Les énergies renouvelables : un nouvel essor ?
Les énergies dites renouvelables offrent d’importants avantages : leur consommation n’épuise pas les ressources d’énergies fossiles et n’entraîne pas d’émissions nettes de CO2 (la combustion de la biomasse émet du CO2 mais celui-ci est à son tour fixé par la croissance des forêts).
En 2002, les énergies renouvelables représentaient 14% de l’énergie consommée sur la planète, soit 1 400 Mtep. Plus de la moitié de ce total correspond à la biomasse dite traditionnelle (le bois, principalement), dont une grande partie n’est pas commercialisée, y compris dans les pays développés. Avec 3 000 milliards de kilowattheures (kWh) produits, l’hydroélectricité est la deuxième énergie renouvelable en volume, elle assure 18% de la production mondiale d’électricité. Certains pays, comme le Congo, l’Uruguay, l’Islande ou la Norvège en tirent la plupart de leurs besoins électriques.
À l’exception des grands barrages hydroélectriques, les énergies renouvelables sont de celles qui sont produites et utilisées localement. Dans les pays en développement, c’est cette caractéristique qui en fait la ressource énergétique principale de la majorité des populations. Dans les pays développés, elles contribuent à l’indépendance énergétique et à l’emploi, de par la petite taille des unités et les besoins de maintenance. En augmentation régulière depuis les années 1980, leur part dans le bilan énergétique des pays développés reste pourtant limitée à environ 6% du total.
Au-delà de ce caractère local, l’économie des énergies renouvelables diffère fortement de l’économie des hydrocarbures. D’un point de vue géographique, comparées aux ressources des hydrocarbures et malgré certains déficits (comme l’absence de biomasse et d’hydraulique en zone aride, par exemple), les ressources renouvelables, sont à peu près également réparties à la surface du globe : comme illustration, le rayonnement solaire annuel moyen ne varie que d’un facteur 2 environ entre le nord de l’Europe et les tropiques. La structure des coûts de production des énergies renouvelables est également différente : l’accès à la ressource est soit gratuit (solaire, éolien, hydraulique), soit à coûts faibles (biomasse), alors que les coûts d’investissements des procédés de transformation sont encore aujourd’hui sensiblement plus élevés que ceux des énergies fossiles.
Les énergies renouvelables sont couramment réparties en deux catégories suivant qu’elles produisent de la chaleur ou de l’électricité.
Les énergies renouvelables productrices de chaleur
La biomasse (masse de matière organique non fossile d’origine biologique), utilisée comme biocombustible, représente une importante ressource d’énergie, notamment dans les pays en développement. Elle atteignait près de 1 100 Mtep en 2002 (soit 11% de la consommation mondiale), et une augmentation de 50% est prévue dans les trente ans à venir. En France, sa part dans le bilan énergétique est significative, le bois combustible représentant de l’ordre de 9 Mtep (le bilan de consommation énergétique annuel étant d’environ 160 Mtep). Alors que les usages traditionnels de la biomasse sous forme de bois de feu régressent dans les pays en développement, son utilisation se développe dans les pays industrialisés au travers de chaudières, éventuellement associées à des réseaux de chaleur, mais également dans les industries de pays émergents, comme l’Inde ou le Brésil.
La biomasse, utilisée comme biocarburant : obtention d’éthanol à partir de la betterave ou du blé, de diester (comme substitut au gazole) à partir du colza, pour se substituer ou se combiner aux carburants pétroliers dans les moteurs thermiques des véhicules. À la suite du Brésil, l’Europe s’est fixée un objectif d’incorporation en 2010 de 5,75% de biocarburants dans tous les carburants automobiles distribués, au titre des économies d’hydrocarbures et des limitations d’émissions de gaz à effet de serre. Les développements technologiques se concentrent sur la conception de moteurs pouvant utiliser des biocarburants en substitution partielle ou totale, ainsi que sur l’abaissement des coûts de production des biocarburants. Il faut toutefois garder à l’esprit les ordres de grandeur : aux rendements et techniques actuels, le remplacement total des carburants automobiles consommés en France par des biocarburants mobiliserait plus de la moitié des terres cultivables du pays.
Le solaire thermique est utilisé presque uniquement dans les bâtiments, pour la production d’eau chaude sanitaire, ou parfois en chauffage direct (baies solaires). Très développé au Proche-Orient et en Asie, il fait l’objet de politiques incitatives dans plusieurs pays d’Europe.
La géothermie exploite la chaleur du sous-sol, soit à basse température (60 à 80 0C) pour être utilisée dans des réseaux de chaleur, soit à haute température (de 120 à 200 0C). Dans ce dernier cas, la chaleur est principalement utilisée pour produire de l’électricité (cf. infra). En France en 2002, l’équivalent de 170 000 logements sont ainsi chauffés par une ressource géothermique basse température alimentant l’un des 60 réseaux de chaleur, situés dans le Bassin parisien et le Bassin aquitain.
La géothermie profonde des roches fracturées fait l’objet de recherches à très long terme, afin d’exploiter la chaleur du sous-sol à très grande profondeur (forage de deux puits, avec la création d’un « échangeur » naturel, les roches chaudes profondes, entre les puits, afin de récupérer la chaleur par injection d’eau). Le site expérimental de Soultz-sous-Forêts, en Alsace, constitue un pilote à l’échelon européen, leader au niveau mondial.
Les énergies renouvelables productrices d’électricité
L’Union Européenne, par une directive de 2001, a décidé de porter la part de production d’électricité d’origine renouvelable de 14% (son niveau en 1997) à 22% en 2010. À l’échelle mondiale, cette proportion était de 18% en 2002, et devrait légèrement augmenter d’ici 2030, selon l’Agence internationale de l’énergie (A.E.I.), pour un doublement de la consommation d’électricité à cette date.
L’énergie hydraulique constitue une ressource renouvelable déjà largement exploitée, dont les développements reposent sur quelques très grands projets, principalement en Amérique latine et en Chine, susceptibles toutefois d’augmenter cette production de 50% d’ici à vingt ans ; outre les contraintes de financement, ces réalisations posent d’importants problèmes environnementaux liés aux modifications majeures du milieu naturel, et à leurs impacts sur les populations, la faune et la flore. En Europe, les principaux sites sont déjà équipés.
L’utilisation industrielle de la biomasse, après gazéification, pour produire de l’électricité au moyen de turbines ou de moteurs adaptés (centrales à biogaz) mobilise de grands groupes industriels en Europe et aux États-Unis.
L’énergie éolienne a connu un développement important depuis le début des années 1990. La croissance du marché s’est accompagnée d’une importante baisse des coûts. L’énergie éolienne devient désormais compétitive dans les zones bien ventées et s’insère avantageusement dans les réseaux électriques de petite taille (par exemple, dans les régions insulaires). Le Danemark, l’Allemagne et l’Espagne sont les pays où cette technique s’est le plus développée et représente plus de 5% (20% pour le Danemark) de la production d’électricité. Ce seuil devrait être atteint en moyenne en Europe dès 2010. Les premières installations sur plates-formes en mer (offshore) ont été effectuées à la fin des années 1990. Leur succès technique et économique donnerait une impulsion supplémentaire à cette filière énergétique.
L’énergie solaire photovoltaïque consiste en la conversion directe de la lumière en électricité par un procédé photoélectrique. Les cellules photovoltaïques, qui assurent cette conversion, sont assemblées en panneaux eux-mêmes fixés aux bâtiments. Ce type d’énergie se développe surtout dans les régions où l’acheminement des énergies traditionnelles est coûteux (sites isolés, îles…). La baisse des coûts des installations et l’amélioration des rendements de conversion sont en constante progression, mais sans atteindre la compétitivité des énergies centralisées lorsque les réseaux existent. Même si, quantitativement, l’énergie solaire photovoltaïque ne représente encore qu’une part très faible des bilans nationaux, elle constitue un enjeu majeur pour plus de deux milliards d’hommes qui n’ont pas accès aux réseaux centralisés de distribution d’énergie. Au milieu du XXIe siècle, il n’est pas exclu que les progrès techniques puissent déboucher sur une utilisation de masse de l’énergie photovoltaïque.
La géothermie à haute température était en 2002 la troisième source renouvelable mondiale en production d’électricité, après l’hydraulique et la biomasse, mais avant l’éolien, avec 57 TWh produits cette année-là. Les États-Unis (15 TWh), les Philippines (10 TWh correspondant à 20% de la production nationale d’électricité) sont les pays les plus concernés. La production en 2030 pourrait atteindre 100 TWh supplémentaires, dont près de la moitié en Amérique du Nord. La France a produit, en 2003, 0,5 TWh d’électricité d’origine géothermique, dont le quart en Guadeloupe.
L’énergie des marées : plusieurs projets importants se font jour, notamment en Grande-Bretagne et en Chine, pour exploiter l’énergie des marées à l’instar du barrage de La Rance (Ille-et-Vilaine). Les impacts sur l’environnement sont toujours majeurs : modification de l’aspect de la côte sur plusieurs kilomètres, changements des courants et des ensablements, incidences sur la pêche.
L’énergie des vagues : il s’agit de capter l’énergie mécanique de la houle, et de la transformer en électricité. La ressource est considérable, mais les difficultés techniques également. Des installations prototypes devraient entrer en production dans les prochaines années, notamment une installation de 20 MW sur les côtes de Cornouailles en 2006.
Les énergies renouvelables disposent de deux atouts essentiels : des ressources qui ne sont pas limitées dans le temps, et peu d’effets défavorables sur l’environnement (et pas du tout sur le changement climatique). Leur avenir dépend de la mise en place de technologies à la fois plus efficaces, plus fiables et surtout moins coûteuses. Mais leur place dans le paysage énergétique de la planète dans trente ans dépendra au moins aussi fortement de l’évolution du contexte général : équilibre entre l’offre et la demande d’énergie, prix des autres énergies, limitation des émissions de gaz à effet de serre.
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