Respect du thème dans un jeu, c'est quoi?

(zappé) par ton dernier message)
Oui, ou peut-être que le rigolo masque le thème ! Ça arrive.

Ou peut-être ce qu’il manque c’est une proposition active (ou interrogative) forte.
En dramaturgie “l’apogée et le déclin des civilisations” n’est pas un thème. Un thème doit être une affirmation forte et active.
Exemple “la guerre detruit l’homme” plutôt que “la guerre” (quoi la guerre ?) ou “la guerre c’est pas beau” (pas actif).
C’est peut-être une piste.

Laisse tomber le sondage, précise ta modélisation.
À mon avis les trois points sont :
1) Sujet
2) Contexte
3) Thème

Et là on se rend compte qu’on a rien inventé, mais tant mieux, on retombe sur du connu sauf que dans le jeu on n’en a pas encore trop conscience !

Est-ce qu’un terme moins ambigu pour le sens que tu donnes à “thème” ne pourrait pas être “le propos” ? Puisque j’ai bien peur que désormais le terme “thème” soit déjà totalement emprunt de son sens commun.
Ainsi, Abalone, est un jeu abstrait (sans" thème" au sens commun du terme, et non au sens que tu lui pretes) dont le propos est “on est plus fort ensemble et plus faible lorsque l’on se retrouve à l’extérieur du groupe” (cf Michel Lalet).

fred henry dit:Est-ce qu'un terme moins ambigu pour le sens que tu donnes à "thème" ne pourrait pas être "le propos" ? Puisque j'ai bien peur que désormais le terme "thème" soit déjà totalement emprunt de son sens commun.

C'est une très bonne suggestion !
En effet le terme consacré au cinéma, théâtre, littérature, tout ce qui raconte une histoire, est bien le thème.
Mais aujourd'hui "thème" à pris un autre sens dans le jeu, comme tu le dis. Il y a une autre raison c'est que le jeu ne raconte pas une histoire mais donne les moyens d'en raconter plein. Bonne raison pour se démarquer.

Le propos c'est bien.

Et pour conserver le terme de "thème" qui est très utilisé dans le jeu, on peut dire que le thème se décompose en trois aspects :
- le contexte
- le sujet
- le propos

Hou ça me plaît bien !

:pouicbravo:

Merci parce que je pensais pas du tout qu’on en arriverait là en créant ce sujet. ( J’avais un sujet mais pas de propos? :D )

ça demande un peu d’entraînement… Prenons des exemples de jeu et essayons de définir leur thème de cette manière pour voir… J’y réfléchis et je reviens

:oops: houla je me retrouve dans une signature !

Sans rire je pense qu’on a là un super outil, aussi bien pour l’analyse que pour le design.
Et c’est sûr que ça marche, ça marche bien au cinéma depuis très longtemps, y’a pas de raison que ça marche pas dans le jeu !

Depuis le temps que je tourne ça dans ma tête, j’arrivais pas à le concrétiser ! C’est cool les forums (des fois) :wink:

Bon comme tu dis maintenant au boulot, quelques exemples concrets sont toujours le bienvenu !
Avec une précaution : alors que le sujet et encore plus le contexte peuvent se voir superficiellement, le propos ne se voit qu’en jouant et certainement plusieurs fois.

Je vous garantis qu’on va découvrir pourquoi certains jeux nous parlent plus alors que d’autres peut-être plus aboutis mécaniquement nous laissent froids ! En tout cas pour moi c’est le cas !

Pour que la phrase soit autonome, je dirais maintenant :

Le thème d’un jeu se décompose en trois aspects : le contexte, le sujet et le propos.

Il faudrait que je rédige toutes les explications qui vont avec… Peut-être pendant ces vacances !

En tous cas je trouve le travail d’analyse/décorticage fort prometteur. J’adore les threads où l’on utilise une approche un peu plus macro sur les jeux.

Bon, comme j’y joue pas mal en ce moment (ce jeu m’obsède en fait!), je vais essayer avec la Gloire de Rome. Ouais je prends toujours des exemples pas évidents moi :

Sujet : La reconstruction d’une ville après un désastre.
Contexte : Rome après le grand incendie de 64 après J-C.
Propos : La reconstruction d’une ville peut attirer des individus égoïstes qui, sous couvert d’oeuvrer pour la ville, désirent simplement s’enrichir ou gagner en pouvoir.
Les joueurs choisissent les bâtiments à construire non pas en fonction des besoin de la ville mais en fonction de ce qu’ils peuvent leur apporter, voire ce qu’ils peuvent faire perdre à leurs adversaires.

C’est certainement un peu superficiel, mais jouer à ce jeu m’a fait penser à la série Treme, où des entrepreneurs malins débarquent à la Nouvelle Orléans juste après Katrina, voyant là une aubaine pour leurs affaires.

Autre contexte et autre média, même propos…

Il y a sûrement de meilleurs exemples!

viking dit:
Les joueurs choisissent les bâtiments à construire non pas en fonction des besoin de la ville mais en fonction de ce qu'ils peuvent leur apporter, voire ce qu'ils peuvent faire perdre à leurs adversaires.
Il y a sûrement de meilleurs exemples!

Je crois que tu nous propose là prototype du propos creux: c'est un jeu, chaque joueur va chercher à en utiliser les éléments au mieux. Si on tient compte de ça et que l'on réécrit ta phrase, ça donne:
C'est un jeu où l'on construit chacun des bâtiments.


(Pas mécontent de mon résumé de la gloire de Rome, moi…)
Le fait que les besoins de la ville ne sont pas (nécessairement) satisfaits n'est pas développé dans le jeu. Ça a aussi un côté rassurant, on peut avoir d'excellents jeux avec un propos tout à fait creux.

Je ne serais pas si catégorique : la reconstruction d’une ville aurait pu intégrer des éléments semi-coopératifs, ou intégrer la volonté du peuple comme une contrainte dans la construction ( à la manière d’un Sylla ).

Que ça soit volontaire ou pas, ce jeu a quand même une ambiance très cynique. Je pense que le choix du sujet (la REconstruction) et la manière dont jouent les joueurs sont en décalage de manière volontaire.
Pour moi c’est déjà un propos.

Je suis d’accord que ce n’est pas nécessairement le meilleur exemple en tous cas!
Mais je suis preneur d’autres tentatives :wink:

Le propos doit être concis et fort. Un paragraphe entier ne fait pas un bon propos.
Le propos type c’est une phrase simple et active. D’un autre côté “chacun construit des bâtiments” n’est pas un propos, c’est un sujet.
Un propos serait “le cynique s’en tire toujours”.
Bon c’est dans l’absolu, j’ai pas joué à Glory to Rome.
En tout cas votre échange met le doit sur un truc : j’ai l’impression que beaucoup de jeu ont un propos assez cynique…

Pour rebondir sur un truc : un propos creux (ou absent) ne fait pas un mauvais jeu… Certes, mais à mon avis, le même jeu avec un travail plus conséquent au niveau du propos en ferait un jeu encore meilleur.
Voir le cinéma par exemple.

Diplomacy :

Sujet : conflit armé entre nation
Contexte : Europe au début du xx ieme
Propos : un seul gagne, mais il doit s’allier pour y arriver.


Ça marche pas mal.

jmguiche dit:Diplomacy :
Sujet : conflit armé entre nation
Contexte : Europe au début du xx ieme
Propos : un seul gagne, mais il doit s'allier pour y arriver.

Ça marche pas mal.


ça me fait penser à Zombies, la blonde, la brute et le Truand, qui va encore plus loin :

Sujet : Des gens enfermés et menacés de mort.
Contexte : Une invasion de zombies dans un centre commercial.
Propos : Pour survivre il faut condamner ses semblables.

On parlait de cynisme dans les jeux?
galbolle dit:Je crois que tu nous propose là prototype du propos creux: c'est un jeu, chaque joueur va chercher à en utiliser les éléments au mieux. Si on tient compte de ça et que l'on réécrit ta phrase, ça donne:
C'est un jeu où l'on construit chacun des bâtiments.

(Pas mécontent de mon résumé de la gloire de Rome, moi…)
Le fait que les besoins de la ville ne sont pas (nécessairement) satisfaits n'est pas développé dans le jeu. Ça a aussi un côté rassurant, on peut avoir d'excellents jeux avec un propos tout à fait creux.


Il me semble que les effets des bâtiments traduisent quand même la réponse à un besoin : ils ne sont pas construits que pour les PV qu'ils rapportent, mais aussi pour servir.


Un autre jeu qui m'interpelle, c'est Tigre & Euphrate (ou, dans une moindre mesure, le SDA coopératif du même auteur). Ce jeu a tout pour être thématique, cependant il est perçu comme abstrait par la plupart des joueurs. Pourquoi ?

Mais…
Autant sujet et contexte, qui sont le ‘décors’ du jeu me semble indiscutables, ils existent, autant le propos semble sous tendre une volonté de l’auteur, ce dont je doute.

Mais…
C’est vrai que bien des jeux ont un propos, même si je ne pense pas que l’auteur en a eu l’intention.

Testons plus difficile : citadelles, castel, Euphrate et tigris, Evo… Quel est le propos ?

Parmi les options disponibles il manque le 1 OU le 2 :)

jmguiche dit:Mais...
Autant sujet et contexte, qui sont le 'décors' du jeu me semble indiscutables, ils existent, autant le propos semble sous tendre une volonté de l'auteur, ce dont je doute.
Mais..
C'est vrai que bien des jeux ont un propos, même si je ne pense pas que l'auteur en a eu l'intention.

Oui c'est aussi l'objet de cette discussion. Ce que je dis c'est que tout jeu devrait avoir un propos, au même titre qu'une œuvre sur un autre médium.
Et oui malheureusement beaucoup n'en ont pas.

Pose toi la question suivante : est-ce que tu vois le propos de tout film que tu vois comme ça sans réfléchir. Non, en tout cas moi non. Pourtant tout film a un propos (un thème ou une prémisse).

Oui le propos devrait sous-tendre la volonté de l'auteur. C'est l'idée, entre autre. Mais comme toi je doute que ce soit souvent le cas.

Le propos en plus d'être un outil d'analyse est un outil de création.
Dans un film, l'œuvre toute entière tourne autour de sa prémisse. Ceux qui ont etudié ou pratiqué la dramaturgie seront d'accord. Pour moi il devrait en être de même pour un jeu.
jmguiche dit:Testons plus difficile : citadelles, castel, Euphrate et tigris, Evo... Quel est le propos ?

À mon avis il n'y en a pas.
Citadelles et Castel c'est sûr, Serge et Bruno sont partis de contraintes mécaniques, Bruno le raconte d'ailleurs sur son site.
Evo je ne sais pas, à mon avis c'est purement mécanique (uniquement autour du sujet et du contexte).

Tigre et Euphrate c'est plus complexe... Quelque chose autour de l'équilibre par exemple... Le côté dévastateur des conflits n'est pas anodin non plus. À creuser...

Pour le SDA coop de Knizia, j'en avais parlé ici il n'y a pas longtemps, pour moi il y a un propos fort, comme "l'espoir permet de surmonter tous les obstacles". Ceux qui ont vécu des parties sur le fil avec une partie des joueurs qui se découragent et l'autre qui essaye de garder tout le monde à flot sauront de quoi je parle !
Et ça ne m'étonnerait pas que cela soit une volonté de l'auteur et non pas un truc fortuit car on est très proche du thème du livre...

À suivre...

Je remonte un peu le fil, que je trouvais intéressant.

Mis à part les jeux de Martin Wallace, nous avons évoqué le propos de Diplomacy, du SDA de Knizia…

J’en ai parlé du bout des lèvres, mais les Chevaliers de la Table Ronde, dit pour moi “Il faut parfois se sacrifier pour servir une cause noble”, un truc comme ça…

D’ailleurs certains joueurs s’en révèlent totalement incapables en jeu. :skullpouic:

Pour moi, un jeu qui a le 1) respecte déjà son thème. Le thème peut alors ne faire qu’habiller le jeu, mais il le fait correctement et n’est donc pas usurpé.

S’il y a en plus le 2), c’est encore mieux. J’appelle cela un jeu “à thème fort”, car les sensations de jeu nous rapprochent de ce que l’on s’imagine être la situation réelle. Souvent dans ce cas là, si l’on essaye de chercher une transposition dans un autre thème, on n’en trouve guère. Souvent aussi, on remarque des petits détails de règle qui sont révélateurs de la présence du thème à l’esprit du développeur alors même qu’il concevait son jeu (exemple flagrant : Martin Wallace… comment ça “déjà cité” :mrgreen:).

Formidable, ce topic !

Je vais tenter d’apporter mes deux cts en abordant deux donts l’absence sur ce fil me surprend quelque peu : j’ai nommé 1960 : Kennedy vs Nixon et Imperial

Concernant Imperial, le jeu est, à ma connaissance, sans équivalent dans son traitement thématique. Si le sujet et le contexte sont abordés de façon assez superficiels (la première guerre mondiale représentée avec quelques pièces de bois et un carte d’Europe.) Le propos ainsi que le point de vue adoptés ici sont très forts et particulièrement cyniques… En effet, si le fait d’adopter le point de vue d’un investisseur n’est déjà pas anodin, le propos qu’on pourrait résumer ainsi : “le but de la guerre n’est pas la conquête territoriale et encore moins la défense de peuples ou d’idéaux mais de s’en foutre plein les fouilles, même si cela implique de retourner sa veste de nombreuses fois…” est vraiment fort et extrêmement présent tout au long de chaque partie.
Le fait que ce propos soit appliquable à une grande majorité de conflits, même futuriste et imaginaire comme c’est le cas pour Impérial 2030, ne fait d’ailleurs que le renforcer.


Le cas de 1960 s’il n’est pas moins interessant, est déjà plus compliqué : si le sujet et le contexte sont fort bien restitués, je manque peut être encore un peu d’expérience sur le jeu pour en dégager le propos directeur. Peut-être qu’une campagne se gagne en détournant l’attention de son adversaire des enjeux majeurs qui décideront la victoire et à grand renfort de coups d’enfoiré. (?)