Bonjour, vous avez peut-être entendu parlé ou lu des choses sur ce formidable joyau de l’architecture du XVIIe racheté il y a peu par un émir… qui a décidé simplement d’y mettre des ascenseurs, 18 salles de bain, des jacuzi… très utiles pour les 2 jours où il y résidera tous les 10 ans…
Alors que c’est le dernier hôtel particulier de cette époque encore “dans son jus” (boiseries, peintures, plan)…!!!
A savoir aussi que normalement, c’est la Commission de Paris Historique qui doit donner un avis sur la réalisation ou non de ce genre de travaux mais que la municipalité de Paris a devancé depuis quelque mois le Gouvernement en ce qui concerne le plan de relance et que pour faciliter les chantiers et donc, la relance, on ne tient plus compte de la valeur historique ou esthétique de tels lieux et que la Commission n’est plus jamais consultée…
vous pouvez soutenir la culture, les arts, et les métiers qui les protègent en signant ici :
http://lambert.over-blog.org/
merci.
Merci Blancas’ pour l’alerte. C’est signé.
Putain, la vache, l’Hotel Lambert! il n’y vont pas de main morte!
Done.
La pétition online, c’est un peu du slacktivisme, mais c’est déjà ça.
greuh.
Dans son jus ?
D’après ce que je sais (mais je ne sais pas grand chose) l’émir en question veut moderniser certaines parties du bâtiment.
Faire un ascenseur par exemple ce qui amènera à détruire un escalier du … XIXe. C’est déjà pas très pur jus.
Moi qui ne le connait que par on-dit, ce soit disant joyau historique n’a jamais été ouvert au public.
A quel moment doit-on arrêter le cours de l’histoire ?
Je me fais l’avocat du diable mais c’est une vraie question à se poser je crois.
Je me pose les mêmes questions que Mops.
Si ce bâtiment était ouvert au public je pense que je signerai. Dès lors qu’il s’agit d’un bâtiment à usage privé, je suis moins convaincu.
Par ailleurs cela pose la question de la vie des bâtiments :
- ajouts des flèches sur les cathédrales par Violet le Duc.
- destruction du forum romain pour la récupération des marbres.
…
Autant dire que je me pose des questions…
LeChef dit:Je me pose les mêmes questions que Mops.
Si ce bâtiment était ouvert au public je pense que je signerai. Dès lors qu'il s'agit d'un bâtiment à usage privé, je suis moins convaincu.
Par ailleurs cela pose la question de la vie des bâtiments :
- ajouts des flèches sur les cathédrales par Violet le Duc.
- destruction du forum romain pour la récupération des marbres.
...
Autant dire que je me pose des questions...
Même si c'est un bâtiment à usage privé, il fait partie de notre histoire et doit à ce titre être protégé.
La deuxième partie du message est absurde : ce n'est pas parce que nos prédecesseurs ont commis des erreurs que nous devons les reproduire. Le coup de Viollet Le Duc s'est reproduit très récemment à Versailles et nous fûmes trop peu à protester. Résultat, le château a depuis peu un aspect non historique (sa cour d'entrée avec la grille).
http://www.chateauversailles.fr/fr/0_Le ... royale.php
La grille a bien existé, mais les deux pans de mur qui la soutiennent n'ont jamais existé tous les deux en même temps

Enfin, pour couper à l'argument "c'est le XIXe c'est pas si vieux" : les bâtiments du XXe siècle font tout autant partie de notre patrimoine, des cités de Le Corbusier à l'arche de la défense, en passant par Beaubourg, le musée Guggenheim de NY, l'Opera de Sydney ou whatever.
greuh.
Bien sur ce serait mieux si l’hotel Lambert était ouvert au public, mais on peut toujours espérer qu’il le soit un jour. Qui sait ce qu’il en sera dans 20 ans, dans 50, dans 100?
Il y a peu je suis allé visiter le cloître de Charlieu. Une petie merveille du XVème. Impossible, si en 1900 et des broquilles quelques illuminés ne s’étaient pas mobilisés pour le récupérer.
Il était déjà démonté et emballé dans des caisses en partance pour les US où un milliardaire voulait le remonter autour de ses tennis.
greuh dit:LeChef dit:Je me pose les mêmes questions que Mops.
Si ce bâtiment était ouvert au public je pense que je signerai. Dès lors qu'il s'agit d'un bâtiment à usage privé, je suis moins convaincu.
Par ailleurs cela pose la question de la vie des bâtiments :
- ajouts des flèches sur les cathédrales par Violet le Duc.
- destruction du forum romain pour la récupération des marbres.
...
Autant dire que je me pose des questions...
Même si c'est un bâtiment à usage privé, il fait partie de notre histoire et doit à ce titre être protégé.
La deuxième partie du message est absurde : ce n'est pas parce que nos prédecesseurs ont commis des erreurs que nous devons les reproduire. Le coup de Viollet Le Duc s'est reproduit très récemment à Versailles et nous fûmes trop peu à protester. Résultat, le château a depuis peu un aspect non historique (sa cour d'entrée avec la grille).
http://www.chateauversailles.fr/fr/0_Le ... royale.php
La grille a bien existé, mais les deux pans de mur qui la soutiennent n'ont jamais existé tous les deux en même temps
Enfin, pour couper à l'argument "c'est le XIXe c'est pas si vieux" : les bâtiments du XXe siècle font tout autant partie de notre patrimoine, des cités de Le Corbusier à l'arche de la défense, en passant par Beaubourg, le musée Guggenheim de NY, l'Opera de Sydney ou whatever.
greuh.
Donc on ne touche plus à rien de ce qui existe déjà ?
Imaginons donc par l'absurde le raisonnement suivant :
Les monuments historiques ont été inventé à l'époque Gallo-Romaine :
On aurait du donc conserver tous les bâtiments de ce style jusqu'à nos jours. Ce qui aurait pour le coup donné un autre visage au paysage urbain et cet hôtel particulier n'existerait surement pas.
Cette défense du patrimoine historique est certes très légitime et nécessaire. Par contre le problème du choix de ce qui est historique et préservable est une question qui doit se renouveler à chaque moment.
Pour ma part, je suis très surpris par exemple de ces sauvegardes qui mettent en valeur les structures architecturales passées en niant leur aspect décoratif chromatique.
On sait que la pierre brute et les poutres brutes apparentes ne sont que des valeurs récemment inventées.
Les magnifiques facades de nos cathédrales furent autrefois peintes de couleurs vives. Les statuaires grecques aussi.
Idem pour les maisons de villes à colombages qui font la fierté de nos quartiers dit "historiques".
Seulement comme cette décoration historique est jugée aujourd'hui par nos goûts contemporains comme trop ostentatoire, on les rénove sans se préoccuper de cet aspect.
Entre histoire et histoire fantasmée, les frontières ne sont pas aussi explicites qu'on veut bien nous laisser le croire.
En bref, si on devait choisir de préserver tout l'héritage historique, on ne pourrait plus construire une seule autoroute, ni gérer l'urbanisation des villes.
La préservation du patrimoine pose des questions de choix.
Si nous devons préserver tout ce qui a été fait sous prétexte de préservation historique je crains que l'immobilisme qui en résulte n'ait des conséquences très encombrantes pour faire vivre les générations futures.
Cela laisse aussi entendre que le XXie siècle ne peut plus modifier alors qu'on va préserver toutes les modifications antérieures ?
Le premier raisonnement n’est pas que “par l’absurde”, il est simplement absurde.
L’exemple des façades colorées n’est pas mieux : les peintures ont disparu bien longtemps avant que la notion de conservation n’apparaisse, et on n’a aucune trace. Le reste du raisonnement à ce sujet s’avère donc erroné. Fulcanelli (pour son “Mystère des cathédrales” aurait pourtant été ravi que la peinture de Notre Dame de Paris soit encore présente ou archivée d’une manière quelconque).
Enfin, les questions à la fin sont elles aussi absurdes. On ne souhaite pas préserver tout ce qui a été fait. On souhaite préserver LE PEU* QU’IL NOUS EN RESTE.
T’as raison. Rasons tout. Du bêton partout. Ouais ! Trop kikoulol.
“Puisque tout le monde veut vivre à Paris, on va raser toute la France pour en faire un parking, et construire une tour de 50km de diamètre à la place de Paris”
~un jeune architecte dans un recueil du Grand Duduche, Cabu
greuh.
* : le TRES peu
Docteur Mops dit:
...
Pas mieux.
@ Greuh :
L'idée n'est pas de tout raser pour faire des parkings, ni pour foutre plein de monde à Paris (j'ai qu'une idée m'éloigner de Paris, je laisse ma place à qui veut).
Simplement, la conservation du patrimoine me semble être autre chose que (je caricature peut-être, mais c'est l'impression que ça m'a fait) "oulala, il y a un bâtiment historique qui va être complètement modifié, vite empêchons cela).
Cette posture me semble aussi intenable et inappropriée que la période de destruction massive d'édifices religieux au XIXème siècle suite à la révolution.
Si préservation du bâtiment il doit y avoir, se pose la question de sa valorisation et de son ouverture au public. De surcroit, la préservation et la restauration sont deux disciplines qui restent tiraillées entre privilégier l'histoire (beaucoup de bâtiments ont évolué et ont été modifié au cours du temps ne rendant pas la tâche aisée) et privilégier un rendu esthétique. Ce tiraillement est toujours présent et à mon avis pas près de s'arrêter.
Sinon, loin de moi l'idée qu'il faut faire table rase du passé, bien au contraire. Mais tout conserver en l'état ne me semble pas être une solution d'autant plus quand les bâtiments ne sont pas valorisés.
1/tu caricatures.
2/le bâtiment est privé. Doit-on le nationaliser pour pouvoir le restaurer/protéger ? Ou doit-on le laisser détruire sans rien faire ?
Que restera t il de tout cela dans mille ans ? Dans dix mille ans ? Dans cent mille ans ?
Protéger en masse, c’est pour qu’un tout petit tout petit tout petit peu survive à un peu plus que deux génération.
Tu n’aurais pas aimé pouvoir les voir, les sus dites façades peintes ? Tu n’aurais pas aimé le voir, le forum romain ? Tu n’aurais pas voulu la voir, la pyramide de gizeh avec son revêtement en albâtre gravé ? Ou le temple d’Athéna Nikhe ?
Sauf que tu pourras pas. Jamais. Niet.
Le discours que je lis dans vos messages n’est finalement que représentatif de la vision à ultra court terme qui essaime dans notre société comme la faucheuse sur un champ de bataille.
Et c’est dra-ma-ti-que.
greuh, qui a envie de pleurer, là, tout de suite. Et ce n’est pas une image.
Il s’agit vraiment de savoir si il faut tout raser ou rien raser? tout préserver ou tout modifier? Je ne crois pas…
Personnellemment je parle uniquement de l’Hotel Lambert un bâtiment du XVIIéme - assez splendide- situé sur l’Ile Saint Louis, dont je regrette à chaque fois que je passe devant qu’il ne soit pas ouvert au public.
Je ne crois pas nous ayons quoi que soit à gagner à nous caricaturer les uns les autres, non?
Au risque d’être moi-même caricaturé et tourné en bouffonnerie, j’ai moi aussi un peu le sentiment qu’après des siècles de négligence coupable du passé hormis dans l’action de quelques mécènes, on fonce un peu dans l’excès inverse à vouloir à tout prix préserver tous les bouts de façades de tel truc qui trainent.
Le cas de cet hôtel dont j’ai le souvenir vague de l’avoir régulièrement trouvé splendide, et voué au démantèlement par un émir, n’est sans doute pas celui sur lequel il est le plus légitime de lancer un débat, mais j’ai quand même eu vent de quelques exemples un peu trop absurdes pour estimer que la loi telle qu’elle est est parfaite, aussi bien dans son esprit que dans son application.
En tout cas, lancer une discussion sur la question ne me semble pas signifier vouloir raser la France pour en faire un parking.
Dites, ça vous compliquerait tellement la vie de lire la demi page de texte qui explique le projet sur la page citée par blancas’ afin de contextualiser vos prises de positions généralistes ?
Je suis bon et généreux, je vous recopie le lien pour que vous n’ayez pas à regarder tout en haut du post : http://lambert.over-blog.org/
On parle bien de saucissonner un bâtiment dont la valeur architecturale est reconnue (après tout, il est classé, hein) donc, d’un point de vue esthétique et culturel, d’un bien public et -justement- pour des intérêts privés. Il y a une légère différence avec la construction d’une autoroute qui (minus l’epsilon des concessions d’exploitation) restent des biens publics (et, certes, à l’usage du public).
Vivi, c’est ce que je dis. Le cas présent n’est sans doute pas le meilleur pour lancer une discussion. D’ailleurs, j’avais signé avant d’intervenir.
Mais à partir du moment où des prises de position générales sont énoncées, on peut en profiter un peu pour causer. C’est quand même pas toi qui vas nous dire qu’y faut pas causer ??
Dans le milieu de la culture, nous sommes nombreux à avoir souhaiter l’ouverture de cet hôtel au public. La question est effectivement de savoir ce qui doit/peut être sauvegardé. Mais si l’hôtel est aujourd’hui démantelé, il est évident qu’on ne se posera plus jamais la question…
Il ne s’agit pas d’une énième église romane perdue dans la campagne, l’hôtel Lambert est une référence pour la période, les plus grands noms y ont collaboré. Je ne suis pas la première à défendre becs et ongles le patrimoine (français ni parisien, je sens le débat glisser aussi sur ce thème, Grolap a fait son apparition…) mais je pense surtout que le problème vient d’un désengagement certain vis à vis de la culture et du patrimoine.
Il ne s’agit pas de tout figer, de vivre dans une ville muséifier mais de considérer le passé et ses apports, en gardant quelques témoignages.
Et oui, moi, quand 2 hôtels particuliers du Marais (Vigny et Croisilles, XVIIe s, avec fresques et boiseries d’époque) sont vendus par le ministère de la culture à un groupe hôtelier pour en faire des suites de luxe, ça me fait hurler.
Je ne vois pas pourquoi la conservation du patrimoine devrait être synonyme de passéisme. Au contraire, il y a beaucoup d’exemples de réhabilitation qui sont des réussites. Pour parler de ce que je connais, le musée David d’Angers dans une église est une merveille, la tate modern qui reprend le patrimoine industriel est aussi un bel exemple. Et l’architecture contemporaine n’est pas en reste non plus, sauf à considérer l’oeuvre de Jean Nouvel (j’ai une affection particulière pour le CNIT personnellement).
Mais ne vous inquiétez pas, les Architectes des bâtiments de France vont bientôt être au chômage, on pourra faire ce qu’on veut.
@Greuh : j’ai toujours entendu dire que la grille n’avait jamais existé mais qu’elle apparaissait juste sur un plan…
blancas' dit:Je ne suis pas la première à défendre becs et ongles le patrimoine (français ni parisien, je sens le débat glisser aussi sur ce thème, Grolap a fait son apparition...)
Mééé euh, qu'est-ce que vous avez avec moi, euuuuh. De une que c'est pas moi qu'ai commencé à pourrir ton beau sujet, de deux que j'ai l'impression d'être intervenu de façon plutôt consensuelle, de trois que je suis d'accord avec toi et que je l'ai déjà dit.
Je récapitule :
-concernant l'hôtel Lambert, la question ne se pose effectivement pas trop. La lecture des différents éléments m'a fait signer la pétition AVANT d'intervenir. D'ailleurs, je ne comptais même pas intervenir.
-Cependant, certains ont émis des opinions plus générales sur la préservation des monuments. Jusqu'ici, rien à ajouter non plus, sauf qu'encore une fois, le cas présent ne s'y prêtait pas nécessairement. Toujours pas d'arrivée du grolap' en vue.
-Là dessus est intervenu greuh dans le style "ton opinion est tellement naze que j'aurais honte de chier un amoncellement de matières fécales comme toi". Du coup, j'ai essayé de dire que, même si le prétexte était mal choisi, il y avait tout de même matière à un débat plus général qui méritait sans doute un minimum de sérénité.
Visiblement, mon intervention était la plus mal venue et la plus hors-sujet, dont acte

blancas' dit: ...perdue dans la campagne, ...
Du parisianisme bon teint...

blancas' dit:@Grunt : j'ai toujours entendu dire que la grille n'avait jamais existé mais qu'elle apparaissait juste sur un plan...
A ce moment là, c'est pire, puisque ce n'est pas de la conservation ni de la rénovation, mais la fabrication d'un passé qui n'a jamais existé.
greuh.
"L’affaire " vue par Libé:
Le cheikh sauve les meubles
L’hôtel Lambert à Paris, racheté par un prince qatari, sera rénové à grands frais. Après les inquiétudes de la Ville, la polémique s’apaise. Visite de chantier
Culture 22 janv. 11h17
Le cheikh sauve les meubles
grand angleL’hôtel Lambert à Paris, racheté par un prince qatari, sera rénové à grands frais. Après les inquiétudes de la Ville, la polémique s’apaise. Visite de chantier.
Réagir
VINCENT NOCE
Du pont de Sully, les passants peuvent voir l’hôtel Lambert à la pointe de l’île Saint-Louis (IVe arrondissement de Paris). Ce rescapé du règne de Louis XIII est un mythe chez les amoureux du patrimoine. «Sans conteste, il est le plus bel hôtel particulier ayant survécu du XVIIe siècle», souligne l’historien d’art Alexandre Pradère. Au bord de la Seine, en contrebas, on aperçoit des camionnettes d’entrepreneurs. Ils sont là pour la restauration des lieux. Une restauration complète, décidée par le nouveau propriétaire, et qui a suscité une vive émotion.
Appartenant depuis 1975 au baron Guy de Rothschild, disparu en 2007, il a été vendu par ses fils au frère de l’émir du Qatar, le cheikh Hamad Ben Khalifa al-Thani, pour une soixantaine de millions d’euros. Ce passionné du Grand Siècle s’est piqué d’en faire un palais digne de la grande époque des Rothschild, quand le baron Guy et Marie-Hélène accueillaient leurs amis, entourés de tableaux comme l’Astronome de Vermeer ou le Portrait de la baronne James de Rothschild par Ingres. Au moins 20 millions d’euros seront consacrés à ce chantier, qui devrait durer deux ans et demi.
Planchers effondrés, murs humides…
Fin décembre, le Monde a ouvert une vive controverse en évoquant une intervention démesurée qui défigurerait ce témoignage historique. «Quatre ascenseurs, des dizaines de chambres avec salles de bains, des menuiseries neuves, la création d’un parking sous le jardin, etc.»: le journal dénonçait ce que le Parisien qualifiait à son tour de «travaux pharaoniques». Heureusement, «tout semblait bloqué» par l’opposition vertueuse de Bertrand Delanoë, assurait le Monde. Sur la foi d’un rapport de la commission municipale consultative du Vieux Paris, le maire avait en effet exprimé son inquiétude. La veille de Noël, il a pris la plume pour demander à Christine Albanel un réexamen du projet, «centré sur le seul enjeu de la question patrimoniale». Il protestait contre l’instauration d’un comité scientifique, y voyant une manière d’éviter le passage devant la Commission supérieure des monuments historiques. La ministre, pas ravie de trouver cette missive au pied du sapin, a immédiatement répliqué, en soulignant avoir elle-même suggéré la création d’«un comité scientifique de haut niveau, afin de permettre d’orienter les choix de restauration». A ce stade, «aucune décision n’est prise». Aussi a-t-elle «réfuté les accusations de légèreté» : «l’Etat a pris toutes ses responsabilités pour surveiller» cette restauration.
Les travaux doivent commencer d’ici l’été. Les 4 000 pages du dossier seront soumises à la Commission supérieure des monuments historiques en mars, indique l’architecte, Alain-Charles Perrot. «Le comité scientifique, formé par le ministère, c’est un plus, se défend-il, car lui peut assurer un suivi tout le long du chantier.» Devant intégrer un architecte historien, il comprend un inspecteur général des monuments historiques et Alain Mérot, spécialiste de la peinture française du XVIIe à la Sorbonne.
Le propriétaire, qui aurait préféré rester dans la discrétion, a autorisé une visite complète des lieux pour quelques journalistes (dont celui de Libération), auxquels ont été ouverts les dossiers. Découpé depuis fort longtemps en appartements, le bâtiment a souffert au cours des siècles. Planchers effondrés, murs humides, installations électriques obsolètes : l’architecte parle d’un état «dramatique» du bâti. «C’est un miracle, assure-t-il, que la couverture ne se soit pas effondrée.» Et, sans doute, un autre miracle de trouver un acquéreur prêt à assurer la réhabilitation. Ce que ni la Ville, ni l’Etat ne sont en mesure d’envisager financièrement.
Le projet prévoit de restaurer tous les décors historiques. L’hôtel serait habité. Certes, les princes arabes ont l’habitude de se déplacer avec un entourage important. Mais les logis seront installés dans l’aile gauche, qui n’a pas conservé de partie ancienne. «Toutes les salles historiques seront préservées», souligne Alain-Charles Perrot. Le décorateur, Alberto Pinto, dépense sans compter pour acheter meubles et tissus anciens. Le choix architectural est de revenir à l’état XVIIe ou XVIIIe, en éliminant nombre d’ajouts postérieurs inesthétiques, notamment dans la cour. Ainsi les garages devraient-ils être supprimés, ce qui permettrait le rétablissement de la façade de l’aile gauche. Un parking souterrain avait été initialement prévu sous la cour. Mais, suite à l’avis défavorable donné par la Ville, il devrait être creusé sous le jardin, ainsi qu’un local technique. Jardin et fontaine retrouveront ensuite leur place sans difficulté.
Echaudés et vigilants
Même si l’édifice a la particularité d’avoir été construit sur un talus, cela ne devrait pas empêcher les nouveaux propriétaires de prendre leurs précautions en cas de crue exceptionnelle, afin de pouvoir déménager rapidement tableaux et panneaux, et protéger les décors peints, à commencer par la grisaille de Le Sueur située sous le grand escalier. Les voitures auraient accès par un pan de mur basculant. Mais l’enceinte, qui doit être réparée, restera la même. Il n’a jamais été question de la rehausser. Les documents en attestent, il n’a jamais non plus été envisagé d’installer la climatisation, ni de créer des dizaines de salles de bains (il y en a déjà une quinzaine et huit cuisines, ce qui suffit bien) ou quatre ascenseurs (il y a en déjà trois, dans l’aile gauche).
La mairie de Paris elle-même reconnaît la qualité de la restauration des décors. Elle se défend d’un mauvais procès : «En aucun cas, nous ne sommes les adversaires de la restauration», dit l’adjointe au patrimoine Colombe Brossel. Et même «la municipalité se félicite de voir des propriétaires privés habiter et faire revivre ces lieux de mémoire». La ministre de la Culture Christine Albanel ne s’était pas privée de dénoncer «les arrière-pensées politiques» prêtées à Bertrand Delanoë. «Il était dans son rôle, qui est celui de lancer une alerte», réplique son adjointe. Il s’est fondé sur l’avis de la commission du Vieux Paris, qui compte des experts indépendants en son sein. En réalité, il n’a aucun pouvoir de bloquer le chantier. Mais il se félicite des «corrections apportées au projet», qui justifient son intervention.
L’architecte se dit ouvert à toutes les recommandations : «Nous voulons faire au mieux, et nous pouvons encore mieux faire.» Il multiplie les détails rassurants. Les gainages passeront par les sols ou les conduits anciens percés dans les cloisons pour les calorifères. «Il n’est ni prévu, ni souhaité, de déposer les lambris.» Didier Rykner, éditorialiste généralement polémiste de la Tribune de l’art, en a conclu que l’hôtel n’était «pas menacé pour l’essentiel». Vice-président de l’association de protection du patrimoine Momus, ayant lui-même été invité à une visite technique, Alexandre Gady explique: «Nous avons été suffisamment échaudés par de récents scandales ; en dépit des assurances données par la ministre, les défenseurs du patrimoine restent vigilants.» Une certaine méfiance est reportée sur Perrot, architecte en chef qui a en charge le Grand Palais, l’Opéra Garnier ou le théâtre de l’Odéon, auquel les puristes reprochent de ne pas toujours montrer suffisamment de respect de l’ancien. Son passage à l’ancien siège d’IBM, place Vendôme, il y a une quinzaine d’années, pour le sultan de Brunei, a été discuté, notamment la transformation malheureuse des fenêtres, qui ont tué toute vie sur la façade. L’intéressé reconnaît : «Le client demandait des vitres blindées. Il n’en est pas question à l’hôtel Lambert. Et aujourd’hui, nous agirions sans doute différemment.» Les fenêtres, aujourd’hui disparates, devraient être harmonisées en petits carreaux de verre fondu à l’ancienne.
Autre point de dispute, le choix du retour à l’Ancien Régime, en passant par-dessus le XIXe. Il est ainsi prévu de déposer, dans l’aile droite, un escalier massif et des vitraux néo-gothiques, assez moches, mais aussi des solives de Viollet-le-Duc, afin de percer une cage d’ascenseur de ce côté de l’hôtel. C’est, d’après l’architecte, la seule requête spécifique du propriétaire. Elle est certes discutable. Mais cette option fait ressortir un dilemme qui se retrouve dans toutes les restaurations, à Versailles par exemple: on ne sait jamais trop que faire de ce siècle, qui a mis tout son cœur à pasticher les périodes précédentes.
Quoi qu’il en soit, même après ce mauvais départ, nul ne regrettera une surveillance publique d’une restauration aussi emblématique.
VINCENT NOCE