Kouynemum dit: est-ce qu'il ne faudrait pas dissocier "linguistique" et "orthographe" ? l'histoire d'une culture n'a pas comme source unique son orthographe. sinon, ça voudrait dire, a contrario, que les sociétés de tradition orale, qui n'ont pas d'orthographe n'auraient pas ou moins d'histoire et/ou pas de racines ? réformer des codes écrits pour les rendre plus accessibles, est-ce que ce n'est pas d'une certaine façon faire vivre une langue, la faire évoluer au lieu de la figer, pour la transformer et lui permettre de continuer à participer à l'histoire en cours ?
Justement, les sociétés de tradition orale perdent peu à peu leurs racine dans la globalité. Le site cité plus haut est intéressant car on se rend compte de l'évolution de notre langue. Mais vouloir la simplifier pour la simplifier n'est pas utile à mon goût. Vouloir simplifier la langue pour lui donner une certaines cohérence, je trouve ça déjà plus intéressant. Enfin, j'ai toujours trouvé que les exceptions donnaient du charme à la langue et un certain challenge. A chacun de ne pas stigmatiser l'autre parce qu'il ne la maîtrise pas aussi bien mais je trouve que c'est un peu fort de dire que l'orthographe a un coté élitiste. Là où je peste un peu, c'est pour la francisation de termes généraux comme cédérom, mél et j'en passe. On vient créer des mots en les coupant de leur racine.
Le but n'est pas de simplifier pour la rendre plus cohérente mais pour la rendre plus accessible à ceux qui l'utilisent ! Le problème de la racine est aussi un faux problème : ceux qui ne connaissent pas un peu le grec ou le latin n'y verront que des graphies différentes pour le même son. Cela sera un frein pour eux. Les exceptions donnent du charme à ceux qui maitrisent ces exceptions ! Avez-vous déjà vu un élève de 10 ans qui lutte pour apprendre la conjugaison et qui trouve que les exceptions font joli?
ça c’est vrai, j’ai jamais entendu une vache dire autre chose que “Meeeuuuuhhh” !
Edit : Vieux chat a écrit : Les exceptions donnent du charme à ceux qui maitrisent ces exceptions ! Avez-vous déjà vu un élève de 10 ans qui lutte pour apprendre la conjugaison et qui trouve que les exceptions font joli?
Le Zeptien dit:j'ai toujours trouvé un peu prétentieuse cette façon de stigmatiser les fautes des uns et des autres sur un forum public...genre "je m' la pète grave" tu vois...cela peut être d'autant plus humiliant (j'insiste sur le terme) que la langue écrite fut, est et sera toujours un vrai calvaire pour certains...
A une époque, je prenais une baffe par faute en dictée, ça doit être pour ça que je suis parfois aussi intransigeant.
Je suis un jour tombé sur un "j'est était [jeçaipuhou]", ça m'a d'autant plus ennervé qu'on est sencé dire (langage parlé en opposition au langage écrit, voir plus haut [EDIT : ah bah tiens ! Merci madame la Vache]), "je suis allé" (ou je suis aller pour ceux pour qui la langue écrite fut, est et sera toujours un vrai calvaire)...
Scoubi dit: Justement, les sociétés de tradition orale perdent peu à peu leurs racine dans la globalité. .
je ne crois pas, non. qu'est-ce sont les racines d'une société ? les peuples de la Gaulle post romaine, les société scandinaves du premier siècle, les Thuléens ont-ils oubliés d'où ils venaient sans l'écrit ? simplement la tradition orale forte sert de véhicule mais c'est un véhicule fragile qui disparait avec les individus. la force de l'écrit, c'est de demeurer indépendament de celui qui l'a rédigé. vaste question que de savoir si une société de tradition orale immergée dans un monde d'écrit peut se protéger sans un préalable de respect et de non-assimilation forcée. l'exemple que donne la défense de la langue bretonne m'inciterait à penser que des groupes accrochés à certaines valeurs peuvent s'en donner la force.
Le Zeptien dit:ça c'est vrai, j'ai jamais entendu une vache dire autre chose que "Meeeuuuuhhh" !
Je disais (enfin, "j'écrivai") ça parce que j'ai souvent ouï des sociologues dire que la mauvaise maîtrise de la langue, y compris la langue orale, était un facteur de discrimination, qui pouvait expliquer certaines formes de violence. Oncques n'ouïtes-vous icelui ?
Mais dans mes verts pâturages, point de ces problèmes-là, en effet.
Scoubi dit:C'est justement paradoxal: la langue évolue parce que certaines personnes font des choix arbitraires à un moment (ils auraient aussi pu décréter qu'on ne pourrait utiliser que "dissout").
pas arbitraires, des choix pratiques de prononciation comme ça a été le cas au moyen âge pour assimiler le latin parlé au sein des dialectes et patois locaux. des choix d'usage commun, comme l'histoire de Renart le Goupil. pourquoi appelle-t-on au XXI siècle un goupil de son nom propre médiéval et pas le loup, nommé Ysengrin dans le même récit ? parce que les usagers de la langue se sont reconnus de plus en plus nombreux dans cette appellation, sans doute ? la langue française est faite de ces transformations théoriques dans le courant de l'usage quotidien. encore une fois, on ne devrait confondre uniformément les évolutions linguistiques et orthographiques.
Vieux chat dit: Les exceptions donnent du charme à ceux qui maitrisent ces exceptions ! Avez-vous déjà vu un élève de 10 ans qui lutte pour apprendre la conjugaison et qui trouve que les exceptions font joli?
et c'est encore plus difficile à vivre quand il s'agit d'un adulte que son orthographe marginalise...
Vieux chat dit: Les exceptions donnent du charme à ceux qui maitrisent ces exceptions ! Avez-vous déjà vu un élève de 10 ans qui lutte pour apprendre la conjugaison et qui trouve que les exceptions font joli?
et c'est encore plus difficile à vivre quand il s'agit d'un adulte que son orthographe marginalise...
J'imagine assez facilement, d'autant que certains parents d'élèves maitrisent moins bien la langue française que leur enfant (qui déjà la baragouine en s'appuyant sur ce qu'ils entendent à la télé, notamment dans les émissions du genre star ac' ou autre)
Alors ça c'est vraiment purement une question d'usage : si je peux dire que je suis actuellement en France, je peux dire que j'étais hier en Allemagne, a fortiori que j'ai été par le passé en Allemagne. Certains estiment que comme c'est moins joli c'est incorrect... Mais reprendre quelqu'un là-dessus, c'est comme reprendre quelqu'un qui parle du premier, puis du second puis du troisième.
En plus j'ai été au Vanuatu est plus précis que je suis allé au Vanuatu car dans le deuxième cas, je ne précise pas si j'en suis revenu.
Personnellement, je ne pense pas avoir jamais marginalisé quelqu’un pour son orthographe… D’un autre côté, quand je tombe sur un texte entièrement rédigé en langage sms, j’abandonne très vite la lecture (mais là, c’est moi qui me marginalise tout seul comme un grand). Certains TTiens manifestent de vraie difficulté en orthographe : je ne les prends pas pour des imbéciles pour autant et je continue à lire leurs messages mais c’est vrai que cela me demande souvent un effort supplémentaire de compréhension. (D’ailleurs, c’est ma découverte d’internet qui m’a fait revenir sur mon opinion que l’orthographe n’était finalement pas très utile et que la langue française s’en était très bien passée pendant plusieurs siècles…) Je n’ai jamais été très fort en dictée, j’ai perdu pas mal de points lors de contrôle à cause de l’orthographe (et du soin aussi mais là c’est un autre débat). Et pourtant, je n’ai pas l’impression que ça ait fortement plombé ma scolarité… Et puis je suis à peu près certain, quoique sans grandes démonstrations, que devoir apprendre certaines exceptions et certains illogismes est bien moins difficile pour des enfants que, disons d’avoir à lire des textes dans lesquels les mots ne s’écriraient jamais deux fois de la même manière. Bref, nous sommes (et j’ai l’impression que ça va durer encore un bout de temps) dans une société de l’écrit et donc il y a des règles, arbitraires, parfois illogiques. Et ce serait pareil dans une société de l’oral (j’ai eu un mal fou à convaincre ma fille qu’elle avait le droit d’utiliser un mot pour un autre mais qu’alors on avait le droit de ne pas la comprendre)… Après, que notre société de l’écrit doive veiller à ne pas exclure ceux que ces règles mettraient en réelles difficultés, ça me parait une évidence, mais je ne crois pas une seconde que cela signifie abolir les règles…
Eric dit:C'est moi qui ai parlé de Moyen-Age en fait... Une époque bénie où il n'y avait pas de règle orthographique... Ce qui est amusant, c'est que tu pointes l'arbitraire des règles orthographique tout en pourfendant le respect de la racine, or il n'y a rien de moins arbitraire que cette habitude. La simplification serait bien plus arbitraire.
Voilà autre chose ! Ce sont les simplifications qui compliqueraient tout maintenant ! ..l' idéologie de la "noble orthographe" a réponse à tout, un paradigme vraiment intéressant....
Je n'ai pas dit que la simplification compliquait, j'ai dis qu'elle serait forcément arbitraire. "Exemple" pourquoi simplifier en "exenple" et pas en exanple" ? Pourquoi écrirait-on cet au lieu de cette et pas cete ou set ?
Eric dit: Après, que notre société de l'écrit doive veiller à ne pas exclure ceux que ces règles mettraient en réelles difficultés, ça me parait une évidence, mais je ne crois pas une seconde que cela signifie abolir les règles...
Personne n'a je crois parler d'abolir les règles, mais de les simplifier (balancer les trop nombreuses exceptions dont les origines sont parfois bien incertaines) pour les rendre plus accessibles à tous comme le dis Vieux chat un peu plus haut....
Eric dit:C'est moi qui ai parlé de Moyen-Age en fait... Une époque bénie où il n'y avait pas de règle orthographique... Ce qui est amusant, c'est que tu pointes l'arbitraire des règles orthographique tout en pourfendant le respect de la racine, or il n'y a rien de moins arbitraire que cette habitude. La simplification serait bien plus arbitraire.
Voilà autre chose ! Ce sont les simplifications qui compliqueraient tout maintenant ! ..l' idéologie de la "noble orthographe" a réponse à tout, un paradigme vraiment intéressant....
Je n'ai pas dit que la simplification compliquait, j'ai dis qu'elle serait forcément arbitraire. "Exemple" pourquoi simplifier en "exenple" et pas en exanple" ? Pourquoi écrirait-on cet au lieu de cette et pas cete ou set ?
Simplifier et abolir sont deux choses différentes. Transformer "cette" en "cet" serait contre-productif car la marque du genre reste quelque chose qui facilite la lecture une fois que l'on a appris à les voir. (et ce n'est pas si compliqué que cela, les élèves y arrivent assez bien) C'est plus les marques du pluriel qui font mal (comme lorsque les élèves mettent "-ent" à la place d'un "s") ou les fautes de grammaire. L'accord sujet/verbe reste LE plus gros soucis de nos élèves.
Et je repose la question de moonboot : qui décide de ce qui doit être simplifié, de dans quel sens simplifier et de jusqu’où simplifier ? Une réforme de l’orthographe a eu lieu en 1990 et je ne crois jamais avoir lu portemonnaie ou piquenique… Sera-t-il plus facile pour moi d’apprendre à arrêter de remplacer n par “m” devant “b” et “p” que pour un enfant d’apprendre à le faire ?
Vieux chat dit:[ C'est plus les marques du pluriel qui font mal (comme lorsque les élèves mettent "-ent" à la place d'un "s") ou les fautes de grammaire. L'accord sujet/verbe reste LE plus gros soucis de nos élèves.
A l'écriture, je veux bien le croire. Mais est-ce que cela ne simplifie pas la lecture de pouvoir différencier un verbe d'un nom ou d'un adjectif ? Est-ce qu'on oublie pas un peu que le premier but de l'orthographe c'est de faciliter la compréhension ?
Qui déciderait? Hum … allez … sans trop réfléchir … des spécialiste de la langue? Pas des académiciens mais des linguistes. Ceux qui justement savent d’où viennent les mots. La réforme a pris aussi en compte les homophones. Vers/verre/vair/vert … les orthographes différentes aident à comprendre le sens. Quant à la réforme de l’orthographe il va falloir attendre que les écrivains s’y mettent ainsi que les journalistes. Les professeurs suivront simplement le mouvement. Modifier la langue ça ne se fait pas vite, mais ça ne s’arrête pas non plus. C’est un phénomène en perpétuel mouvement.
Vieux chat dit:[ C'est plus les marques du pluriel qui font mal (comme lorsque les élèves mettent "-ent" à la place d'un "s") ou les fautes de grammaire. L'accord sujet/verbe reste LE plus gros soucis de nos élèves.
A l'écriture, je veux bien le croire. Mais est-ce que cela ne simplifie pas la lecture de pouvoir différencier un verbe d'un nom ou d'un adjectif ? Est-ce qu'on oublie pas un peu que le premier but de l'orthographe c'est de faciliter la compréhension ?
Justement non, on ne l'oublie pas. Et je peux te dire que le "ent" en fin de verbe ne simplifie la compréhension que pour ceux ... qui maitrisent déjà la langue. Les élèves en difficulté d'ailleurs n'arriveront pas à bien lire "les poules couvent au couvent". J'en ai d'ailleurs eu l'exemple pas plus tard .. qu'hier. Même en fin de cM2, l'accord sujet/verbe reste LA faute la plus commise. Et je parle de phrase pas trop complexes (avec quand même des inversions sujet/verbe ou des phrase du genre "Ils l'emmènent").
Vieux chat dit:Qui déciderait? Hum .. allez ... sans trop réfléchir ... des spécialiste de la langue? Pas des académiciens mais des linguistes. Ceux qui justement savent d'où viennent les mots. .
Exactement comme ça se fait maintenant, tu veux dire... Il me semble que le conseil supérieur de la langue française a autorité sur l'académie française... Quand aux "poules qui couvent au couvent", j'ai quand même l'impression qu'on trouverait pas beaucoup moins de phrases de ce genre avec un "s" marquant le pluriel... A moins que ta proposition soit carrément de supprimer la conjugaison, mais là, on sort de l'évolution naturelle d'une langue...
Ok Eric, donc, si j’ai bien tout compris, tu penses qu’il faut surtout toucher à rien, continuer avec une orthographe à la complexité souvent dénuée de tout sens réel, qui perpétue une certaine discrimination sociale, qui prend beaucoup trop d’importance dans différents cursus au moment des évaluations (scolaires, universitaires et même professionnelles) et tout cela parce que tu craindrais d’être dépassé toi même ou en tout cas, de voir remis en cause tes acquis ? Parce que si ce n’est pas cela le fond de ta pensée (ce que je veux bien croire)…ça y ressemble quand même un peu.