Economie du jeu et Crowdfunding

khaali dit:
Itai dit:
Bref, on se retrouve face à trois approches de l'achat de jeu, avec des rythmes complètement différents. C'est l'argument principal qui fait qu'à mon avis, la démocratisation de KS va connaître des limites. On va avoir un noyau des joueurs qui se sont adaptés au rythme KS qui croîtra peu. Et on va avoir des occasionnels, qui vont se joindre à un projet parce qu'il a réussi à capter son attention, mais dont la grande majorité n'y reviendront pas ou peu.
Par contre fatalement, ceux qui se sont adaptés au rythme du KS vont eux, moins acheter en boutique.


Merci pour ton post Itai, très interessant. Je te rejoint sur une bonne partie de ton analyse, sauf sur la répartition des types de joueurs. Depuis que je suis le participatif, j'ai l'impression que ceux qui sont tellement déçus par leurs premières expériences qu'ils laissent tomber complètement sont une toute petite minorité. La plupart s'adaptent, et re-pledgent (mais avec plus de recul et de précautions).

Ces groupes existent, c'est indéniable. Après sur leur répartition, je me base fatalement sur une estimation personnelle. C'est clair que ce serait sympa que KS fournisse des stats.

Alors en vrac pour ajouté mon grain de sel et au moins tout aussi brouillon que Mr T mais en moins long!
Je pense que le point soulevé par le sus-nommé Mr T sur le délais et son impact est très intéressant car à terme cela risque d’être la seule différence avec le circuit traditionnel. Je développerai plus loin cette idée.
Si on regarde l’évolution de la société on se rend vite compte que le crowdfunding est une conséquence normale de notre mode de consommation. Si on s’intéresse à l’évolution de l’industrie musicale par exemple, premier gros succès du CF (toi + moi lalalalalaaaaa ), on voit que cette dernière a petit à petit intégré le consommateur dans le processus créatif des «tubes». Pour la faire courte, au début on sort le disque de nul part et on prie pour que ça marche, maintenant le public vote à coup de sms sur TF1. Pour la version longue je vous recommande de vous pencher sur la vie de M. Barclay et de son label.
On a sorti de l’ombre le processus créatif pour en faire un spectacle. C’est exactement ce qui se passe sur KS pour le JdP. (sauf qu’à la place de TF1 on a BGG pour les pools). Et sa marche! et ça marchera jusqu’à la prochaine transformation du marché.
Conséquence normale je disais. En effet à force d’avoir était pris pour un con le consommateur est désormais méfiant. On saupoudre le tout d’ambiance de «crise» et on obtient un marché où la demande se rétracte. Là, les moteurs de l’économie qui doivent relancer la machine (ie les préteurs d’argent) deviennent frileux et du coup freine la création en ne prenant aucun risque.
C’est sans compter sur la volonté d’entreprendre de tous ces esprits créatifs qui demeure une force motrice sans pareille. Du coup on contourne l’obstacle et on crée son propre canal de financement.
En résumé CF=Nécessité économique et CF=Spectacle
A mon avis deux des pierres angulaires de son succès.
Sur l’évolution du CF, il est évident qu’il va se structurer par le biais de ces principaux intervenants, présent ou à venir, pour devenir un élément majeur de l’économie (c’est déjà quasi fait). Par conséquent il va se démocratiser et grossir pour atteindre sa masse critique.
Du coup le CF ne serait-il pas en train de devenir le prochain circuit «traditionnel» de l’industrie du jeu puisqu’il est une maturation de ce dernier ?
Il y a encore plein de point à aborder (notamment mon premier que je développerai finalement pas dans ce post :D sachant que ça s’intègre dans l’idée de mutation de l’industrie ) mais je le ferai plus tard.
Merci de m’avoir lu.

Un point qui me semble n’a pas encore été abordé c’est le stock , pour tous les maillons de l’économie du jeu de société c’est un gros paramètre çà gérer.
Pour le détaillant, c’est de la place, de l’argent immobilisé, et une valeur fiscal/comptable.
Pour l’éditeur, c’est un peu la même chose, le stock c’est un peu galère à gérer et ça coute très très cher à garder (stockage, et encore une fois valeur comptable), alors généralement le stock d’invendu c’est déstockeur (pas top pour l’image) , ou la marchandise est détruite.
KS résout complètement cette problématique pour les jeux n’utilisant que ce circuit, pour les projet présent sur KS et en boutique (CMON, Queen games, …) KS permet de récolter de précieuses données pour les quantités à fabriquer, stocker, et vendre.

Perso il y a juste un point que je ne partage pas avec ThierryT : le rapprochement KS/Boutiques.
Je m explique : le nombre d acteurs sur KS augmente de façon vertigineuse. On peut déjà clairement parler de concurrence entre les projets. Ca va avoir un effet très net : la réduction des marges qui sont aujourd hui très importantes. A terme on peut tout à fait imaginer que l on se retrouve avec des marges identiques au réseau classique. Et dans ce cas, ça veut dire que le même produit devient totalement invendable en boutique oú il serait au double ou triple de son prix KS.

fred henry dit:Perso il y a juste un point que je ne partage pas avec ThierryT : le rapprochement KS/Boutiques.
Je m explique : le nombre d acteurs sur KS augmente de façon vertigineuse. On peut déjà clairement parler de concurrence entre les projets. Ca va avoir un effet très net : la réduction des marges qui sont aujourd hui très importantes. A terme on peut tout à fait imaginer que l on se retrouve avec des marges identiques au réseau classique. Et dans ce cas, ça veut dire que le même produit devient totalement invendable en boutique oú il serait au double ou triple de son prix KS.

Les petits KS (grande majorité) ont une approche totalement différente de celle que tu décris, dans le sens ou ils produisent un run de 1000 ou 2000 avec 300-500 backers, et ont donc une économie qui pourrait tout a fait fonctionner par la suite en réseau classique... enfin ca demande que le porteur soit "un poil compétent", mais techniquement ton argument ne s'applique qu'aux jeux qui dégueulent de SG, donc aux gros...
Les petits se concurrencent de ce que je vois sur d'autres points que l'ajout de matériel jusqu'a rendre le jeu non vendable (SG devenus addons en retail, pas de SG car juste financé, mini SG sans cout réel -quelques cartes, ou un artbook low cost, baisse du prix lors du KS en grapillant sur la marge de désintermédiation, etc)...
Par contre pour les Big One (ou en devenir ;) ) là oui je pense que la problématique se pose... encore que regarde CMon et leur politique boutique post KS ca tiens la route (cf Edge ou le fait qu'on les trouve sur tous les mag spé en ligne US...)
[EDIT : je dis pas qu'il y a moyen de lacher des pledges + SG aux boutiques avec une remise décente... mais qu'il y a moyen de trouver une solution pour les intégrer dans la vie de jeux issus de KS...]

Bon exemple des limites du KS:
Nouveau KS “THE LAST 52 MEEPLES ON EARTH” par Worthington Publishing.
$49 de jeu, $35 de port :shock:
=> je ne pense pas que les boutiques soient concurrencées :) !

7Tigers dit:Bon exemple des limites du KS:
Nouveau KS "THE LAST 52 MEEPLES ON EARTH" par Worthington Publishing.
$49 de jeu, $35 de port :shock:
=> je ne pense pas que les boutiques soient concurrencées :) !

Pour la france on est bien couverts par le port... les US c'est moins le cas et plus ca ira plus ils auront des solutions clés en main au moins pour l'EU :)
Nicowa dit:....
Autre question :
J'ai pas tout lu, je ne sais pas si le sujet a été évoqué ou non. Vous pensez que CMON pourra se passer de KS? Pas de crowdfunding, mais du support Kickstarter. Pour faire ça "maison".
Je ne pense pas que KS leur apportent tant de monde que ça maintenant. Les projets CMON sont tellement connus qu'ils doivent avoir leur clientèle et que c'est cette clientèle qui se fait le relais pour de nouveaux participants. Il doit y avoir encore à grappiller de ce coté là.
Après, j'imagine qu'il faut des serveurs qui suivent derrière pour gérer des début de KS sans coquilles. Le petit bug du début de ZBP en est la preuve. Mais je ne sais pas ce que ça représente en investissement.

Perso, je pense que ça se tente.
Ce n'est pas sans risque mais depuis Zombicide S02, ça fait en gros 15 millions de $ de CA pour CMON via KS.
Est-ce que pour un peu moins d'1 millions de $ tu peux remplacer KS (et intégrer ton PM par la même occasion, voir même une solution de paiement pour gratter un peu aussi sur les comms amazon, stripe ou paypal)?
Oui c'est du boulot et ce n'est pas gagné mais:
- les économies à faire sont loin d'être négligeables
- on a vu sur du jdr VF avec le dernier Cthulhu sur Ulule et INS via blackbook que réussir une campagne hors-KS est possible et sur un marché bcp + petit que le jeu de plateau avec fig.
- une plateforme comme ça pourrait aussi servir à des projets autres que ceux de CMON pour attaquer KS, en se spécialisant sur du jds pour capitaliser sur la communauté autour de CMON
Si quelqu'un peut le tenter, c'est CMON :)

Le truc c’est que tu perds :
> le tiers de confiance
> le trafic naturel (hors captif)
> une partie de la visibilité (marketing pour la vie retail du jeu)
Je te rejoins qu’il y a deux ans ils auraient été deux a avoir la carrure, la il ne reste que CMon… mais pas sur que ce soit super pertinent, le gain ne serait pas nescessairement si élévé que ca (je doute qu’ils payent plus de 3% à KS…) soit entre 500k à 3% et 750k en deux ans si ils payent plein pot
Pour une énergie énorme a dépenser, aucune garantie que 100% de leur base les suivrait, pas sur qu’ils arrivent a attirer un flux entrant (hors captif) aussi fort… bon je suis sur qu’ils doivent y penser, mais c’est carrément un autre business, et vu que pour l’instant je n’ai pas l’impression qu’ils arrivent déjà a financer le leur, je pense qu’il faudra encore qu’ils le consolident, et apres ils pourront y réfléchir… je peut me tromper mais ca ne fait pas trop sens pour eux d’aller dans ce sens là en terme de business (aujourd’hui & a court terme du moins)
[EDIT : ca aurait plus de sens de racheter d’autres acteurs pour leur appliquer leur modele si ils avaient le cash, plutot que d’aller créer une telle plateforme avec un potentiel très incertain…]

tiens au passage: il manque encore un bon milliard pour construire Minas Tirith !!! Sur indiegogo :Explore Crowdfunding Campaigns & Unique Products | Indiegogo
-minas-tirith#/

Pour moi, CMON est au contraire celui qui peut le moins de passer de KS car KS fait partie de son image. Leur évolution devrait plutôt être un élargissement de la gamme pour devenir aussi une marque boutique (d’ailleurs, ça semble être la voie qu’ils empruntent): CM pour les KS, ON pour le circuit trad (ce qui devrait aussi leur permettre de caser du CM)

jeremie-0 dit:
Effectivement, Asyncron est une petite boite. Mais pourquoi un financement via une banque ne passerait-il pas (Je ne parle pas d'intérêts à rembourser ou autre) ? Je veux dire, la majeure partie des éditeurs passe par là. Je ne pense pas qu'ils ont tous une trésorerie propre à assumer une production complète. Encore une fois, je ne porte pas de jugement sur la manière de fonctionner hein ! :)
Mais si une banque fait bien son boulot (et ce n'est certes pas gagné), elle analysera le marché, le positionnement de l'éditeur et le produit et après coup décidera ou pas de donner suite. Et vu de ma lorgnette de joueur, on voit bien que le secteur est en plein boum. Je suis vraiment surpris qu'aucun établissement bancaire ne donne suite.

Alors, je sors d'en prendre, et je peux t'assurer que les banques sont loin de se bousculer au portillon pour soutenir les éditeurs.
Une banque prète de l'argent si elle a la certitude de le récupérer avec un intérêt.
Produire un jeu, le mettre ne vente et récupérer les fonds prend du temps et n'offre aucune garantie de retour. Ton jeu peut faire un flop, il peut y avoir un problème de production, un container qui coule (normalement tu fais assurer, mais bon...), un bad buzz, ... bref c'est ce qu'on appelle un investissement spéculatif : il y a un risque, et si ca foire et que le jeu ne se vend pas la banque ne pourra pas vendre les jeux saisis pour se rembourser puisqu'ils ne se vendent pas.
En plus, ca ne rentre pas dans une case standard : achat d'une voiture, d'une maison, de locaux industriels, d'outillage, ... Techniquement c'est de l'achat de marchandises destinées à la revente. Et c'est beaucoup plus risqué.
Du coup la banque dit non et réserve ses prêts à des clients 'standard'.
kordo dit:C'est là qu'on pourrait évoquer le rôle du distributeur, que je considère comme un intermédiaire très mystérieux.
Sans parler de grande distri là tout de suite, mais de ceux qui relayent un jeu produit sur KS ou circuit classique de maison d'édition:
-certains mettent-ils en valeur leur gamme en boutique et comment?
-quelle est la part des éditeurs ou auto-éditeurs qui passent par cette intermédiation par rapport à ceux qui font le taf eux-mêmes (plus rares j'imagine)
-se gavent-ils au passage (j'ai cru comprendre que oui mais bon..)
-enfin ceux qui font double-emploi (distri et boutique) est-ce une bonne chose pour le consommateur, là aussi j'ai cru comprendre qu'ils faisaient "baisser" les prix..

Le rôle du distributeur est assez simple pourtant. Un distributeur remplit essentiellement deux fonctions :
- Commerciale : c'est le distributeur qui contacte individuellement chaque boutique, les relance, annonce les nouveautés, gère les commandes et facturations.
- Logistique : C'est le distributeur qui dans son entrepôt ou il a des palettes de différents éditeurs fait le 'picking' c'est à dire met dans un colis les 1 ou 2 exemplaires de chaque jeu commandé, et l'expédie à la boutique.
Pour ces prestations, le distributeur prend une marge de 25 à 40% suivant le produit, l'éditeur, et les volumes vendus. C'est une marge BRUTE de laquelle il faut retirer les salaires des commerciaux, manutentionnaires, transporteurs, la promo, etc.
Gérer directement les boutiques et les envois est pour un éditeur complexe, cher, et surtout un autre métier que celui d'éditeur. Je travaille avec un distributeur pour me libérer de ces aspects et pouvoir me concentrer sur mon métier d'éditeur : dénicher, développer et produire de bons jeux. Pour moi ca justifie leur marge.
Certains éditeurs se distribuent eux-même, en direct. D'autres font le commercial eux-même et utilisent un partenaire logistique. C'est un choix propre à chaque éditeur, et le milieu de la distribution est actuellement en ébullition avec l'apparition de nouveaux acteurs.
jmt-974 dit:Par contre que ce soit un éditeur établi ou auto éditeur ou auteur voulant auto éditer, je trouve que KS à un role bien plus sain qu'un crédit "sec"... et si personnellement j'avais un produit grand public a financer je pense que j'aurais plus tendance à me diriger vers KS qu'une banque, non pas par facilité mais pour les avantages réels qu'on en retire...
En effet un crédit ne veut pas dire que le produit (jeu) sera vendable, ni s'écoulera correctement, alors qu'avec KS on fait en simultané la validation du modele (interet du client final pour le produit), le financement de la pré-prod restante et de la prod initiale, et en plus on crée le marketing de lancement avec les early adopters...
Si le KS marche on peut mettre le produit sur le marché sans risque, et si il y a besoin de relais bancaires il sera probablement assez simple de les trouver (démonstration de l'interet du marché)... par contre si il foire c'est que le produit n'était peut etre pas si bon (et soit on retourne a la planche a dessin, soit on passe a autre chose)...

Discutez-en avec un banquier, tu verras que leurs critères sont bien plus difficiles que ca. Même en proposant une garanties hypothécaires couvrant plus de 10x la somme demandée. Sur le coup, j'ai halluciné.
ehanuise dit:
Discutez-en avec un banquier, tu verras que leurs critères sont bien plus difficiles que ca. Même en proposant une garanties hypothécaires couvrant plus de 10x la somme demandée. Sur le coup, j'ai halluciné.

Oula je parle pas d'un crédit sur de lourd hein, genre 10-20% de ce qui a été pré-vendu sur KS (avec un KS ayant eu un succès d'estime au minimum)... et pour avoir un peu de stock... je pense qu'un éditeur avec un peu d'historique a une chance (credit sec, c'est mort d'avance...), mais je suis d'accord que c'est loin d'etre un acquis c'est clair... (les banques c'est pas mes grands copains non plus... )
crashover1d dit:
Pire en RP, le Cultura de Claye Souilly par exemple à carrément un rayon GW avec du Warhammer (normal et 40k) en Starter, des Addons, la peinture ( :mrgreen: ) et autres accessoires !!!

Petit HS :
Vu les habitudes de GW, si ca marche on verra une boutique warhammer ouvrir en face dans 6 mois :mrgreen: :^:

j’ai l’impression, comme il a été dit, que les KS sont essentiellement suivis par les “core gamers” qui cherchent avant tout des jeux pour eux et fait pour eux (rare/ luxieux/ long/ complex / bref pas commercial…). Tous les KS de ce type n’ont évidemment aucun impacte sur les boutiques qui de toutes les façons ne vendent et ne vendront jamais ce type de jeux.
Alors, comment expliquer la reussite de “10’ to Kill” par exemple ou “Thunnel” qui non pas spécialement un public “core” ? N’est-ce pas là le début d’une démocratisation du KS pour le lancement de produit plus standard ? N’est-ce pas là finalement une pratique saine (comme Jmt l’a dit) afin de valider l’accueuil du public, de se créer une trésorerie sans interets bancaires ? Et est-ce que ce type de jeu (très comparable à de l’édition classique) par KS nuit aux boutiques ? Je pense que non.
De mon point de vu, les éditeurs font le filtre des protos (pas assez bon, pas assez commercial) et certains auto-editeurs ont fait les frais de cette absence de filtre (recul). KS n’a pas ce filtre mais avec la multiplication des projets sur KS, seul les plus sur finiront par atteindre leur financement. Les plus sur seront ceux porter par des éditeurs comme CMON, Asyncron, et autre qui auront fait le filtre, la comm’ aussi, et qui auront fait leur preuves et donc auront acquit l’interet d’un public. (ce n’est qu’une pure conjecture)

Nono dit:j'ai l'impression, comme il a été dit, que les KS sont essentiellement suivis par les "core gamers" qui cherchent avant tout des jeux pour eux et fait pour eux (rare/ luxieux/ long/ complex / bref pas commercial...). Tous les KS de ce type n'ont évidemment aucun impacte sur les boutiques qui de toutes les façons ne vendent et ne vendront jamais ce type de jeux.
Alors, comment expliquer la reussite de "10' to Kill" par exemple ou "Thunnel" qui non pas spécialement un public "core" ? N'est-ce pas là le début d'une démocratisation du KS pour le lancement de produit plus standard ? N'est-ce pas là finalement une pratique saine (comme Jmt l'a dit) afin de valider l'accueuil du public, de se créer une trésorerie sans interets bancaires ? Et est-ce que ce type de jeu (très comparable à de l'édition classique) par KS nuit aux boutiques ? Je pense que non.
De mon point de vu, les éditeurs font le filtre des protos (pas assez bon, pas assez commercial) et certains auto-editeurs ont fait les frais de cette absence de filtre (recul). KS n'a pas ce filtre mais avec la multiplication des projets sur KS, seul les plus sur finiront par atteindre leur financement. Les plus sur seront ceux porter par des éditeurs comme CMON, Asyncron, et autre qui auront fait le filtre, la comm' aussi, et qui auront fait leur preuves et donc auront acquit l'interet d'un public.

Pour moi, les joueurs core, ce sont des joueurs qui suivent quotidiennement l'actualité ludique, qui sont à l'affût des dernières nouveautés et qui ont un budget jeu conséquent.
Ce ne sont pas spécialement des joueurs qui se spécialisent ou se cantonnent à un type de jeu donné. Ils pourront tout aussi bien aimer les gros jeux ameritrash plein de figurines, les petits jeux minimalistes, les jeux de deck building, les eurogames avec meeples et cubes en bois...
Je me considère comme un joueur core, et j'ai participé (entre autres) aux KS de Tiny Epic Defenders (un petit jeu coopératif), Conan (un gros jeu de figurines), Two rooms and a boom (un party game), et Spirits of the Rice Paddy (un jeu de gestion avec meeples). :)

Boudjou un sujet-fleuve :mrgreen:
Mais y’a du dossier effectivement, et des choses à en dire.
Pour les boutiques en tant que clientes, KS n’est pas du tout adapté. Une boutique a un fonctionnement économique simple : acheter un produit, le revendre avec bénéfice. Chaque cycle est une ‘rotation’. un produit comme Twilight imperium III va faire une ou deux rotations par an, un produit comme une boîte de boosters Magic une dizaine ou même plus. L’ensemble du cash que la boutique peut assigner à acheter du stock, le ‘Open to buy’ est une somme délimitée. Elle peut varier un peu mais son élasticité est faible.
Un produit ‘normal’, la boutique le demande au distributeur, elle le reçoit et le paye au distrib. à 90 jours (parfois c’est comptant, parfois plus que 90j, mais le scénario le plus courant c’est 90j). Si elle l’a vendu entre temps, elle est payée par le client avant de payer le distrib. Sinon, elle avance les fonds de son open to buy.
Plus la rotation est courte, plus le produit est rentable. Or, un produit acheté sur KS, même à un prix boutique, il faut le payer immédiatement, et le recevoir dans 6-9 mois. Et durant ce temps c’est autant d’€ en moins disponibles pour des prduits en rotation sur les rayons. Si on ne voit que ça, c’est juste un suicide pour un détaillant de proposer des produits achetés sur KS.
Évidemment il y a d’autres aspects qui entrent en compte. Mais le manque à gagner sur le cash immobilisé fait que les produits KS sont au mieux une opération blanche pour les boutique, et au pire une perte.
C’est pour ca que pour le KS de Twin Tin bots j’avais proposé à l’époque une alternative pour les boutiques: commander durant le KS sans avancer de fonds, et une fois le jeu produit, le recevoir via le distributeur aux conditions habituelles, mais deux semaines avant les autres boutiques. Du coup pas besoin d’immobiliser du cash. (mais en même temps ca n’aidait pas directement la campagne non plus. j’étais juste certain d’en vendre au moins X en boutique après la sortie.)
Ensuite l’impact de KS sur les boutiques, ca c’est un autre dossier.
KS s’adresse aux core gamers, aux ‘alphas’. Ce sont aussi des prescripteurs : je vois au club des gars se ramener avec un jeu KS, le faire essayer à d’autres, et quand le jeu sort en boutique, ceux qui n’avaient pas suivi la campagne se le procurent si ca leur a plu. on en a pas parlé ci-dessus mais c’est un des aspects importants de KS : la promotion du jeu avant sa sortie.
Le revers de la médaille est que toute la pub et la comm sont concentrées avant et pendant la campagne, et une fois le jeu financé il est difficile de refaire un campagne de comm’ pour soutenir sa sortie en boutiques.
Pour l’éditeur, l’aspect KS est très simple : Recevoir les sous, avant de produire. Pour un petit éditeur comme moi c’est une alternative à ‘ne pas sortir de jeu faute de sous’. On a parlé des banques ci-dessus, la banque est un parapluie qu’on ne vous laisse utiliser que s’il fait bon. Les aspects promotion et comm’ sont du bonus, la souscription est avant tous un moyen de financement alternatif. Et en plus, ça marche :^:
Un dernier truc important c’est les figurines…
Un projet ‘avec figurines’ et ‘sans figurines’ obéissent à des économies totalement différentes et ne sont pas comparables. Beaucoup de joueurs ne s’en rendent pas bien compte et ont du coup des attentes irréalistes sur certains projets.
Produire un jeu de société ‘carton’, c’est un coût fixe ‘F’ (films d’impression, calage des rotatives, impression, agencement de la chaine de production ou de petites mains remplissent les boîtes de meeples et kubenbois, etc), et un coût à l’unité ‘U’ (papier, kubenbois, meeples, etc.) Si je fais 1000, 5000 ou 10000 exemplaires, le coût à l’unité est (F/1000)+U, (F/5000)+U ou (F/10.000)+U
Pour le plastique le principe est le même : coûts fixes ‘F’ sous forme de moules, calage, etc.
Sauf que… sur un projet ‘carton’ la partie fixe est relativement faible, du genre 2000 à 5000 euros. Une fois qu’on dépasse les 5000 exemplaires, les coûts à l’unité ne diminuent plus beaucoup. Et sur un projet ‘Plastique’ les coûts de moules vont de 5000 à 40000€ voire plus suivant le nombre de moules, leur complexité, et leur type (moules en cuivre pour faire quelques dizaines de milliers d’exemplaires ou moules en acier pour en faire des millions).
Avec du plastique il faut faire des dizaines de milliers de pièces pour que ce soit payable. Mais le prix à la pièce devient ridicule, et c’est facile de rajouter une louche de plastique au produit pour le même prix. En carton, rajouter un punchboard aura un impact beaucoup plus notable sur le prix unitaire.
Les projets pionniers KS à amener la logique de ‘stretch goals’ étaient des projets à figurines, comme le ‘reaper bones’.
Quand un jeu ‘normal’ sort, genre une boîte, une règle, quelques punchboards, un cartonformage et une poignée de pièces en bois, il est difficile d’y ajouter une louche de bois ou de carton pour le même prix. Et si on y ajoute à partir d’une certain seuil des figurines plastique à la place des meeples en bois, on se retrouve tout d’un coup dans une économie différente, avec des attentes différentes; Et si le porteur de projet n’a pas été extrêmement prudent dans ses calculs, il risque juste d’y perdre sa culotte. Et sa chemise. Et le reste.
Un dernier point qui n’a pas été beaucoup abordé c’est la logistique. Une fois le jeu produit, il faut le mettre entre les mains des soutiens. On est en train de voir émerger des acteurs nouveaux de ‘fulfillment’, c’est à dire l’expédition à l’unité, et de voir des acteurs historiques de la VPC s’engager aussi sur ce terrain.
Ca met aussi la pression sur les distributeurs, donc à terme le métier pourraît changer : faire le ‘picking’ dans l’entrepôt et envoyer à des adresses individuelles les produits, c’est en fait la fonction logistique du distributeur sauf que lui fait du B2B et pas du B2C. Il se pourrait que certains distributeurs décident de se concentrer sur l’aspect commercial pur et utilisent ces nouveaux acteurs comme partenaires pour la logistique. Comme mettre ce type d’affaire en place demande beaucoup moins d’investissements lourds que d’ouvrir un entrepôt et centre logistique, on pourrait avoir une explosion de distributeurs purement commerciaux qui redistribue les billes dans le secteur.

très intéressant ehanuise !
Juste en passant… Les boutiques n’ont plus, à ma connaissance 90 jours pour payer… on est entre 30 et 60 jours… Et mine de rien 30 jours en moins c’est énorme…
Donc effectivement faut une trésorerie conséquente pour assumer ses commandes et le charges fixe ou de belles perspectives de ventes rapides en 30 à 60 jours.