinq, dix, quinze, vingt ans peut-être. Clairement, leur intérêt n’est pas du tout que la Chine devienne démocratique, car le concept de démocratie, pour être opératoire, ne peut s’accommoder de l’absence de syndicat. En cela, le discours de certaines entreprises prônant l’ouverture à la Chine évoque ceux qui stigmatisent ces naïfs qui appellent au boycott de la Birmanie, «naïfs» dont fait partie, excusez du peu, Aung San Suu Kyi elle-même. Leur rhétorique est classiquement cynique, au sens de la définition donnée par Oscar Wilde : «Le cynique est celui qui connaît le prix de tout, la valeur de rien.»
Dernier ouvrage paru :Une Histoire populaire du boycott (1880-2005), l’Harmattan, deux tomes.
http://www.liberation.fr/rebonds/317591.FR.php
ben moi je m’en vais dire bonjour à la mer
bertrand dit:Le deuxième frein est sans doute le plus insidieux : il s’agit de l’ubiquité des annonceurs, dont les petits LU de Calais avaient dû souffrir lors de leur appel au boycott d’une star du CAC 40, j’ai nommé Danone. En 2001 en effet, cet annonceur ultrapuissant dans les médias avait, très naturellement, découragé bien des journalistes de relayer la lutte des ouvriers «plan-socialisés» de Calais ou de Ris-Orangis.
Il n'empèche que je les boycottes encore et toujours, ces petits LU...
Certes, c'est parce que en "rationalisant" et regroupant leurs centres de production, Danone a introduit sur les ateliers ou chaines de fabrications de petits LU des produits utilisant de l'oeuf (voire fruits à coque) et que du coup, ils sont tombés au champ d'honneur, victimes de l'offensive anti-"produits pouvant provoquer une réaction allergique au gamin"
Vaste débat…
Le meilleur moyen de se débarrasser des jeux c’est de ne pas s’y intéresser.
Ce sera ma forme de boycott à moi.
(en gros, je vois plus le boycott comme un acte individuel que collectif ou chacun agit selon sa conscience).
sur ] Eurotopics :
Comment faire pression sur la Chine ?
Les Jeux olympiques de Pékin sont-ils menacés ? Le débat sur la conduite à adopter face à la Chine et sa gestion des événements au Tibet permet d’apporter des éléments de réponse. Parmi les politiciens, les sportifs, le Comité international olympique (CIO), qui peut ou doit réellement faire pression sur les autorités chinoises
Le Temps (Suisse)
Jean-Jacques Roth ne considère pas que le boycott soit la meilleure arme à utiliser contre Pékin. “Pour l’heure, on constate l’efficacité remarquable d’une poignée de militants capables de barbouiller l’image officielle d’Olympie par leurs T-shirts maculés de ketchup. Cette pression ne reculera pas, elle enflera à chaque passage de la flamme olympique. Si la Chine comprend assez tôt que YouTube peut être plus dévastateur qu’un boycott, que l’opinion est ailleurs qu’en son empire une force redoutable, elle cherchera le geste d’apaisement qui sauvera sa face, les Jeux et les consciences blessées. Les JO pourraient alors devenir le ‘catalyseur de changement’ auquel veut croire le président du CIO, Jacques Rogge, dans une formule qu’il faut espérer prémonitoire.”
Dziennik (Pologne)
Robert Korzeniowski, directeur de la chaîne de télévision polonaise TVP Sport, qualifie d’“hypocrisie” l’exigence selon laquelle les sportifs devraient supporter le fardeau des problèmes politiques en boycottant les Jeux olympiques de Pékin. “Ni les hommes d’affaires, ni les politiciens n’ont réellement tiré les conséquences de la tragédie du Tibet. Je n’ai pas eu connaissance de la baisse des commandes d’avions, de voitures, d’ordinateurs et d’autres produits fabriqués par l’Empire du Milieu. (…) Les hommes d’affaires et les politiciens souhaitent, grâce aux athlètes olympiques, ne rien avoir à se reprocher, tout en servant leurs intérêts politiques et économiques. Mais pourquoi les sportifs devraient-ils particulièrement rendre ce monde meilleur ?”
La Tribune (France)
Pour Eric Benhamou, “Pékin n’est pas le Moscou du rideau de fer [en référence au boycott des Jeux de Moscou de 1980]. La Chine est une puissance qui compte et ses JO un événement incontournable pour lequel Coca-Cola ou McDonald’s n’ont pas hésité à payer un ticket de 100 millions de dollars pour figurer parmi les principaux sponsors. (…) Pas question donc de boycott, personne ne le propose, pas même le dalaï-lama en exil. D’ailleurs, le boycott n’a jamais démontré son efficacité alors qu’il dessert avec certitude les sportifs eux-mêmes. La riposte sera donc au mieux symbolique : l’absence de quelques dirigeants dans les tribunes officielles le jour de l’ouverture des Jeux. Ce qui est plus choquant, c’est le silence du CIO. Il avait fait le pari que les JO pourraient contraindre les autorités chinoises à se montrer plus ouvertes sur la question des droits de l’homme. C’est visiblement un échec. Il ne reste plus désormais à espérer que le CIO se montre à l’avenir plus rigoureux. Pourquoi pas au travers d’une nouvelle charte.”
Die Zeit (Allemagne)
“La famille olympique, comme elle aime s’appeler, doit reconnaître qu’elle dispose du pouvoir politique”, demande Christof Siemes. “Quel est le pouvoir politique du sport ? Les responsables olympiques donnent la réponse qui les arrange. On incite la Corée du Nord et la Corée du Sud à participer aux Jeux sous un drapeau commun, comme s’il ne s’agissait pas d’une manifestation politique. L’ancien président du CIO Juan Antonio Samaranch a attribué les Jeux à Pékin en invoquant l’argument selon lequel les Jeux olympiques pourraient changer une ville ‘ou même un pays’. (…) Seulement un mois après l’attribution, Jacques Rogge, son successeur et actuel président du CIO, expliquait que son organisation n’était pas le ‘chien de garde’ du respect des droits de l’homme en Chine.”
Les athlètes contre le boycottage
Article paru dans l’édition du 22.03.08 du Monde
Les sportifs français ne veulent pas rater les Jeux de Pékin mais envisagent des actions de soutien au Tibet
Pour les athlètes français, pas question de boycotter les Jeux olympiques, du 8 au 24 août, en Chine. « Entre l’excitation d’aller aux Jeux et la gêne d’être dans un pays comme la Chine, c’est l’excitation d’aller aux Jeux qui l’emporte », résume l’escrimeur Nicolas Lopez, qui espère disputer ses premiers JO à Pékin. « Je ne suis pas prêt à renoncer aux Jeux, parce que je ne pense pas que le boycottage aurait une influence sur la Chine », poursuit le champion de France 2006.
De François Hollande à Bernard-Henri Lévy en passant par l’association Reporters sans frontières, plusieurs voix dissonantes se sont fait entendre cette semaine pour appeler à envisager cette possibilité si la Chine ne changeait pas d’attitude envers le Tibet.
« L’énorme erreur, c’était de donner les JO à Pékin », tranche le marcheur Yohann Diniz, champion d’Europe et vice-champion du monde du 50 km. « Tout le monde s’excite depuis une semaine, mais c’est avant qu’il fallait s’agiter. Personnellement, je n’ai pas attendu les JO pour être conscient des problèmes du Tibet », explique le sportif, qui se dit « engagé à gauche ».
« Les politiques auraient dû demander à la Chine de montrer des signes d’amélioration avant de lui donner les Jeux », juge le marcheur. « I l fallait y penser au moment de l’attribution des Jeux », estime également Adrien Hardy, champion olympique à Athènes, il y a quatre ans, en aviron, dans la catégorie deux de couple. « Le boycottage ne changera rien. Il y a d’autres actions à mener, au niveau économique ou politique, avant de toucher au sport », argumente ce rameur de 29 ans. « Il faut faire la part des choses. Nous, les sportifs, on prépare les JO, pas une compétition en Chine et encore moins une publicité pour le régime chinois, poursuit Adrien Hardy. Entre les JO d’Athènes et de Pékin, j’ai fait plus de 15 000 kilomètres en bateau. En tant que sportif, je ne conçois pas de boycotter les Jeux. Ce qui ne m’empêche pas d’être sensible aux problèmes du Tibet. »
Pour Philippe Bana, le directeur technique national du handball français, qui jouera sa qualification pour les Jeux en mai, « les sportifs ne doivent pas être pris en otage ». « Ne pas aller à Pékin serait une erreur, estime Philippe Bana. Il y aura deux fois plus de médias qu’à Athènes : ce sera une occasion unique de se faire entendre. »
Pour Yohann Diniz et Nicolas Lopez, une manière de manifester leur opposition à la politique répressive menée par la Chine au Tibet serait, comme le demande notamment l’ONG Human Rights Watch, de boycotter la cérémonie d’ouverture des Jeux. « Boycotter la cérémonie est une idée de compromis assez originale, juge Nicolas Lopez. Cela permettrait aux Etats d’affirmer leur choix politique. Mais je ne pense pas que «Sarko» y soit prêt. Car personne ne veut se fâcher avec la Chine. C’est un partenaire économique très important, or ce sont les intérêts économiques qui priment. »
Aux Etats-Unis, le porte-parole de la Maison Blanche a assuré, jeudi 20 mars, que le président Bush n’avait pas l’intention de boycotter la cérémonie d’ouverture des Jeux.
A l’instar de Yohann Diniz, qui évoque la possibilité d’arborer un T-Shirt de soutien au Tibet s’il monte sur le podium, cet été, à Pékin, Nicolas Lopez pense à une manifestation tout aussi ostentatoire. « L’idéal serait d’aller aux Jeux, de gagner, et de monter sur le podium avec un drapeau du Tibet », décrit l’escrimeur.
Au comité national olympique et sportif français (CNOSF), on précise que les athlètes pourront s’exprimer, mais dans le respect de la Charte olympique. « On n’a pas interdit aux athlètes de faire usage de leur liberté d’expression, mais l’idée, c’est quand même de leur dire que, s’ils vont aux Jeux, c’est pour faire les Jeux, précise Jean-Paul Clémençon, directeur de cabinet du président du CNOSF, Henri Sérandour. Comme l’a dit le président Rogge, au cours des compétitions, sur les podiums, pendant les manifestations liées à l’olympisme, il n’y a pas la place pour manifester un point de vue. Par contre, ailleurs, les athlètes comme les cadres sont libres d’exprimer ce qu’ils souhaitent. Beaucoup de choses peuvent se faire en amont des Jeux, de la part des athlètes comme des personnalités politiques. »
Nicolas Lopez ne se fait aucune illusion. « L’organisation prendra toutes les précautions nécessaires pour éviter que les athlètes ne fassent passer des messages politiques, prédit l’escrimeur. Je p ense qu’il y aura un black-out pendant 15 jo urs. »
Je n’apprécie pas du tout la tendance actuelle de vouloir reporter sur des athlètes tout le poids de la contsctation contre la Chine.
Pas seulement les appels aux boycotts, mais également et surtout le coté faux-cul qui consiste à dire “on ne peut rien faire officiellement, mais bien sur à titre individuel…” On va en arriver à stigmatiser ceux qui ne se prononcent pas sur le sujet ou ne feront pas de gestes (ceux qu’on ne veut pas forcément faire nous mêmes). Comme tout citoyen, un sportif a le droit d’avoir ses convictions personnelles et de les exprimer s’il en a envie mais pas le devoir d’assumer publiquement les convictions des autres (et leurs conséquences)…
Demande t’on aux employés d’un supermarché à titre individuel de retirer des linéaires les produits made in China ?
Demande t’on aux salariés d’Airbus à titre individuel de refuser de travailler sur les avions commandés par la Chine ?
Tout le monde critique le CIO qui a attribué les jeux à la Chine, sur des critères plus économiques que éthiques (mais ce ne sont pas les seuls) et de se retrancher derrière le fameux “oui, mais en 7 ans, la Chine a le temps de s’améliorer et les chinois nous ont promis”. Mais paradoxalement, sans cette décision du CIO, il n’y aurait pas de crise au Tibet ou plutôt celle-ci aurait une résonnance beaucoup moins forte. Il faut en profiter pour faire comprendre par la politique aux Chinois qu’ils doivent rectifier le tir, sous réserve d’un effet d’image désastreux qui gacherait totalement l’iamge qu’ils veulent donner au monde avec les Jeux.
si je puis me permettre de faire egoistement paraitre mon point de vue…
Moi j’adore regarder les jeux qu’ils soient en Chine ou ailleurs et je ne vos aucun interet de boycotter quoi que ce soit, si ce n’est de faire disparaitre l’esprit des jeux…
Boycotter ne changera strictement rien à la politique chinoise…
Moi, je ne comprends pas qu’on puisse dire “boycottage”
De toutes manières, les JO, c’est déjà de la grosse arnaque, non ?.. vous en êtes conscients ?..
Du pain et des jeux… l’histoire se répète… Même si je ne regarde pas, j’aurai droit aux images d’exception… le nageur africain seul dans son bassin, le cycliste espagnol se signant avant de se gameller au départ, et puis les images de joie, de bonheur, de victoire, etc… bref, la totale.
Tant mieux si certains trippent en regardant les J.O… pour le reste, arrêtez de nous bourrez le mou.
Alea jacta est.
J’ai participé trois fois aux Jeux olympiques, obtenu deux médailles, et j’ai eu la chance, en 2004, d’être porteur de la flamme olympique. De tous ces événements, je garde le souvenir d’une ambiance magique, extraordinaire, de fête et de générosité, de plaisir pur.
Je suis sans doute une illustration parfaite de l’idéal olympique : je me suis entraîné comme un fou pendant dix-sept ans, mais je n’étais qu’amateur et je travaillais à côté. Et depuis que j’ai arrêté la compétition, je suis revenu à la vie «civile» pour gagner ma vie et vivre en famille comme tout le monde. Avec, toujours au cœur, cet amour de l’olympisme qui me fait rêver depuis l’enfance.
C’est pourquoi j’ai pleuré de voir cette mascarade de parcours de flamme olympique, moi qui ai été chargé de remettre le flambeau à Stéphane Diagana en 2004 au premier étage de la tour Eiffel.
Embêter le mouvement olympique pour embêter la Chine ? Le calcul est simple, et «l’objectif Tibet» semble mériter ce moyen médiatique de défendre une cause.
Pourquoi pas, sauf qu’une fois encore, on prend les athlètes en otage. Certes ils ne sont pas indifférents à la cause du Tibet, certes les valeurs de liberté et d’égalité leur sont chères, puisqu’ils se battent pour la plupart d’entre eux dans le plus strict respect de l’idéal olympique, si pur et si beau.
Mais dans sa jeune vie, lorsqu’on va participer aux Jeux olympiques, on a déjà beaucoup sacrifié à cet idéal pour donner le meilleur de soi-même, et si on a la chance de participer à deux ou trois olympiades, c’est bien le maximum. Si on veut y être compétitif, on a tout mis de côté pour se donner à 100 %. Alors pourquoi devenir l’instrument politique des autres ?
S’il y a des problèmes, c’est aux hommes politiques, à l’action politique citoyenne, aux acteurs économiques qu’il faut demander de réagir. Ils sont là pour ça, et même s’ils n’ont pas le tambour médiatique des Jeux olympiques, ce sont eux qui peuvent être efficaces. Le piège est double pour le pauvre athlète qui est, comme celui à qui il est promis monts et merveilles, le seul à croire en son idéal olympien.
Car le non-initié se sentira légitime à prendre le sport en otage : les dirigeants olympiques, s’ils ont pris cette décision, n’avaient en tête que des arrières-pensées économiques, politiques, stratégiques. Eux aussi ont pris les athlètes en otage, eux aussi se nourrissent sur la bête, eux aussi jouent une partie de billard à trois bandes et, dans leur grande lâcheté, demandent aux sportifs de porter haut des valeurs admirables pour faire avancer leurs petites combines.
Alors de grâce, les uns et les autres, cesser de vous tirailler pour profiter au mieux de votre beau bébé médiatique, laissez-le vivre un peu. Pensez, vous qui découvrez la noble cause du Tibet et la jouissance d’être du côté des gentils, que vous avez privé certains athlètes d’un rêve extraordinaire, celui de porter la flamme olympique, de communier avec les autres sportifs et de faire partie de cette belle chaîne.
Adressez-vous directement à nos hommes politiques pour qu’ils tiennent leur ligne de conduite de campagne électorale. Témoignez de votre courroux auprès des acteurs économiques qui accompagnaient notre président de la République lors de son voyage en Chine : les gros contrats qui s’y sont négociés peuvent aussi être de beaux otages ?
Et si, outre demander aux autres de faire des efforts à votre place, vous avez envie d’agir, amis artistes, faites-le dans vos salles de spectacle. Amis donneurs de leçons faites-le en votre nom. Amis consommateurs, vérifiez que le tee-shirt, le four à micro-ondes ou les baskets du petit dernier à 8 euros, que vous venez d’acheter, ne proviennent pas de Chine.
Vous avez un champ d’action et de parole qui est le vôtre, il serait courageux de le prendre, et de laisser les athlètes choisir celui qui leur est propre. Car le dilemme qui est le leur est déjà assez lourd à porter comme ça, quand on a besoin d’être à fond sans arrière-pensée au départ d’une compétition.
On a également besoin, vous le savez bien, du soutien de tous derrière soi. L’histoire, elle, retiendra le nom des médaillés.
FRANK ADISSON canoéiste, médaillé aux Jeux olympiques de Barcelone (1992) et Atlanta (1996).
Dans Rebonds, de Libé
quelques grammes de poil à gratter dans un monde de consensus :
http://www.jean-luc-melenchon.fr/?p=585#more-585
Pour aller dans le sens de ce que dit Bertrand, une belle histoire:
http://www.sportvox.fr/article.php3?id_article=16864
Seulement il faut aussi faire un petit rappel.
Lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Berlin en 1936 certaines délégations ont défilé en faisant le salut nazi devant la tribune où se trouvait Hitler.
J’ai toujours trouvé cette attitude de beaucoup d’athlètes lamentable car à l’époque on ne pouvait pas ignorer ce qui se passait en Allemagne.
Heureusement que Long était là pour faire oublier cette triste attitude.
Fadest dit:Je n'apprécie pas du tout la tendance actuelle de vouloir reporter sur des athlètes tout le poids de la contestation contre la Chine.
Complètement d'accord.
Pour le salut nazi, visiblement, il avait déjà eu lieu lors des jeux précédents, puisqu’il s’agissait du salut Olympique. Certes, il aurait été plus à propos de ne pas le faire à Berlin…
Et à cette période, l’Allemagne a participé officiellement à l’Expo universelle de Paris, lui permettant d’étaler l’ambition de la puissance nazie, mais également, des athlètes sont partis à Barcelone participés aux Jeux de l’Amitié (en réaction aux JO de l’allemagne nazie) plutôt à obédience communiste. Un certain nombre de ces athlètes sont restés et ont combattus aux coté des opposants à Franco qui avait pris le pouvoir pendant ces jeux…
Sinon, plus que la référence à l’idéologie nazie, c’est le rapprochement avec la situation de Mexico 68 en plus fort qui m’inquiète.
Fadest dit: c'est le rapprochement avec la situation de Mexico 68 en plus fort qui m'inquiète.
Monsieur Fadest, tu pourrais développer ton idée, silteplé ?
Je crois que fadest fait référence aux JO qui se sont déroulés quelques mois après une repression très dure de manifestants par le gouvernement mexicain, manifestants qui réclamaient simplement la liberté politique (des centaines de morts)…nous étions en 1968, comme le documentaire de P. Rothman nous l’a rappelé hier…
Enpassant dit:Pour aller dans le sens de ce que dit Bertrand,...
Moi je ne dis rien, ce sont différents points de vue que je pointe . Et d'avis différent.
Je ne me prononcerais pas pas pour ou contre le boycott des JO en Chine, puisque de toute manière je boycotte les JO tout simplement. Mais je ressens une forte hypocrisie de part et d'autres mais aussi des points de vues contraires légitimes.
Par contre je soutiens les actions d'Amnesty International, qui ne se focalisent pas sur le Tibet mais sur le respect des droits humains, à l'occasion de cet événement.
Le rapprochement que fait Fadest avec les JO de Mexico, en 1968, j'aurais tendance à le craindre aussi: une répression féroce avant l'ouverture des JO, afin que ceux -ci se déroulent sans "parasitisme".
Quelques jours après cette répression, aucun pays ne s'abstint,à ma connaissance, de participer à la cérémonie d'ouverture , suite à cette répression sanglante ...
bertrand dit: Par contre je soutiens les actions d'Amnesty International, qui ne se focalisent pas sur le Tibet mais sur le respect des droits de l'Homme, à l'occasion de cet événement.
...
des droits humains
Amnesty a changé depuis pas mal de temps sa terminologie pour englober toutes les situations où la dignité humaine n'est plus respectée, notament les situations particulières des enfants et des femmes.
Mexico 68… la dictature parfaite (sic) accueille les Jeux…
bertrand dit:Le rapprochement que fait Fadest avec les JO de Mexico, en 1968, j’aurais tendance à le craindre aussi: une répression féroce avant l’ouverture des JO, afin que ceux -ci se déroulent sans “parasitisme”.
Quelques jours après cette répression, aucun pays ne s’abstint,à ma connaissance, de participer à la cérémonie d’ouverture , suite à cette répression sanglante …
Tu parles là du coté “évenementiel” d’un problème lors des Jeux (mais ça peut-être aussi Munich 72 - la prise d’otages - ou Atlanta 96 - la bombe).
Ma crainte devient plus que certains en viennent à “souhaiter” ce genre “d’incidents” juste pour dire qu’ils avaient raison (je ne vais quand même pas aller jusqu’à utiliser provoquer ou lieu de souhaiter pour le moment).
Concernant notre président, j’aimerais juste qu’il se prononce clairement une fois pour toutes, en donnant des raisons claires aux français et au gouvernement chinois, au lieu de tergiverser et faire l’inverse, décider en fonction de l’opinion.
Brown s’est décidé, il ira et le GB améliorer ses relations avec la Chine. Merkel s’est décidée, elle n’ira pas et l’Allemagne, très critique vis à vis de la Chine reste un pays respecté la-bas. La France ne sait pas trop, et la situation s’envenime, et les problèmes commencent à s’étendre au delà de la sphère politique. Franchement, c’est si dur de prendre une décision ? Rien n’oblige un chef d’état à être présent, et rien n’oblige un chef d’état présent à cautionner ce qu’il se passe en dehors de l’enceinte olympique.I lpourrait même emmener Rama Yade cette fois ci, vu qu’elle a été privée de Chine la dernière fois…