Rio de la Plata/Trinidad Chronique d'un gachis devenu un anachronisme

Merci du retour Palferso . Bon ça me confirme qu’a priori ce ne serait pas le jeu sortable par chez moi, même si je reste curieux d’y découvrir, comme toujours avec des jeux qui me semblent proposer quelque chose différents.

Concernant l’analyse du placement d’ouvrier, j’ai compris les propos de la manière suivante (et j’y souscris de manière générale) :

- sur les placements d’ouvrier on a des semblants de choix mais pour au final faire en gros la même chose. Schématiquement : “Tu m’as bloqué la case pierre, j’irai chercher du bois. Au tour suivant quand tu iras chercher du bois, j’irai prendre la pierre”. Alors bien sûr le timing a son importance, mais ceci pour dire qu’alors que sur la papier on a l’impression d’une interaction forte, bloquante, on est en réalité plutôt dans un simple effet de décalage, quelque chose qui joue son rôle de manière bien moins brutale que ça ne peut le paraitre.

- l’interaction des placements d’ouvrier se concentre sur les moyens, pas sur la fin. Quel est le but de l’action et comment elle va influencer la partie. Trop souvent l’influence concerne juste le joueur lui-même, son action lui permet de gagner des PV, mais ça valorise juste son combo, ça n’a pas d’influence sur les autres. Ici le propos de Trinidad semble l’inverse : tu peux faire tout ce que tu veux , mais toute action que tu réalises a un impact sur ce que pourront faire les autres. Globalement, je trouve les jeux d’aujourd’hui trop concentré sur les moyens et peu sur la finalité que ce soit la finalité mécanique, son interaction ou de manière général le propos du jeu (quel expérience l’auteur veut nous proposer)

Un exemple intéressant c’est Barrage : il y a des actions de placement d’ouvrier commune bloquantes (eau, gagner des machines…), et des actions de placement sur son plateau (construction) qui elles sont totalement libres. Et finalement les actions qui ont la plus grosse portée en terme d’interaction, ce sont les constructions. C’est à dire les actions non contraintes. Comme quoi on peut effectivement avoir un jeu assez ouvert en terme d’action, et pourtant interactif et contraint dans ses conséquences.

@Rodenbach, @ocelau. Merci pour vos retours et votre contribution au débat.

palferso dit :@Rodenbach, @ocelau. Merci pour vos retours et votre contribution au débat.

en attendant tes retours sur les parties (genre de jeu où même s'il y a peu de chance que j'y joue , j'aime bien avoir les retours d'expérience et les analyses)

@ocelau: oui, ce que tu dis quant à la portée de l’interaction à Barrage est très intéressant. Il propose effectivement un “entre deux” intéressant. Maintenant, Barrage est à mon goût bien trop induit par les actions contraintes et je m’en suis vite lassé aussi (sans doute pour ça).

Oui j’attends également tes prochains retours, tu as éveillé ma curiosité !

A noter (cela rentre aussi dans les défauts majeurs de Trinidad) que son prix est à mon sens absolument délirant. Si il n’avait pas été soldé dans de très fortes proportions (j’ai récupéré la Collector Box à 60€ au lieu de 160€!!!) et sans la nostalgie Proustienne des moments passés autour de Rio de la Plata, je n’aurais jamais mis un kopek sur un jeu aussi insortable…

Ça c’est ce qu’on appelle du déterrage de l’archéologie marine. 

Rio de la Plata est de 2010. Mon post originel a 10 ans mais ça me semblait intéressant de le lier à Trinidad (2022). Je n’ai actualisé que le titre et j’ai lié le post à Trinidad.

Bon sang, trois pages de débats intéressants à rattraper !

(Du coup, je vais pas y jouer tout de suite, mais faut que je le garde ce jeu alors ? Qui veut venir jouer chez moi ? :p)

Non, une seule page. Les 2 précédentes concernaient Rio de la Plata.

Tasmat dit :Bon sang, trois pages de débats intéressants à rattraper !

(Du coup, je vais pas y jouer tout de suite, mais faut que je le garde ce jeu alors ? Qui veut venir jouer chez moi ? :p)

Moi évidemment !

Je partage l’avis de Rodenbach, c’est sur que le placement d’ouvriers limite les choix et peut les rendre stéréotypés mais de nombreuses autres mécaniques d’action limitent les choix.  C’est juste une mannière comme une autre selon moi de les limiter.  Alors oui, dans un jeu où on ne sait faire que 5 actions, il n’est pas nécessaire de les limiter, mais dans un jeu comme Agricola, un peu de limitation fait du bien et évite l’analysis paralysis.  
Cela reste, à mon sens, une manière élégante de faire des choix dans les jeux.
Evidemment, je te rejoints sur le fait que la mécanique de placement d’ouvriers n’est évidemment pas une mécanique suscitant l’interaction même si dans certains jeux, on est amené à choisir des emplacements pour bloquer les adversaires.

Je réfléchissais à cette histoire de liberté à Trinidad, et je me demandais dans quelle mesure ce n’était pas l’illusion du choix, dans le sens où on tend vers des enchaînements d’action optimisés, et délaissant des enchaînements qui ne seront jamais envisagés (je ne connais pas les règles donc c’est plus une réflexion générale sur les jeux avec une grande liberté de choix).
J’ai repensé à la raison pour laquelle Tannhauser avait opté pour des routes prédéfinies pour se déplacer sur le plateau : d’après les auteurs, 90% du temps (chiffre random ^^) on va faire des déplacements optimisés pour se mettre à couvert par exemple, et donc il y a des mouvements qu’on ne fera jamais. Et donc les mouvements réellement intéressants à faire sont en réalité moins nombreux que ce qu’on croit.

J’ai pas les clés pour répondre à ça.
palferso j’attends ton avis sur la question 

Rodenbach dit :Je réfléchissais à cette histoire de liberté à Trinidad, et je me demandais dans quelle mesure ce n'était pas l'illusion du choix, dans le sens où on tend vers des enchaînements d'action optimisés, et délaissant des enchaînements qui ne seront jamais envisagés (je ne connais pas les règles donc c'est plus une réflexion générale sur les jeux avec une grande liberté de choix).

[...]

palferso j'attends ton avis sur la question 

Je ne débats plus sur TT. Pour rester bref: ton discours tient dans le cadre d'un jeu où il n'y a pas d'interaction.

Exemple rapide (entre beaucoup d'autres possibles à ce jeu) et (très) schématique: tu optimises avec les oeillères ta récolte de ressources et/ou construction d'édifice et/ou envoi de tes ressources vers l'Espagne pour te faire du blé ou autre. Pendant ce temps, tes petits camarades te laissent faire ta petite gestion et tapent aussi dans les ressources mais sans les optimiser pour construire un truc ou faire du fric mais juste pour les épuiser et éventuellement les dépenser "à perte" pour former/armer des miliciens afin de provoquer une attaque des Querandis (exaspérés de voir leurs ressources naturelles être pillées par les conquistadores) tout en se donnant les moyens d'y faire face militairement. L'optimisateur autarcique va se faire plus de blé que les autres mais il va être pitoyable dans la défense de Trinidad et pourra perdre beaucoup plus que ce qu'il aura récolté.

Un autre défaut potentiel de Trinidad (à mon sens): la négociation. Je me suis expliqué sur ce point concernant El Grande (ICI). Je ne perds jamais de temps dans un jeu à négocier (car c’est aussi accaparer “autoritairement” le temps de jeu des autres). Je peux proposer un ou plusieurs deals à un joueur. Il accepte ou il refuse et basta.

Ensuite, je joue pour m’amuser et pour que tout le monde passe le meilleur moment possible autour de la table. C’est à dire que les joueurs qui ne respectent pas ce qu’ils ont acté avec quelqu’un pour le plomber ne sont pas (plus) les bienvenus à ma table.

Mais Quondam laisse la porte ouverte à ce type de pratiques/de joueurs (en les limitant tout de même via le “pacte de sang”), porte que j’ai refermé pour plein de raisons depuis bien longtemps.

J’ai l’impression que les jeux de négociation avec possibilité de traîtrise, malgré que ce puisse être la madeleine de Proust de certains, ne reviennent plus tellement sur les tables. Je n’ai jamais eu l’occasion d’avoir une mauvaise expérience à ce genre de jeux qui ont des durées de partie souvent à rallonge, mais il faut quand même reconnaître que ça a tendance à rallonger les parties de façon totalement démesurée, et ça crée potentiellement un gros différentiel de plaisir autour de la table entre celui qui va jubiler après un coup fumeux et celui ou ceux qui verront leur partie ruinée de façon assez violente engendrant frustration, colère, en passant par ceux qui vont s’ennuyer (voire être totalement saoulés) pendant les phases de négo car ils n’ont pas d’appétence particulière pour ça.

C’est à se demander de nos jours dans quelle mesure cela peut être une “bonne” mécanique.

ocelau dit :
l'interaction des placements d'ouvrier se concentre sur les moyens, pas sur la fin. Quel est le but de l'action et comment elle va influencer la partie. Trop souvent l'influence concerne juste le joueur lui-même, son action lui permet de gagner des PV, mais ça valorise juste son combo, ça n'a pas d'influence sur les autres. Ici le propos de Trinidad semble l'inverse : tu peux faire tout ce que tu veux , mais toute action que tu réalises a un impact sur ce que pourront faire les autres. Globalement, je trouve les jeux d'aujourd'hui trop concentré sur les moyens et peu sur la finalité que ce soit la finalité mécanique, son interaction ou de manière général le propos du jeu (quel expérience l'auteur veut nous proposer)

J'aimerais revenir sur l'histoire de la fin et des moyens dont parle si bien ocelau.

Si je peux évidemment me concentrer sur les moyens à Trinidad, le coup idéal et la liberté d'action constante doivent permettre de chercher/créer le coup qui mettra en branle le plus efficacement ces 2 aspects (la fin et les moyens). Dans mon exemple plus haut en réponse à Rodenbach, si les ressources collectées ne sont pas ou peu exploitées (on peut même imaginer en cas plus extrême un joueur blindé d'un type de ressources continuer à taper dedans alors que d'un point de vue gestion classique, il aurait au contraire intérêt à se diversifier), elles serviront plus tard mais ont au moment de ces actions une tout autre finalité que celle de leur exploitation concrète et immédiate.

Autre type d'exemple qui sort d'un cadre directement lié aux ressources (substantif tellement connoté gestion...), si je construis un édifice loin des résidences des joueurs pour leur en retarder l'accès et l'utilisation (c'est la dimension géographique de Trinidad où tout se qui se construit est mis en place sur le plateau et non gardé par chacun (sur son plateau perso ou autre); de fait, à ce jeu, quasiment tout ce que l'on fait peut potentiellement servir aux autres ce qui est aussi le cas évidemmment des édifices: je construis une scierie pour sortir du bois et je permets aux autres de l'utiliser sans qu'ils aient dépensé les ressources pour la construire...). L’utilisation de cet édifice construit par l'un loin des autres va retarder une activation potentielle par un adversaire (techniquement, seul un bâtiment adjacent à une de nos habitations peut être activé par nous) et évidemment dans ce cas, cela va avoir des répercussions tant sur l’occupation géographique (et son timing...) que sur les choix d’édifices ultérieurs à construire pour les uns et les autres. A contrario, construire un édifice directement adjacent à l’habitation d’un adversaire (ou hyper facilement accessible pour un ou plusieurs) aura des répercussions toutes autres non plus tant liées directement aux ressources/pouvoirs de chaque édifice mais aux répercussions multiples d'une utilisation massive). Toutes ces répercussions ne sont évidemment pas figées dans le marbre et pourront être à tout moment nuancées, accélérées ou ralenties plus ou moins fortement en fonction des choix de chacun (qui de fait devront à ce jeu réagir à tout dess(e)in de contexte pour le modeler le plus à sa convenance possible). Chaque action donne des moyens et influe sur diverses fins, la liberté étant toujours totale pour moduler ces deux aspects (pas d'actions contraintes).

Si tel Prométhée, je vole le feu pour servir mes petits intérêts en négligeant les répercussions que peuvent avoir une telle collecte, je suis mort à Trinidad. Il est de fait tout à fait grisant à ce jeu (au moins pour moi) de sentir que la moindre action, le moindre choix provoque des tremblements qui vont (bien) au-delà de nous et de nos petits besoins immédiats.

Mais bon, je développerai et reviendrai confirmer ou infirmer plus tard quand j'y aurai (enfin) rejoué. J'ai hâte...

Merci !
(Ça donne toujours envie, expliqué comme ça)

Rodenbach dit :Merci !
(Ça donne toujours envie, expliqué comme ça)

+1 laugh

Merci à vous.

Maintenant, je n’ai joué “que” 3 parties dont 2 non achevées et une seule à ce jour avec un être humain (config 3 joueurs avec l’IA). D’ailleurs, je n’aime pas du tout les IA en général qui m’emmerdent assez profondément mais celle-ci est bien foutue, rapide et ultra simple à jouer. Elle remplit par ailleurs assez bien sa fonction vu qu’elle est relativement compétitive en terme de points et qu’elle contribue assez efficacement à remplir les espaces de la ville et à vider les ressources notamment.

A noter qu’en solo, l’IA peut être dédoublée et que l’on se retrouve du coup avec une config type “3 joueurs”. Dédoubler l’IA peut cependant en fonction des répartitions de ses cartes la rendre moins compétitive mais au moins, on peut se frotter un peu au jeu (seul intérêt à mon sens des jeux solo).

De toute manière, sachant que les jeux solo me font très vite chier, il est clair que je jouerai peu à ce jeu et que donc, j’en parlerai beaucoup…  Moyen de jouer intellectuellement avec Trinidad (à défaut d’y jouer physiquement…) et de me donner l’impression (l’illusion?) que je rentabiliserai un tant soit peu mon investissement dans un jeu (quasi) insortable.