[politique]La révolte des "indignés" en Espagne

Cassiel dit:Or, ces situations ne sont pas uniquement la résultante de simples contingences, mais bien révélatrices pour certaines d'un état de la pensée.

+1. J'ai eu un boss qui pestait contre le décret de féminisation des noms de fonctions (passé sous le socialo-communiste Jospinou Ier), jugeant que c'était débile, moche, et j'en passe, que le masculin générique pouvait très bien servir pour tout et que c'était comme ça depuis la nuit des temps, que l'on sombrait dans le politiquement correct, etc. Il l'a bouclé le jour où, un peu fatigués, on lui a fait remarquer qu'il n'avait jamais eu de mal à mentionner sa cuisinière.
El comandante dit:
Cassiel dit:Or, ces situations ne sont pas uniquement la résultante de simples contingences, mais bien révélatrices pour certaines d'un état de la pensée.

+1. J'ai eu un boss qui pestait contre le décret de féminisation des noms de fonctions (passé sous le socialo-communiste Jospinou Ier), jugeant que c'était débile, moche, et j'en passe, que le masculin générique pouvait très bien servir pour tout et que c'était comme ça depuis la nuit des temps, que l'on sombrait dans le politiquement correct, etc. Il l'a bouclé le jour où, un peu fatigués, on lui a fait remarquer qu'il n'avait jamais eu de mal à mentionner sa cuisinière.


Je ne comprends pas le rapport avec le décret, dans la mesure où cuisinier/cuisinière existaient avant celui-ci. Peux-tu m'éclairer sur ce point? (Je ne cherche pas la polémique, mais vraiment à comprendre)

++

Peut-être ouvrir un autre sujet pour ce hors-sujet, non ?

La question ne m’est pas destinée et je m’avance assurément un peu trop.

Je conçois principalement deux dimensions :

- Celle qui ressort des connotations sexuelles :

J’ai cité l’exemple de la Salope et du Salop.

Prenons une autre situation : les expressions homme à femmes, être un Don Juan, un Casanova, un tombeur, etc… renvoient à l’expression d’un pouvoir enviable et encouragé. A contrario, pour les femmes, la frontière est ténue avec l’expression d’un pouvoir pernicieux, car naturel (et donc véniel, tant qu’il s’applique à demeurer raisonnable).
Je connais la femme fatale, mais pas l’homme fatal :D.

- La reconnaissance sociale :

Notamment dans l’univers du travail. On désignera plus facilement le gardien et la concierge. On aura la femme de ménage, l’hôtesse, et l’infirmière. La secrétaire ne renvoie pas du tout au même imaginaire que le secrétaire. J’en passe et des meilleurs.



La féminisation dans le vocabulaire pourrait servir d’électrochoc, et faire prendre conscience de ces représentations plus ou moins conscientes.

A titre personnel, je ne pense pas que renvoyer au sexe de la personne (alors que l’on prône que la femme est un homme comme les autres, et réciproquement - aux différences morphologiques près) soit une idée géniale… C’est s’attaquer à la forme, en fermant les yeux sur des facteurs culturels profonds.

Akhela dit:Pour la Grèce, c'est beaucoup plus simple : tous les grecques sont coupables de ce qui leur arrive. La corruption est généralisée, la fraude fiscale aussi et leur classe politique est aussi corrompue voir plus que leurs fonctionnaires et en plus ils ont cachés la situation et n'ont jamais géré correctement le pays. Ils paient 40 ans de fraudes massives et généralisées.

Tu te rends compte de ce que tu avances ?
On dirait du Apathie dans le texte. Au passage, :arrow: une réponse qui lui sied.
Cet archétype qui est capable deux ans après d'évoquer l'existence du sketch préalable pour insinuer du "il n'y a pas de fumée sans feu".
Pour rappel, exactement sur le même modèle, et ce n'est pas moi qui l'ait avancé mais Maldoror. On est passé du :
Pour en revenir à la grèce, quand on pense que fut une époque, c'était "byzance"...
Ah les facécies de l'histoire...

au
Akhela dit:La corruption est généralisée, la fraude fiscale aussi et leur classe politique est aussi corrompue voir plus que leurs fonctionnaires et en plus ils ont cachés la situation et n'ont jamais géré correctement le pays.

C'est marrant, j'aurais plutôt dis : ah les facéties des clowns médiatiques.
Aucune honte, aucun amour de Soi. Pour un pseudo-journaliste, c'est d'une bassesse innommable.
---
Maldoror, merci de ne pas me faire dire que je te prendrais pour un con. J'ai écris que je doutais de ton honnêteté intellectuelle ; ceci est très différent.
Maldoror dit:Ca n'est pas s'appeler nostradamus de rappeler que le fond de commerce de ce mouvement en France (qui existe à peine pour le moment comme tu le rappelles par ailleurs), comme pour une majorité des mouvements sociaux de ces dernières années, c'est la défense de son pouvoir d'achat, soit pour le dire plus clairement: on veut plus de pognon, nous. Parfois, les nous sont ceux qui en ont vraiment besoin, mais le plus souvent, ce sont juste des corporations plutôt bien loties. Il y a des tas de gens au RSA qui auraient bien raison de s’indigner en France, malheureusement ils ont moins de visibilité dans les médias que les 2000 adhérents du NPA.


Je ne suis pas d'accord avec ta grille de lecture de l'égoïsme. Ces mouvements dénotent au contraire d'un retour de bâton du vivre ensemble.

Lorsque j'écris que nous chantons le refrain "qui veut devenir plus riche que riche ?", je reconnais que notre société s'est profondément reposé sur un égoïsme "institué" et en arrive, fort logiquement, à se poser la question du vivre ensemble.

Ce n'est pas moi qui ait fait référence à Hobbes et implicitement à la notion d'état de nature. Or, le contrat social actuel n'irait _ selon les protestataires participant à ces mouvements _ pas dans de le sens de l'intérêt général. Il me parait donc difficile de prétendre que le fond de commerce serait l'individualisme forcené (au sens moderne).

Et là où je vois la malhonnêteté en œuvre, c'est lorsque tu en appelles à l'existence de cet égoïsme "institué" pour faire un appel du pied aux ressentiments (et donc à cet égoïsme de nature que tu prétends critiquer)... alors que franchement, la visibilité médiatique d'un facteur et du chiffon rouge des extrémistes, c'est foncièrement peanuts. Tu en es au td d'application "diviser pour mieux régner sur un forum" :D ?

Quant à dire ce qui est en voie d'en ressortir politiquement, je m'en suis bien gardé... contrairement à toi et Akhela.
Cassiel dit:
Akhela dit:Pour la Grèce, c'est beaucoup plus simple : tous les grecques sont coupables de ce qui leur arrive. La corruption est généralisée, la fraude fiscale aussi et leur classe politique est aussi corrompue voir plus que leurs fonctionnaires et en plus ils ont cachés la situation et n'ont jamais géré correctement le pays. Ils paient 40 ans de fraudes massives et généralisées.

Tu te rends compte de ce que tu avances ?
On dirait du Apathie dans le texte. Au passage, :arrow: une réponse qui lui sied.
Cet archétype qui est capable deux ans après d'évoquer l'existence du sketch préalable pour insinuer du "il n'y a pas de fumée sans feu".
Pour rappel, exactement sur le même modèle, et ce n'est pas moi qui l'ait avancé mais Maldoror. On est passé du :
Pour en revenir à la grèce, quand on pense que fut une époque, c'était "byzance"...
Ah les facécies de l'histoire...

au
Akhela dit:La corruption est généralisée, la fraude fiscale aussi et leur classe politique est aussi corrompue voir plus que leurs fonctionnaires et en plus ils ont cachés la situation et n'ont jamais géré correctement le pays.

C'est marrant, j'aurais plutôt dis : ah les facéties des clowns médiatiques.
Aucune honte, aucun amour de Soi. Pour un pseudo-journaliste, c'est d'une bassesse innommable.
---
Maldoror, merci de ne pas me faire dire que je te prendrais pour un con. J'ai écris que je doutais de ton honnêteté intellectuelle ; ceci est très différent.
Maldoror dit:Ca n'est pas s'appeler nostradamus de rappeler que le fond de commerce de ce mouvement en France (qui existe à peine pour le moment comme tu le rappelles par ailleurs), comme pour une majorité des mouvements sociaux de ces dernières années, c'est la défense de son pouvoir d'achat, soit pour le dire plus clairement: on veut plus de pognon, nous. Parfois, les nous sont ceux qui en ont vraiment besoin, mais le plus souvent, ce sont juste des corporations plutôt bien loties. Il y a des tas de gens au RSA qui auraient bien raison de s’indigner en France, malheureusement ils ont moins de visibilité dans les médias que les 2000 adhérents du NPA.

Je ne suis pas d'accord avec ta grille de lecture de l'égoïsme. Ces mouvements dénotent au contraire d'un retour de bâton du vivre ensemble.
Lorsque j'écris que nous chantons le refrain "qui veut devenir plus riche que riche ?", je reconnais que notre société s'est profondément reposé sur un égoïsme "institué" et en arrive, fort logiquement, à se poser la question du vivre ensemble.
Ce n'est pas moi qui ait fait référence à Hobbes et implicitement à la notion d'état de nature. Or, le contrat social actuel n'irait _ selon les protestataires participant à ces mouvements _ pas dans de le sens de l'intérêt général. Il me parait donc difficile de prétendre que le fond de commerce serait l'individualisme forcené (au sens moderne).
Et là où je vois la malhonnêteté en œuvre, c'est lorsque tu en appelles à l'existence de cet égoïsme "institué" pour faire un appel du pied aux ressentiments (et donc à cet égoïsme de nature que tu prétends critiquer)... alors que franchement, la visibilité médiatique d'un facteur et du chiffon rouge des extrémistes, c'est foncièrement peanuts. Tu en es au td d'application "diviser pour mieux régner sur un forum" :D ?
Quant à dire ce qui est en voie d'en ressortir politiquement, je m'en suis bien gardé... contrairement à toi et Akhela.


:pouiclove:
Cassiel dit:
Akhela dit:Pour la Grèce, c'est beaucoup plus simple : tous les grecques sont coupables de ce qui leur arrive. La corruption est généralisée, la fraude fiscale aussi et leur classe politique est aussi corrompue voir plus que leurs fonctionnaires et en plus ils ont cachés la situation et n'ont jamais géré correctement le pays. Ils paient 40 ans de fraudes massives et généralisées.

Tu te rends compte de ce que tu avances ?
On dirait du Apathie dans le texte. Au passage, :arrow: une réponse qui lui sied.
Cet archétype qui est capable deux ans après d'évoquer l'existence du sketch préalable pour insinuer du "il n'y a pas de fumée sans feu".
Pour rappel, exactement sur le même modèle, et ce n'est pas moi qui l'ait avancé mais Maldoror. On est passé du :
Pour en revenir à la grèce, quand on pense que fut une époque, c'était "byzance"...
Ah les facécies de l'histoire...

au
Akhela dit:La corruption est généralisée, la fraude fiscale aussi et leur classe politique est aussi corrompue voir plus que leurs fonctionnaires et en plus ils ont cachés la situation et n'ont jamais géré correctement le pays.

C'est marrant, j'aurais plutôt dis : ah les facéties des clowns médiatiques.
Aucune honte, aucun amour de Soi. Pour un pseudo-journaliste, c'est d'une bassesse innommable.


et bien toi tes références c'est Apathie, moi c'est un journaliste spécialisé sur l'UE mais qui connait bien la Grèce et qui est allé sur place :

http://bruxelles.blogs.liberation.fr/co ... tages.html
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/co ... iscal.html
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/co ... plein.html
http://bruxelles.blogs.liberation.fr/co ... ption.html

et j'ai pas retrouvé l'article sur les piscines (les grecques ont un impôt sur les piscine, seuls 500 étaient déclarées à Athènes jusqu'à ce que l'administration utilise ... google earth). Oui ils ont fraudé, oui les grecques savaient pour la corruption et n'ont rien fait : si tu ne t'occupes pas de la politique, elle ne t'oublie pas. La démocratie c'est le contrôle des représentants par les électeurs. Quand en pleine crise tu double ta TVA collectée, c'est que la fraude avant la crise était généralisée, pas seulement aux plus riches, mais à tous les niveaux.
Oui je pense qu'il faut que l'UE (en fait les états membres) aident la Grèce . Pour autant, je ne vais pas pleurer sur les conséquences en terme de rigueur économique pour les grecques : d'abord parce qu'il faut assumer les conséquences de ses actes et ensuite parce que je pense que beaucoup de pays vont devoir en arriver là (en moins violent, mais violent quand même) dont la France.
Ce qui arrive à l'Espagne est différent : pour ce que j'ai lu dans la presse, pas de fraude massive (de la fraude, il y en a partout, c'est quand elle est massive et généralisée qu'il y a un problème de responsabilité collective), pas de déficit budgétaire monstrueux avant crise, pas de tricherie sur la dette.
akhela dit: j'ai pas retrouvé l'article sur les piscines (les grecques ont un impôt sur les piscine, seuls 500 étaient déclarées à Athènes jusqu'à ce que l'administration utilise ... google earth).

http://www.liberation.fr/economie/01016 ... tre-un-con
Ainsi, le fisc vient d’utiliser Google Earth pour compter les piscines dans le nord huppé de la capitale (Kefalari, Kastri, etc.). Le chiffre final ? 16 974. Le nombre de bassins déclarés ? 324…

Maldoror, tu as fort à propos changé de ton au fil du topic (et je t’en remercie) mais y’a qd même 2-3 points qui me font réagir.

Maldoror dit:Vouloir la croissance, c’est baser sa vision du monde vers l’avenir. La décroissance est une idéologie mortifère de retour en arrière. Mais c’est à la mode chez pas mal de nouveaux riches qui se sont rendu compte qu’ils n’avaient pas besoin du dernier gadget de chez apple.

Penses-tu vraiment qu’il n’y a rien de possible qui soit entre “la société de croissance” et la “décroissance” ?
Perso je ne suis pas un ambitieux, je ne suis pas du tout pour la société des requins qui est forcément le pendant de la croissance à tout prix et pourtant je suis le 1er à moquer de ceux qui vont s’enterrer au sommet d’une montagne en coupant l’électricité et tout lien avec l’extérieur. Ca m’étonnerait fort, même s’ils sont bienveillants à leur égard, que les “nouveaux riches” comme tu les appelles, soient prêts à rejoindre les décroissants.
Après c’est peut-être moi qui ait une image trop extrême des décroissants. Parce que si être décroissants c’est juste ne pas se jeter sur “le dernier gadget de chez apple” alors j’en suis aussi.

Maldoror dit:
akhela dit:
Pour en revenir au sujet, je serai curieux de connaître les éléments à charge qui t’autorisent à avancer ceci :
akhela dit:j’ai comme l’impression qu’ils demandent à bénéficier de la même gabegie que nos parents.

C’est une blague?
Non parceque pour fréquenter majoritairement des moins de trente ans de divers milieux, c’est un constat d’une telle évidence que demander à le démontrer, c’est comme demander à un mathématicien que les trois angles d’un triangle équilatéral sont égaux.
Tu penses qu’ils veulent quoi, toi? Moins de boulot, de moins bons salaires, moins de pouvoir d’achat, être locataires à vie?
A ton avis pourquoi Melenchon est à 3% d’intention de voter et MLP à 20? Parceque les gens, et les jeunes notamment, veulent consommer moins, écolo, veulent moins de sécurité?
Rétablis les conditions de vie économique des trente glorieuses et tu verras ce mouvement disparaître. Tu as vraiment besoin qu’on te le prouve?

Comment répondre autrement que par non :lol:
Evidemment que les gens ne seraient pas contre, comment pourrait-il en être autrement ? :lol:
Le truc c’est juste que perso, et je vois le mouvement Espagnol dans la même veine, je ne veux pas être arrosé de subventions ou que le gouvernement baisse les taxes pour augmenter artificiellement les salaires, je m’indigne juste du fait que les bénéfices des entreprises vont de plus en plus au capital et non au “travail”. Même si je ne suis pas pour la décroissance, que feraient-ils tous ces puissants sans la base ? Que savent-ils faire de leurs mains ? Ils ne sont rien sans nous et ce serait bien qu’ils s’en rappellent au moment de partager le gâteau.
Je sais bien que ça ressemble à un gros discours de gaucho mais je m’en fous, je veux pas qu’on partage 100% du gâteau, juste qu’on arrête de nous dire que nos boites vont couler si on augmente les salaires en jouant sur la peur du chômage alors les revenus des patrons sont astronomiques. C’est tout … et pourtant ça semble presque inimaginable à l’heure actuelle :roll:

tupak amaru dit:Oui nous sommes d’accord tu as raison, mais laisse moi le droit de m’emballer car je suis content que de tels mouvements existent dans lesquels je me reconnais, je n’ai pas lancé le thread, j’aime la prospective et en discuter avec d’autres… Nous ne sommes que sur un forum, la portée de mes commentaires plus que relative, alors si j’ai envie de savoir si je ne suis pas le seul à espérer que cela marche pourquoi pas?

+1, moi aussi j’espère même si je suis assez pessimiste.
Les grandes grèves de l’année dernière m’ont rassuré sur la capacité des mobilisation de l’opinion en France mais j’ai une énorme crainte : que ces gens ne cherchent qu’à conserver leurs avantages en assurant un statu quo, sans vraiment vouloir changer les choses.

VictorVVV dit:
http://www.liberation.fr/economie/01016 … tre-un-con
Ainsi, le fisc vient d’utiliser Google Earth pour compter les piscines dans le nord huppé de la capitale (Kefalari, Kastri, etc.). Le chiffre final ? 16 974. Le nombre de bassins déclarés ? 324…


J’ai un pote qui connait bien la Grêce …
Les maisons y sont tjrs en travaux puisque … les Grecques ne paient des impôts fonciers que lorsque leur maison est terminée. Il est donc facile de s’arranger pour que ce ne soit jamais le cas (ainsi on ne paie jamais l’impôt :roll: ). Quand on ajoute l’histoire des piscines ça fait un lourd passif.
Après l’histoire des impôts fonciers a sans doute changé depuis la crise mais ça a duré un moment.

La fraude fiscale est sans doute un sport national en France mais j’ai bien l’impression qu’on jouait pas dans la même division :lol:

Maldoror dit:Sinon, des nouvelles de la révolution grenobloise ? J’attends avec une certaine fébrilité de nouvelle photos !



http://www.larousse.fr/encyclopedie/ehm ... les/180648

Comme quoi faut pas trop titiller les grenoblois sur les questions de révolution, ça peut mal finir. :mrgreen:
Maldoror dit:J’attends avec une certaine fébrilité de nouvelles photos !


Là faut reconnaitre qu'on dépasse la mauvaise fois pour le coup :lol:
De "nouvelles" photos on t'a dit :lol:
Cowboy Georges dit:
Maldoror dit:J’attends avec une certaine fébrilité de nouvelles photos !

Là faut reconnaitre qu'on dépasse la mauvaise fois pour le coup :lol:
De "nouvelles" photos on t'a dit :lol:

Ce n'est pas de la mauvaise foi.
La photo est nouvelle.
C'est le tableau qui est vieux.
:mrgreen:
Cowboy Georges dit:
Penses-tu vraiment qu'il n'y a rien de possible qui soit entre "la société de croissance" et la "décroissance" ?

Entre la décroissance et la croissance, il existe quelque chose qu'on appelle la stagnation. C'est ce que nous vivons en ce moment.

Cowboy Georges dit: je m'indigne juste du fait que les bénéfices des entreprises vont de plus en plus au capital et non au "travail". Même si je ne suis pas pour la décroissance, que feraient-ils tous ces puissants sans la base ? Que savent-ils faire de leurs mains ? Ils ne sont rien sans nous et ce serait bien qu'ils s'en rappellent au moment de partager le gâteau.

+1, mais je pense que tout le monde ou presque est d'accord avec ça.
Cowboy Georges dit:
Je sais bien que ça ressemble à un gros discours de gaucho

Mais non mais non, ne sois pas si dur avec toi même. Quand bien même d'ailleurs tu serais un gaucho, tu en as parfaitement le droit, la liberté d'opinion politique étant un droit garanti par la déclaration des droits de l'homme, n'en déplaise à certains. :D
Cowboy Georges dit:
mais je m'en fous, je veux pas qu'on partage 100% du gâteau, juste qu'on arrête de nous dire que nos boites vont couler si on augmente les salaires en jouant sur la peur du chômage alors les revenus des patrons sont astronomiques. C'est tout ... et pourtant ça semble presque inimaginable à l'heure actuelle :roll:


Inimaginable en effet, et pour cause, aucun des candidats ne mettant sérieusement en cause la répartition pour le moins injuste des richesses considérables que nos sociétés industrielles produisent n'a la moindre chance de gagner la présidentielle.
C'est un des paradoxes que je répète souvent entre deux trois propos outranciers (il faut lire le fond parfois, même si j'aime bien titiller pour forcer le débat quand il s'enfonce dans les grandes platitudes "gimauviennes"); tout le monde est conscient de ce que tu dénonces, tout le monde râle, mais au moment d'aller voter, ce sont toujours les mêmes qui sont réélus et qui, même du côté socialiste, ne feront RIEN pour changer les choses, car cela demanderait une "révolution", véritablement.

Maldo
akhela dit:et bien toi tes références c'est Apathie, moi c'est un journaliste spécialisé sur l'UE mais qui connait bien la Grèce et qui est allé sur place

Non, mes références sont plutôt à chercher du côté de Hobbes, Locke & Cie.
Tu m'excuseras de ne pas reproduire les schémas mentaux du Quatremer, journaliste (effectivement) engagé idéologiquement (si, si). C'est un peu comme si tu me proposais d'écouter du Mermet pour me rapporter un fait objectif, et que tu m'imposais sa grille de lecture avec.
Or, tu as bien écrit :
Pour la Grèce, c'est beaucoup plus simple : tous les grecques sont coupables de ce qui leur arrive. La corruption est généralisée, la fraude fiscale aussi et leur classe politique est aussi corrompue voir plus que leurs fonctionnaires et en plus ils ont cachés la situation et n'ont jamais géré correctement le pays. Ils paient 40 ans de fraudes massives et généralisées.


Ce n'est pas des faits dont il est question (je t'aide, j'ai mis en couleur ce qui me fait te poser la question : "Tu te rends compte de ce que tu avances ?").

Libre à toi de tenir un tel discours, faisant abstraction du fonctionnement des structures politiques, notamment de la question des responsabilités engagées (on est aussi concerné au fait, à travers les choix politiques et économiques de nos représentants dans le cadre de l'Union Européenne relativement à la Grèce, toujours considéré comme un "bon élève" (sic) si ce n'est mieux), crachant sur le principe fondateur de souveraineté, et surtout son modus operandi.

Lorsque je disais qu'en période d'instabilité politique, la pensée de la classe dominante n'arrive pas à comprendre les enjeux réels de ce qui arrive (crise du moralisme et de la démocratie) comme obnubilé par son carcan mental, je ne pensais pas que c'était si criant.

N.B. :
- On pourrait aussi parler de l'Islande, non ?
- Je suis impatient de connaître le discours dominant en exercice une fois que nous serons plus directement concernés.

le truc pénible qu’on a bien compris, c’est que quand ils parlent de la Grèce, il y a le sous-entendu : “et ça pourrait vous arrivez à vous aussi ce genre de crise sales fainéants de français si vous acceptez pas nos beaux ajustements structurels” ; c’était très audible dans les propos récents de michel godet face à mélenchon. ils disent “grecs”, mais ils pensent “français”, on est des demi-PIGS pour les gens qui alignent leur vision du monde sur celle des financiers anglo-saxons. ce sont des menaces et des insultes à peine voilées, ça devient pénible…

Cassiel dit:


Je parle de fait (la corruption et la fraude généralisée depuis au moins la chute des Colonels) et tu me parles de philosophes du 17ème. Tu confonds faits et idées : Quatremer a des idées que je partage effectivement pour un certain nombre, mais là en l'espèce, il s'agit de faits.
Et oui, à ce niveau les grecques sont responsables. Responsables d'avoir accepté la corruption (pas seulement de leurs politiques, mais de leurs fonctionnaires aussi), d'avoir fraudé massivement. Nous partageons une de leur faute : celle d'avoir trop dépensé (mais chez les grecques, il y a eu comme facteur aggravant le mensonge des politiques sur le montant de la dette).

Pour ce qui est de mon opinion sur le moment où ça va arriver chez nous : je suis conscient que je n'aurais vraisemblablement pas de retraite avant l'âge de 70 ans au moins, que je vais devoir essentiellement la financer moi-même, que mes avantages sociaux vont devoir sérieusement diminuer ... ça ne me fait pas plaisir, mais je vais payer les conneries de la génération de mes parents, je ne vais pas faire payer mes enfants.
akhela dit:ça ne me fait pas plaisir, mais je vais payer les conneries de la génération de mes parents, je ne vais pas faire payer mes enfants.


Ah, parce que tu penses que tes enfants n'auront plus à payer ? Je te trouve étrangement ultra-optimiste sur le sujet vu les autres opinions que tu exposes ici.

Tout le monde s'accorde à dire à chaque réforme de la retraite qu'elle n'est pas suffisante et qu'il faudra en refaire une dans les 4 ans (et encore ça c'est juste pour les retraites, on parle pas des déficits publiques) et tu penses que repousser l'âge de la retraite à 70ans va régler tous les pb d'ici 20ans ? (au max, si tu veux pas que tes enfants paient)

Y'a pas qq'un qui parlait de bisounours plus tôt dans le topic ? :lol:

Je ne sais ce qui doit le plus me sidérer : la pensée qu’une société serait purement hétéronome ou que l’humain n’existe pas pour lui-même.

Je rejoins une des idées soutenues par E.Todd dans Après la démocratie : la logique libérale en place est incompatible avec des principes démocratiques, car le nombre de contradictions internes va croissant.

Au moins, on aura fait un petit tour et compris les logiques et intérêts en jeu. Le “tous coupable” prononcé par un juriste, l’indéfini des responsabilités engagées renvoyant tout le monde dos à dos, et place à l’austérité pour (espérer) retrouver les bases d’un libéralisme stable _ car c’est l’objectif poursuivi.

N.B. : Aucun problème. Je peux aussi endosser mon manteau de cynique : “J’appartiens à un milieu favorisé. Faisons tous vache maigre, le temps que les risques d’instabilité soient régulés”.

Sur la crise actuelle, un débat entre deux philosophes très intéressant, publié dans le Monde (une fois n’est pas coutume).

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Débat › Comment sortir de la crise de la civilisation occidentale ?
Le face-à-face Peter Sloterdijk Slavoj Zizek
Des idées-force pour éviter les impasses de la globalisation
LEMONDE | 27.05.11 | 12h19 • Mis à jour le 02.06.11 | 09h00

Pour la première fois depuis 1945, l’idée d’avenir est en crise en Europe. Et l’Occident peine à croire au progrès, à l’image de ces nouvelles générations qui n’imaginent plus qu’elles vivront mieux que celles de leurs aînés. Désaffection politique, crise économique ou crispation identitaire : comment caractériser le moment que nous traversons ? Et peut-on, selon vous, parler d’une crise de civilisation

Peter Sloterdijk : Que voulons-nous dire, lorsque nous employons le terme de “civilisation occidentale”, dans laquelle nous vivons depuis le XVIIe siècle ? A mon avis, nous parlons d’une forme de monde créé sur l’idée de la sortie de l’ère du passéisme. La primauté du passé a été rompue ; l’humanité occidentale a inventé une forme de vie inouïe fondée par l’anticipation de l’avenir. Cela signifie que nous vivons dans un monde qui se “futurise” de plus en plus. Je crois donc que le sens profond de notre “être-dans-le-monde” réside dans le futurisme, qu’il est le trait fondamental de notre façon d’exister.

La primauté de l’avenir date de l’époque où l’Occident a inventé ce nouvel art de faire des promesses, à partir de la Renaissance, au moment où le crédit est entré dans la vie des Européens. Pendant l’Antiquité et le Moyen Age, le crédit ne jouait presque aucun rôle parce qu’il était entre les mains des usuriers, condamnés par l’Eglise. Tandis que le crédit moderne, lui, ouvre un avenir. Pour la première fois, les promesses de remboursements peuvent être remplies ou tenues. La crise de civilisation réside en ceci: nous sommes entrés dans une époque où la capacité du crédit d’ouvrir un avenir tenable est de plus en plus bloquée, parce qu’aujourd’hui on prend des crédits pour rembourser d’autres crédits.

Autrement dit, le “créditisme” est entré dans une crise finale. On a accumulé tant de dettes que la promesse du remboursement sur laquelle repose le sérieux de notre construction du monde ne peut pas être tenue. Demandez à un Américain comment il envisage le remboursement des dettes accumulées par le gouvernement fédéral. Sa réponse sera surement: “personne ne le sait”, et je crois que ce non-savoir est le noyau dur de notre crise.

Personne sur cette Terre ne sait comment rembourser la dette collective. L’avenir de notre civilisation se heurte à un mur de dettes.

Slavoj Zizek : J’adhère pleinement à cette idée d’une crise du “futurisme” et de la logique de crédit. Mais prenons la crise économique dite des subprimes de 2008: tout le monde sait qu’il est impossible de rembourser ces crédits hypothécaires, mais chacun se comporte comme s’il en était capable. J’appelle cela, dans mon jargon psychanalytique, un désaveu fétichiste: “Je sais bien que c’est impossible, mais quand même, je vais essayer…” On sait très bien qu’on ne peut pas le faire, mais on agit en pratique comme si on pouvait le faire. Cependant, j’emploierais le terme “futur” pour désigner ce que Peter Sloterdijk appelle le “créditisme”. Le terme “avenir”, d’ailleurs, me semble plus ouvert. La formule “no future” est pessimiste mais le mot “avenir” est plus optimisme. Et je ne cherche pas, ici, à relancer le communisme de Marx qui s’apparente, en effet, à un créditisme démesuré.

Afin de caractériser notre situation, économique et politique, idéologique et spirituelle, je ne peux que rappeler une histoire probablement apocryphe. Il s’agit d’un échange de télégrammes entre les états-majors allemand et autrichien pendant la Grande Guerre. Les Allemands avaient envoyé un télégramme aux Autrichiens en leur disant: “Chez nous, la situation sur le front est sérieuse mais pas catastrophique”, et les Autrichiens avaient répondu: “Chez nous la situation est catastrophique mais pas sérieuse” ! Et c’est cela le catastrophique: on ne peut pas payer ses dettes, mais, d’une certaine façon, on ne prend pas ça au sérieux. Outre ce mur de dettes, l’époque actuelle s’approche d’une sorte de “degré zéro”.

Premièrement, l’immense crise écologique nous impose de ne pas continuer dans cette voie politico-économique. Deuxièmement, le capitalisme, à l’image de la Chine, n’est désormais plus naturellement associé à la démocratie parlementaire. Troisièmement, la révolution biogénétique nous impose d’inventer une autre biopolitique. Quant aux divisions sociales mondiales, elles créent les conditions d’explosions et d’émeutes populaires sans précédent…

L’idée de collectif est également touchée par la crise. Comment, à l’heure de l’individualisme débridé, redonner sens au “commun”?

S. Z.: Même si nous devons rejeter le communautarisme naïf, l’homogénéisation des cultures, tout comme ce multiculturalisme qui est devenu l’idéologie du nouvel esprit du capitalisme, nous devons faire dialoguer les civilisations et les individus singuliers. Au niveau des particuliers, il faut une nouvelle logique de la discrétion, de la distance, voire de l’ignorance. Alors que la promiscuité est devenue totale, c’est une nécessité vitale, un point crucial.

Au niveau collectif, il faut en effet inventer une autre façon d’articuler le commun. Or le multiculturalisme est une fausse réponse au problème, d’une part parce qu’il est une sorte de racisme désavoué, qui respecte l’identité de l’autre mais l’enferme dans son particularisme. C’est une sorte de néocolonialisme qui, à l’inverse du colonialisme classique, “respecte” les communautés, mais du point de vue de sa posture d’universalité. D’autre part, la tolérance multiculturelle est un leurre qui dépolitise le débat public, renvoyant les questions sociales aux questions raciales, les questions économiques aux considérations ethniques.

Il y a aussi beaucoup d’angélisme dans cette posture de la gauche postmoderne. Ainsi le bouddhisme, par exemple, peut-il servir et légitimer un militarisme extrême: dans les années 1930-1940, l’établissement du bouddhisme zen n’a pas seulement soutenu la domination de l’impérialisme japonais mais l’a même légitimé. J’utilise volontiers le mot de “communisme”, car mes problèmes en réalité sont ceux des biens “communs”, comme la biogénétique et l’écologie.

P. S.: Il faut retrouver la véritable problématique de notre ère. Le souvenir du communisme et de cette grande expérience tragique de la politique du XXe siècle nous rappelle qu’il n’y a de solution idéologique dogmatique et automatique. Le problème du XXIe est celui de la coexistence au sein d’une “humanité” devenue une réalité physiquement. Il ne s’agit plus de “l’universalisme abstrait” des Lumières, mais de l’universalité réelle d’un collectif monstrueux qui commence à être une communauté de circulation réelle avec des chances de rencontres permanentes et des chances de collisions élargies.

Nous sommes devenus comme des particules dans un gaz, sous pression. La question est désormais celle du lien social au sein d’une trop grande société; et je crois que l’héritage des prétendues religions est important, parce qu’elles sont les premières tentatives de synthèses méta-nationales et méta-ethniques.

Le sangha bouddhiste était un vaisseau spatial, où tous les déserteurs de toutes les ethnies pouvaient se réfugier. De la même manière, on pourrait décrire la chrétienté, sorte de synthèse sociale qui transcende la dynamique des ethnies fermées et les divisions des sociétés de classes. Le dialogue des religions à notre époque n’est rien d’autre que le reformatage du problème du “communisme”.

La réunion qui a eu lieu à Chicago en 1900, le congrès des religions mondiales, était une façon de poser la question de notre actualité à travers ces fragments, ces représentants de n’importe quelle provenance, les membres de la famille humaine qui s’étaient perdus de vue après l’exode africain… A l’âge du rassemblement, il faut poser et reformater tout ce qu’on a pensé jusqu’ici sur le lien de coexistence d’une humanité débordante. C’est pour cela que j’emploie le terme de “co-immunisme”.

Toutes les associations sociales de l’histoire sont en effet des structures de co-immunité. Le choix de ce concept rappelle l’héritage communiste. Dans mon analyse, le communisme remonte à Rousseau et à son idée de “religion de l’homme”. C’est un concept immanent, c’est un communautarisme à l’échelle globale. On ne peut pas échapper à la nouvelle situation mondiale. Dans mon livre, la déesse ou entité divine qui apparaît dans les dernières pages, c’est la crise: elle est la seule instance qui possède assez d’autorité pour nous pousser à changer notre vie. Notre point de départ est une évidence écrasante: on ne peut pas continuer comme ça.

S.Z.: Mon idée ne consiste pas tant à chercher un “co-immunisme” qu’à revivifier l’idée d’un véritable communisme. Mais rassurez-vous, il s’agit plutôt de celui de Kafka que celui de Staline, davantage celui de d’Erik Satie que celui de Lénine! En effet, dans son dernier récit, Joséphine la cantatrice ou le peuple des souris, dessine l’utopie d’une société égalitaire, un monde où les artistes, comme cette cantatrice Joséphine, dont le chant rassemble, subjugue et méduse les foules, et qui est célébrée sans pour autant obtenir d’avantages matériels.

Une société de reconnaissance qui maintient le rituel, revivifie les fêtes de la communauté, mais sans hiérarchie ni grégarité. Idem pour Erik Satie. Tout pourtant, semble éloigner de la politique le fameux auteur des Gymnopédies, qui déclarait composer une “musique d’ameublement”, une musique d’ambiance ou de fond. Et pourtant, il fut membre du Parti communiste. Mais loin d’écrire des chants de propagande, il donnait à écouter une sorte d’intimité collective, à l’exact opposée de la musique d’ascenseur. Et c’est cela mon idée du communisme.

Pour sortir de cette crise, Peter Sloterdijk, vous optez sur la réactivation des exercices spirituels individuels alors que vous, Slavoj Zizek, insistez sur les mobilisations politiques collectives ainsi sur la réactivation de la force émancipatrice du christianisme. Pourquoi de telles divergences ?

P.S.: Je propose d’introduire le pragmatisme dans l’étude des prétendues religions; cette dimension pragmatique vous oblige à regarder de plus près ce que font les religieux, à savoir des pratiques intérieures et extérieures, que l’on peut décrire comme des exercices qui forment une structure de personnalité. Ce que j’appelle le sujet principal de la philosophie et de la psychologie, c’est le porteur des séries d’exercices qui composent la personnalité. Et quelques-unes des séries d’exercices qui constituent la personnalité peuvent être décrites comme religieuses.

Mais qu’est-ce que ça veut dire ? On fait des mouvements mentaux pour communiquer avec un partenaire invisible, ce sont des choses absolument concrètes que l’on peut décrire, il n’y a rien de mystérieux en tout cela. Je crois que jusqu’à nouvel ordre, le terme “système d’exercices”, est mille fois plus opératoire que le terme de “religion” qui renvoie à la bigoterie d’Etat des Romains. Il ne faut pas oublier que l’utilisation des termes “religion”, “piété” ou “fidélité” était chez les Romains réservée aux épithètes que portaient les légions romaines stationnées dans la vallée du Rhin et partout ailleurs.

Le plus grand privilège d’une légion était de porter les épithètes pia fedilis, parce que cela exprimait une loyauté particulière à l’empereur à Rome. Je crois que les Européens ont tout simplement oublié ce que “religio” veut dire. Le mot, signifie littéralement “diligence”. Cicéron en a donné la bonne étymologie : lire, legere, religere, c’est-à-dire étudier attentivement le protocole pour régler la communication avec les êtres supérieurs. C’est donc une sorte de diligence, ou dans ma terminologie, un code d’entraînement. Pour cette raison je crois que “le retour du religieux” ne serait efficace que s’il pouvait conduire à des pratiques d’exercices intensifiés.

En revanche, nos “nouveaux religieux” ne sont que des rêveurs paresseux la plupart du temps. Mais au XXesiècle, le sport a pris le dessus dans la civilisation occidentale. Ce n’est pas la religion qui est revenue, c’est le sport qui est réapparu, après avoir été oublié pendant presque 1500 ans. Ce n’est pas le fidéisme, mais l’athlétisme qui a occupé le devant de la scène. Pierre de Coubertin voulait créer une religion du muscle au tournant du XXe siècle. Il a échoué comme fondateur d’une religion, mais il a triomphé comme créateur d’un nouveau système d’exercices.

S. Z. : Considérer la religion comme ensemble de pratiques corporelles, cela existait déjà chez les avant-gardes russes. Le réalisateur soviétique Sergueï Eisenstein (1898-1948) a écrit un très beau texte sur le jésuite Ignace de Loyola (1491-1556), pour qui il s’agissait d’oublier Dieu, sinon comme quelqu’un qui a mis en place certains exercices spirituels. Ma thèse du retour au christianisme est très paradoxale : je crois que ce n’est qu’à travers le christianisme que l’on peut véritablement se sentir vraiment athée.

Si vous considérez les grands athéismes du XXe siècle, il s’agit en réalité d’une tout autre logique, celle d’un “créditisme” théologique. Le physicien danois Niels Bohr (1885-1962), l’un des fondateurs de la mécanique quantique, a été visité par un ami dans sa datcha. Mais celui-ci hésitait à passer la porte de sa maison à cause d’un fer de cheval qui y était cloué – une superstition pour empêcher les mauvais esprits d’entrer. Et l’ami dit à Bohr : “Tu es un scientifique de premier rang, alors comment peux-tu croire à ses superstitions populaires?” “Je n’y crois pas !”, répondit Niels Bohr. “Mais pourquoi laisses-tu donc ce fer à cheval, alors”, insista l’ami. Et Niels Bohr eut cette très belle réponse: “Quelqu’un m’a dit que ça fonctionne, même si on n’y croit pas !” Ce serait une assez bonne image de notre idéologie actuelle.

Je crois que la mort du Christ sur la croix signifie la mort de Dieu, et qu’il n’est plus le Grand Autre qui tire les ficelles. La seule façon d’être croyant, après la mort du Christ, est de participer à des liens collectifs égalitaires. Le christianisme peut être entendu comme une religion d’accompagnement de l’ordre existant ou une religion qui dit “non” et aider à y résister. Je crois que le christianisme et le marxisme doivent combattre ensemble le déferlement des nouvelles spiritualités ainsi que la grégarité capitaliste. Je défends une religion sans Dieu, un communisme sans maître.

P. S. : Admettons que nous soyons dans la séance de clôture du concile du Nicée et que l’un des archevêques pose la question dans la réunion: faut-il mettre à l’index notre frère Slavoj Zizek ? Je crois que la grande majorité voterait l’anathème, car il commet ce que les anciens appelaient une “hérésie”. Slavoj Zizek assume une attitude sélective par rapport à la vérité entière : hérésie signifie sélection. Et la sélection dans ce cas précis, c’est d’omettre la suite de l’histoire biblique, qui parle de résurrection après la mort du Christ. Mais si l’on omet la résurrection, on oublie l’essentiel parce que le message du christianisme c’est que la mort ne nous menace plus. Le succès mondial du christianisme ne reposait pas seulement sur le message de l’amour universel mais surtout sur la neutralisation des menaces que faisait peser la mort sur chaque conscience. Sans omettre la phobocratie païenne : Tous les empires sont fondés sur le pouvoir de la peur. On peut raconter l’histoire comme Slavoj Zizek l’a fait, mais il faut ajouter une deuxième dimension libératrice : sans rupture avec la phobocratie, il n’y a pas de liberté, ni chrétienne ni athée. Sinon, on ne fait que changer de seigneur ; Jupiter ou le Christ, ça ne fait aucune différence tant que les deux divinités demeurent des puissances phobocrates.

Malheureusement, le christianisme est devenu la phobocratie la plus terrible de toute l’histoire des religions, surtout grâce à Augustin qui, avec sa théorie de la prédestination, a créé un véritable réacteur de peurs, que la philosophie des Lumières a heureusement interrompu. Même dans l’aventure communisme, la phobocratie chrétienne a persisté sous la forme du terrorisme d’Etat ! Et ce n’est pas terminé. La phobocratie musulmane n’est pas prêt de s’arrêter. Pour tous ceux qui cherchent une sortie de l’univers concentrationnaire des phobocraties classiques, il faut reconstruire la dimension émancipatrice d’un christianisme éclairé. Et j’accepte volontiers une reconstruction athée, à condition de mettre l’accent sur la suppression de l’élément phobocrate de l’ancien paganisme.

Le moment historique que nous traversons semble être marqué par la colère. Une indignation culmine dans le mot d’ordre “Dégage!” des révolutions arabes ou des protestations démocratiques espagnoles. Or, à y croire Slavoj Zizek, vous êtes trop sévère, Peter Sloterdijk, à l’égard des mouvements sociaux qui proviendrait selon vous du ressentiment.

P. S.: Il faut distinguer la colère et le ressentiment. A mon avis, il y a toute une gamme d’émotions qui appartiennent au régime du thymos, c’est-à-dire au régime de la fierté. Il existe une sorte de fierté primordiale, irréductible, qui est au plus profond de notre être. Sur cette gamme thymotique s’exprime la jovialité, contemplation bienveillante de tout ce qui existe. Ici, le champ psychique ne connaît pas de trouble. On descend un peu dans l’échelle des valeurs, c’est la fierté de soi.

On descend encore un peu, c’est la vexation de cette fierté qui provoque la colère. Si la colère ne peut pas s’exprimer, condamnée à attendre, pour s’exprimer plus tard et ailleurs, cela conduit au ressentiment, et ainsi de suite jusqu’à la haine destructrice qui veut anéantir l’objet d’où est sortie l’humiliation. N’oublions pas que la bonne colère, selon Aristote, c’est le sentiment qui accompagne le désir de justice. Une justice qui ne connaît pas la colère reste une velléité impuissante. Les courants socialistes du XIXe et XXe siècle ont créé des points de collecte de la colère collective, sans doute quelque chose de juste et d’important. Mais trop d’individus et trop d’organisations de la gauche traditionnelle ont glissé vers le ressentiment. D’où l’urgence à penser et imaginer une nouvelle gauche au-delà du ressentiment.

S.Z.: Ce qui satisfait la conscience dans le ressentiment, c’est plus de nuire à l’autre et de détruire l’obstacle que de profiter de moi-même. Nous slovènes, sommes comme ça par nature. Vous connaissez la légende où un ange apparaît à un paysan et lui demande: “Veux-tu que je te donne une vache? Mais attention, je vais aussi donner deux vaches à ton voisin !” Et le paysan slovène dit: “Bien sûr que non !” Mais pour moi, le ressentiment, ce n’est jamais vraiment l’attitude des pauvres. Plutôt l’attitude du pauvre maître, comme Nietzsche l’a très bien analysée. C’est la morale des “esclaves”.

Seulement, il s’est un peu trompé du point de vue social: ce n’est pas l’esclave véritable, c’est l’esclave qui, comme le Figaro de Beaumarchais, veut remplacer le maître. Dans le capitalisme, je crois qu’il y a une combinaison très spécifique entre l’aspect thymotique et l’aspect érotique. C’est-à-dire que l’érotisme capitaliste est médiatisé par rapport à un mauvais thymotisme, qui engendre le ressentiment. Je suis d’accord avec Peter Sloterdijk : au fond le plus compliqué c’est de savoir comment penser l’acte de donner, au-delà de l’échange, au-delà du ressentiment.

Je ne crois pas vraiment dans l’efficacité de ces exercices spirituels que propose Peter Sloterdijk. Je suis trop pessimiste, pour cela. A ces pratiques auto-disciplinaires, comme chez les sportifs, je veux y ajouter une hétérotopie sociale. C’est pourquoi j’ai écrit le chapitre final de Vivre la fin des temps où j’entrevois un espace utopique communiste, en me référant à ces œuvres qui donnent à voir et à entendre ce que l’on pourrait appeler une intimité collective. Je m’inspire aussi de ces films de science-fiction utopiques, où il y a des héros errants et des types névrosés rejetés qui forment de véritables collectivités. Des parcours individuels peuvent aussi nous guider.

Ainsi, on oublie souvent que Victor Kravtchenko (1905-1966), le dignitaire soviétique qui dénonça très tôt les horreurs du stalinisme dans J’ai choisi la liberté et qui fut ignoblement attaqué par les intellectuels pro-soviétiques, écrivit une suite, intitulée J’ai choisi la justice, alors qu’il luttait en Bolivie et organisait un système de production agraire plus équitable. Il faut suivre et encourager les nouveaux Kravtchenko qui émergent de partout aujourd’hui, de l’Amérique du Sud aux rivages de la Méditerranée.

P.S.: Je pense que vous êtes victime de l’évolution psycho-politique des pays de l’Est. En Russie, par exemple, chacun porte en soi un siècle entier de catastrophe politique et personnelle sur ses épaules. Les peuples de l’Est expriment cette tragédie du communisme et n’en sortent pas. Tout cela forme une espèce de boucle de désespoir autogène. Je suis pessimiste par nature, mais la vie a réfuté mon pessimisme originel. Je suis donc pour ainsi dire un apprenti-optimiste. Et là je pense que nous sommes assez proches l’un de l’autre parce que nous avons parcouru des biographies parallèles dans un certain sens à partir de points de départ radicalement différents, tout en lisant les mêmes livres.

Juste un mot sur l’affaire Dominique Strauss-Kahn. S’agit-il d’une simple affaire de mœurs ou bien du symptôme d’un malaise plus important?

P.S.: Indéniablement, il s’agit d’une affaire planétaire qui dépasse le simple fait divers. Dominique Strauss-Kahn est peut-être innocent. Mais cette histoire révèle que le pouvoir exorbitant détenu par un individu peut créer une sorte de religion des puissants que je qualifierais de panthéisme sexuel. Nous croyions en avoir terminé avec les rois soleil. Mais, curieusement, le XXIe siècle multiplie par dix mille ces hommes de pouvoir qui s’imaginent que tous les objets de leur désir peuvent être pénétrés par leur rayonnement.

S.Z.: Le seul aspect intéressant de l’affaire DSK, c’est la rumeur selon laquelle ses amis auraient approché la famille de la victime supposée en Guinée, offrant une somme exorbitante d’argent si Nafissatou Diallo retirait sa plainte. Si cela est vrai, quel dilemme ! Faut-il choisir la dignité ou l’argent qui peut sauver la vie d’une famille, en lui donnant la possibilité de vivre dans la prospérité ? C’est cela, qui résumerait la véritable perversion morale de notre temps.
Propos recueillis par Nicolas Truong
Article paru dans l’édition du 28.05.11

Cowboy Georges dit:
akhela dit:ça ne me fait pas plaisir, mais je vais payer les conneries de la génération de mes parents, je ne vais pas faire payer mes enfants.

Ah, parce que tu penses que tes enfants n'auront plus à payer ? Je te trouve étrangement ultra-optimiste sur le sujet vu les autres opinions que tu exposes ici.
Tout le monde s'accorde à dire à chaque réforme de la retraite qu'elle n'est pas suffisante et qu'il faudra en refaire une dans les 4 ans (et encore ça c'est juste pour les retraites, on parle pas des déficits publiques) et tu penses que repousser l'âge de la retraite à 70ans va régler tous les pb d'ici 20ans ? (au max, si tu veux pas que tes enfants paient)
Y'a pas qq'un qui parlait de bisounours plus tôt dans le topic ? :lol:


ça dépend si on prend les mesures drastiques rapidement (on en prend pas le chemin vu comme ça couine pour la retraite à 65 ans). Je ne suis pas le seul à décider puisqu'il s'agit d'un vote. Toutefois, je ne crois pas dans les programmes qui proposent de dépenser plus sans augmentations sérieuse des prélèvement (note, je suis d'accord avec certaines des propositions des manifestants espagnols postées par greuh, mais la plupart ne sont pas chiffrée en terme de ressource).
Cassiel dit:Je ne sais ce qui doit le plus me sidérer : la pensée qu'une société serait purement hétéronome ou que l'humain n'existe pas pour lui-même.
Je rejoins une des idées soutenues par E.Todd dans Après la démocratie : la logique libérale en place est incompatible avec des principes démocratiques, car le nombre de contradictions internes va croissant.
Au moins, on aura fait un petit tour et compris les logiques et intérêts en jeu. Le "tous coupable" prononcé par un juriste, l'indéfini des responsabilités engagées renvoyant tout le monde dos à dos, et place à l'austérité pour (espérer) retrouver les bases d'un libéralisme stable _ car c'est l'objectif poursuivi.
N.B. : Aucun problème. Je peux aussi endosser mon manteau de cynique : "J'appartiens à un milieu favorisé. Faisons tous vache maigre, le temps que les risques d'instabilité soient régulés".


Personnellement, je ne vois pas trop les contradictions du libéralisme avec la démocratie. Ce que je vois par contre c'est qu'à gauche du PS, il n'y a aucun parti démocratique en France.
Quant à ta dernière affirmation, c'est ton cynisme qui est cynique : dans toutes les révolutions, ce sont toujours les plus pauvres qui ont le plus souffert (sans parler des excès de ces révolutions).